• Aucun résultat trouvé

Cette étude de cas montre clairement qu’il est indispensable d’intégrer les organisations communautaires au sein du secteur privé pour assurer leur rentabilité et leur survie. La Nacobta a besoin du secteur privé : elle doit pouvoir utiliser ses infrastructures et mobiliser des investissements pour ses initiatives. Il lui faut donc acquérir les compétences nécessaires pour traiter avec le secteur privé, en gérant l’organisation comme une entreprise professionnelle. Les politiques publiques influent sur le succès de toute organisation de producteurs et sur ses relations avec les marchés et le secteur privé. Il importe donc de mener une action auprès des gouvernements afin d’encourager et de faciliter la mise en œuvre de politiques nationales permettant aux groupes ruraux d’avoir un meilleur accès aux marchés et aux produits.

L’importance des apports financiers de ce projet a permis de combiner des objectifs de développement avec le renforcement du secteur du tourisme. C’est là un aspect essentiel si l’on considère que les investissements dans le capital humain bénéficieront au pays sur le long terme, même s'ils ne produisent que peu de résultats à court terme.

Cependant, les leçons les plus significatives de cette expérience sont les suivantes.

Dans un secteur d’activité non agricole comme le tourisme, beaucoup de pauvres tentent de créer de petites entreprises, mais sont défavorisés par la faiblesse de leurs moyens. Cette expérience montre avant tout qu’une organisation de producteurs est un moyen très efficace pour regrouper les entreprises de cette catégorie sociale.

Sans cette organisation, les fonctions de groupe de pression qu’elle a assumées auraient été inexistantes. Les Etc n’auraient pas eu de représentant pour exprimer leurs revendications, et elles n’auraient pas eu accès à des formations, des appuis techniques et des financements.

Du fait qu’elle opère au niveau interassociatif, cette organisation est en mesure de combiner deux fonctions essentielles : apporter un appui technique direct à ses membres et représenter leurs intérêts vis-à-vis des pouvoirs publics et du secteur privé.

En appliquant une stratégie flexible mais ciblée pour les conditions d'adhésion, l’organisation de producteurs veille à ce que les bénéfices de son action ne soient pas détournés au profit de groupes plus favorisés.

Une action directe peut engendrer des résultats positifs de manière indirecte. Ainsi, l’action menée auprès du gouvernement a conduit progressivement celui-ci à reconnaître les Etc comme un groupe actif. Il convient de tenir compte de ces résultats indirects dans le cadre du suivi et de l’évaluation.

Il s’est révélé que l’organisation avait besoin d’acquérir des compétences pour travailler avec des intervenants très divers – les pauvres, le secteur privé et les décideurs. Cela implique qu’il faut

suivre non seulement l’impact des actions, mais aussi le développement institutionnel du comité de direction.

Les Etc ont pu établir des relations avec le secteur privé d’autant plus facilement que la Nacobta servait de point de contact central. Toutefois, pour que ce type de partenariat offre un intérêt, il doit apporter des avantages aux deux parties.

Le renforcement d’une institution peut être lent et exiger au départ beaucoup de ressources financières et autres. Les bénéfices se manifesteront et se multiplieront avec le temps. Il s’agit parfois d’un processus long et coûteux. Les bailleurs de fonds doivent en tenir compte dans leurs politiques d’évaluation.

E

TUDE DE CAS N

° 13 :

ASSOCIATIONS DE PRODUCTRICES DE SESAME

– N

ATIONAL

A

SSOCIATION OF

W

OMEN

F

ARMERS

(

NAWFA

), G

AMBIE

Localisation : Gambie (toutes les divisions).

Echelle d’intervention : environ 48 000 adhérentes dans l’ensemble du pays.

Bénéficiaires : principalement les femmes membres des associations de productrices de sésame et, indirectement, leurs familles. Les hommes peuvent eux aussi bénéficier des services de vulgarisation et d’un meilleur accès aux intrants et variétés nouvelles.

Objectifs spécifiques : accroître la production de sésame, favoriser la maîtrise des interventions et responsabiliser les femmes grâce au renforcement de leurs organisations.

Activités du projet : apporter un appui financier et technique, assurer une formation et mettre en place des activités de développement humain débouchant sur la génération de revenus extra-agricoles.

Bailleur de fonds : Crs/Gambie (avec des subventions de l’Usaid).

Budget : en moyenne, entre 140 000 et 150 000 dollars par an de 1988 à 1990. Subventions Usaid Title II : 280 000 dollars par an à partir de 1991 ; 800 000 dollars en 1999-2000. Total : plus de 3 millions de dollars sur une période de 12 ans.

Contexte

Catholic Relief Services (Crs) est une Ong internationale qui intervient en Gambie depuis 1964.

Le Crs/Gambie a pour mission de réduire l’insécurité alimentaire et d’améliorer la nutrition des agricultrices et des enfants qui constituent son principal groupe cible. Actuellement, il s’attache avant tout à renforcer les capacités des agricultrices. Ce processus de responsabilisation des femmes gambiennes se déroule parallèlement à d’autres initiatives comme le « programme femmes dans le développement » mis en œuvre à l’échelon national de 1993 à 1998 avec l’appui de la Banque mondiale.

