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3 Préparation des diamines secondaires et tertiaires 3.1 Synthèse des diamines secondaires

III-3.1.a Etude bibliographique des méthodes existantes

Bien que la synthèse des diamines primaires 33 et 34 ait été décrite plusieurs fois dans la littérature, il y a peu d’exemples de diamines secondaires ou tertiaires dérivées de dianydrohexitols. En série isoidide, deux méthodes existent. La plus ancienne met en œuvre la substitution nucléophile par une amine du ditosylate 18a issu de l’isomannide. En présence de diméthylamine à 120°C, la diamine tertiaire correspondante a été isolée avec un rendement de 45%.146 Plus récemment, ce type de réaction a été réalisé avec de la benzylamine à 180°C pendant 12 heures122 ou bien à 160°C pendant 24 heures.147 La benzylamine 36 est obtenue avec des rendements respectifs de 70 et 79% (schéma 106). Cette diamine a permis de former des liquides ioniques122 ainsi que la diamine primaire 33.147

103 Schéma 106

Linberg et Thiem153 ont développé une méthode douce via une amination réductrice mettant en jeu des hydrures de bore. Celle-ci a l’avantage de fonctionnaliser les deux diamines primaires 33 et 34 sans réaction secondaire. En présence de dérivés carbonylés, au reflux du méthanol, les diamines primaires donnent les imines correspondantes avant d’être réduites in situ par un borohydrure tel NaBH4, NaBH(OAc)3 ou NaBH3CN (schéma 107). Les diamines secondaires sont ainsi formées avec des rendements allant de 48% à 86% selon les réactifs utilisés (tableau 45).

Schéma 107

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Tableau 45 : Etude de Thiem sur l’amination réductrice des diamines primaires 33 et 34

Entrée Diamine R1 R2 Hydrure Rendement

1 i-Bu Me NaBH4 18% 2 i-Bu Me NaBH(OAc)3 52% 3 i-Bu Me NaBH3CN 60% 4 Me Me NaBH(OAc)3 52% 5 Me Me NaBH4 31% 6 i-Bu H NaBH4 69% 7 n-Pr H NaBH(OAc)3 58% 8 n-Pr H NaBH4 86% 10 i-Bu Me NaBH(OAc)3 48%

De manière générale, en présence de NaBH3CN, ou de NaBH(OAc)3 les imines issues de cétones conduisent à de meilleurs rendements en amine secondaire (entrées 1 à 3 puis 4 et 5). Quant aux amines provenant d’aldéhyde, la réduction est favorisée en présence de NaBH4 (entrées 7 et 8). De plus, dans ces conditions, une diamine secondaire en série isomannide a été préparée (entrée 10).

De même, l’amination réductrice a été réalisée avec la dicétone 50 en présence de 2-pentylamine.153 Le dérivé carbonylé 50 a été formé à partir de l’isomannide en présence de dichromate de pyridinium (PDC) dans le dichlorométhane avec un rendement modéré de 59% aux côtés de 8% de produit de monooxydation. L’amination réductrice ultérieure à l’aide de la 2-pentylamine et de borohydrure de sodium a conduit sélectivement à la diamine secondaire 51 de la série isomannide avec un rendement de 59% (schéma 108).

105 Schéma 108

III-3.1.b Notre travail

Comme nous l’avons vu précédemment, seules les diamines secondaires ou tertiaires peuvent être formées en série isoidide par substitution directe du tosylate 18a par une amine. Ainsi nous avons préparé au laboratoire la dibenzyle amine 36 selon les conditions décrites par Kumar122 avec un rendement de 61% (schéma 109).

O O TsO OTs 18a BnNH2; 180°C O O BnHN NHBn 36 61% 16 heures Schéma 109

Afin de former d’autres diamines secondaires, nous avons utilisé l’amination réductrice. Elle a, dans un premier temps, été tentée avec la diamine primaire 33 selon les conditions mises au point par Thiem153 mais sans tamis moléculaire (schéma 110). L’acétone et trois aldéhydes (le p-anisaldéhyde, la pyridine-2-carboxaldéhyde et le p-nitrobenzaldéhyde) ont été mis en présence de la diamine 33. La réaction a été suivie par un contrôle RMN1H qui nous a permis de vérifier la formation de l’imine ainsi que le taux de conversion du composé 33. Lorsque la réaction est complète, l’ajout du borohydrure peut avoir lieu. Les résultats figurent dans le tableau 46.

