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102. Contrôler, c’est vérifier, surveiller et apprécier83le fond et les formes, les moyens

et les modes de preuve présentés au juge.

103. « À l’égard du juge, faire la preuve consiste à produire des éléments qui

emporteront sa décision. Il s’agit donc d’un effort, une initiative ou une riposte, qui incombe à celui qui demande, qui affirme (actor).»84

104. Or, la preuve commande la procédure devant la juridiction compétente, dont le maître est le juge. C’est lui qui va vérifier, surveiller et valoriser l’établissement des faits qui mèneront ou non à la solution du litige. Il est donc tenu du fait de la loi et sous prétexte de déni de justice85, de trancher ce litige86.

105. Pour ce faire, le juge administratif contrôlera l’offre de preuve soutenue par les parties au procès87(Section I) en vertu du principe de la saisine judiciaire qui lui procure ce

caractère dit de dominant88(Section II).

83 J.DUBOIS,op. cit., p. 122.

84 A. PLANTEY, « La preuve devant le juge administratif », J.C.P., 1986. I. 3245, n˚3.

85 L’article 4 du Code civil français, qui rejoint l’article 4 du Code de procédure civile libanais, dispose : « Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi,

pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice. »

86 Trancher le litige, c’est pratiquement « dire le droit » en vertu de l’adage latin « Jure dictio », qui remonte bien loin dans l’histoire des civilisations.

87 J.BAUDOIN,Conclusions sur l’affaire Labat :R.D.P.,1968,p.659.

88 J.-J.DAIGRE, « À propos du pouvoir discrétionnaire du juge en matière de production forcée de pièces »,

SECTIONI

L’OFFREDEPREUVE

106. Prouver, c’est établir la vérité, la réalité de quelque chose par le raisonnement ou par des pièces à conviction, voire indiquer avec certitude la véracité des choses89.

107. Par des preuves, nous faisons allusion aux éléments matériels et factuels du litige. Il s’agit donc d’un fait palpable, présent et actuel. À partir de là, « prouver consiste donc à

démontrer la réalité d’un fait ou la véracité d’une information, à présenter des éléments de conviction de nature à entraîner la décision d’un partenaire comme d’un adversaire d’une autorité politique ou administrative, voire de l’opinion publique »90.

108. En bref, c’est offrir au juge ce produit de la vérité, ces pièces ayant une teneur précise (§1) qui influencera, sans doute, la solution même du litige (§2).

§ 1. LECONTENUDEL’OFFREDEPREUVE

91

109. Quel est le contenu de l’offre de preuve ? De cette question en découle une autre : qu’est-ce que la preuve in abstracto ?

110. En matière civile, Baudry LACANTINERIE écrit que la preuve « est (…) la

démonstration (…) de l’exactitude d’un fait qui sert de fondement à un droit prétendu »92.

111. Cette réponse s’incorpore en matière administrative93, qui se nourrit de la même

sève94. Le souci de la preuve95 est donc de remettre les éléments matériels et factuels du

89 D.MAINGUY,Introduction générale au droit, Litec, 1997, p. 99. 90 A.PLANTEY,in « La preuve devant le juge administratif », op. cit., p. 1.

91 J.-J.THOUROUDE, Pratique du contentieux administratif, op. cit., p. 119 ; D.CHABANOL, La pratique du

contentieux administratif devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, Litec,

1988, p. 107.

92 B.LACANTINERIE,cité par B.PACTEAU, in « La preuve », op. cit., p. 2.

93 R.CHAPUS, « De l’office du juge : Contentieux administratif et nouvelle procédure civile », op. cit., p. 11.

litige96 au juge qui, à partir de ceux-ci, dégage, interprète et applique la règle de droit

adéquate97. Il est certainement le chef de l’action et le garant du contenu réel de la

preuve98.

112. Il s’agit, par conséquent, d’un long chemin rationnel qui nécessite une analyse (A) et une discussion (B).

A. L’ANALYSE

113. L’analyse exige, pour parvenir à un objet, une opération spirituelle de décomposition de ses éléments, d’en établir sa nature et sa fonction.

114. Nous procéderons alors, pour simplifier la tâche, à l’exposition de l’hypothèse, pour en tirer ensuite les conclusions.

1. L’hypothèse : la preuve est un point de fait

99

115. Pour les privatistes aussi bien que pour les publicistes, l’objectif du droit de la preuve a un double volet : d’une part, il doit assurer la sécurité juridique et d’autre part, il doit permettre, autant que possible, d’atteindre la vérité100.

