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VERS « UN NOUVEAU COMMENCEMENT » ?

II. UN POPULISME ILLUSOIRE ?

À présent, il convient de se demander si le raisonnement de Reagan, aussi sédui-sant soit-il, est vraiment convaincant. S’il est clair que le chef de l’État se pose en leader populaire à l’assaut des élites de Washington, la logique de ses arguments résiste-t-elle aux assauts de l’analyse ?

Une première faille logique apparaît lorsque Reagan oppose le principe d’autogouvernement et celui d’interventionnisme. En effet, il ne s’ensuit pas que celui qui croit que « la société est devenue trop complexe pour s’autogouverner » croit aussi, nécessairement, que « personne parmi nous n’est capable de se gouverner soi-même ». On peut tout à fait admettre cette capacité tout en affirmant que certains problèmes économiques dépassent la sphère du pouvoir d’un seul individu, voire d’un groupe d’individus, si bien qu’ils nécessitent l’intervention de l’État. C’est cette idée qui était au centre de la politique interventionniste de Franklin D. Roosevelt.

Écoutons ce que dit ce dernier lors de son discours d’investiture de 1937 :

Cette année marque le cent cinquantième anniversaire de la Convention consti-tutionnelle qui nous érigea en nation. À cette Convention, nos aïeux surent trouver le moyen de sortir du chaos qui fit suite à la Guerre révolutionnaire ; ils créèrent un État fort, doué des pouvoirs de l’action unie qui, aujourd’hui comme

« Le problème, c’est l’État » 57 à l’époque, sont suffisants pour résoudre des problèmes qui sont totalement au-delà de toute solution individuelle ou locale1.

En s’inscrivant dans cette tradition, bien loin de compromettre le principe d’autogouvernement, Roosevelt pensait ouvrir « un nouveau chapitre dans notre livre d’autogouvernement2 ». Ce « livre » commence lorsque les Treize colonies obtien-nent l’autonomie gouvernementale en s’affranchissant de l’autorité britannique ; il se poursuit lorsque les nouveaux États, divisés par des conflits internes et en proie à des menaces externes, remplacent les Articles de la confédération par la Constitution et s’unissent au moyen d’un État central fort, chargé de garantir la longévité de cette indépendance ; le chapitre de Roosevelt s’ouvre lorsque les États-Unis, accablés par une crise économique sans précédent, trouvent en l’État fédéral le moyen de « maî-triser les épidémies économiques » au lieu de se laisser maîmaî-triser, et donc gouverner, par elles. Roosevelt déclare, en effet, que

nous avons reconnu […] le besoin de voir en l’État l’instrument de notre cause commune de résoudre pour l’individu les problèmes grandissants d’une civilisa-tion complexe. Leurs tentatives répétées de trouver une solucivilisa-tion sans l’aide de l’État nous avaient laissés déconcertés et perplexes. […] [N]ous savions qu’il fallait trouver le moyen pratique de contrôler les forces aveugles de l’économie et l’égoïsme aveugle de certains3.

C’était donc bien l’individu que cette politique interventionniste était censée affran-chir, partant de l’idée que celui-ci n’est capable de se gouverner lui-même que lors-qu’il est libéré des épidémies économiques grâce aux contrôles étatiques. Ainsi Rea-gan pose-t-il un faux dilemme lorsqu’il invite à choisir entre l’autogouvernement et l’interventionnisme : à partir du moment où certains problèmes sont « totalement au-delà de toute solution individuelle ou locale », non seulement ces approches ne se contredisent pas nécessairement, mais elles peuvent même se compléter.

Certes, Reagan aurait difficilement pu en disconvenir. Comme nous l’avons vu, ce

1 . Franklin D. Roosevelt, « Inaugural Address January 20, 1937 », APP, http://www.presidency.ucsb.edu/ws/?pid=15349 (consulté le 11 juin 2015) : « This year marks the one hundred and fiftieth anniversary of the Constitutional Convention which made us a nation. At that Convention our forefathers found the way out of the chaos which followed the Revolutionary War;

they created a strong government with powers of united action sufficient then and now to solve prob-lems utterly beyond individual or local solution. » C’est nous qui soulignons.

