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L’élevage bovin dans les différentes régions administratives du Mali

CHAPITRE VI CONCLUSION L’ELEVEUR FACE A L’INNOVATION = ELEVEUR FACE AU

Encadré 2. L’élevage bovin dans les différentes régions administratives du Mali

Des sources des statistiques de la DNPIA (2005), il existe une grande disparité entre les régions administratives du Mali, tant sur le plan des effectifs que des systèmes d’élevage bovins (Tableau 3). Toutefois, l’émergence de couronnes laitières périurbaines concerne chacune d’elle, ce qui traduit une fois de plus l’importance du développement des systèmes d’élevage péri-urbains.

La région de Mopti situé dans le Delta central du fleuve Niger est la première région d’élevage de bovins et ovins/caprins. Le système d’élevage est à majorité transhumant. Les troupeaux effectuent chaque année, le cycle traditionnel aller-retour entre les pâturages herbacés de la bande sahélienne et les pâturages de décrue du Delta central (Diallo, 1978). Les troupeaux passent la saison sèche dans les pâturages de décrue dominés par le bourgou (Echinocloa stagnina). Les repousses sont abondantes et très appétées par les animaux. En cette période le lait est disponible pour les populations urbaines de la ville de Mopti. Les aménagements hydro-agricoles et le développement de la riziculture du riz flottant par l’ORM, ont affecté la productivité des pâturages de bourgou, le rendement paille du riz est beaucoup inférieur à celui du bourgou. L’alimentation des animaux devient la principale contrainte de l’élevage en saison sèche. Les éleveurs doivent constituer leur stock de fourrage de bourgou avant le retour des troupeaux transhumants dans les bourgoutières ou acheter à la fois le fourrage et les aliments concentrés sur le marché. La supplémentation se trouve prioritairement dirigée sur un nombre réduit de vaches laitières et en second lieu aux animaux faibles. Le potentiel du cheptel laitier est largement sous-exploité. En hivernage, l’installation du riz et la crue des eaux poussent les troupeaux sur les pâturages sahéliens. La traite est restreinte à la consommation des bergers, la production de lait permise par les pâturages abondants, échappe en grande partie à la consommation humaine.

L’élevage des camelins est essentiellement pratiqué par les éleveurs des Régions de Gao- Kidal et Tombouctou. C’est la partie septentrionale du pays, où la pluviosité annuelle ne dépasse guère 300 mm. Le pâturage ligneux est à prédominance d’espèces épineuses. Le mode d’élevage est le nomadisme, les éleveurs se déplacent à la recherche du pâturage et des points d’eau. Aujourd’hui, une tendance forte à la sédentarisation est observée : 10% des effectifs en 1989 et 70% en 2004 (enquête DNE in Pradère (2007). L’élevage de camelins y est suivi de celui des petits ruminants par ordre de grandeurs numériques. L‘effectif bovin de ces régions représente moins de 10% de l’effectif national. En effet, de 1960 à 1974, les régions géographiques de Gao et Kidal avaient les effectifs de bovins les plus élevés. Une diminution considérable des effectifs de bovins a été observée à partir de 1978 (Tangara et Keïta, 2004). Ces auteurs estiment la réduction à 75% des effectifs de bovins entre 1961 et 1986, la période englobe les années de sécheresse. La reconstitution des effectifs de bovins est lente. Les effectifs de bovins sont estimés en 2006 à un croît de 5% de l’effectif de bovins qu’hébergeaient ces régions en 1961 (Pradère, 2007).

Les régions de Kayes, Koulikoro et Ségou se partagent la bande sahélienne, domaine d’accueil des troupeaux transhumants en saison des pluies. La partie sud est le domaine agricole à dominance de cultures vivrières (mil, sorgho, maïs) et la riziculture dans la zone de l’office du Niger. L’importance numérique de l’élevage de bovins est identique entre les trois régions. L’activité d’élevage est associée à l’agriculture sur beaucoup d’unités de production. Deux systèmes d’élevage coexistent, le système agropastoral des agriculteurs et le système semi-transhumant des éleveurs agriculteurs ou éleveurs peuls sédentarisés. Les agropasteurs propriétaires de troupeaux de grande taille, pratiquent également la transhumance en hivernage, quand l’espace est intégralement occupé par les champs. Dans cette partie agricole, les conflits sont fréquents entre éleveurs et agriculteurs. Des couronnes laitières se forment, se spécialisent (amélioration génétique) et s’intensifient (stockage de résidus de culture, ramassage de paille de brousse, utilisation d’aliments concentrés, produits vétérinaires) autour des capitales régionales et des villes de troisième rang.

