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III.2. Comment ménager des conditions de réception pour garantir une

III.2.2.1. Poursuivre l’insertion multicanale des contenus de

« Etre là où sont les internautes »317. Tel est le positionnement stratégique de diffusion qui a émergé à partir des années 2010 et que Silvère Mercier résumait ainsi lors du congrès de l’IFLA en 2014. Les entretiens avec des usagers révèlent à quel point c’est nécessaire. Or, ce positionnement implique de diffuser les contenus éditoriaux selon une certaine logique, une logique multicanale de dissémination des contenus. Celle-ci est fondamentalement différente de la logique consistant à les éditorialiser de manière centralisée sur le site web d’une bibliothèque. « L’usager n’est pas forcément demandeur d’une bibliothèque 2.0, mais de contenus produits par la bibliothèque se disséminant dans son univers numérique quotidien »318 précise ainsi Lionel Dujol. Cela signifie que dans le contexte actuel où l’information est omniprésente et vient dans une large mesure aux usagers, les bibliothèques doivent s’adapter en diffusant leurs contenus partout où sont leurs publics-cibles, et en démultipliant leur présence en ligne selon ces cibles. Cette logique de dissémination se traduit par le développement d’un « archipel de sites, blogs, réseaux sociaux, pour conforter la présence des médiathèques sur le web et élargir la dissémination des contenus des médiathèques » expose Franck Queyraud319.

Se sont dès lors développées des réflexions multiples sur les modes d’insertion de différents types de contenus éditoriaux de bibliothèque sur le web. Différents moyens ont été explorés. De nombreuses bibliothèques partagent les contenus sur les RSN via un lien qui ramène au produit éditorialisé. D’autres ont cherché à s’insérer dans la sphère numérique de partage littéraire et documentaire sous forme de booktubing (comme le préconisait Nicolas Beudon320 et le pratique la médiathèque de Montpellier, par exemple, sur sa chaîne YouTube), ou en mettant des avis critiques en ligne sur des plateformes de partage littéraire comme Babelio ou Libfly321. Les contributeurs de Ziklibrenbib ont

317 MERCIER, Silvère. Etre là où les internautes sont : BiblioSésame sur Facebook. Congrès de l’IFLA, 2014.

Disponible sur le Web : <http://pro.bpi.fr/es/sites/Professionnels/contents/Contenus/collections -et-services/eurekoi/etre- la-ou-les-internautes-so-1.html?bpisite%3Dpro.bpi.fr%26bpisite%253Dpro.bpi.fr>.

318 DUJOL, Lionel. Web 2.0 : de nouveaux usagers en bibliothèque ?. Marketing Libraries in a Web 2.0 World. Berlin : De

Gruyter Saur, 2011, IFLA Publications, p.77. Cité par La notion de marque pour les bibliothèques, Pierre-Louis Verron, 2013). Nous soulignons.

319 QUEYRAUD, Franck. Devenir contributeur. Un projet délibéré de médiation numérique des médiathèques de

Strasbourg Eurométropole. Dispositif de formation interne au numérique et d’éditorialisation des contenus sur le web 2015 -

2018. Lectures 197. 2016 [consulté le 30/07/2019], p.35. Disponible sur le Web :

<https://www.calameo.com/read/001070373736955aeb0c4>.

320 BEUDON, Nicolas. Le booktubeur et le bibliothécaire. Le Recueil factice [en ligne]. Mis en ligne le 07/12/2014

[consulté le 04/08/2019]. Disponible sur le Web : < http://nicolas-beudon.com/2014/12/07/booktube/>.

321 LEMAIRE, Alexandre. Utiliser et intégrer les réseaux sociaux littéraires pour la médiation documentaire

numérique des bibliothèques. GALAUP, Xavier. Développer la médiation documentaire numérique [en ligne]. Villeurbanne : Presses de l’enssib, coll. Boite à outils, #25, 2014, p.194 -202, Disponible sur le Web :

Quel avenir de la production éditoriale en bibliothèque dégager de cette étude de récéption ?

LAMOTTE Caroline | DCB28 | mémoire de recherche | février 2020 - 78 –

donné des interviews dans des revues spécialisées. Il est également possible de trouver des relais de diffusion dans des communautés d’intérêt, comme l’a fait L’Influx avec les communautés de spectacle vivant. Cela implique par contre, pour l’institution, de changer de posture, comme le précise bien Lionel Dujol322, en allant se mettre au même niveau

que les gens pour les capter. C’est en effet une logique de diffusion horizontale, qui se met au niveau des publics en exploitant leurs usages et leurs codes en ligne, par exemple la participation aux événements réguliers de recommandation, à travers l’indexation de contenus avec des #, type #vendredilecture#lyon. Cela suppose également de connaître les communautés du Web pour voir comment les bibliothèques peuvent trouver leur place et travailler avec elles.

