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3. L E DEVOIR PRATIQUE À L ’ ÉPREUVE DE LA PHÉNOMÉNOLOGIE HUSSERLIENNE

3.3. L E DEVOIR SANS VALEUR

3.3.3. Présupposé normatif II : le schème de l’intentionnalité

structure intentionnelle que les choses du monde, cela était exclu d’avance : le schème de l’intentionnalité à partir duquel Husserl envisageait toute conscience de, dont la conscience d’un devoir éthique, présupposait normativement que cela aurait été une façon incorrecte de fonder l’éthique. S’il devait y avoir une constitution d’une prescription pratique, c’est qu’il fallait qu’il y ait un objet justifiant cette prescription, la fonction prescriptive et la fonction justificatrice de la valeur étant intimement reliées dans ce présupposé normatif. Ce faisant, c’était la possibilité de penser l’éthique à partir des normes qui était exclue, puisque les normes ne sont pas ce sur quoi porte une visée intentionnelle, mais ce qui s’applique à la visée intentionnelle – à la verticale, pourrions-nous dire.

Il nous faudra aussi considérer un autre présupposé normatif à l’œuvre dans l’élaboration de l’éthique husserlienne, jouant cette fois sur le rapport entre prescription et motivation39. Car l’objet fondant la prescription pratique devait également pouvoir faire le lien entre la possibilité pratique et la réalisation pratique. Husserl, en pensant le devoir pratique sous la forme d’un impératif, sous la forme donc d’une exigence à agir, plaçait son éthique sous l’horizon de la réalisation pratique. Comme si certaines possibilités pratiques exigeaient à être, et ce, en raison de leur valeur. La valeur devait faire le pont entre le possible et l’effectif, introduisant entre les deux l’exigence. Mais c’est donc dire que Husserl s’inquiétait du passage de la possibilité pratique à l’action réalisée. Conséquemment, il devait trouver un objet qui puisse assurer le passage à l’acte. En vertu de cet autre présupposé normatif, son éthique allait être correcte que s’il trouvait ce qui pouvait assurer le passage à l’acte. La valeur était en ce sens un objet parfait, nous permettant de vouloir réaliser l’action et nous mettant sur cette voie en suscitant nos affects.

Nous proposerons cependant de briser ce lien tissé entre la justification, la prescription et la motivation, lien ayant conduit Husserl à fonder l’éthique sur une axiologie40. Certains phénomènes, dont l’impératif, l’excuse et l’akrasie, nous inciterons à délester l’éthique de ces présupposés normatifs. Nous espérons ce faisant rendre le recours aux valeurs moins évident, plus problématique, et ce, en rendant douteuses les normes qui justifiaient pourtant ce recours aux valeurs. Ainsi libérés du présupposé que l’éthique doit trouver un objet propre en lieu et place de l’objet intuitif dans la structure intentionnelle et

39 Infra, section : « 3.3.2. Présupposé normatif I : l’unité du devoir et du vouloir ». 40 Infra, section : « 3.3.4. L’épochè normative et les valeurs ».

du présupposé que l’éthique doit réussir à rendre compte du passage entre la possibilité pratique et l’action effective, nous pourrons considérer la prescription pour elle-même et phénoménologiquement. Nous verrons alors, une fois que ces présupposés auront été suspendus, que les normes peuvent très bien avoir un usage pratique. Ce qui supposera que norme, intuition et valeur auront chacune leur propre fonction : la norme sera prescriptive, l’intuition justifiante et la valeur motivante.

Nous annoncerons ainsi une voie vers une éthique qui, sortie de la logique de la production d’une action, n’exigerait plus rien tout en délimitant pourtant le champ de ce qui devrait être, s’il doit y avoir une action. Les normes, d’abord pensées à partir de la structure intentionnelle de la conscience, pourront ainsi avoir une portée pratique. Surplombant les actes et les visées de sens dans lesquels se constitue l’objet de nos pratiques, elles s’y appliqueront de façon à distinguer des objets pratiques corrects et d’autres incorrects. Mais elles ne nous diront jamais si nous avons à agir. La même épochè de l’effectivité des actes qui était à l’œuvre dans la sphère théorique – Husserl ne parlant jamais des actes de juger effectifs – serait ainsi à l’œuvre en éthique.