2. Ibid.

3. Ibid. : « we recognized […] the need to find through government the instrument of our united purpose to solve for the individual the ever-rising problems of a complex civilization. Repeated at-tempts at their solution without the aid of government had left us baffled and bewildered. […] [W]e knew that we must find practical controls over blind economic forces and blindly selfish men C’est nous qui soulignons.

n’est pas l’existence de l’État fédéral qui lui pose problème, mais la méconnaissance des limites de son rôle. Bien sûr que l’État doit aider les individus là où ils sont im-puissants, mais Reagan insiste qu’il ne doit pas agir là où ils ne le sont pas.

D’ailleurs, il ne faut pas surestimer les capacités de l’État : après tout, qu’est-ce que ce dernier sinon un groupe d’individus ? Des individus investis de plus de pouvoirs que d’autres, certes, mais des êtres humains tout de même, avec leurs atouts comme leurs faiblesses. Nous verrons bientôt que, au cours des années 1970, on assista à la montée d’une idéologie libérale qui remet explicitement en cause la capacité des hommes politiques, à cause des limites de leur connaissance, à mieux réguler l’économie que le marché « libre ». Sur le plan politique aussi, Richard Nixon, une décennie avant Reagan, inversa la logique rooseveltienne en évoquant « les limites de ce que l’État peut faire tout seul1 ». Dès lors, ce ne sont plus les individus qui pa-raissent impuissants, mais l’État — si bien que ce sont les individus qui sont appelés à agir là où celui-ci est inefficace. « En faisant trop confiance à l’État, déclare Nixon, nous lui avons demandé plus que ce qu’il peut offrir. » « Il est grand temps de renon-cer à la politique condescendante du paternalisme » qui consiste à « concentrer tout le pouvoir et toutes les responsabilités à Washington. […] Encourageons donc les individus de cette nation et des nations étrangères à faire davantage par eux-mêmes »2. Comme nous l’avons vu, c’était en suivant cette même voie que Reagan comptait régler les problèmes économiques auxquels le pays était confronté au mo-ment de son investiture.

Pour que cette solution soit convaincante, cependant, encore faut-il que les pro-blèmes en question relèvent effectivement de la sphère de pouvoir du « peuple », ou, à la rigueur, de celle des États fédérés. Or, si nous regardons à nouveau les maux économiques que Reagan énumère au début de son discours — l’inflation, le chô-mage, le déficit fédéral et la fiscalité fédérale — force est de constater qu’ils sont tous, comme le dirait Roosevelt, « totalement au-delà de toute solution individuelle ou locale ». Chacun dépasse, en effet, les capacités d’action du peuple ; les deux

1. Richard Nixon, « Inaugural Address – January 20, 1969 », APP,

http://www.presidency.ucsb.edu/ws/index.php?pid=1941&st=&st1= (consulté le 11 juin 2015) : « the limits of what government alone can do. »

2. R. Nixon, « Oath of Office and Second Inaugural Address – January 20, 1973 », APP, http://www.presidency.ucsb.edu/ws/index.php?pid=4141&st=&st1= (consulté le 11 juin 2015) : « In trusting too much in government, we have asked it more than it can deliver » ; « the time has come to turn away from the condescending policies of paternalism » ; « to gather all power and responsibility in Washington ; « Government must learn to take less from people so that people can do more for themselves. »

« Le problème, c’est l’État » 59 niers ne concernent que l’État fédéral par nature ; quant aux États fédérés, ils ne peu-vent rien contre l’inflation dans la mesure où la politique monétaire relève de la seule Reserve fédérale, et ils ne peuvent avoir qu’un impact local et limité sur le chômage.

On voit donc mal comment le peuple ou les États fédérés seraient plus à même d’apporter des solutions à ces problèmes que l’État fédéral. Au mieux pourrait-on dire que celui-ci est le problème et la solution ; en effet, si les problèmes qu’identifie Reagan relèvent tous du domaine de l’État fédéral, logiquement c’est à celui-ci de changer ses politiques d’emploi, monétaire, budgétaire et fiscale. C’est ce que Rea-gan fera d’ailleurs lors de son mandat. Mais que signifie alors la réduction de la sphère d’influence de l’État fédéral à ce moment-là ? Quelles responsabilités Reagan veut-il rendre au peuple et aux États fédérés ?

