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31 - POLLUTION ORGANIQUE DES COURS D'EAU

Dans le document ECOLOGIE FONDAMENTALEEAU ET MILIEUX HUMIDES (Page 46-52)

Anciennes car elles remontent aux premières cités, les pollutions organiques sont en recul dans divers pays, grâce à l'épuration des rejets d'eaux usées. Mais elles resteront encore longtemps excessives dans de nombreuses régions du monde où continuent à croître la population et les mégalopoles.

Les matières organiques rejetées avec les eaux usées domestiques, industrielles et parfois agricoles consomment l'oxygène en étant décomposées de multiples bactéries. Le taux d'oxygène diminue, puis finit par réaugmenter quand réoxygénation l'emporte sur la consommation d'oxygène.

La désoxygénation, l'apport et la production d'azote ammoniacal - dont la toxicité augmente avec le pH et la température - ainsi que de divers composés de dégradation, surtout près du fond, perturbent le peuplement en invertébrés aquatiques et en poissons. La salissure mécanique et les colmatage des fonds modifient aussi les biocénoses.

Les espèces exigeantes en oxygène, ou demandant des fonds propres, ou sensibles à l'azote ammoniacal comme à d'autres toxiques, disparaissent. Certaines espèces prolifèrent.

Globalement, il y a diminution de la diversité faunistique.

Par épisodes, surtout à l'étiage et en période de fortes chaleurs, la chute de l'oxygène dissous et/ou la toxicité ammoniacale peuvent entraîner des mortalités brutales des poissons.

Chez les poissons de nos régions, les salmonides sont les plus atteints.

Les effets de la pollution organique se conjuguent souvent avec ceux de l'eutrophisation des cours d'eau. Celle-ci se prolonge plus en aval avec des algues filamenteuses fixées pour les eaux plus vives, et un plancton très abondant dans les eaux lentes.

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3.1.2 - Critères d'evaluation & contrôle

Divers paramètres permettent d'évaluer la pollution par les matières organiques, principalement :

- le taux d'oxygène dissous et son pourcentage par rapport à la saturation normale en oxygène ;

- la Demande Biochimique en Oxygène Dissous, consommation d'oxygène en 5 jours dans des conditions standard, ou DBO5, permet d'évaluer globalement la fraction organique rapidement biodégradable ; - la Demande Chimique en Oxygène, ou DCO, permet d'évaluer la quantité globale d'oxygène consommable, même sur le long terme ; elle est plutôt adaptée aux cas de rejets industriels peu biodégradables ; - l'azote ammoniacal, et notamment l'azote ammoniacal non ionisé qui est calculé d'après la température et le pH ;

- les phosphates, bon indicateur de rejets d'eaux usées.

Ces paramètres sont comparés aux valeurs données par des grilles normatives, ce qui permet d'estimer la gravité de la situation. Des figurations et cartes avec des couleurs standard permet de visualiser la situation du réseau hydrographique.

Cette évaluation est toujours rendue difficile par les grandes variations de concentrations, sous l'effet du climat, des fluctuations des rejets et surtout de celles du débit dans le milieu récepteur.

La sensibilité de la faune d'invertébrés aquatiques permet d'apprécier la gravité des pollutions organiques par des méthodes biologiques. Quoique cette approche soit moins quantitative, elle a l'intérêt d'être moins sensible aux fluctuations et elle permet d'estimer l'effet sur les biocénoses elles-mêmes. Basés sur la nature des invertébrés et sur leur diversité, l'indice biotique et, plus récemment, l'indice de biologique générale normalisé (IBGN), sont intéressantes surtout pour les petites et les moyennes rivières.

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Profil d'indices biotiques

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Note sur l'IBGN

3.1.3 - Lutte contre les pollutions organiques & urbaines 3131 - L'épuration des eaux usées urbaines

La réduction des pollutions urbaines devrait commencer "à la source" par des économies sur les consommations d'eau, ou sur des produits comme les phosphates, mais...