116. Or, la vérité en matière contentieuse administrative, c’est l’exactitude d’un fait qui servira de base pour un fondement solide d’un droit prétendu101 au sein d’une action

administrative juridictionnelle102.

94 Ici, nous faisons allusion aux sources du droit romano-germanique ou latino-germanique ; voir en ce

sens : R.FARHAT,Introduction à l’étude du droit, Beryte, 1992, pp. 32-34. (Droit libanais, ouvrage écrit

en français).

95 B.PACTEAU, in « La preuve », op. cit., p. 2.

96 Idem., J.-B.DENIS,« Quelques aspects de l’évolution récente du système des preuves en droit civil »,

Rev.trim.dr.civ., 1977, p. 6.

97 F.TERRÉ, Introduction générale au Droit, Dalloz, 2003, pp. 378-440. 98 M.WALINE,note sous l’arrêt Michau : R.D.P., 1954, p. 509.

99 M.WALINE, note sous l’arrêt Barel : R.D.P., 1954, p. 509.

100 D.MAINGUY, in Introduction générale au droit, op. cit., p. 99, écrivait : « … Le droit ne peut négliger

la recherche de la vérité mais ne peut perdre son temps en une vaine recherche. Aussi, un système probatoire efficace peut permettre de démontrer qu’une chose est vraie, on dit alors qu’elle est prouvée, tant qu’il n’est pas démontré qu’elle est fausse. »

117. Il s’agira donc d’un principe et d’une application par le syllogisme judiciaire. 118. Les juristes publicistes ainsi que privatistes sont unanimes pour reconnaître à la preuve, en principe, pour unique objet, des éléments matériels et factuels.

119. Ces éléments, objets de preuve, une fois produits au juge, emporteront par la suite sa décision. Or, ces éléments, qui viennent à l’appui des conclusions du requérant, nécessitent une procédure devant la juridiction compétente régulièrement saisie103.

120. De là résultent à la fois le droit et l’obligation, pour chaque personne ayant intérêt, qualité104 et capacité, de faire la preuve des faits105, soutenant l’exactitude de ses

allégations.

121. En d’autres termes, chaque personne dont la décision pourra affecter, de loin ou de près, sa situation, a le droit d’être appelée à l’instance pour faire la preuve. C’est dire que le fait conditionne l’application du droit, car « l’application correcte de la norme juridique

implique donc une approche aussi exacte que possible de la vérité des faits »106 .

122. Mais s’il est établi que l’exactitude des faits doit être prouvée107, la teneur de la

norme juridique108 doit-elle l’être aussi ?

123. En principe, la règle applicable à la cause soumise au juge n’a pas à être prouvée. Il est censé la connaître109.

102 J.-J.THOUROUDE,in Pratique du contentieux administratif, op. cit., pp. 69-161

103 C.E., 15 nov. 1989, Canigou : Rec. C.E., p. 1402 – C.E., 5 juill. 1993, Clément : Rec. C.E., p. 948 (identité douteuse)- C.E., 13 oct. 1982, Rabin : Gaz. Pal., 1983, I, an.dr.adm., p. 156 (absence de signature) - C.E., 1er juill. 1960, Féd.nat.org.séc.soc. : Rec. C.E., p. 441 (critique d’une loi).

104 R.CHAPUS, Droit du contentieux administratif, Montchrestien, 2001, pp. 396-445 ; CH.DEBBASCH et J. RICCI, Contentieux administratif, Dalloz, 2001, pp. 321-353 ; Art.66 al.5 du R.C.E.L.

105 C.E.L., 24 févr. 1999, Héritiers de Jamil Baalbaky : R.J.A., 2003, Tome II, p. 346. 106 A.PLANTEY, in « La preuve devant le juge administratif », op. cit., p. 1.

107 Sur les faits non établis, voir : P.LAURANT,Conclusions sur l’affaire Chomat : D., 1956, p. 469. 108 Sur la norme juridique en général, voir : F.TERRÉ, op. cit., pp. 199-271 ; sur la distinction entre norme

et règle au sein du « Droit et sa sanction », voir : C. DE MALBERG, « Contribution à la théorie générale de l’État », Sirey, 1920, Tome I, pp. 207-211 et 238-240.

109 Le droit libanais s’applique sans nécessité de prouver son contenu. Aux termes de l’article 142 du C.P.C., « la preuve de l’existence du droit libanais n’est pas exigée ».

Cependant, il y a une différence entre le droit français et le droit libanais : alors que le droit français considère la loi étrangère comme un fait matériel dont la teneur doit être prouvée par la partie qui l’allègue, le droit libanais l’exige également, mais uniquement dans le cas où le juge ne la connaît pas ; à défaut, la preuve de la loi étrangère n’est pas demandée.

