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2.1. Généralités sur les polluants primaires et secondaires

2.1.3. Les polluants secondaires

2.1.3.1. L’ozone troposphérique

La distribution spatiale et temporelle de l’ozone troposphérique dépend de processus dynamiques, chimiques et photochimiques. La chimie de l’O 3 dans les basses couches de l’atmosphère est soumise

à des lois d’évolution non linéaire, dépendant de l’intensité des émissions d’oxydes d’azote et de COV et de leur distribution temporelle et spatiale. Il semble donc important de connaître les échelles spatiales caractéristiques de ces processus, de l’échelle locale, puis régionale à l’échelle planétaire.

2.1.3.1.1. Formation de l’ozone

A l’échelle de la troposphère, les concentrations d’ozone ont augmenté principalement dans l’hémisphère Nord, tandis que la couche d’ozone stratosphérique diminue.

Les concentrations troposphériques d’ozone au sein de l’hémisphère Nord sont supérieures à celles de l’hémisphère Sud du fait d’une plus forte production photochimique résultant de fortes émissions de NOx et d’intrusions d’air stratosphérique plus fréquente. La production d’ozone dans l’hémisphère sud

est régie par les feux de biomasse, sources principales d’hydrocarbures non méthaniques et d’oxydes d’azote. Les concentrations d’ozone au sol décrivent une variation journalière dépendante de la dynamique de la couche limite ainsi que de la production photochimique. En présence de rayonnement solaire, les catalyseurs majeurs de l’ozone sont les oxydes d’azote suivant le mécanisme décrit en équation (1). Une fois formée, l’ozone réagit rapidement avec NO afin de régénérer NO2. Un état

stationnaire s’établit donc entre NO, NO2 et O3. Une production nette d’ozone ne se fait donc que si

des réactions ne consommant pas d’ozone permettent de régénérer NO en NO2 :

NO + HO2•→ NO2 + OH• (32)

NO + CH3O2•→ NO2 + CH3O• (33)

Elles sont cependant concurrencées par des réactions de HO2• et CH3O2• avec l’ozone. Les vitesses de

réactions de (32) et (33) doivent être supérieures aux vitesses des réactions suivantes :

HO2• + O3→ OH• + 2O2 (34)

CH3O2• + O3→ CH3O• + 2O2 (35)

Cela est vérifié lorsque le rapport massique NO/O3 est supérieure à 2*10 -4

. Les radicaux HO2• et

CH3O2•, nécessaires à la production d’ozone, sont les produits des réactions d’oxydation des COV, du

monoxyde de carbone CO (36) et du méthane CH4 (37) par le radical OH•, issu de la réaction de la

vapeur d’eau avec l’état excité de l’oxygène atomique, résultat de la photolyse de l’ozone (290 nm < UV < 310 nm). CO + OH•→ CO2 + H• (36) H• + O2 + M → HO2• + M CH4 + OH•→ CH3• + H2O (37) CH3• + O2 + M → CH3O2• + M

Ces réactions d’oxydation sont du même type pour les hydrocarbures non méthaniques. Les COV donnent, après oxydation, des radicaux peroxyde (RO2•).

RO2• + NO → RO• + NO2 (38)

Lorsque les oxydes d’azote sont en quantité suffisante, les réactions (36), (37) et (38) contribuent à l’oxydation de NO en NO2 sans consommation d’ozone.

L’oxydation des COV, du CO et du CH4 conduit donc à une production d’ozone. Les équations bilan

sont données ci-après (39) et (40). Les mécanismes d’oxydation des COV non méthaniques (RH) sont plus complexes et nous ne donnerons là que l’équation bilan (41).

CO + 4O2 + hν→ CO2 + O3 (39)

CH4 + 4O2 + hν → CH2O + H2O + 2O3 (40)

RH + nO2→ R’CHO + H2O + mO3 (41)

où m peut varier de 2 à 14 selon la nature de l’hydrocarbure et R’CHO un composé carbonylé.