La région de Sikasso, situé au cœur de la zone cotonnière en zone Mali-sud détient la part la plus importante du cheptel bovin, après la région de Mopti. Différentes études placent au contraire la région de Sikasso comme première région en effectif de bovins (DNE, 1992 ; Bosma et al., 1996). Il s’agit en tous cas de la région où le cheptel croît le plus vite. En effet, les effectifs se sont accrus au sud du Mali après les grandes sécheresses des années 70/80. Comme expliqué plus haut, cette augmentation des effectifs est une conséquence des migrations et sédentarisation des pasteurs et leur troupeau d’une part, et de l’intégration agriculture-élevage d’autre part.

Tableau 3 : Répartition du cheptel par région administrative et économique du Mali

Source estimation DNPIA, 2005

o Les espèces laitières

Les effectifs des espèces laitières sont de loin les plus importants du cheptel national. La répartition des espèces présente une hétérogénéité numérique par région administrative et géographique (Figure 1). Les effectifs de petits ruminants (ovins/caprins) sont plus élevés, suivis des bovins. Le cheptel de camelins est moins important.

Les effectifs de bovins sont plus importants dans la partie sud et dans la région de Mopti dans le delta intérieur du Niger. Les bovins constituent le gros du cheptel laitier de la région de Sikasso, les espèces d’ovins/caprins du sud ont de faibles aptitudes laitières.

L’élevage des petits ruminants et des camelins est du ressort des régions du Nord. Il coexiste avec l’élevage camelin dans la région géographique de Gao-Kidal.

La zone péri-urbaine de Bamako détient une faible proportion des bovins de races locales et de petits ruminants (Tableau 3 et Figure 1). Il faut signaler cependant, la présence de troupeaux constitués de bovins de races améliorées issus d’insémination artificielle avec des semences de races laitières exotiques européennes (Montbéliarde, Holstein, Rouge des Steppes,……). Ces génotypes croisés sont aussi élevés dans certaines zones péri-urbaines à l’intérieur (Ségou, Sikasso, Mopti).

0 500 1000 1500 2000 2500 3000 3500 Bam ako Kay es Kou likor o Sikas so Ség ou Mop ti Tom bouc tou Gao -Kid al

Bovins Ovins Caprins Camélins Unité : 1000 têtes

Source estimation DNPIA, 2005

Figure 1 : Répartition des effectifs d’espèces laitières par région administrative et le District de Bamako

o Un potentiel de lait réel mais diffus

Le cheptel laitier malien se compose d’une diversité d’espèces (bovins, ovins, caprins, camelins) dont le lait rentre dans l’alimentation humaine. Les chiffres relatifs aux effectifs des femelles en lactation et aux quantités de lait produit ont été obtenus par application des paramètres bioéconomiques établis par le Ministère de l’Élevage et de l’Environnement (1994) et des effectifs de femelles reproductrices (Tableau 4).

Tableau 4 : Paramètres bioéconomiques des espèces domestiques au Mali

Espèces Nbre femelles adultes (p.100) Taux de fécondité (p.100) Productions journalières (litres) Durée de lactation (jours) Bovins 36 62 1,5 180 Ovins/caprins 75 90 0,5 120 Camelins 49 60 5 270

Source : Ministère de l’élevage et de l’environnement (1994

)

Le Tableau 5 donne l’importance des effectifs de femelles adultes par espèce laitière suivant les zones géographiques. En effet, les zones d’élevage déterminent les modes d’élevage et la disponibilité du lait pour la consommation des populations. Dans la partie septentrionale, le départ des troupeaux en transhumance à la recherche des pâturages abondants d’hivernage, rend inaccessible le lait produit. De la même façon, l’expansion des zones de culture repoussent les troupeaux sédentaires des agriculteurs loin des centres de consommation notamment en hivernage. La mobilité du troupeau devient alors un facteur d’inaccessibilité du lait à la portée des consommateurs. Le nomadisme est en perte de vigueur, les familles des pasteurs sont fixées auprès des infrastructures socio-sanitaires. Les bergers se déplacent seuls

avec les troupeaux sans la famille. Pendant les déplacements des troupeaux, le veau est prioritaire et seulement de faibles prélèvements de lait sont effectués pour l’alimentation du berger. En outre, faute d’infrastructures routières et de moyens adéquats de transport et de conservation, de vastes surfaces du territoire restent en dehors des circuits de commercialisation. Dans ces conditions, des quantités considérables de lait échappent à la consommation humaine. Les femmes des pasteurs sont loin des troupeaux, les surplus de lait ne sont plus transformés en produits laitiers conservables (fromage, beurre). Par ailleurs, dans la zone soudano-sahélienne, la production animale est très basse pendant la saison sèche étant donné l’offre fourragère réduite (Kané, 1993 ; Kaasscheieter et al., 1998). Des arrêts de la traite sont même observés par les éleveurs pour assurer la survie des veaux et de leur mère. En effet, la distance et le manque d’aliments constituent des contraintes à l’exploitation optimale du potentiel laitier. Ces contraintes sont spécifiques aux zones géographiques et liées à la saison de l’année.