Historique du projet

Le Crs-Gm mène une action depuis les années 80 pour développer la culture du sésame. Il s’agit ainsi de diversifier la production agricole de la Gambie afin de contribuer directement à la sécurité alimentaire des ménages. Au départ, les villageois cultivaient le sésame principalement pour en extraire de l’huile et pour leur consommation. Mais jusqu’à récemment, le volume de production restait faible.

A la fin des années 80, il est apparu que les capacités de production ne suffisaient plus à répondre à la demande et qu’il fallait amener les producteurs à prendre en charge le développement de cette culture. En 1989, à l’initiative du Crs/Gambie, les premières associations de productrices de sésame (Aps) ont officiellement vu le jour. Ce sont des organisations

regroupant des agricultrices autour d’une même production : le sésame. Composées de représentantes de groupements villageois, elles ont pour objectif d’augmenter les niveaux de production, de favoriser la maîtrise des interventions et de responsabiliser les femmes grâce au renforcement de leurs organisations. Les Aps ont été aussi créées dans l’idée de faciliter l’accès d’un plus grand nombre de producteurs aux services d’encadrement, aux intrants et aux débouchés. En outre, elles ont permis au Crs-Gm de travailler avec les représentantes des Opr plutôt que directement auprès des populations rurales – ce qui exige moins de présence sur le terrain.

Les Aps se sont récemment fédérées sous l’égide de la National Association of Women Farmers (Nawfa).

Aide des bailleurs de fonds

Le partenariat entre le Crs-Gm et la Nawfa repose sur les principes suivants, établis en 1999. • Les fonds sont décaissés sur présentation par la Nawfa d’un état récapitulatif des dépenses du projet. Le Crs-Gm peut suspendre les décaissements si la Nawfa ne fournit pas de justifications satisfaisantes.

• La responsabilité vers le haut conditionne le budget – la Nawfa doit fournir des rapports mensuels, trimestriels et annuels conformes aux directives de l’Usaid.

• Le suivi, l’évaluation et les bilans périodiques sont contrôlés par le Crs.

• Le Crs-Gm poursuivra son appui financier et technique pendant la période convenue.

• La Nawfa assume la responsabilité financière et opérationnelle de l’encadrement des productrices de sésame. Elle est aussi chargée de recruter et de superviser le personnel du projet.

• La Nawfa doit établir un budget, un plan stratégique, des programmes d’activités et des procédures internes.

Bénéficiaires du projet

La décision initiale de promouvoir la culture du sésame en Gambie est venue du Crs-Gm , qui a formalisé et structuré les groupements de productrices. Tout en s’appuyant sur l’organisation traditionnelle des femmes par groupes d’âge au niveau des villages, les associations de productrices de sésame ont été constituées autour des presses à huile de sésame fournies antérieurement par le Crs-Gm. Chaque association réunit ainsi plusieurs groupements villageois. En principe, l’adhésion est ouverte à toutes les femmes. Mais dans la pratique, il arrive que certaines ne puissent en bénéficier ; par exemple, des membres de minorités ethniques s’associent pour contribuer à la production de sésame de leur village, mais se plaignent de ne pas recevoir les avantages espérés de l'association et de ne pas être considérées comme des adhérentes à part entière.

Si les adhérentes semblent, en général, bénéficier de manière assez égale de leur appartenance aux associations de productrices de sésame, les villages éloignés tendent avoir moins facilement accès aux avantages que ceux situés à proximité d’une route ou près de l’endroit où sont basées les dirigeantes des Aps. En outre, toutes les adhérentes ne peuvent avoir accès aux classes d’alphabétisation et de comptabilité, celles-ci étant introduites progressivement et souvent éloignées des villages. Il arrive aussi que les plus pauvres reçoivent moins d’avantages : premièrement, parce qu’elles ne sont pas toujours en mesure de payer leur cotisation et, deuxièmement, parce qu’elles ne disposent pas des ressources productives et des fonds nécessaires pour réaliser des investissements.

Le Crs-Gm cible son assistance sur les agricultrices et les enfants – les plus vulnérables à l’insécurité alimentaire. Etant donné que seules les femmes peuvent officiellement devenir

membres des Aps, cette initiative privilégie délibérément la partie féminine de la population. Toutefois, rien n’empêche les hommes de bénéficier des services de vulgarisation au niveau des villages, et ils sont fréquemment présents aux réunions ou consultés par les groupements féminins lorsqu’il s’agit de prendre des décisions. En revanche, leur degré de participation au niveau des Aps est moins évident.

Cependant, la division du travail entre les sexes et le contrôle des moyens de production nécessaires pour la culture du sésame demeurent problématiques, et les hommes conservent la plupart du temps le pouvoir de décision au sein des ménages et des groupements villageois. Les femmes connaissent toujours des difficultés pour l'accès au matériel agricole car, dans l’agriculture gambienne, ce sont normalement les hommes qui sont propriétaires de ce matériel, en régissent l’utilisation et contrôlent l’accès à la terre. La Nawfa s’efforce de trouver des solutions appropriées à ce problème.