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ARTICLE 3 : Contenu national de la télévision canadienne : mécanisme de

3.1 Le système de radiodiffusion au Canada

3.1.1 La politique de quotas

Au Canada, la Loi sur la radiodiffusion72 énonce les objectifs de la politique canadienne relative au système de radiodiffusion. Le CRTC (anciennement dénommé Bureau des gouverneurs de la radiodiffusion (BGR)) réglemente et surveille le système canadien de radiodiffusion pour s'assurer de l’application de la loi et de l’atteinte de ses objectifs.

C'est en 1959 que le BGR a adopté les premiers règlements en matière de contenu canadien, soit lorsque les premières stations de télévision indépendantes privées ont obtenu l'autorisation de diffuser dans les grands centres au Canada. Ces règlements visaient à s'assurer qu'un pourcentage minimum d’heures de diffusion soit consacré à des émissions canadiennes. Avant cette date, toutes les stations privées de télévision étaient affiliées au réseau de langue anglaise ou française de la Société Radio-Canada (SRC) et, en tant qu'affiliées, étaient tenues de diffuser les émissions de la SRC, assurant ainsi un certain pourcentage de contenu canadien73.

Le qualificatif « émission canadienne » s’obtient généralement à l’issue d’un processus de certification. En général, le CRTC certifie une émission ou une série canadienne qui répond aux critères suivants74 :

– le producteur doit être canadien et être responsable de la surveillance et de la prise de décisions concernant l'émission;

– la production obtient un minimum de points selon les fonctions créatives clés remplies par des Canadiens;

– un pourcentage minimal des dépenses liées à l'émission concerne des services fournis par des Canadiens ou des entreprises canadiennes.

72 Voir http://laws-lois.justice.gc.ca/PDF/B-9.01.pdf , archivé à https://perma.cc/2UCP-LXCP 73 Canadian Heritage, 2002, Canadian Content in the 21st Century.

(http://publications.gc.ca/collections/Collection/CH44-29-2002E.pdf, archivé à https://perma.cc/UK74-62KS),

consulté le 20 avril 2013

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L'essentiel de la politique de contenu canadien n'a pas énormément changé depuis cinquante ans. Encore aujourd’hui, elle repose sur le paradigme de l'identité culturelle75. Ses fondements ont même été solidifiés dans les textes créant le CRTC en 1976. En effet, selon la Loi,

Les attitudes des Canadiens, leurs opinions, leurs idées, leurs valeurs et leurs talents artistiques sont le fruit de l'histoire de ce pays, de sa situation géographique, de ses institutions et de sa diversité linguistique et culturelle. Cette expérience partagée constitue l'identité canadienne.

L'article 3.1 (d) (ii) de la Loi sur la radiodiffusion reconnaît cet état de fait et stipule que le système canadien de radiodiffusion doit favoriser l'épanouissement de l'expression canadienne de la manière suivante76 :

i. en proposant une très large programmation qui traduit des attitudes, des opinions, des idées, des valeurs et une créativité artistique canadienne;

ii. en faisant appel à des artistes canadiens dans les émissions de divertissement; iii. en fournissant de l'information et de l'analyse concernant le Canada et l'étranger

considérés d'un point de vue canadien.

Sur un plan pratique, la mise en œuvre de cette loi a consisté au fil du temps à l'imposition de règles strictes quant à la structure des coûts de production des télédiffuseurs et en une limitation du volume d'émissions étrangères que ces derniers peuvent diffuser chaque jour (et donc une restriction aux importations)77.

S'agissant de la structure des coûts, les services canadiens de télévision doivent investir une part importante de leur revenu brut dans l'achat d'émissions canadiennes réalisées par des producteurs indépendants ou à la production canadienne interne (production faite par les télédiffuseurs eux- mêmes). Cette proportion a souvent varié dans le temps et d'une entreprise à l'autre. C'est une condition coercitive de licence, c'est-à-dire que l'entreprise qui ne s'y conforme pas risque de voir

75 Machet E. et S. Robillard, 1998, Télévision et culture: politiques et règlementation en Europe, Dusseldorf, Institut européen de la communication.

76 Voir http://www.crtc.gc.ca/eng/cancon/mandate.htm, archivé à https://perma.cc/LDS5-MACC

77 Pour une étude intéressante sur les politiques canadiennes de l'audio-visuel et de la culture en général en lien avec le commerce international, voir Ivan Bernier, « Politiques culturelles et commerce international », dans Variations

sur l’influence culturelle américaine, sous la direction de Florian Sauvageau, Presses de l’Université Laval, Ste-Foy,

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sa licence révoquée. Les obligations de licence du CRTC fixent habituellement la proportion dans l'intervalle allant de 30% à 45% du revenu brut total de la chaîne de télévision.

En retour, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux mettent en place une batterie d’outils de financement public de la production sur lesquels les télédiffuseurs s’appuient. Par ailleurs, les câblodistributeurs sont tenus non seulement de financer une partie de cette production, mais aussi d’inclure obligatoirement et gratuitement des chaînes de télévision et de radio dans les bouquets offerts aux clients. Le coût étant ultimement transféré aux clients par les frais plus élevés d’abonnement aux services audio-visuels.

En outre, le système de licences, étroitement encadré par le CRTC, offre aux entreprises audio- visuelles une protection légale contre la concurrence d’entreprises désireuses de rentrer sur le marché. Cette situation peut protéger des entreprises inefficaces contre des entreprises plus compétitives provenant de marchés plus concurrentiels, des États-Unis notamment. Ce qui peut avoir un impact négatif sur la qualité des produits proposés aux consommateurs.