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6. Conception Centrée Utilisateur

6.2. CCUSC (Conception Centrée Utilisateur pour Systèmes Complexes)

6.2.2. Présentation de la méthode

La CCUSC s’appuie sur le cycle de conception en spirale et HIC. Elle utilise les outils technologiques disponibles actuellement tels que RV et RA et développe le modèle en spirale « traditionnel » sur une troisième dimension afin d’intégrer ces notions de réel et de virtuel. Ce modèle est présenté sur la Figure 6-5.

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Figure 6-5 : Cycle CCUSC

On retrouve le schéma classique commençant par l’expression du besoin et se terminant par la validation du produit en passant par les phases de conception, de réalisation, de tests ou d’évaluation. Les étapes de conception et de production peuvent être réalisées dans un plan virtuel ou dans plan réel. Les étapes d'expression et de validation par l'utilisateur sont communes aux deux plans. La validation permet de vérifier, soit qu’un concept correspond bien à l’usage attendu, soit que la fonction associée répond bien aux attentes initiées par le concept. Les étapes d'analyse et d'évaluation représentent l'axe charnière entre le plan virtuel et le plan réel. C’est lors de l’analyse que le choix entre le plan virtuel et le plan réel est fait. Les deux plans se rejoignent à l'étape d'évaluation. Le plan horizontal est l'utilisation traditionnelle du modèle « spirale » ; il représente la production d'un produit réel. Le plan vertical est la conception d’un produit virtuel. À chaque itération, après les phases d’expression du besoin et d’analyse, nous avons le choix entre un cycle de prototypage rapide (virtuel) et la production d'un prototype réel. Entre ces deux plans, il y a l'espace de réalité mixte qui nous permet de présenter un produit combinant virtualité et réalité.

Prenons l'exemple d'un concept de main capable de se déplacer dans un environnement. • Étape 1 : Le premier cycle de conception se déroule dans un plan complètement virtuel:

on représente une main virtuelle qui se déplace dans un environnement virtuel. L'objectif de la première évaluation est de vérifier si l’utilisateur en a l’usage.

• Étape 2 : Une fois le concept validé, on cherche à identifier les fonctions nécessaires à sa mise en œuvre. Dans notre exemple, les fonctions principales associées sont la mobilité et la manipulation.

127 / 146 • Étape 3 : Le deuxième cycle, dont l'objectif est de concevoir l'une des deux fonctions, la mobilité par exemple, se déroule aussi dans un plan complètement virtuel. On propose différentes solutions virtuelles qui sont évaluées par les utilisateurs. Ces solutions prennent en compte certaines contraintes physiques, technologiques…

• Étape 4 : La solution virtuelle la plus pertinente est réalisée dans le plan réel donnant lieu au développement d'un prototype réel. Celui-ci est ensuite évalué par les utilisateurs. Cette démarche simplifiée en quatre étapes induit un certain nombre de remarques.

Les cycles des étapes 1 et 3 peuvent faire l'objet de plusieurs itérations.

A chaque étape, un retour en arrière est possible. Par exemple, si le prototype réel de l'étape 4 ne donne pas satisfaction, on peut revenir à l'étape 3 pour affiner la conception. Nous allons maintenant nous attacher au développement de la fonction manipulation. Deux voies s'offrent à nous selon que l'on parte de l'étape 3 ou de l'étape 4. Dans le premier cas, on utilise la fonction mobilité virtuelle retenue et on y ajoute la fonction de manipulation virtuelle. On dispose alors d'une solution entièrement virtuelle d'implantation du concept. Dans le second cas, on utilise la fonction de mobilité réelle de l'étape 4 sur laquelle on implante la fonction de manipulation virtuelle. Nous allons développer cette seconde voie dans les étapes 5 et 6.

• Étape 5 : Ce troisième cycle se déroule maintenant dans un plan de réalité mixte. On peut implanter sur le prototype réel de la fonction mobilité plusieurs solutions virtuelles de la fonction manipulation.

• Étape 6 : La solution mixte la plus pertinente donne lieu à l'évolution du prototype réel initial auquel on a ajouté la fonction manipulation réelle. Celui-ci est de nouveau évalué par les utilisateurs.

Nous avons vu qu’il existait deux façons d’évaluer une fonction, la simulation ou la production d’un prototype réel :

• La simulation validera un objet simplifié : structure et IHM. Cette phase est essentielle car elle permet de mettre l’objet en situation, d’un point de vue concepteur mais aussi utilisateur. Ainsi, concepteur et utilisateur appréhendent mieux les difficultés et les limites des diverses solutions.

• L’évaluation d’un prototype réel intègre les contraintes non prises en considération précédemment (réalité, technologies, réutilisation, coût, entretien…). L'avantage est de pouvoir confronter l'utilisateur avec un objet en interaction avec son environnement et soumis aux lois de la physique (accélération, glissade…). Il est plus facile de mettre un opérateur en situation lorsque que celle-ci contient des éléments réels (notamment pour la vidéo).