Mais cinq ou dix ans après l’émergence de ce programme de dissémination, où en est le déploiement de ce positionnement stratégique sur le web ? A-t-il eu un impact massif sur l’accessibilité des productions éditorial(isé)es de bibliothèques ?

Certains contenus éditoriaux ont certes été rendus accessibles sur les réseaux sociaux par liens depuis les pages Facebook des bibliothèques ou des produits (comme le blog Bmol ou L’Influx). Cette dissémination semble cependant encore largement à réaliser selon Lionel Dujol323. Il explique ce phénomène par trois difficultés. La première est la friction entre communication de bibliothèque et communication de la tutelle, qui veut garder la main et empêche la bibliothèque de développer, par la communication, une présentation de ses productions de médiation. La deuxième est la difficulté à faire valoir qu’il s’agit de médiation et non de communication, laissant certains personnels croire que ce n’est pas de leur ressort mais d’une compétence particulière. La troisième difficulté, enfin, est celle de mobiliser les moyens humains et temporels pour développer ces approches. Une répondante de l’enquête écrit en commentaire qu’elle trouve « dommage que les productions de contenu ne soient pas plus mises en valeur dans les bibliothèques de manière générale. Heureusement, les réseaux sociaux commencent à changer un peu la donne ». L’inconvénient est que dans une recherche par mot-clé, ces contenus ressortent très difficilement voire pas du tout324. Les tests que nous avons réalisés sur Google selon le mode de recherche d’un usager lambda ont très peu permis d’arriver sur des contenus éditoriaux de bibliothèque, à moins d’un titre d’article exact ou d’un sujet de niche. C’est particulièrement le cas pour les conseils de lecture, pourtant présentés comme le produit éditorial « phare » d’avenir, et qui ont fait l’objet de réflexions325. Aucun site web ou blog de recommandation de bibliothèque n’apparaît dans les premières pages de Google, et les sites de recommandation prisés des publics n’y font jamais référence326. Sur les RSN, dans

<https://books.openedition.org/pressesenssib/725>. Voir aussi le billet de blog de Silvère Mercier du 05/05/2010 intitulé « Bibliothèques et réseaux sociaux littéraires, où en est-on ? » qui reprend ce texte d’Alexandre Lemaire et atteste le moment d’émergence de cette réflexion.

322 Entretien téléphonique du 27/01/2020 323 Entretien téléphonique du 27/01/2020

324 Test réalisé le 16/01/2020. Pour prendre quelques exemples, sur Facebook, #patrimoine ne fait ressortir que la page de la

Médiathèque Jacques-Chirac de Troyes, #recommandation littéraire aucune bibliothèque (mais un éditeur, un auteur, une personne lambda, un critique). #conseil lecture ne le permet pas non plus (un blog littéraire belge, un éditeur, ActuaLitté, même un centre religieux), ni #blog musical ; certains mots-clés ne renvoient qu’à une seule bibliothèque, comme #dossiers documentaires à un post de la MIOP, #tresor patrimoine à la Bibliothèque de Mulhouse, et #bibliothèque bleue comme #moyenage à celle de Troyes. #webzine conduit à celle de Louise Michel. Le référencement de ces contenus sur Facebook, par mots-clés, reste donc à améliorer. Il en va de même sur Twitter.

325 Voir par exemple Mercier Silvère, http://www.bibliobsession.net/2010/05/05/bibliotheques -et-des-reseaux-

sociaux-litteraires-ou-en-est-on/ , réseaux sociaux étant ici à prendre au sens de plat eformes sociales.

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la plupart des cas, pour trouver des contenus de bibliothèque, il est nécessaire de les chercher non pas par mots-clés, ce qui est le mode de recherche normal, mais par page de bibliothèque. Il faut donc, autrement dit, connaître leur origine pour pouvoir éventuellement les retrouver. « Je trouve que les contenus digitaux publiés par les bibliothèques ont du mal à être trouvés/consultés si on ne sait pas quelle bibliothèque les a produits » expose une jeune femme dans l’espace « Commentaires » en fin de notre questionnaire d’enquête. L’accessibilité reste donc, à l’heure actuelle, un problème, et il faut continuer à travailler à la dissémination des contenus. Mais n’est-ce pas également, voire avant tout, un problème de référencement ?

III.2.2.2. La question clé du référencement et de l’archivage

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