Surtout, en raison de ces deux présupposés normatifs, l’éthique de Husserl sera un bel exemple de ce que veut dire « point de description sans prescription, et sans prescription à la description ». Ce par quoi nous ne voulons pas dire que la phénoménologie ne peut pas tenter de critiquer les normes qui déterminent déjà ce que nous considérons être une description correcte. Et ce qui ne veut pas dire non plus qu’il soit toujours problématique qu’il y ait des normes qui président la description. L’enjeu étant justement de penser une critique transcendantale des normes dans laquelle leur droit serait en question. Et surtout une critique transcendantale des normes qui aurait pour tâche de constituer les normes en tant que normes.

1. H

USSERL ET LA QUESTION DE L

APPLICATION NORMATIVE DE LA LOGIQUE

1.1. HUSSERL, LA LOGIQUE ET L’ÉTHIQUE DE LA PENSÉE

La normativité n’est pas une thématique étrangère à Husserl. Seulement, elle n’a pas d’abord été prise de front par Husserl. Elle fut par contre abordée à partir d’une autre problématique, soit celle de savoir quels sont les types de sciences que l’on peut établir, quels sont leurs rapports de fondation et quelle est la place de la logique au sein de celles- ci. Ce qui apparaît très tôt pour Husserl dans les Prolégomènes, c’est que certaines sciences sont normatives alors que d’autres sont objectives, et que le caractère essentiel de la logique n’est pas d’être une science normative, mais d’être une science objective qui peut certes avoir accessoirement une fonction normative. Ainsi, dans sa discussion portant sur l’essence de la logique, Husserl établit ce qu’est selon lui une science normative, et surtout en quoi elle est opposée à une science objective [sachlich]. La normativité en tant que telle, en revanche, c’est-à-dire en tant que position en droit d’une norme et d’un devoir qui lui serait corrélé, n’est donc pas le principal souci de Husserl, qui la considère plutôt incidemment au départ.

Cette façon initiale de considérer la science en sa fonction normative, où il sera reconnu que certaines sciences peuvent donner des normes quant à la façon dont nous devons penser, ne sera par ailleurs pas limitée à ses réflexions portant sur l’essence de la logique. Au contraire, lorsqu’il sera question de déterminer l’essence de l’éthique, la division entre une science éthique purement objective et une science éthique ayant une fonction normative sera encore la ligne de partage à partir de laquelle la réflexion de Husserl commencera41. Autrement dit, le partage entre les sciences normatives et les sciences objectives n’équivaut pas au partage entre les sciences pratiques et les sciences théoriques. Une science pratique comme l’éthique peut être normative ou objective, tout comme une science théorique comme la logique peut être normative ou objective. Cette

41 Sur cette question, voir : cf., Leçons sur l’éthique et la théorie de la valeur, p. 73-147 [3-69] ; cf.,

similitude entre la logique et l’éthique justifiera les constantes analogies entre la délimitation des tâches de la logique et la délimiation de celles de l’éthique42.

À nos yeux, une conséquence majeure est à tirer de ce que nous venons d’exposer brièvement. Ce que Husserl entend par « pratique » n’est pas du tout équivalent à ce qu’il entend par « normativité ». Les valeurs et les normes ne donnent pas lieu au même genre de devoir. La normativité à laquelle pense Husserl n’a rien à voir avec une axiologie, et la science normative à laquelle il aspire n’équivaut pas à ce qu’il entend par science pratique. Ces deux types de sciences seraient même souvent confondues, créant le plus grand désordre dans les délimitations et les définitions des sciences à son époque – notamment chez les antipsychologistes et les néokantiens. Réussir à voir ce qui distingue le devoir pratique de la normativité pour Husserl, le premier étant fondé sur la valeur et le second sur la structure intentionnelle de la conscience, sera donc le but de cette première sous-section.