En fait, Reagan le passe sous silence dans ce discours — et c’est ce non-dit qui est peut-être le plus parlant. Reagan aurait eu du mal à convaincre s’il affirmait qu’il incombait aux États fédérés et au peuple de résoudre les problèmes de chômage, d’inflation, de déficit public et de fardeau fiscal, problèmes face auxquels ils sont à eux seuls impuissants. En revanche, s’il envisageait plutôt de leur transférer d’autres responsabilités qu’il n’exprime pas ici et qu’il estime être de leur ressort et non de celui de l’État fédéral, alors le raisonnement deviendrait cohérent. Pourquoi passer ces responsabilités sous silence ? N’est-ce pas le maillon de la chaîne qui manque ?

L’hypothèse la plus plausible est que les réformes que Reagan souhaitait inverser étaient en fait populaires. C’était effectivement le cas de celles qui, depuis le New Deal, visaient à protéger les individus, au moyen de l’intervention de l’État, contre les « forces aveugles de l’économie et l’égoïsme aveugle de certains hommes ». Si Reagan s’en était pris directement à elles, il aurait sûrement compromis son image de leader populaire. Or, s’il est obligé de déguiser ainsi ses intentions pour que cette image apparaisse, on bascule alors dans le monde de l’imaginaire. N’oublions pas, après tout, que, avant de devenir homme politique, Reagan était acteur ; homme poli-tique, serait-il en train de jouer le leader populiste ? Plusieurs éléments de ce dis-cours nous portent à le croire ; et, une fois de plus, c’est surtout ce que Reagan ne dit pas qui rend son « populisme » suspect.

Tout d’abord, il y a la question du consentement populaire. Comme nous l’avons vu, Reagan convoque le répertoire révolutionnaire en prétendant que, depuis plu-sieurs décennies, le gouvernement « semble s’être accru au-delà du consentement des gouvernés ». Ceux-ci sont ainsi invités à comparer l’interventionnisme de cette

pé-riode à l’oppression coloniale exercée par l’État britannique, si bien que le New Be-ginning signalerait la fin d’un régime despotique et impopulaire. Or, si le New Deal était vraiment à ce point contraire à l’expérience américaine, comment expliquer, par exemple, que la politique de Franklin D. Roosevelt, censée faire écho à l’oppression britannique, ait été plébiscitée à quatre reprises1 ? Comment expliquer la victoire écrasante en 1964 de Lyndon B. Johnson, autre grande figure de l’État intervention-niste, contre Barry Goldwater qui, comme Reagan, voulait inverser cette politique2 ? Comment expliquer que même Richard Nixon, qui pourtant avait affiché lui aussi sa volonté de rompre avec l’ordre du New Deal, se soit résigné à ne pas y toucher direc-tement, voire à le développer davantage, afin de ne pas compromettre sa té3 ? Contrairement à ce que prétend Reagan, il semble qu’une bonne partie du peuple américain ait soutenu des politiques qui donnaient un plus grand rôle à l’État fédéral dans la vie économique.

L’admettre, cependant, ce serait risquer de ternir son image de leader populaire.

Pour s’en sortir, Reagan a donc recours à cette ruse très commune dans les démocra-ties représentatives, surtout celles qui pratiquent le scrutin majoritaire : l’amalgame entre la volonté du gagnant et celle du peuple entier. Sont passés sous silence tous ceux qui n’avaient pas donné leur consentement à cette politique et qui, faute de scrutin proportionnel, ne sont pas représentés. À partir de là, toutes les confusions et tous les anachronismes sont possibles : les opposants à l’ordre du New Deal, minori-taires pendant plusieurs décennies, virent l’État fédéral grandir au-delà de leur con-sentement ; puis, au moment où leur candidat gagne le scrutin majoritaire, Reagan présente le non-consentement passé de ses électeurs comme celui du peuple entier.

Ainsi, par un tour de passe-passe, toutes ses majorités qui avaient donné leur consen-tement à la politique interventionniste par le passé disparaissent au détour d’une phrase.

Est-ce la seule illusion démocratique que nous rencontrons dans ce discours ?

1. Seule la mort empêcha la continuation de la présidence de Roosevelt, décédé quelques mois après le début de son quatrième mandat. La Seconde Guerre mondiale avait produit des conditions exceptionnelles qui ont favorisé ses troisième et quatrième réélections. Depuis la ratification du XXIIe Amendement à la Constitution le 27 février 1951, aucun président ne peut exercer plus de deux man-dats — ce qui, avant Roosevelt, avait été une tradition non écrite.