Elle commence habituellement par l'assainissement, collecte des eaux usées par un réseau de canalisations qui les amène à un système d'épuration.

Le type d'épuration actuellement le plus fréquent est l'épuration par des boues activées. Cette chaîne de traitement commence par des systèmes physiques comme le dégrillage, la

décantation, la flottation. Le coeur du traitement est la décomposition biologique des matières organiques par des bactéries recyclées (boues secondaires) et recevant une abondante fourniture d'oxygène. Puis les bactéries sont séparées de l'eau épurée par une décantation finale. Le traitement peut être complétée par la déphosphatation (cf

Eutrophisations) qui est biologique ou chimique, par une dénitrification biologique, par une filtration et/ou une décontamination terminales.

Il existe d'autres types de traitement, comme le lagunage naturel, les anciens lits bactériens, les nouvelles cultures fixées ou filtration biologique, les procédés purement chimiques, les séparations physiques, l'épandage et la réutilisation pour l'irrigation, etc.

Pratiquement tous les systèmes récupèrent et produisent des déchets, les boues. Celles-ci doivent elles aussi être traitées, séchées notamment. Elles doivent ensuite être éliminées par épandage et recyclage en agriculture, par épandage intensif et contrôlé, ou par incinération puis stockage des cendres.

Les techniques d'épuration et d'élimination des boues sont en constante évolution technique.

3132 - Les autres pollutions urbaines ...

Les agglomérations polluent aussi par les eaux pluviales, c'est-à-dire par les eaux de pluies contaminées.

Les eaux pluviales sont polluée par des matières organiques (salissures des voies, mauvais branchements), des résidus d'hydrocarbures, des particules émises par les voitures (issues de la combustion incomplète des carburants, ou de l'usure des pneus), des herbicides (entretien des espaces verts et de la voierie), des rejets intempestifs (zones artisanales et industrielles), et par toutes sortes de déchets.

Mais le traitement de ces eaux pluviales est pour l'instant rarement pratiqué.

Par ailleurs, les réseaux unitaires - qui évacuent les eaux usées mais également les eaux pluviales - reçoivent des débits gonflés par les orages. Ces débits peuvent submerger les stations d'épuration, ce qui oblige à "by-passer" la station de traitement - c'est-à-dire à rejeter directement dans le milieu récepteur.

3133 - L'épuration des rejets industriels

Les eaux rejetées par diverses industries et notamment par les industries agro-alimentaires sont souvent très comparables aux eaux usées urbaines. Elles sont chargées de matières organiques, d'azote ammoniacal, de phosphates, etc. issus des matières premières ou du process industriel lui-même. L'épuration est alors effectuée selon des techniques très voisines. Les autres industries font appel à des précédés extrêment variables, parmi lesquels les techniques membranaires sont de plus en plus utilisées.

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32 – EUTROPHISATIONS

A travers le monde entier, les lacs deviennent, dans leur grande majorité, de plus en plus eutrophes, presque toujours sous l'influence des rejets de phosphore. L'eutrophisation perturbe leur situation naturelle et gêne de nombreux usages. Au fil des décennies, la situation s'aggrave presque partout, atteignant même des régions que l'on croyait reculées et protégées. L'excès de production primaire s'étend aussi dans d'autres milieux aquatiques, principalement les grands fleuves mais aussi quelques domaines marins.

3.2.1 - Eutrophisation des lacs

* 3.2.1.1 - Niveau trophique et définition de l'eutrophie

L'intensité de la production primaire par les végétaux aquatiques, principalement les algues planctoniques, est déterminante pour l'écologie lacustre.Les "limnologues" classent, à la suite de Thinemann vers 1930, les lacs selon leur productivité et leur "climat" physico-chimique qui l'accompagne :

- oligotrophes, à faible production primaire ;

- eutrophes, à "bonne" au sens de forte production primaire ; - mésotrophes, à productivité intermédiaire ;

- dystrophes, à productivité entravée par des conditions difficiles comme l'excès d'acidité ou de matières en suspension.