Pour comprendre la particularité de la position de Husserl sur cette question, il peut cependant être utile de commencer par un rappel du contexte philosophico-historique contemporain de la réflexion de Husserl et ainsi d’accentuer en quoi sa position n’est ni conforme au psychologisme, ni conforme à l’antipsychologisme de son époque, mais constitue plutôt une troisième voie dont on ne peut comprendre la particularité que si l’on distingue bien « éthique » de « science normative ». Pour ce faire, nous reprendrons ce qu’en dit Léo Freuler dans La crise de la philosophie au XIXe siècle43, à la fois parce que ce texte a le mérite de présenter ce que devait être le contexte historico-philosophique au moment où Husserl écrivait les Prolégomènes et non pas à partir de problématiques ou de perspectives postérieures à cette époque, mais surtout parce que Freuler y affirme que Husserl aurait adopté une forme d’éthicalisme en logique, idée à laquelle nous ne pouvons pas souscrire.

Ce que nous rappelle d’abord Freuler, c’est que pendant le XIXe siècle et encore à l’époque des Recherches logiques, la philosophie a de nombreux ennemis et traverse une crise à la fois due à l’effondrement des systèmes de l’idéalisme allemand, lequel discrédita

42 Le cours de 1914 portant sur les questions fondamentales de l’éthique porte spécifiquement sur cette

analogie : cf., Leçons sur l’éthique et la théorie de la valeur, p. 73-147 [3-69].

43 FREULER, L., La crise de la philosophie au XIXe siècle, Paris : Vrin (coll. Bibliothèque d’histoire de la

la philosophie en raison de son caractère spéculatif, et à la montée concomitante des sciences de la nature, qui montrent chaque jour davantage de nouveaux résultats scientifiques et ainsi la primauté de leur méthode44. Face à cette crise, redéfinir la philosophie était devenu un impératif45, et plusieurs écoles philosophiques seraient nées de cette redéfinition : le néocriticisme comme retour à Kant afin de combattre le dogmatisme de la philosophie spéculative et du matérialisme vulgaire de l’époque46 ; le psychologisme comme façon de satisfaire les exigences de la scientificité tout en reconnaissant la particularité de l’expérience interne par rapport à l’expérience externe propre aux sciences de la nature47 ; et l’antipsychologisme, comme refus de fonder l’ensemble des sciences sur la psychologie48.

Or, ce que souligne bien Freuler, c’est que les attaques de l’antipsychologisme contre le psychologisme vont se cristalliser autour de la question des normes imposées à la pensée et qu’elle doit suivre. L’antipsychologisme, en prenant appui sur l’idée de Kant selon laquelle « en logique, il s’agit <…> non de la façon dont nous pensons, mais de la façon dont nous devons penser »49, accuse le psychologisme de réduire toute la question de savoir comment nous devons penser à celle de savoir comment nous pensons dans les faits50. Parce qu’il fonde la logique sur une science des vécus psychiques, le psychologisme serait seulement capable de dire comment nous pensons effectivement, quels sont les processus psychiques qui ont effectivement lieu. Mais la logique serait une éthique de la pensée pour les antipsychologistes, et non pas une science des faits. Comment alors à partir d’une science portant sur des faits pourrions-nous nous élever à une science portant sur les normes de la pensée correcte ?

44 Id., p. 7-53.

45 Freuler identifie « quatre commandements » que devait respecter cette redéfinition : ne pas suivre une voie

spéculative, prendre en compte les sciences de la nature, ne pas ériger de système et maintenir l’autonomie et la spécificité propre à la philosophie : cf., Id., p. 87-110.

