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Présentation des caractéristiques générales de la formation des Grés d’Annot

Chapitre 3 : Présentation des caractéristiques générales de la

formation des Grés d’Annot

Le bassin des Grès d’Annot appartient à l’ensemble des bassins d’avant-pays périalpins méridionaux d’âge tertiaire (e. g.: Champsaur, Taveyannaz, Grès du Val d’Illiez). Il se situe dans le sud des Alpes françaises, autour du Massif Cristallin de l’Argentera (fig. 37). À l’Est, il est bordé par l’ensemble des Unités Internes de la chaîne alpine (fig. 37), à l’Ouest par le bassin d’avant-pays de Valensole (fig. 37).

Figure 37 : Cadre géologique régional de la formation des Grés d’Annot.

La formation des Grés d'Annot correspond à une série de dépôts sous-marins d’épaisseur maximale de 1000 à 1200 m (Apps 1987, Ravennes et al. 1987, Joseph et al. 2000). Cette formation repose en « onlap » sur la formation des calcaires nummulitiques et la formation des marnes bleues, l’ensemble des trois formations constituant la « Trilogie Priabonienne » (Ravennes et al. 1987). Les dépôts des Grés d’Annot sont datés de la fin de l’Eocène et du début de l’Oligocène (Jean 1985).

Les dépôts sont composés principalement de corps gréseux massifs à granulométrie de sable grossier et galet, alternant avec des dépôts argileux. La géométrie des dépôts correspond au sud (région d'Annot) à de larges chenaux sous-marins qui évoluent vers le nord en des corps plus tabulaires, non chenalisants (région de Barcelonnette), l’ensemble se terminant au nord par des dépôts frangeant riches en argile (Joseph et al. 2000).

Selon (Guillocheau et al. sous presse), l’organisation géométrique et l’évolution spatiale des dépôts seraient contrôlées par le taux de sédimentation en relation avec les variations du niveau marin relatif, associées aux phases de progradation/aggradation/rétrogradation des systèmes deltaïques à la source des sédiments. La phase de progradation se caractérise par des dépôts hétérolithiques, tabulaires et à faible pente (phase d’accrétion) qui passent à des corps homolithiques/hétérolithiques faiblement érosifs ou en transit puis à des corps tabulaires à laminations obliques et larges scours (phase de remplissage). La phase aggradante correspond à des dépôts homolithiques tabulaires à laminations planes et à scours de tailles moyennes à réduites. La phase de rétrogradation se caractérise par un dépôt condensé présentant une forte bioturbation. Chaque cycle aurait une durée de 20000 ans.

Figure 38 : Log synthétique de la Trilogie Priabonienne selon Ravennes et al. (1987).

Les études paléogéographiques générales montrent que le sud du bassin d’Annot était bordé par une chaîne de montagnes d'orientation globalement E-W, comprenant les massifs des Maures et de l’Esterel ainsi que le bloc Corso-Sarde (Jean 1985) (fig. 39). Cette zone constitue la source majoritaire des sédiments à l'origine de la formation des Grés d'Annot (e.g. Kuenen et al. 1957,

Gubler 1958, Stanley 1965, Ivaldi 1974, Stanley 1975, Elliot et al. 1985, Jean 1985, Ravennes et al. 1987, Hilton 1995) (fig. 39). Un apport sédimentaire en provenance du bassin des Nappes Internes ou de la Cordillère Tendasque, situé à l’est du bassin d’Annot, a été aussi invoqué par certains auteurs (Campredon 1972, Ivaldi 1974, Jean 1985) (fig. 39).

Figure 39 : Cadre paléogéographique à l’époque de la mise en place des Grés d’Annot (modifié d’après Ravennes et al. (1987)).

Du point de vue géodynamique, il est maintenant admis que le bassin des Grés d’Annot correspond à un bassin d’avant-pays soumis pendant la sédimentation turbiditique à un régime tectonique en compression.