Si l’on peut décomposer le concept en plusieurs fonctions comme dans l’exemple du concept de la main virtuelle qui se décline en deux fonctions : mobilité et manipulation, nous pouvons itérer dans un espace de réalité mixte. Lorsque le nombre de fonctions est important, le plan mixte est au départ un plan de virtualité augmentée (beaucoup de virtuel et peu de réel) puis devient, au fur et à mesure de l’avancement du projet, un plan de réalité augmentée (beaucoup de réel et peu de virtuel) avant de se confondre avec un plan totalement réel. Finalement, nous construisons un produit innovant à partir d'un objet complètement virtuel en remplaçant graduellement les concepts par les fonctions virtuelles associées, puis, par les fonctions

128 / 146 réelles. Le processus se termine lorsque le produit est entièrement réel et validé. Cette utilisation « traditionnelle » de la CCUSC est schématisée sur la Figure 6-6.

Figure 6-6 : Utilisation traditionnelle de la CCUSC

L’application de cette démarche ne se limite pas à son utilisation dès la définition du concept de l’objet innovant. Il est possible de la mettre en œuvre soit en cours de conception, soit quand il y a nécessité de faire évoluer un produit. Dans le premier cas, si la conception du produit a débuté sur un plan réel, on peut supposer que l’on dispose d’un prototype plus ou moins finalisé du produit. Si celui-ci n’a pas donné satisfaction lors des évaluations, il est possible de revenir sur un plan virtuel pour affiner le concept (Figure 6-7 a). Dans le cas où celui-ci est satisfaisant, on peut réitérer sur un plan mixte afin d’ajouter au prototype réel les concepts non encore finalisés (Figure 6-7 b). Dans le cas où l’on désire faire évoluer un produit, on peut suivre le même raisonnement. Si le besoin d’évolution du produit est important, on peut itérer sur un plan virtuel. Si cette évolution concerne l’ajout de fonctions élémentaires, on itère sur un plan de réalité mixte.

.(a) .(b)

Figure 6-7 : Utilisation étendue de la CCUSC

Que l’on conçoive ou que l’on apporte des modifications à un produit, il est possible que l’utilisation de parties matérielles déjà commercialisées soit nécessaire pour diverses raisons (fiabilité, coûts ...). La virtualité augmentée permet d’intégrer dans une scène virtuelle les propriétés dynamiques réelles de ces objets tout en ne les modélisant que très simplement (au niveau visuel) dans le monde virtuel. On pourrait imaginer que, dans notre exemple, le bras manipulateur soit imposé pour des raisons de coûts de développement. Dans ce cas, on peut modéliser la structure géométrique du bras pour l’intégrer sur une base mobile virtuelle. En parallèle, on utilise un bras réel fixé sur un socle quelconque non mobile dans le monde réel. Lorsque l’utilisateur pilote le bras sur l’interface, il contrôle le bras réel. Le retour capteur réel est ensuite utilisé dans le monde virtuel pour obtenir une visualisation correcte en tenant compte des véritables valeurs articulaires du bras manipulateur réel. Cette méthode présente deux avantages. Premièrement, il n’est pas nécessaire de modéliser les propriétés dynamiques du bras. Deuxièmement, en fixant le bras réel dans un espace dégagé, on élimine le risque de collision. On a ainsi un bras dynamiquement réaliste dans un environnement virtuel qui, lui, peut être encombré et cela sans risque pour le matériel réel. On a donc des propriétés dynamiques (difficiles à modéliser en virtuel) qui peuvent se greffer dans des environnements

Réel Réalité mixte 2 1 Réel Virtuel 1 2 Réel Virtuel Réalité mixte Plan virtuel Plan réel Plan mixte Espace de réalitée mixte

129 / 146 virtuels très variés et pouvant donc mettre l’utilisateur dans un grand nombre de situations d’évaluations n’existant pas forcément dans le monde réel.

La Figure 6-8 résume les différentes approches présentées ci-dessus. On y retrouve l’utilisation de la CCUSC débutant par un concept ainsi que son utilisation étendue partant d’un produit réel nécessitant des évolutions. Ce schéma montre bien que la CCUSC n’est pas limitée à passer du virtuel au réel. L’utilisation de la CCUSC étendue permet de faire des bouclages entre virtuel et réel au cas où un prototype réel en cours de conception serait nécessaire. De plus, même le produit virtuel est validé, il est possible de réitérer sur un plan virtuel si le choix technologique instanciant en réel la fonction virtuelle n’est pas satisfaisant. Il est aussi possible de revenir en arrière sur un plan de réalité mixte.

Figure 6-8 : Mise en œuvre de la CCUSC