124. En effet, « de sa nature, la preuve judiciaire n’a pour objet que la constatation de

points de fait susceptibles d’être déniés. Les règles de droit ne sauraient, en général, faire la matière d’une preuve proprement dite »110.

125. Dans ce contexte, le terme « en général » nous laisse deviner qu’il y a une règle particulière à savoir : c’est celle de prouver le contenu ou l’usage local de la loi étrangère111. Cette règle s’applique devant les deux ordres de juridiction112, mais avec une

seule différence : alors que devant l’ordre judiciaire, il suffit d’apporter la preuve des lois étrangères113, il est obligatoire, devant l’ordre administratif, de prouver, au surplus,

l’existence et le contenu de la règle juridique dont les parties invoquent le bénéfice dans les cas de recours en interprétation ou en appréciation de la validité. Cependant, il est vain de profiter de cette exception pour renverser la nature de l’objet de la preuve, « le contentieux

de l’interprétation n’étant ni très important, ni même très représentatif du contentieux administratif »114.

126. Ce qui nous laisse conclure que dans la majorité115 des cas, la preuve a pour objet

un fait116. Ce fait117, posé dans les mains du juge, l’incitera à la qualification juridique118

afin d’appliquer la règle de droit adéquate à la solution du litige par le biais du syllogisme judiciaire. Le fait établi, le juge procédera à la technique du syllogisme judiciaire119. Il

110 AUBRY et RAU ;PLANIOL et RIPERT,cités par P.PACTET, in Essai d’une théorie de la preuve devant la

juridiction administrative, op. cit., p. 117.

111 A.PLANTEY et F.-CH.BERNARD, La preuve devant le juge administratif, Economica, 2003, pp. 261 et suivantes.

112 J.BAZ, Le droit judiciaire privé, pas de maison d’édition, 1993, pp. 123-124. (Droit libanais, ouvrage écrit en arabe).

113 A.PLANTEY et F.-CH.BERNARD, in La preuve devant le juge administratif, op. cit., p. 261-262.

114 P.PACTET, in Essai d’une théorie de la preuve devant la juridiction administrative, op. cit., pp. 117- 118.

115 C.f., infra, §2, de la Section 1, du Chapitre I, du Titre Premier, de la Première Partie de notre thèse. 116 DOMAT et PERROT, cités par J.-PH. COLSON, in L’office du juge et la preuve dans le contentieux

administratif, op. cit., p. 17.

117 J.CHEVALIER,« Le contrôle de la Cour de cassation sur la pertinence de l’office de preuve », D.Chr., 1956, pp. 37 et suivantes ; voir également l’article de M. FROMONT,« Le contrôle de l’appréciation des

faits économiques dans la jurisprudence administrative », in A.J.D.A., 1966, pp. 588 et suivantes. 118 C.f., B, du §2, de la Section 1, du Chapitre I, du Titre Premier, de la Première Partie de notre thèse. 119 En matière administrative, la structure d’un arrêt du Conseil d’État français ou libanais le prouve. Les

visas (des textes et visas des conclusions des parties), la motivation (la majeure, la mineure) et le dispositif.

qualifiera les faits, décortiquera les règles juridiques en vigueur, sélectionnera la plus adéquate, l’interprétera s’il y a lieu, pour l’appliquer ensuite au cas d’espèce, et en tirera enfin la conclusion estimée comme solution convenable au conflit, objet du litige.

127. « Ainsi apparaît le caractère syllogistique du raisonnement judiciaire : l’existence

de la règle de droit constitue la majeure, l’existence des données de fait prévues par cette règle la mineure et c’est du rapprochement des prémisses que résulte le jugement »120,

voire la décision de justice121. En bref, les éléments factuels du litige, en d’autres termes,

l’objet de la preuve, traités pour une prémisse mineure, sont l’élixir du syllogisme judiciaire usant nécessairement la motivation122. Cependant, dans ce contexte, l’objet de la

preuve est différent de l’objet de la demande et des moyens employés à l’appui de ladite demande (2).

2. La conclusion

128. L’objet de la preuve est distinct de l’objet de la demande et des moyens utilisés à l’appui de cette demande. En matière administrative contentieuse, chaque instance exige des éléments constitutifs, une instruction et un jugement123.