Les réactions des hydrocarbures avec OH• sont relativement rapides (quelques heures - surtout les insaturés) en comparaison avec celles du CO et du CH4. Les temps de résidence de ces composés dans

la troposphère sont donc différents. Les échelles de formation de l’ozone ne sont donc pas les mêmes. Les sources d’émission de NMHC telles que les combustions ou les évaporations permettent donc une production rapide d’ozone à l’échelle locale ou régionale. Les zones de formation d’ozone sont donc à échelle locale ou régionale. Les réactions d’oxydation du CO, du CH4 et de certains COV sont plus

lentes et permettent une formation plus tardive d’ozone, ce qui permet une formation d’ozone à plus grande échelle spatiale (échelle synoptique).

2.1.3.1.2. Echanges stratosphère-troposphère

Les processus d’échanges entre la stratosphère et la troposphère se font essentiellement à la frontière des masses d’air polaires et celles plus chaudes des basses latitudes. Le courant jet est le principal facteur responsable de ces échanges selon deux processus :

▫ Les foliations de tropopause sont des ruptures de tropopause survenant fréquemment au

printemps dans l’hémisphère Nord. Elles sont le résultat d’une accélération brutale des vents au sein du courant jet, qui génère alors une aspiration d’air stratosphérique vers la troposphère. Une masse d’air stratosphérique chargée en ozone est donc injectée au sein de la troposphère.

▫ Les gouttes froides se forment lorsque les ondulations du courant jet se referment sur elles-

mêmes. Le phénomène prend donc la forme d’une goutte. Le courant jet étant établi à haute latitude dans l’hémisphère Nord, la goutte emporte avec elle, vers les plus basses latitudes, une masse d’air froid stratosphérique chargée en ozone.

Ces processus initiés à échelle synoptique amènent au sol, « ponctuellement », de fortes concentrations d’ozone ; ces dernières sont fréquemment observées à méso-échelle ou à échelle régionale. Cette source d’ozone stratosphérique représenterait en valeur moyenne 20 % des sources totales d’ozone dans la troposphère (Marenco, 1986).

2.1.3.1.3. Les puits d’ozone

2.1.3.1.3.1. Les processus chimiques

Le processus chimique de destruction le plus important se fait par réaction avec les NOx : le jour, NO2

et NO3 sont facilement dissociés dans le visible et permettent de former de l’ozone. Cependant, en

ville lorsque les concentrations en NO sont très fortes, c’est la réaction (1) qui est prépondérante, ce qui inhibe la production photochimique d’ozone. Pendant la nuit, l’ozone est détruit par réaction avec les NOx (42) (prés des sources) et (43).

O3 + NO → NO2 + O2 (42)

O3 + NO2→ NO3 + O2 (43)

Un autre processus chimique de destruction est la contrepartie du processus de formation ; en effet si les teneurs en NOx ne sont pas suffisantes (< 0,03-0,06 µg.m

-3

), les radicaux peroxydes, issus des chaînes d’oxydation du CO et du CH4, et ceux issus des chaînes d’oxydation des COV (46) conduisent

à une perte d’ozone (44) et (45). De façon directe :

HO2• + O3→ OH• + 2O2 (44)

ou indirecte sans régénération de NO2 :

HO2• + HO2•→ H2O2 + O2

(45) HO2• + CH3O2•→ CH3O2H + O2

RO2•+ HO2• → ROOH + O2

(46) R’O2• + R’’O2•→ R’O + R’’O + O2

L’ozone peut aussi être détruit par réaction avec le radical OH• (47) pendant la journée, puisque les HOx ne doivent leur existence qu’à l’ensoleillement.

O3 + OH •→ HO2 + O2 (47)

2.1.3.1.3.2. Le processus de dépôt sec

En milieu rural, le dépôt sec est le puits dominant ; en milieu urbain, son importance est moindre par rapport aux processus de destruction chimique mais elle n’est pas négligeable. Le dépôt est quasi nul au-dessus de l’océan (Affre et al., 1997). Les valeurs de vitesse de dépôt varient selon les conditions locales et peuvent être comprises entre 0,002 cm/s et 2,0 cm/s. Les valeurs moyennes usuelles sont de l’ordre de 0,3 à 0,5 cm/s.