En conséquence l’estimation de la production laitière nationale à partir des seuls paramètres biotechniques qui précèdent, est probablement surestimée. La DNPIA qui a fait ce calcul obtient le chiffre de 419.228.500 litres de lait tiré par an, après avoir soustrait 50 % pour la consommation du petit (production laitière des bovins et camelins réunies). Ce chiffre exprime une moyenne nationale, sans tenir compte des performances laitières des vaches métisses des zones péri-urbaines de Bamako et des villes de Ségou, Sikasso, Mopti (Coulibaly, 1993 ; Coulibaly, 2006).

L’importance de l’élevage des petits ruminants dans les régions du nord a été décrite ci- dessus. La production de lait des petits ruminants est élevée dans ces régions du nord. Les races des ovins/caprins du sahel ont de bonnes aptitudes laitières (Wilson, 1988). Les prélèvements de lait destinés à la consommation des familles sont relativement importants (50 kg de lait/brebis en 130-140 jours de lactation). Par contre, les troupeaux de petits ruminants au sud sont de taille réduite (5-20 têtes). Les races de petits ruminants du sud ont de faibles aptitudes laitières. Le lait est laissé pour nourrir les petits.

Tableau 5: Potentiel de l’élevage laitier au Mali

BOVINS OVINS CAPRINS CAMELINS Régions/District Eff. Eff. Femelles lactantes Pod. Lait (litresX1000l) Eff. Eff. Femelles lactantes Pod. Lait (litresX1000l) Eff. Eff. Femelles lactantes Pod. Lait (litresX1000l) Eff. Eff. Femelles lactantes Pod. Lait (litresX1000l) Total prod; (litresX1000l) Bamako 15349 3426 925 23020 15539 932 5028 3394 204 0 0 0 2061 Kayes 1174375 262121 70773 626866 423135 25388 940140 634595 38076 285 84 113 134349 Koulikoro 1074375 239801 64746 806603 544457 32667 1111075 749976 44999 568 167 225 142638 Sikasso 1511799 337434 91107 771187 520551 31233 691279 466613 27997 0 0 0 150337 Ségou 1125023 251105 67798 1310397 884518 53071 1841316 1242888 74573 568 167 225 195668 Mopti 1722069 384366 103779 2078929 1403277 84197 3006436 2029344 121761 9744 2865 3867 313603 Tombouctou 706018 157583 42547 1724767 1164218 69853 3182398 2148119 128887 319876 94044 126959 368246 Gao-Kidal 353009 78792 21274 1511 1020 61 1791042 1208953 72537 615061 180828 244118 337990 Total 2005 7682017 1714626 462949 7343280 4956714 297403 12568714 8483882 509033 946102 278154 375508 1644893

o Des ceintures laitières périurbaines qui naissent d’éleveurs urbains, et de systèmes intensifiés

Le cas des éleveurs peuls se sédentarisant et pratiquant la vente de lait vers les villes a déjà été évoqué plus haut. Tout comme le cas des agriculteurs, sédentaires, qui adoptent progressivement une activité d’élevage et, s’ils sont proche d’un noyau urbain, peuvent y vendre un peu de lait. Il existe cependant des facteurs spécifiques à la zone péri-urbaine, en ce sens qu’ils reposent sur des acteurs urbains, et non ruraux.