2. Johnson obtint 61,1 % du vote populaire et 90,3 % du vote des grands électeurs.

3. Cf. N. Klein, The Shock Doctrine, op. cit., p. 165-166 ; Rick Perlstein, Nixonland : The Rise of a President and the Fracturing of America, New York, Scribner, 2008, p. 395-396 ; et Bruce J. Schul-man, The Seventies : The Great Shift in American Culture, Society, and Politics, New York, Da Capo Press, 2001, p. 24 sq.

« Le problème, c’est l’État » 61 Considérons maintenant l’antiélitisme de Reagan. Comme nous l’avons vu, celui-ci oppose les « élites politiques » et le « peuple » et annonce son intention de rendre à celui-ci les pouvoirs et les responsabilités que celles-là avaient indûment accaparés.

Rien de plus démocratique, au premier abord, car Reagan semble promouvoir l’élargissement de la démocratie directe. Ce qu’il néglige, cependant, c’est que le

« peuple » comporte lui-même ses élites : les grandes puissances économiques.

Écoutons ce que Roosevelt avait à dire en son jour sur le rapport de sa politique in-terventionniste aux élites économiques et à la démocratie :

En fait, au cours de ces quatre dernières années, nous avons rendu l’exercice du pouvoir plus démocratique ; car nous avons commencé à subordonner, comme il se doit, les pouvoirs autocratiques de la sphère privée au gouvernement du peuple. La légende qu’ils étaient invincibles, au-dessus et au-delà des procé-dures de la démocratie, a été brisée. Ils ont été contestés et battus1.

Il n’est pas très risqué de supposer que l’on compte ces « pouvoirs autocratiques de la sphère privée » parmi les mécontents de ce nouvel ordre démocratique. Si Reagan veut maintenant remettre au « peuple » les pouvoirs que les élites du New Deal lui avaient enlevés, sans tenir compte des élites privées, ne risque-t-il pas de ne faire que transférer ces pouvoirs d’un groupe d’élites à un autre ? Dès lors, ce qui paraissait comme un élargissement de la démocratie directe : rendre le pouvoir au peuple, serait en fait un rétrécissement de la démocratie indirecte : l’émancipation des autocraties privées du contrôle public. Nous n’avons pas encore les moyens de dire si c’était l’intention profonde de Reagan, ou s’il s’était laissé duper par son propre discours, restant convaincu subjectivement qu’il rendait le pouvoir au « peuple » au sens large, alors que, objectivement, il le rendait aux autocraties capitalistes ; nous reviendrons sur ces questions plus loin. Quoi qu’il en soit, constatons qu’il est possible que la démocratie affichée dans ce discours soit un faux-semblant et que la réalité soit tout autre.

La non prise en compte des élites privées rend également suspect l’équité des pro-positions de Reagan. Il dit : « Les solutions que nous cherchons doivent être équi-tables, sans qu’aucun groupe ne soit pris à part pour payer un prix plus élevé2. »

1. F. D. Roosevelt, « Inaugural Address – January 20, 1937 », op. cit. : « In fact, in these last four years, we have made the exercise of all power more democratic; for we have begun to bring private autocratic powers into their proper subordination to the public's government. The legend that they were invincible above and beyond the processes of a democracy—has been shattered. They have been challenged and beaten. »

2. R. Reagan, « Inaugural Address – January 20, 1981 », infra, annexe II, p. 578.

Cette proposition paraît égalitaire ; mais, faute de tenir compte des élites privées, ce qui se profile derrière ce masque de « justice sociale » est en fait une autre politique potentiellement impopulaire, que Reagan mettra en œuvre dès 1981, mais qu’il ne prononce pas ici : la remise en cause de l’impôt progressif. Celui-ci est fondé sur l’idée que chacun doit payer selon ses moyens, si bien que les hauts revenus sont soumis à des taux d’imposition plus élevés que ceux auxquels sont soumis les reve-nus modestes. « Injuste ! », s’écrient ses critiques, car c’est prendre certains groupes à part (les riches) pour les faire payer plus cher. Poussée à l’extrême, cet idéal de justice débouche sur l’impôt à taux unique (flat tax), dont l’un des plus grands défen-seurs était Milton Friedman1. Un simple calcul permet de démontrer que ce type d’impôt déboucherait sur une répartition des richesses très éloignée de l’idée que quiconque se fait de la justice distributive2. Mais en appelant à une baisse des impôts

1. Voir M. Friedman et R. Friedman, Free to Choose : A Personal Statement [1979], New York, Harcourt, 1990, p. 306. Friedman siégeait à l’Economic Policy Advisory Board de Reagan en 1981, l’année où celui-ci signa l’Economic Recovery Tax Act qui prévit le passage du taux d’imposition maximal de 70 à 50 % et du taux minimal de 14 à 11 %. Si ce n’est pas le taux unique dont Friedman avait rêvé, Reagan s’en est néanmoins rapproché.