Il existe deux voies de disparition de l’ozone :

▫ Par décomposition thermodynamique catalysée par les surfaces, deux molécules d’ozone

donnent trois molécules d’oxygène.

▫ A la surface des végétaux, l’ozone est captée au niveau des stomates surtout pendant le

jour, lorsque l’activité stomatique est importante.

2.1.3.1.3.3. Le processus de photolyse

L’absorption d’ultraviolets (290 nm < λ < 350 nm) conduit à la photodissociation de l’ozone en une molécule d’oxygène et un atome d’oxygène dans l’état fondamental (O(3P) si λ > 310 nm) ou excité (O(1D) si λ < 310 nm). L’ozone détruit par des rayonnements de longueur d’onde supérieur à 310 nm est reformé immédiatement par recombinaison selon l’équation (48).

O(3P) + O2 + M → O3 + M (48)

En ce qui concerne l’atome O(1D), il réagit avec la vapeur d’eau pour donner deux radicaux OH•. Comme on l’a vu précédemment, ils permettront de reformer de l’ozone dans les chaînes d’oxydation du CO, CH4 et COV en fonction de la teneur en NOx. La photolyse est un processus de moindre

importance par rapport aux processus chimiques, en ce qui concerne l’hémisphère Nord.

2.1.3.2. Formation des aérosols secondaires

Les aérosols atmosphériques sont de fines particules liquides ou solides en suspension dans l’air. Ces particules ont deux origines. La première résulte d’un processus mécanique, par action du vent sur les surfaces continentales et océaniques (Chapitre I-2.1.2.5.). La seconde source est physico-chimique et est associée aux processus de conversion gaz/particule par nucléation et/ou condensation. Ce processus est à l’origine du mode fin des aérosols (D < 1µm). Il conduit à des aérosols primaires et/ou secondaires, selon que la conversion gaz/particule est réalisée avant l’émission dans l’atmosphère ou indirectement dans l’atmosphère. Prenons le cas du SO2 pour montrer ces divers processus.

La transformation de ce polluant primaire qu’est SO2 en un petit aérosol liquide peut se dérouler selon

plusieurs scénarii dépendant des conditions atmosphériques : humidité relative, ensoleillement, présence ou non de particules de condensation. Parmi les différentes possibilités (Figure I-2.10), nous pouvons faire une distinction entre les réactions d’oxydation faisant intervenir des processus hétérogènes (supposant l’existence préalable d’une particule solide ou liquide) et celles se produisant dans la phase vapeur de façon homogène et conduisant à la formation d’acide sulfurique à l’état de vapeur (Jaecker et Mirabel, 1986) :

1. Le premier processus fait intervenir une phase liquide sous forme de gouttes (nuages, pluies, brouillard, …). Le SO2 est absorbé par la gouttelette et oxydé dans la phase aqueuse sous l’action de

corps dissous tels que O2, NOx et H2O2. La distribution en taille de ces aérosols liquides influence

fortement l’oxydation de SO2, la présence ou non de sels minéraux dissous, ainsi que le pH jouent, eux

aussi, des rôles déterminants. Parmi toutes les réactions d’oxydation étudiées, celle faisant intervenir H2O2 semble être prépondérante, surtout pour de faibles valeurs de pH. En fin de compte, nous

obtenons des gouttelettes acides, qui par précipitation, ou lors d’épisodes de brouillard vont se déposer sur les sols et les végétaux.

H2O vapeur + polluants SO2, O3,

NOx, etc… Adsorption sur des surfaces Radicaux OH•, HO2•, CH3O2• Aérosols atmosphériques solides Adsorption sur des gouttes Aérosols liquides nuages, brouillard Aérosols acides Aérosols acides Aérosols acides Déposition oxydation H2O2, O3 oxydation croissance nucléation croissance nucléation coagulation coagulation hétéromoléculaire Nuclei liquides Noyaux de condensation acides Mn, Fe2O3 SO3, H2SO4 H2SO4(H2O)n SO4 2- adsorbé homomoléculaire