129. Les éléments constitutifs de l’instance sont : les parties, les conclusions et les moyens. Pratiquement, les conclusions et les mémoires présentés par les avocats au Conseil d’État en France, et par les avocats à la Cour au Liban124, comprennent deux

parties, l’une relatant les faits, l’autre les discutant. C’est dire que l’intégralité du syllogisme, contrôlé par le juge, se trouve reproduite dans ces mémoires. Régulièrement, le

120 P.PACTET,Essai d’une théorie de la preuve devant la juridiction administrative, op. cit., p. 118. 121 Sur l’ensemble de la motivation des décisions de justice, voir : A.TOUFFAIT et A.TUNC, « Pour une

motivation plus explicite des décisions de justice, notamment de celles de la Cour de cassation »,

Rev.trim.dr.civ., 1974 ; F.M.SHROEDER,Le nouveau style judiciaire, Dalloz, 1978. (Ici, nous faisons

allusion à l’intégralité de l’ouvrage). E.GABOLOT, La logique des jugements de valeur, pas de maison d’édition, 1927. (Veuillez consulter l’intégralité de l’ouvrage).

122 Sur le contrôle du Conseil d’État sur la teneur de la motivation d’un acte administratif, voir : N. POULET-GIBOT, « Le Conseil d’État et le contenu de la motivation des actes administratifs », D.,

Chron., 1992, p. 61.

123 R.CHAPUS, Droit du contentieux administratif, Montchrestien, 2001, pp. 751-1027.

124 Au Liban, il n’y a pas, comme en France, un nombre précis d’avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation. En revanche, un avocat libanais plaidant en appel, peut le faire devant tous les ordres et les degrés de juridiction (l’ordre administratif, judiciaire et même confessionnel).

rôle essentiel des parties au procès se réduit à la preuve des faits allégués pour laisser le reste au juge : jura novit curia125.

130. Or, en éclairant l’objet de la preuve126, le syllogisme judiciaire permet de percevoir

les différentes notions voisines, d’où la nécessité de la distinction entre objet de la preuve et objet de la demande127, d’une part, et les moyens utilisés à l’appui de la demande,

d’autre part.

131. L’objet de la preuve est différent de l’objet de la demande128.

132. Simple à cerner, l’objet de la demande est contenu dans les conclusions des parties. Il est l’expression du but poursuivi par le requérant.

133. Abordé dans la requête introductive d’instance, ce but se résume par le dispositif de la décision que le juge est appelé à élaborer129 .

134. Il peut revêtir deux prédicats : soit l’annulation d’une décision administrative dans le contexte d’un recours en annulation, soit l’octroi d’une indemnisation dans le cadre d’un recours de pleine juridiction130. Cependant, en lui-même, ce but131 poursuivi ne paraît pas

suffire, puisque le demandeur doit étayer sa requête par des faits.

125 Cet adage latin veut dire qu’en principe, la partie qui réclame l’application d’une règle de droit n’a pas à en apporter la preuve ; exception faite pour le droit étranger, les usages et les coutumes.

En fait, le juge français, tant judiciaire qu’administratif, n’est pas censé connaître le droit étranger ; c’est aux parties d’établir l’existence (en droit privé) et même parfois la teneur (en droit administratif) de la règle invoquée. Cependant, la connaissance du juge assouplit, dans certains cas, cette exigence de preuve.

De surcroît, simultanément, le juge, et particulièrement le juge judiciaire, n’est pas non plus censé connaître les usages et les coutumes.

Mais si cette règle est sûre pour les usages locaux, il n’en est pas de même pour la coutume qui, en tant que règle de droit positif, doit être connue par le juge : c.f., supra, §1, de la Section 1, du Chapitre I, du Titre Premier, de la Première Partie, notamment le (a), de notre thèse.

126 M.PARQUET, Introduction générale au droit, Bréal, 1996, pp. 88-89.

127 Dans le contexte de la théorie générale de la demande, voir l’excellente définition de l’objet et de la cause chez les professeurs Ch. DEBBASCH et J.-C.RICCI, in Contentieux administratif, op. cit., p. 428.

128 Idem., p. 119.

129 P.SANDEVOIR, « Recours de pleine juridiction », Rep.Cont.Adm. Dalloz, 2000, pp. 1-43.

130 P.PACTET, op. cit, p. 119 ; C.E.L., 14 oct. 1998, Mohamed Hussein Dia : R.J.A, 2003, Tome I, p. 9. Sur le pouvoir du juge de pleine juridiction, dans la prise en considération des changements qui affectent l’état du droit et/ou les circonstances de fait, afin de donner à sa décision toute son efficacité, voir : C.E., Sect., 8 janv. 1982, Aldana Barreña : Rec. C.E., p. 9, concl. B.GENEVOIS (saisie d’un recours de

plein contentieux contre un refus de la qualité de réfugié, il appartient à la commission des recours des réfugiés, « non d’apprécier la légalité de la décision qui lui est déférée au vu des seuls éléments dont

135. Dans un arrêt rendu le 30 janvier 1914 dans l’affaire Couillaud, le Conseil d’État français a débouté le requérant pour absence de l’exposé des faits et des moyens de la requête fondant le pourvoi132. Au surplus, le contenu de la demande révèle, à la fois, l’objet

susmentionné et la cause juridique de la demande. La cause juridique de la demande en est le fondement133.