106 Schéma 110

Tableau 46 : Amination réductrice réalisée sur la diamine 33

Entrée R1 R2 Hydrure Diamine obtenue Rendement

1 Me Me NaBH(OAc)3 67% 2 H NaBH4 70% (imine) 3 H NaBH4 81% 4 H NaBH4 79%

Malgré l’absence de tamis moléculaire dans le milieu réactionnel, le composé 52 a été formé avec un meilleur rendement que celui décrit dans la littérature (67% contre 52%) (entrée 1). Par contre, l’amination réductrice en présence de p-nitrobenzaldéhyde et de borohydryre de sodium (entrée 2) a échouée. Seule l’imine 53 est isolée avec un rendement de 70% après purification sur colonne de gel de silice. Le manque de réactivité est probablement dû à la présence, sur les noyaux aromatiques, des groupements nitro en para électroattracteurs (-M) qui rendent les doubles liaisons des imines inactives vis-à-vis de l’hydrure. Par contre, lorsque l’aldéhyde est le p-anisaldéhyde, les groupements méthoxy en para, électrodonneurs par effet mésomère renforcent l’electrophilie du carbone de l’imine ce qui pourrait expliquer

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le rendement de 81% obtenu en amine 54 (entrée 3). L’amine 55 a, quant à elle, été formée avec succès avec un rendement similaire de 79% (entrée 4).

En série isomannide, les rendements en diamines secondaires, réalisées avec les mêmes aldéhydes dans les mêmes conditions réactionnelles, ont été globalement plus faibles que ceux de leurs homologues de la série isoidide (schéma 111, tableau 47).

Schéma 111

Tableau 47 : Amination réductrice réalisée sur la diamine 34

Entrée R1 R2 Hydrure Diamine obtenue Rendement

1 Me Me NaBH(OAc)3 0% 2 MeO Me NaBH4 37% 3 H NaBH4 67% 4 H NaBH4 43%

Nous pensons que cette différence est liée à l’encombrement stérique induit par la proximité des deux groupements azotés en position endocyclique. D’un côté le premier groupement fixé pourrait bloquer l’approche du second lors de la formation de l’imine, et de l’autre, ces deux chaînes gêneraient l’approche du borohydrure de sodium sur chacune des deux faces de l’imine et diminueraient ainsi la cinétique de la réaction. Ainsi, dans les conditions réactionnelles précédentes, aucune réaction entre la diamine primaire 34 et

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l’acétone n’a été observée d’après le contrôle RMN1H (entrée 1). Les composés 57 et 58, issus respectivement des réactions avec le p-anisaldéhyde et la pyridine-2-carboxaldéhyde, sont obtenus avec des rendements faibles à moyens (respectivement 37% et 67%) (entrées 2 et 3). De plus, puisque la diamine secondaire benzylé 59 ne peut pas être obtenue via une substitution de l’alcool activé de l’isoidide,147 l’amination réductrice a été tentée avec le benzaldéhyde. Ainsi, la diamine 59 a été isolée avec un rendement modeste de 43% (entrée 4).

III-3.2 Synthèse des diamines tertiaires

La diamine tertiaire diméthylée 61 a aussi été préparée de deux façons différentes. Dans un premier temps, la synthèse de cette diamine dans les conditions décrites par Brimble et coll.154 qui ont mis en œuvre la formation « one-pot » d’une amine tertiaire à partir de l’amine primaire correspondante. En effet, via une amination réductrice en présence de formaldéhyde aqueux, de palladium sur charbon 10% et sous atmosphère d’hydrogène, le produit 60 est isolé avec un rendement de 79% (schéma 112).

Schéma 112

Nous avons testé cette réaction avec la diamine 34 de la série isomannide mais le rendement n’a jamais excédé 15% (schéma 113)

Schéma 113

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Dans un second temps, une stratégie mettant en jeu une mono-protection de type Boc de la diamine 34 a été réalisée. Le carbamate 62 a donc été formé selon des conditions classiques décrites par Wipf et Manojlovic155 à partir de la diamine primaire 34 en présence de dicarbonate de tert-butyle et de triéthylamine au reflux du dichlorométhane. Le produit 62 a été isolé avec un rendement de 84%. La méthylation ultérieure de l’atome d’azote du composé 61 selon les conditions décrites par Kočovský et coll.156 à l’aide d’un large excès d’hydrure de sodium et d’iodure de méthyle au reflux du THF fourni le dérivé 63 quantitativement. La méthylation du produit 62 suivie de la réduction du carbamate par LiAlH4 au reflux du THF selon le protocole décrit par Sudalai et Talluri157 permet d’obtenir le produit 61 (schéma 114). La diamine 61 a ainsi été préparée avec un rendement global de 73% en trois étapes ce qui est plus avantageux que sa synthèse précédente qui met en jeu une amination réductrice (schéma 113).

Schéma 114

La réduction directe du carbamate 62 a aussi été réalisée dans les mêmes conditions en vue d’isoler la diamine secondaire 64 mais celle-ci n’a malheureusement pas pu être isolée pure quelles que soient les méthodes utilisées (traitement chimique, chromatographie). Une seconde méthode consiste à déprotéger le dicarbamate 63 en présence d’acide trifluoroacétique dans le dichlorométhane à température ambiante comme l’ont décrit

155 Wipf, P.; Manojlovic, M. D. Beilstein J. Org. Chem. 2011, 7, 824-830.

156 Malkov, A. V.; Stončius, S.; McDougall, K. N.; Mariani, A.; McGeoch, G. D.; Kočovský, P. Tetrahedron

2006, 62, 264-284.

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Luthman et coll.158 Un rendement quantitatif en diamine secondaire 64 a ainsi été obtenu (schéma 114).