Figure I-2.10 : Différents processus conduisant à la formation d’aérosols acides

2. L’oxydation à la surface de particules solides insolubles a été beaucoup moins étudiée. Nous pouvons résumer les réactions de la façon suivante :

SO2 + particules solides → SO2(absorbé)

SO2(ads) + OH•(ads) → HOSO2(ads) (49)

HOSO2(ads) + OH•(ads) → (HO)2SO2(ads)

(HO)2SO2(ads) → SO4 2-

+ 2 H+(ads)

Le taux de conversion de SO2 en H2SO4 serait très important, quoique limité par la capacité totale

d’adsorption des surfaces disponibles. C’est pourquoi, ce processus ne jouerait qu’un rôle secondaire.

3. Le troisième scénario consiste en une oxydation de SO2 en phase gazeuse, se produisant

photochimiquement, en présence d’oxygène ou de radicaux du type O•, RO2 • , CHO2 • , OH•, HOSO2 • ,… Il semble que les réactions avec HO2

et surtout OH• soient les plus efficaces et conduisent à des taux de transformation de SO2 en H2SO4 de l’ordre de 0,5 à 2-3%.h

-1

. L’acide sulfurique ainsi formé, pourra induire, en présence de vapeur d’eau, la formation de germes liquides par nucléation hétéromoléculaire.

Parmi les deux processus de formation d’acide sulfurique étudiés, nucléation hétéromoléculaire homogène et nucléation hétéromoléculaire hétérogène, seul le premier permet de produire un aérosol acide stable (Jaecker et Mirabel, 1986). La nucléation hétéromoléculaire homogène conduit, dans tous les épisodes de pollution et sous toutes les conditions météorologiques, à la formation d’aérosols submicroniques, particulièrement riches en acide sulfurique, jusqu’à 75% en poids dans la stratosphère (Jaecker et Mirabel, 1986).

Des aérosols peuvent aussi se former à la suite d’une réaction entre deux espèces chimiques qui produit un composé ayant une très faible pression de vapeur. C’est le cas des sels de sulfate et nitrate d’ammonium issus des réactions de neutralisation des acides nitrique et sulfurique par le gaz ammoniac (Equations 50, 51 et 52).

NH3 + HNO3↔ NH4NO3 (50)

NH3 + H2SO4 ↔ NH4HSO4 (51)

2 NH3 + H2SO4 ↔ (NH4)2SO4 (52)

Il existe des systèmes plus complexes. En réalité, le système se complexifie très fortement en présence d’autres espèces organiques ou inorganiques. En atmosphère marine, par exemple, NaCl(s) et MgCl(s) réagissent facilement avec HNO3(aq) et H2SO4(aq) conduisant à une perte de Cl sous forme de

HCl(g) :

H2SO4(aq) + 2 NaCl → Na2SO4 + 2 HCl(g) (53)

HNO3(aq) + NaCl → NaNO3 + HCl(g) (54)

Si les réactions sont bien connues, elles ont récemment été mises en évidence par l’analyse individuelle de particules marines et terrigènes (Laskin et al., 2005), avant et après exposition à de l’acide sulfurique ou nitrique gazeux (Krueger et al., 2004).

De nombreux facteurs peuvent influencer la formation des espèces ioniques secondaires :

1. Les concentrations en oxydants gazeux et dissous, 2. La solubilité de l’oxydant dans l’eau,

3. Le pH de la solution,

4. La force ionique de la solution,

6. La température, facteur très important dans la formation des particules. Par exemple, à pH = 7, le transfert de HNO3 de la phase gazeuse à la phase aqueuse est 3,8 fois plus efficace à - 5°C qu’à

+25°C. A température élevée les composés ont tendance à se volatiliser (à Patm),

7. L’humidité relative. Elle influe sur l’équilibre des espèces ioniques entre la phase aqueuse et la phase particulaire. L’humidité relative pour laquelle l’aérosol solide absorbe spontanément de l’eau pour devenir liquide se traduit par la notion de point de déliquescence. Par exemple, le point de déliquescence à 25°C et à Patm de NH4NO3 est de 61,8%, 79,9% pour (NH4)2SO4 et 80,0% pour

NH4Cl.