Vollenweider, vers 1980, à la suite d'une étude internationale dans plusieurs centaines de lacs de l'OCDE, a complété cette distinction par les lacs hypereutrophes, à eutrophisation très excessive pour l'équilibre du milieu et pour ses usages.

L'évolution naturelle de nombreux lacs les fait passer souvent de l'oligotrophie à l'eutrophie. Cette évolution est favorisée par le piégeage des éléments fertilisants qui contrôlent leur production primaire, et par leur comblement progressif. Cette évolution n'est cependant pas générale.

En revanche, la plupart des lacs deviennent eutrophes sous l'influence aux activités humaines, ils peuvent même être hypereutrophes dès leur création.

Le terme et le concept d'eutrophisation a été étendu à d'autres écosystèmes aquatiques, en particulier les leuves et canaux, les lagunes littorales, parfois certaines étendues marines.

* 3.2.1.2 - Description d'un lac eutrophe

Le plancton, principal producteur primaire dans la biocénose lacustre, se développe plus fortement dans un lac eutrophe que dans un lac oligotrophe ou mésotrophe, et il se concentre dans des eaux plus superficielles.

A la belle saison, les algues se multiplient très activement, principalement certaines Diatomées (Algues Brunes), des Chlorophytes (Algues vertes) et surtout les Cyanobactéries (Algues bleues).

Près de la surface, les teneurs en oxygène et le pH deviennent très fluctuantes, surtout au cours du nycthémère. Les eaux deviennent sursaturées et alcalines au cours des après-midis ensoleillés, surtout si elles sont pauvres en calcium.

En profondeur, l'oxygène est consommé par la décomposition de la matière organique produite. Surtout en cas de tendance à la stratification des eaux et formation d'un

hypolimnion, le milieu y devient anoxique. Depuis le fond, où les conditions d'anaérobiose

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3.2.2 - Eutrophisation d'autres milieux dulçaquicoles

La situation des étangs s'apparente à celle des lacs. La situation y est plus variable d'un étang à l'autre (petits écosystèmes), et très fluctuante avec le temps (faible inertie). Il arrive que certains soient recouverts entièrement par des algues vertes comme Hydrodictyon.

Les grands fleuves, les canaux, et même les petites rivières lentes peuvent eux-aussi être affectés par une tendance eutrophe.

L'eutrophisation y est cependant différente car le développement des algues - du plancton surtout - est habituellement limité par le courant, par l'âge de l'eau dans les rivières (les algues se développent moins rapidement que les bactéries), par le taux élevé de matières en suspension. Souvent, lorsqu'il y a du courant, ce sont des macroalgues périphytiques telles que des Chlorophytes filamenteuses (par ex. des Cladophores) qui se développent à la belle saison et/ou en étiage. Dans certains cours d'eau, il peut y avoir aussi un recouvrement général des supports par un feutrage de diverses algues, éventuellement associées à des bactéries si l'eutrophisation accompagne ou plutôt suit une pollution organique.

Curieusement, dans certaines rivières à fond calcaire, le lit s'exhausse par précipitation des carbonates sous l'effet de l'eutrophisation.

Les taux de chlorophylle a peuvent atteindre plusieurs centaines de µg/l. Les fluctuations d'oxygène peuvent être notables avec parfois une baisse en profondeur et apparitions d'azote ammoniacal à proximité du fond - quand le débit est très lent et les eaux assez profondes. Il peut aussi y avoir quelques déficits en oxygène à la reprise des débits qui emporte les algues.

En eau douce, les phosphates sont souvent le facteur limitant, même si l'on connaît des développements d'algues vertes qui ont besoin d'azote - en général, le taux de nitrates diminue en été/étiage, parfois même s'annule en partie par l'effet de cette consommation.