2. Pour démontrer les effets d’une telle politique fiscale, appliquons à deux revenus annuels, soit (A) 20.000 $ et (B) 1.000.000 $, d’abord des taux progressifs et ensuite un taux unique.

Soient les taux progressifs suivants : 0 % (0 $ - 5.000 $) ; 5 % (5.001 $ - 15.000 $) ; 15 % (15.001 $ - 45.000 $) ; 30 % (45.001 $ - 200.000 $) ; 50 % (200.001 $ - 500.000 $) ; 70 % (500.001 $ +). Dans ce cas, A payera 1.250 $ d’impôts et conservera 18.750 $ de pouvoir d’achat, tandis que B payera 551.500 $ d’impôts et conservera 448.500 $ de pouvoir d’achat. Certes, B paye bien plus d’impôts que A, aussi bien du point de vue du taux moyen que de celui de la somme abso-lue, mais l’écart entre 18.750 $ et 448.500 $ après impôt demeure très considérable. L’impôt progres-sif n’empêche donc pas les plus fortunés de jouir d’un pouvoir d’achet nettement supérieur à celui des moins fortunés.

Supposons maintenant que soit appliquée aux deux revenus un taux unique de 15 %. A payera alors 3.000 $ d’impôts et conservera 17.000 $ de pouvoir d’achat, tandis que B payera 150.000 $ d’impôts et conservera 850.000 $ de pouvoir d’achat. En termes d’impôts, B paye toujours bien plus d’impôts que A, bien que chacun paye une proportion égale de ses revenus respectifs ; en termes de pouvoir d’achat, en revanche, l’écart s’est considérablement creusé. A a vu ses impôts augmenter de 1.750 $, tandis que B a vu les siens diminuer de 401.500 $. Difficile de voir en quoi ce système d’impôts serait plus « juste » et « égalitaire »…

Soyons néanmoins indulgents et appliquons maintenant une déduction automatique de 15.000 $.

En effet, le but des défenseurs de l’impôt à taux unique n’est pas d’augmenter la part des impôts payés par les pauvres ; au contraire, ils veulent moins d’impôts pour tout le monde pour stimuler la con-sommation et l’activité économique. C’est pourquoi ils proposent une limite en-dessous de laquelle on n’est pas imposable (voir, par exemple, Ibid., p. 306). Supposons donc que seuls les revenus au-dessus de 15.000 $ soient soumis au taux unique de 15 %. A payera alors seulement 750 $ d’impôts, soit 500 $ de moins par rapport à l’impôt progressif, tandis que B payera 147,500 $ d’impôts. À partir de là, il est possible d’obtenir un soutien populaire pour une telle réforme fiscale dans la mesure où tous, y compris les plus démunis, bénéficieraient d’une réduction d’impôts. Cependant, on voit qu’une telle réforme fiscale profiterait bien davantage aux hauts revenus : par rapport à l’impôt progressif, A ob-tient une réduction de 500 $ et B une réduction de 404.000 $ ! Tout le monde paye moins d’impôts,

En effet, le but des défenseurs de l’impôt à taux unique n’est pas d’augmenter la part des impôts payés par les pauvres ; au contraire, ils veulent moins d’impôts pour tout le monde pour stimuler la con-sommation et l’activité économique. C’est pourquoi ils proposent une limite en-dessous de laquelle on n’est pas imposable (voir, par exemple, Ibid., p. 306). Supposons donc que seuls les revenus au-dessus de 15.000 $ soient soumis au taux unique de 15 %. A payera alors seulement 750 $ d’impôts, soit 500 $ de moins par rapport à l’impôt progressif, tandis que B payera 147,500 $ d’impôts. À partir de là, il est possible d’obtenir un soutien populaire pour une telle réforme fiscale dans la mesure où tous, y compris les plus démunis, bénéficieraient d’une réduction d’impôts. Cependant, on voit qu’une telle réforme fiscale profiterait bien davantage aux hauts revenus : par rapport à l’impôt progressif, A ob-tient une réduction de 500 $ et B une réduction de 404.000 $ ! Tout le monde paye moins d’impôts,