Les dépôts centres migrent d'est en ouest selon la direction de la compression alpine (Elliot et

al. 1985). La sédimentation évolue depuis des turbidites profondes dans le bassin d'Annot pendant

l’Eocène moyen et le début de l’Oligocène vers des turbidites influencées par les tempêtes dans le bassin de Barrême situé au sud-ouest pendant l’Eocène supérieur et l’Oligocène puis vers des dépôts fluvio-lacustres dans le bassin de Digne-Valensole situé encore plus à l'ouest durant l’Oligocène, le Pliocène et le Pléistocène. Les dépôts fluviatiles du Paléocène et de l’Éocène inférieur dans le bassin de Barrême au sud-ouest du bassin d'Annot sont influencés directement par le fonctionnement de

chevauchements (canalisation) (Gupta 1997). Pour Ford et al. (1999) les Grès d’Annot se déposent dans un bassin d’avant-pays ouvert, dont la zone de subsidence maximale migre vers le nord-ouest de l’Eocène moyen à l’Eocène supérieur et se ferme au sud-ouest contre le massif des Maures et de l’Esterel. À l’Oligocène inférieur, la direction de raccourcissement initialement E-W devient SW-NW consécutivement à la mise en place des nappes de l’Embrunais-Ubaye.

Néanmoins pour d’autres auteurs (e.g. Pairis 1987, Ravennes et al. 1987, Hamiti 1994) il existe des preuves d’une tectonique extensive synsédimentaire globalement E-W et qui se manifeste par le fonctionnement de failles normales NE-SW à pendage SE (par exemple a faille de Braux à l'Ouest d'Annot). Ces failles auraient essentiellement fonctionné pendant la sédimentation des calcaires nummulitiques et des marnes bleues, avant la mise en place des Grés d’Annot. Cette extension serait liée à l’ouverture du rift Corso-Sarde.

Labaume et al. (1989) décrivent, à partir d’une étude microtectonique de la Nappe de Digne et des Grés d’Annot autour du Massif de l’Argentera, une évolution tectonique en 5 phases successives de déformation fragile (fig. 40).

Figure 40 : Modèle d’évolution tectonique du Sud des Alpes externes occidentales du début de l’Oligocène au Quaternaire (modifié d’après Labaume et al. (1989)).

(2) Une phase extensive NW-SE à NS de l’Oligocène à l’Aquitanien pour la zone du massif de l’Argentera ; cette phase s’enregistre à partir de l’Eocène supérieur pour le secteur du bassin de Digne (fig. 40). L’origine de cette phase d’extension peut être double : soit elle est la conséquence du Rifting Oligocène Ouest-Européen, soit elle est traduit une permutation des axes de contraintes principales dans le bassin d’avant-pays lorsque le front compressif était localisé plus à l’est.

(3) Une phase compressive NE-SW pendant le Miocène (fig. 40). (4) Une phase extensive de direction E-W au Pliocène (fig. 40). (5) Une phase compressive N-S au Quaternaire (fig. 40).

Labaume et al. (1989) notent que les différentes phases extensives ne sont pas incompatibles avec un régime compressif général, aux limites du bassin. Il importe cependant de préciser à quel stade d’évolution et dans quelle partie de la chaîne se situent ces déformations extensives.

À l’échelle régionale, la morphologie du bassin, correspond à une série de quatre grands sous bassins d'orientation SE-NW (Elliot et al. 1985, Jean 1985, Apps 1987, Ravennes et al. 1987, Pickering & Hilton 1998). Ces bassins (notés A,B,C,D fig. 39) sont partiellement confinés et se remplissent successivement d’est en ouest, consécutivement à la progression des chevauchements alpins. Ils ne sont reliés entre eux que par des chenaux ou des zones de transit (Sinclair 1994, Pickering & Hilton 1998, Sinclair & Tomasso 2002).

L’identification et l’influence des topographies de tailles réduites, en particulier liées à au fonctionnement de failles normales synsédimentaires, sur les écoulements sous-marins restaient jusqu’ici anecdotiques par rapport à l’ensemble des travaux existant sur la formation des Grés d’Annot (Cremer 1983, Kneller & McCaffrey 1999, McCaffrey & Kneller 2001, Bouroullec 2002).

Le cadre de la présente étude se situe dans le secteur du col de la Moutière, dans la partie nord de la formation des Grès d'Annot. Les dépôts correspondent à des corps tabulaires, non chenalisants qui se mettent en place dans le sous bassin de Sanguinière/Col de la Cayolle, allongé dans une direction SSE-NNW et large de 9 à 19 Km (bassins et al. 1985, Pickering & Hilton 1998, Joseph et al. 2000). La direction des écoulements principaux est parallèle de l’axe du sous bassin (Inglis et al. 1981, Jean 1985, Ravennes et al. 1987, Pickering & Hilton 1998, Joseph et al. 2000).