46 Id., p. 146. 47 Id., p. 173-176 48 Id., p. 210.

49 KANT, E., Logique, op. cit., p. 12. Il ajoutera : « Dans la logique, ce que nous voulons savoir, ce n’est pas

comment l’entendement est, comment il pense, comment il a procédé jusqu’ici pour penser, mais bien comment il devrait procéder dans la pensée. Elle doit nous enseigner le droit usage de l’entendement, c’est-à- dire celui qui est cohérent avec lui-même. » (Id., p. 12)

L’avantage de relire cette époque à partir de la cristallisation de l’opposition antipsychologiste sur les questions des normes imposées à la pensée correcte réside en ce que ce point de départ permet de bien mesurer la portée de certains concepts clefs de la philosophie de l’époque. Pensons par exemple à Lotze, qui décide de faire de la validité [Geltung] des idées l’un des quatre modes de l’effectivité au côté de l’être des faits51. Pensons sinon aux néokantiens du Sud-Ouest, qui se voient obligés d’en appeler à l’idéalité des valeurs [Werte] pour justifier le fait que nous devons penser de certaines façons plutôt que d’autres.

Surtout, la lecture de l’opposition entre psychologisme et antipsychologisme proposée par Freuler est identique à celle faite par Husserl dans les Prolégomènes, qui cite même le même passage de Kant que Freuler. Pour Husserl aussi, l’opposition entre le psychologisme et l’antipsychologisme se joue sur la question du caractère normatif de la logique. Les psychologistes prétendent fonder toute la logique, même lorsqu’elle prétend comment nous devons penser, sur la psychologie (Prolégomènes, § 18), alors que les antipsychologistes prétendent qu’il est impossible de fonder une science normative sur une science des faits comme la psychologie (Prolégomènes, § 19).

En revanche, là où nous ne pouvons suivre Freuler, c’est lorsqu’il affirme que pour Husserl, la logique est une éthique de la pensée. Freuler propose en effet de classer les psychologismes et les antipsychologismes non en suivant leur opposition, mais plutôt en suivant la distinction kantienne entre une physique de la pensée52 et une éthique de la

pensée. Il existerait selon lui trois formes d’éthique de la pensée : l’éthicalisme anthropologique, l’éthicalisme critique et l’éthicalisme réaliste. La philosophie de Husserl, tout comme celle de Frege, appartiendrait à ce dernier type d’éthicalisme, qu’il nomme aussi antipsychologisme réaliste, et ce, parce que contrairement aux deux autres formes d’éthicalisme, « cette troisième forme d’éthicalisme exclut tout lien entre les vérités logiques et une « subjectivité » qui puisse prendre une part quelconque dans leur constitution », forme « d’antipsychologisme sans conscience du tout » puisque la vérité objective serait « entièrement indépendante de toute espèce de subjectivité, y compris la

51 LOTZE, R. H., « Le monde des Idées », trad. A. Dewalque, Philosophie 91: 3 (2006), p. 9-23 [505-523]. 52 Tout psychologisme n’est pas une physique de la pensée, mais seulement le psychologisme physicaliste :

« pensée » considérée comme un acte de conscience »53. Freuler va même plus loin, et

affirme que cet éthicalisme réaliste est une forme de réaction spéculative contre le psychologisme de l’éthicalisme anthropologique et criticiste, réaction spéculative équivalente à un retour au réalisme des universaux et au platonisme54.

Nous ne chercherons pas ici à répondre à cette lecture de la philosophie husserlienne comme équivalente d’une réaction spéculative au psychologisme – que dire en effet du rôle de l’intuition, qui constitue un frein à la spéculation chez Husserl ? Plus problématique encore selon nous est la terminologie employée par Freuler pour parler de la logique chez Husserl. Husserl concevrait la logique comme une éthique de la pensée. Ce qui semble justifier cette qualification chez Freuler, c’est un passage du § 19 des Prolégomènes, où Husserl emploie effectivement cette expression (Prolégomènes, p. 61 [56]). Or, Husserl ne l’emploie pas alors pour qualifier sa propre conception de la logique, mais il la reprend plutôt lorsqu’il énumère les arguments de ceux qui sont contre le psychologisme, et ce, pour qualifier leur conception de la logique, par exemple celle de Hamilton, Drobisch et Erdmann, et aussi celle de Herbart55.