En effet, l’élevage sédentaire est aussi pratiqué par les commerçants, les artisans, les fonctionnaires, du domaine publique et du secteur privé. Ces nouveaux acteurs résident dans les centres urbains. Ils investissent les revenus ou l’épargne de leur activité dans le bétail. Cette forme d’élevage sédentaire est un des facteurs à l’origine du développement des ceintures laitières aux alentours des grands centres urbains et des villes secondaires. Les fonctions premières de cet élevage, l’épargne et le prestige social, évoluent rapidement vers une fonction de production (embouche bovine ; production de lait) pour profiter du marché urbain. Pour ces acteurs bien capitalisés, le foncier est le principal facteur limitant au développement de l’élevage péri-urbain, en fait un système hors sol. Le pâturage est restreint par le développement de l’agriculture péri-urbaine et l’extension de la ville. A cet effet, l’acquisition de foncier de terre de culture est difficile dans les alentours immédiats des villes. Cet élevage péri-urbain né de l’élevage sédentaire se caractérise par l’utilisation accrue d’aliments complémentaires produits ou achetés, de produits vétérinaires et par l’amélioration génétique. Autres caractéristiques de ce système d’élevage, la proportion de femelles est élevée en lien avec l’objectif de production de lait. Une étude a été effectuée en 1989 sur 54 troupeaux de production laitière de la zone péri-urbaine de Bamako par le programme FAO/Gouvernement (Coulibaly, 1993). Cette étude a concerné 9150 têtes d’animaux enquêtés, montre que le pourcentage de femelles dans le troupeau périurbain de Bamako (74,5%) est supérieur à celui du troupeau national (65%). Cette variation concerne essentiellement la présence de génisses (17,4% contre 11,4%) et de veaux femelles (15% contre 10,6%). Le nombre de mâles (taureaux et bœufs) est de 5,7% du troupeau périurbain alors qu’il s’agit respectivement de 8,1% et 12,7% pour le troupeau national. L’auteur conclut à une volonté des éleveurs de la zone péri-urbaine de Bamako pour la reproduction et peut- être la fonction laitière comme style d’exploitation. En gardant davantage les génisses, l’élevage concerné se situe dans l’optique d’augmenter à court terme le nombre de vaches laitières au sein d’un troupeau a priori en bonne expansion économique.

En plus de ces caractéristiques structurelles, l’amélioration génétique des races de bovins est un objectif essentiel de l’éleveur péri-urbain. Ainsi, les effectifs des bovins métis étaient estimés à 8400 têtes (PDAP, 1999). Cet effectif est constitué majoritairement de 85% de produits de croisement avec la race Montbéliarde, 8% avec l’Holstein, 6% avec la race Rouge des Steppes et 1% avec d’autres races exotiques européennes. Il faut aussi noter, les ventes de sujets mâles pour l’élevage vers l’intérieur (Ségou, Sikasso, Mopti, Koulikoro, Kayes). Ainsi, l’élevage de noyaux de troupeau de bovins laitiers améliorés est aussi observé autour de la plupart de ces principales villes du Mali. En plus de l’utilisation des taureaux améliorés, les éleveurs font de plus en plus recours à l’insémination artificielle. Les effectifs de bovins croisés élevés dans ces zones sont mal connus par les statistiques nationales.

La présente étude fait l’hypothèse de l’existence de la même dynamique dans la zone péri- urbaine de Sikasso. Elle propose des méthodes et outils pour appréhender et comprendre les processus et les mécanismes de développement de ce nouveau type d’élevage, faisant autant d’engouements auprès des éleveurs.

o Bilan des contraintes au développement de la filière laitière malienne

Contraintes techniques à la production laitière

Des contraintes d’alimentations, d’amélioration génétique, de reproduction, de santé sont les causes essentielles de la basse production animale et particulièrement de la saisonnalité de la production de lait des unités de production. Elles constituent de véritables obstacles au développement de la production laitière et à l’approvisionnement régulier en lait local des populations.

L’alimentation des troupeaux est fondée sur les ressources pastorales. La disponibilité des fourrages est tributaire des aléas climatiques et de l’accès au cours de la période végétative des herbacées annuelles. Des quantités considérables de paille de brousse sont consumées par les feux de brousse. Ainsi, les années de forte production de fourrage deviennent des années déficitaires en fourrage. Les éleveurs propriétaires de troupeaux de grande taille, sont contraints à des déplacements parfois de grandes amplitudes à la recherche de pâturages et de point d’eau. L’exhaure d’eau en saison sèche est le plus souvent le motif de départ en transhumance de ces types de troupeaux.

Les pratiques d’apports d’aliments complémentaires permettent l’étalement des périodes de conception des femelles reproductrices. Mais les quantités de résidus de culture stockées et d’aliments concentrés achetés, sont largement inférieures aux besoins des troupeaux. La constitution de stocks d’aliments est limitée par le calendrier agricole, la disponibilité de la main d’œuvre et surtout des flux de trésorerie des unités de production. Dans ces conditions, il est difficile d’envisager une production laitière intensive. En fait, l’alimentation régule les vêlages et limite l’extériorisation des aptitudes laitières du troupeau.

