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3. L’AVIATION CIVILE AU CANADA

3.4 Politiques nationales visant à réduire les émissions de GES

Au Canada, selon le partage des compétences, l’aviation relève de la juridiction fédérale. Contrairement aux autres types de transport, les vols intraprovinciaux sont également soumis à la législation fédérale par le biais de Transport Canada. (Gouvernement du Québec, 2002) Certaines règlementations provinciales peuvent néanmoins s’appliquer, notamment concernant les taxes sur le carburant. L’aviation civile est règlementée par la Loi sur l’aéronautique et plus particulièrement par le Règlement de l’aviation canadien. Toutefois, on n’y retrouve aucune mention des émissions de GES. (Chalifour et Besco, 2018) Le CO2

n’est pas une émission régulée dans le secteur aérien au Canada, mais il le devient indirectement puisque le pays doit se conformer aux requis de l’OACI qui, à cet effet, a récemment adopté la nouvelle norme relative au CO2. C’est surtout grâce au Cadre pancanadien sur la croissance propre et les

changements climatiques (CPC) et à la norme sur les combustibles propres (NCP) que le Canada mise pour réduire ses émissions des GES.

3.4.1 Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques

En décembre 2016, le CPC a été adopté par le premier ministre canadien ainsi que par ses homologues provinciaux. Il se décline selon quatre piliers : la tarification de la pollution, des mesures complémentaires pour réduire les émissions du secteur économique, l’adaptation et la résilience aux changements climatiques et l’innovation des technologies propres et la création d’emplois. Arrimé aux objectifs de l’Accord de Paris, il vise une réduction des émissions de 30 % d’ici 2030 par rapport au niveau de 2005. (ECCC, 2018a) L’élément central représente la tarification progressive des émissions de GES selon le principe du pollueur-payeur. Le Canada propose un modèle pancanadien, communément appelé le « standard fédéral », de sorte que la tarification du carbone soit appliquée partout à travers le pays. Cette approche se veut flexible et c’est pourquoi le gouvernement accepte que les provinces développent leur propre système de tarification de la pollution. En l’occurrence, s’il n’existe aucun système de tarification dans une province, alors le « standard fédéral » devra s’appliquer. Ce sera d’ailleurs le cas pour l’Ontario, le Manitoba, la Saskatchewan, le Nouveau-Brunswick et l’Alberta. (ECCC, 2018a; Forrest, 2019, 30 juillet)

Plusieurs secteurs sont couverts par le CPC. D’une part, les secteurs de l’habitation et des transports. À titre d’exemples, on y mentionne les efforts afin de produire de l’électricité à partir de sources non émettrices, la modernisation des bâtiments afin d’améliorer l’efficacité énergétique, l’adoption de nouvelles normes pour les véhicules utilitaires légers, des investissements dans les transports en commun et les bornes de recharge pour véhicules électriques. D’autre part, les secteurs de l’industrie, l’exploitation forestière, l’agriculture et des déchets sont également discutés dans le CPC. Le transport aérien, inclus dans le secteur des transports, est évoqué quelques fois. On y mentionne brièvement le Plan d’action du Canada en matière de réduction de GES dans le domaine de l’aviation, la conformité du pays au programme CORSIA et la recherche et le développement de carburants alternatifs, mais est-ce suffisant? Le secteur de l’aviation devrait-il occuper une plus grande place dans le CPC?

3.4.2 Norme sur les combustibles propres

Annoncée en 2016, la NCP s’insère dans le CPC de façon complémentaire à la tarification de la pollution pour réduire les émissions de GES. Elle vise à promouvoir l’utilisation de combustibles à faible teneur en carbone et les sources d’énergie alternatives telles que l’électricité, l’hydrogène ou le gaz naturel renouvelable. Celle-ci s’appliquera aux carburants solides, liquides et gazeux. La norme est adoptée dans l’objectif global de diminuer les émissions de 30 Mt d’ici 2030, en ligne avec les cibles de l’Accord de Paris. Le règlement est attendu pour 2020 et son entrée en vigueur prévue pour 2022. (ECCC, 2019a)

Cette approche réglementaire s’appuie sur des exigences annuelles de réduction et de limites d’intensité carbonique, exprimées toutes deux en grammes d’équivalent CO2 par mégajoule (g d’éq. CO2/MJ). Les

réductions annuelles tiendront compte des émissions de GES générées sur tout le cycle de vie du carburant. Elles s’appliqueront à tous les combustibles alors que les limites d’intensité seront spécifiques à chaque carburant liquide, tel que montré au tableau 3.1. (ECCC, 2019a)

Tableau 3.1 : Exigences de réduction et limites annuelles d'intensité en carbone (tiré de : ECCC, 2019a)

À partir de 2022, ces limites annuelles obligeront les raffineurs et importateurs d’essence à diminuer leur intensité carbonique. (Boag, 2019) Ces réductions et limites d’intensité se feront de plus en plus strictes avec les années et devraient permettre une réduction d’environ 11 % d’ici 2030 par rapport à 2005. Ces exigences de réduction sont prévues de plafonner à 10 g d’éq. CO2/MJ à partir de 2030. (ECCC, 2019a)

Essentiellement, il s’agit d’un MBM fondé sur le même principe que le programme CORSIA. Les fournisseurs de combustibles fossiles produiront des quantités excédentaires annuelles d’équivalent carbone selon une quantité d’énergie (MJ). Ces excédents correspondent à leur obligation de conformité en intensité carbonique. Chaque excédent d’équivalent carbone correspond à une tonne équivalente de CO2 qui devra ainsi être compensée par l’achat d’un crédit. Les parties non assujetties à la NCP pourront

participer de manière à générer des crédits volontaires. (ECCC, 2017b; ECCC, 2018b) Par cette approche réglementaire, le Canada est le premier pays à réguler l’intensité carbonique des combustibles fossiles. (Boag, 2019)

La norme s’appliquera à « quiconque produit, importe et, dans certains cas, distribue des combustibles fossiles au Canada ». En revanche, la NCP ne sera pas applicable au carburant utilisé pour les vols internationaux. (ECCC, 2017b; ECCC, 2018b) L’applicabilité aux vols domestiques, quant à elle, semble nébuleuse pour le moment. La publication du règlement en 2020 devrait clarifier cette information.

4. CIBLES ENVIRONNEMENTALES EN MATIÈRE DE RÉDUCTION DE GES DANS LE DOMAINE