Or, Husserl, même s’il rappelle leurs arguments, n’est pas entièrement d’accord avec ce qu’affirment ceux qui sont contre le psychologisme. Certes, il est d’accord avec le fait d’être contre le psychologisme parce que celui-ci n’arrive pas à rendre compte du fait que la logique donne des normes à la pensée correcte. Il est néanmoins en désaccord avec la façon dont ils conçoivent la logique dans cette opposition56. Car les antipsychologistes ne

voient pas que les lois théoriques ne sont pas en elles-mêmes normatives, mais qu’elles le deviennent plutôt à la faveur d’une tournure normative :

Les antipsychologistes, en tout cas, n’étaient pas autorisés à mettre en avant à titre d’argument que la psychologie traite des lois naturelles, la logique, par contre, des lois

normatives [Normalgesetzen]. Le contraire de la loi naturelle en tant que règle

53 Id., p. 216. 54 Id., p. 221-222.

55 Cf., Prolégomènes, p. 242 [218], où Husserl souligne qu’en concevant la logique comme une « morale pour

la pensée », Herbart aurait raté la logique pure au fondement de toute logique normative. Il réfère alors à la troisième édition du Lehrbuch zur Psychologie de Herbart. Sur la logique comme éthique de la pensée chez Herbart et son lien avec Kant : cf., MAIGNE, C., « Le réalisme rigoureux de J. F. Herbart » dans HERBART, J.

F., Les points principaux de la métaphysique, Paris : Vrin (coll. Textes et commentaires), 2005, p. 49-62.

56 Husserl est d’accord avec le caractère normatif de la vérité, comme nous le montrerons. Ce qu’il reprochera

à ces adversaires du psychologisme, c’est simplement de ne pas avoir fondé sur une science théorique cette dimension normative de la vérité et de la logique, et d’avoir encore inclus dans la logique pure des propositions normatives. Cf., Prolégomènes, p. 65-66 [59-60].

empiriquement fondée d’un être ou d’un évènement réel, n’est pas la loi normative en tant que prescription, mais la loi idéale au sens d’une légalité, ayant son fondement exclusif dans les concepts (les idées, essences conceptuelles pures) et, par conséquent, non empirique. Pour autant que les logiciens formalistes, parlant de lois normatives, n’ont pas perdu de vue ce caractère purement conceptuel et, en ce sens, apriorique, ils se sont référés dans leur argumentation à une chose indubitablement exacte. Mais ils ont négligé le caractère théorique des propositions purement logiques, ils ont méconnu la différence entre lois théoriques, qui, par leur contenu, sont prédestinées à une régulation de la connaissance, et lois normatives, qui ont, par elles-mêmes et par essence, le caractère de prescriptions. (Prolégomènes, p. 182 [164-165])

On comprend alors les conclusions critiques que Husserl présente, au dixième chapitre, contre les antipsychologistes. Si par exemple Husserl n’est pas d’accord avec Kant, c’est notamment parce que celui-ci aurait fondé les normes de la pensée dans l’usage de certaines facultés subjectives (l’entendement, la raison) – celles-ci nous donnant les normes de la pensée correcte – et non pas dans la tournure normative qu’obtiennent les concepts d’abord et avant tout objectifs de la logique pure57. De même, la critique que Husserl prononce

contre Herbart et sa morale de la pensée ne se comprend que si l’on admet que la logique théorique et pure n’est pas d’emblée normative, mais ne le devient qu’à la faveur d’une tournure normative. Si Husserl vante les mérites de Herbart pour avoir mis de l’avant l’idéalité du concept, du contenu de ce qui est pensé, face à l’activité de le penser58, il croit en revanche que Herbart a confondu l’idéalité du concept avec son caractère « normatif » et qu’il a, conséquemment, réduit la logique à n’être qu’une morale de la pensée :

Mais, ce qui est plus important c’est la méprise fondamentale en vertu de laquelle Herbart place l’essentiel de l’idéalité du concept logique dans sa <normativité>59. Par là lui échappe

57 Pour Kant, pour déterminer comment nous devons penser, nous n’avons qu’à nous limiter à l’usage de

certaines de nos facultés subjectives, celles-ci donnant donc les normes de la pensée correcte ; il n’est pas du

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