136. Maître de l’action134, le juge en tire la conséquence : seul le titulaire du droit ou la

victime peuvent signer la demande pour déclencher, à la suite, l’action en justice.

137. À défaut, la personne à qui le pouvoir d’agir a été valablement transmis par décès, cession ou subrogation, est légalement apte à ester en justice135.

138. Ce juge a également la faculté de définir, lato sensu ou stricto sensu, le droit invoqué par le requérant136.

circonstances de fait [existantes] à la date de sa propre décision ») – C.E., 25 nov. 1998, Départ. du Nord ; Rec. C.E., p. 439, R.F.D.A., 1999, p. 248- C.E., 4 nov. 1994, Abderrahmane : Rec. C.E., p. 1110

– C.E., Sect. (avis art.12), 5 avr. 1996, Houdmond : Rec. C.E., p. 116 – C.A.A. Bordeaux, 25 févr. 1993,

SA Fametal : Rec. C.E., p. 431, D.A., 1993, n˚346.

131 Pour les professeurs DEBBASCH et RICCI, « la cause de la demande est son fondement juridique. À

l’intérieur de la cause, il faut distinguer les moyens qui en sont le soutien ». « Ils sont la cause de la cause. » La différence entre les deux, c’est que « les moyens sont parfois de pur fait », alors que « la cause se situe uniquement sur le plan du droit ». Voir : Ch. DEBBASCH et J.-C. RICCI, Contentieux

administratif, op. cit, p. 428.

132 C.E., 30 janv. 1914, Couillaud : Rec. C.E., p. 132 : « Considérant que la requête susvisée ne contient

pas l’exposé des faits et des moyens sur lesquels le sieur Couillaud prétend fonder son pourvoi : qu’ainsi elle ne satisfait pas aux prescriptions de l’article 1er du décret… » - C.E., Sect., 15 juill. 1957,

Ville de Royan : Rec. C.E., p. 499.

133 J. MOREAU, « La cause de la demande en justice dans la responsabilité administrative

extracontractuelle », in Mélanges offerts à R.STASSINOPOUOS,L.G.D.J., 1974, pp. 77 et suivantes.

134 Sur l’étendue du pouvoir du juge administratif, particulièrement en matière de l’excès de pouvoir où réside actuellement la révolution culturelle contentieuse en France, voir : C.E., Sect., 6 févr. 2004, Mme

Hallal : Req. n˚ 240560 – C.E. Sect., 23 juill. 1976, URSSAF du Jura : Rec. C.E., p. 362, avec les

conclusions de DONDOUX publiées à la Rev. Adm. 1976, p. 607. En l’espèce, le Conseil d’État, dans sa décision envers Mme Hallal, abjurant la jurisprudence issue de l’arrêt URSSAF susmentionné, a admis que « l’administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de

l’excès de pouvoir que la décision dont l’annulation demandée est légalement justifiée par un motif, de fait ou de droit, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ».

Sur le pouvoir facultatif du juge de l’excès du pouvoir en matière de substitution de base légale, voir : C.E., Sect., 3 déc. 2003, Préfet de Seine-Maritime c/ M. El Bahi : Req. n˚240267.

135 C.E., Sect., 17 juill. 1950, Mouret : Rec. C.E., p. 447 – C.E., 9 déc. 1927, Cts Gargiulo : Rec. C.E., p. 1198 – C.E., 28 nov. 1934, Cie d’assurances La Bourgogne : Rec. C.E., p. 1127 – C.E., 13 févr. 1980,

139. En bref, pour simplifier : la réponse à la question « que faut-il prouver », c’est la teneur de l’objet de la preuve ; tandis que la réponse à la question « pourquoi faut-il prouver », c’est le contenu de l’objet de la demande. En revanche, la question « comment faut-il prouver » résume les moyens de la demande.

140. Nous venons de distinguer l’objet de la preuve de l’objet de la demande137.

Cependant, distinguer l’objet de la preuve des moyens de la demande est une tâche beaucoup plus délicate. Cette difficulté réside dans la requête présentée par le requérant au juge.

141. En effet, au lieu de se contenter d’établir la matérialité des faits auxquels s’applique la règle de droit réclamée, le requérant va beaucoup plus loin que cela :

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