La lutte contre l'eutrophisation ne peut être que préventive. Elle exige la déphosphatation des effluents ET la limitation ou la suppression des phosphates dans les lessives, sur de vastes bassins versants fluviaux, y compris dans leurs amonts épargés par l'eutrophisation.

En cas de développement d'algues vertes, on pourra compléter par la dénitrification des eaux usées et par la lutte contre les nitrates d'origine agricole.

Photos de rivières eutrophes

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Evolution du plancton en cours

d'eau eutrophes

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Zones classées sensibles en France

3.2.3 - Eutrophisation en milieux saumâtres ou marins

L'eutrophisation perturbe également divers types de milieux marins ou saumâtres, en général côtiers, et aussi, de plus en plus, des étendues marines.

L'eutrophisation des eaux saumâtres est particulièrement dangereuse car ces milieux sont fragilisée par les stratifications salines, qui augmentent le risque de désoxygénation en profondeur. En outre, dans les estuaires, la mort du plancton apporté avec les eaux douces et la floculation des matières en solution ou en pseudo-solution, peut renforcer la

désoxygénation et leurs conséquences sur les poissons. Dans le cas mortalité de poissons en baie de Vilaine (juin 1982), l'arrivée des crues à la belle saison a entraîné un apport massif d'eaux douces créant une stratification temporaire.

Les "malaïgues" (mauvaises eaux) des lagunes littorales méditerranéennes sont des crises d'eutrophisation rendues particulières par les modifications successives dans les conditions physico-chimiques et les peuplements d'algues et de bactéries du cycle du soufre. Elles se traduisent par des changements de couleurs de l'eau et par des mortalités de la faune.

Certaines mers soumises à des dessalures importantes peuvent être régulièrement

désoxygénées, avec même apparition d'hydrogène sulfuré toxique, comme cela est observé dans la mer Baltique et le golfe de Gutland. La Mer Noire apparaît comme un cas extrême, où la désoxygénation permet d'ailleurs le développement massif de bactéries du cycle du méthane.

Les "marées vertes" littorales sont des développements massifs de grandes algues, souvent des algues vertes du genre Ulva ou de genres voisins. Il en résulte notamment des

accumulations importantes d'algues en décomposition et malodorantes. Les baies à faible renouvellement hydrologique et aux estrans étendus sont plus favorables aux marées vertes. Le phosphore étant généralement assez abondant et disponible dans les sédiments de ces milieux peu profonds, le facteur limitant s'avère être l'azote, dû à l'agriculture intensive des bassins versants dans la plupart des situations.

Dans d'autres situations, l'eutrophisation se manifeste par des "eaux colorées", équivalent marin des "blooms" ou "fleurs d'eau", particulièrement nombreuses et intenses. Les désoxygénations qui en résultent peuvent entraîner des mortalités de poissons et

d'invertébrés. De vastes zones de la Mer du Nord par exemple, ou du golfe du Mexique en face du Mississipi, sont régulièrement atteintes. Le facteur limitant peut-être l'azote et/ou le phosphore. Les facteurs limitants de la productivité marine peuvent évoluer avec la saison ou selon les lieux, notamment pour le phosphore, l'azote, la silice, le fer, etc.

L'eutrophisation n'affecte pas (encore) les vastes étendues océaniques. La productivité primaire y est plus faible et développée dans une épaisseur d'eau considérable. Elle est généralement limitée par le phosphore, "point faible" fondamental de la productivité marine, mais aussi par le fer, qui est un élément limitant de l'azotofixation - laquelle permet aux algues (cyanobactéries) d'utiliser l'azote atmosphérique dissous en mer.

La lutte contre l'eutrophisation exige une connaissance suffisante des facteurs limitants ou que l'on peut rendre limitants.

Dans le document ECOLOGIE FONDAMENTALEEAU ET MILIEUX HUMIDES (Page 46-52)

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