Le type génétique des races bovines élevées détermine le potentiel de production laitière des troupeaux de bovins. Les troupeaux sont composés en majorité d’animaux de race locale (zébu, taurins et de leur produits de croisement, méré). La productivité laitière des vaches de race locale est faible (1,5 l/j en 180-210 jours de lactation). Certaines vaches ne parviennent pas à nourrir leur veau en saison sèche. Dans ces conditions, les stratégies des éleveurs visent plutôt à assurer la survie des couples mères-veaux en arrêtant la traite. Ceci engendre une sous-exploitation du potentiel laitier avec conséquence une perte de lait à la commercialisation. Les vaches métisses issues de croisement par insémination des vaches locales avec des semences de races exotiques améliorées (Montbéliarde, rouge des steppes, Holstein,…) ont une productivité élevée suivant les systèmes de production (3, 4, 8 l/j en 270 jours de lactation). Tandis que les vaches laitières de race pure peuvent égaler une production de 20-40 l/j en 270 jours de lactation (Coulibaly, 1993). Cependant, ces animaux croisés ou de race pure, ont des besoins (alimentation, santé, infrastructures) plus élevés que les races locales. Ces dernières sont rustiques et adaptées aux conditions du milieu. En revanche, l’extériorisation des potentialités des troupeaux nécessite une amélioration de la conduite et des pratiques des éleveurs.

Le taux de reproduction (60%), l’intervalle entre vêlage (18-24 mois) et l’âge au premier vêlage (3-4 ans), sont à la fois des indicateurs de performances des troupeaux et de distinction des unités de production. La précocité des génisses assure le renouvellement des vaches en fin de carrière économique (11 ans). La régularité des cycles de reproduction des femelles favorise l’étalement de la production de lait sur les périodes de soudure (mars, avril, mai). Ces périodes correspondent à la baisse de l’offre de lait, engendrant les prix aux producteurs les plus élevés. En fait, une faible proportion des éleveurs y profite de cette opportunité offerte par le marché urbain.

Le taux de mortalité des veaux est élevé (12% et plus). Dans ces systèmes d’élevage, la mort du veau équivaut au tarissement de la vache et à la fin de la lactation. Le veau stimule la descente de lait. Or, les vaches n’acceptent d’être traites sans la présence du veau. L’amélioration de la conduite des veaux diminue les mortalités de veaux et sécurise les prélèvements de lait des éleveurs, la productivité du troupeau y est amélioré.

Ces nombreuses contraintes montrent à quel point les éleveurs peuvent se retrouver acculés, et l’innovation devenir leur seule porte de sortie (Caron, 1998). Les expériences et les savoir- faire des éleveurs déterminent l’orientation des systèmes de production (production de lait, naisseurs et vente de génétique) et jouent sur les processus d’innovation.

Politiques et réglementations sectorielles

Les politiques d’élevage en général en Afrique et particulièrement en Afrique occidentale Française (AOF) héritent de celles de la colonisation (Coulibaly, 1993). Les premiers vétérinaires européens venus en Afrique et en particulier au « Soudan français » (actuel Mali) étaient des vétérinaires militaires appartenant à l’escadron des Spahis Sénégalais. Ils ont entrepris de 1878-1904, les premières études sur les races domestiques, sur les conditions d’élevage et surtout sur les maladies animales (peste bovine, péripneumonie bovine, charbon bactéridien et symptomatique, trypanosomes, etc.) qui décimaient les troupeaux. Je cite ici quelques politiques de l’époque coloniale ayant marqué les politiques d’élevage en Afrique Occidentale Française et singulièrement au Mali :

• Création en 1904 du Service fédéral zootechnique et des Epizooties devenu en 1942 le Service d’Elevage et des Industries Animales chargé (i) de la protection sanitaire du cheptel, (ii) du développement et du perfectionnement de l’élevage et (iii) de l’amélioration et l’exploitation des produits animaux.

• Création de cadre de vétérinaires coloniaux prévoyant un recrutement de vétérinaires civils ce qui a abouti à la mise en place en 1922 de l’Institut de Médecine Exotique devenu en 1948 l’Institut d’Elevage et de Médecine Vétérinaire des pays Tropicaux (I.E.M.V.T.).

• Mise en place de moyens de travail en 1925 : Laboratoire fédéral de Dakar, Ecole vétérinaire de Bamako, Centre d’Immunisation et de traitement, etc.

• Enfin, jusqu’au seuil des indépendances en 1960, les dernières politiques de découpage en circonscriptions et secteurs d’élevage, de réseau de centres et de postes vétérinaires avaient surtout pour but d’assurer une surveillance sanitaire du troupeau, objectif prioritaire longtemps prédominant.

Politiques d’élevage hérités de la colonisation

Les orientations politiques fondées sur la protection sanitaire ont marqué la période de 1960- 1961 de succession des vétérinaires africains au départ des derniers vétérinaires coloniaux.