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2- Les points de vue de la planification urbaine : causes, traitements, critiques

Chapitre I : les causes de l’embouteillage

I- 2- Les points de vue de la planification urbaine : causes, traitements, critiques

Selon nos analyses en tant qu’humble urbaniste, il nous semble que les causes de l’embouteillage les plus profondes sont celles qui sont liées à la planification urbaine, mais il reste à divulguer leur contenu qui, à notre avis, jusqu’à présent n’est pas assez connu. En effet, la planification urbaine, par faute de moyens techniques capables de faire face aux causes liées à l’urbanisme, cède le champ aux techniques de transports, ce qui peut justifier la concentration des efforts sur ces techniques de transports. Donc le problème n’est pas traité comme il faudrait, et les causes liées à la planification urbaine restent invisibles ou à la merci du hasard. Ces causes, nous allons les énumérer ci-dessous :

- La consommation de l’espace d’une façon anarchique durant plusieurs années ;

- La croissance urbaine sans planification et / ou la création déséquilibrée des nouveaux quartiers périphériques.

Même si parfois quelques quartiers périphériques sont équilibrés par rapport à leur localisation en relation au centre, ils ne le sont pas sur le plan de l’attractivité commerciale, ni des emplois, ni des loisirs, ni des transports, … Vu l’excentricité des quartiers périphériques, les habitants sont souvent obligés de passer par le centre-ville pour rentrer chez eux :

- plus de 110.000 véhicules transitent par le centre-ville une fois / jour, dont 98,1 % (108,000) voitures particulières 41 ;

- La centralité du secteur centre-ville imputable à une structure urbaine à forte concentration d’équipements commerciaux et administratifs dans son cœur ;

- L’augmentation de la mobilité. Les causes de l’embouteillage dans la planification urbaine sont liées l’une à l’autre comme dans une chaîne. Elles se suivent. L’augmentation de la mobilité motorisée individuelle des Constantinois est une conséquence de la politique de la ville dans le domaine des T.C. Les acteurs ont négligé de mettre en place un système commun propre à améliorer la mobilité des personnes. Dès lors, celles-ci ont été condamnées à trouver à ce problème des solutions particulières (la voiture). L’embouteillage est au bout de la chaîne ;

- La localisation non équilibrée des équipements collectifs oblige la majorité des gens à se rendre dans les lieux les mieux équipés (le centre). La distance à parcourir entre centre et quartiers dépourvus nécessite un moyen de déplacement motorisé individuel disponible (VP ou taxis licite ou clandestin) ;

- Nous pouvons ajouter aussi à ces différentes causes le changement et l’évolution sociale des Constantinois, ce qui a contribué à l’augmentation de la mobilité.

Enfin, tous ces facteurs d’embouteillage peuvent être regroupés en une seule cause fondamentale et globale : c’est l’absence d’une vraie politique de la planification urbaine,

car jusqu’à présent l’Algérie n’en a jamais eu. En effet le dysfonctionnement du système de transport et de la circulation urbains à Constantine, est dû, essentiellement, à la nature

sectorielle des différentes tentatives et l’échec de l’ensemble des politiques

organisationnelles et institutionnelles des autorités.

Le traitement des facteurs liés à la planification se caractérise par une négligence presque totale de mesures dont l’objectif est l’élimination de l’embouteillage. Les seuls traitements prévus concernent :

- La concentration des activités et des équipements administratifs dans le centre ; - L’excentricité déséquilibrée des quartiers périphériques.

L’embouteillage résultant de la concentration de la majorité des équipements notamment : tertiaires, commerciaux et scolaires au centre-ville fut utilisé comme argument pour justifier les quelques timides opérations réalisées. Nous citons quelques exemples : la création en 1983, sur la place de la Brèche, d’une passerelle aérienne réservée aux piétons a, par sa taille trop imposante et sa laideur, dénaturé le paysage sans améliorer pour cela la circulation. Elle fut l’objet de nombreuses critiques, et les autorités décidèrent de la supprimer. On décida ensuite l’élargissement et des prolongements du passage souterrain piétonnier, dont la réalisation est estimée à plusieurs millions de dinars et aura duré des années, mais cette opération pour canaliser la circulation piétonnière et assurer la fluidité de la circulation automobile, surtout au centre-ville, n’a pas atteint l’objectif escompté (empêcher les piétons de traverser les rues au péril de leur vie, entre d’innombrables véhicules, et les accrochages véhicules/véhicules et véhicules/piétons au carrefour place des

∗ Voir cartes n°8a, 8b et 8c

∗ Il faut dire aussi que, sur le plan pratique beaucoup de piétons sont découragés par la montée et la descente d’escaliers, et préfèrent rester au niveau à ramper et se faufiler entre les véhicules !

martyres., Photo n°7). Cet élargissement du passage souterrain piétonnier n’a donc pas entraîné la réduction des problèmes de circulation, auxquels était destiné cet aménagement, et du coup le centre-ville continue de vivre une situation à nulle part comparable à travers le territoire national∗∗. Pire encore, ce passage souterrain a été vite squatté par quelques trois cents « trabendistes » (marchands ambulants informels, dont la présence pousse les passants à ne pas l’emprunter), qui travaillent dans des conditions de promiscuité et de sécurité alarmantes. Ainsi ce passage souterrain piétonnier mal ventilé a été complètement détourné de sa fonction initiale, qui relevait de la circulation. Même les interventions survenues après le changement politique de 1988 n’ont rien apporté, soit parce qu’elles sont sectorielles (ne prennent pas dans leur intervention l’ensemble de l’agglomération), par exemple l’intervention en 1997 du Bureau d’Etudes des Transports Urbains sur le centre ville uniquement, soit parce qu’elles sont trop libérales ou anarchiques.

Dans l’objectif d’améliorer le fonctionnement du réseau par l’élimination des facteurs de l’embouteillage dus à l’excentricité des quartiers dépendant du Centre-ville, on recourt à la technique de transports pour augmenter la capacité des axes vers les secteurs périphériques de la ville : le meilleur exemple, c’est la rocade sud composée dans sa partie centrale de deux routes à deux voies, qui assure un fort écoulement de trafic de véhicules de transit à vitesse plus ou moins élevée. Sinon à l’exception de cette rocade l’ensemble du réseau de déviation ne remplit que partiellement sa raison d’être (le contournement du centre-ville), notamment la partie située au Nord-Ouest qui souffre des contraintes physiques (voir carte des pentes, n°3. ) « Cette lacune géographique a obligé une partie du trafic à transiter par le centre-ville, d’où des troubles insupportables, impossible de les éviter... » 42

Ces deux traitements mis à part, la planification urbaine ne propose pas, semble-t-il, d’autres actions en vue du même objectif. Le tableau n° 30 réunit les facteurs d’embouteillage qui ont une relation avec les quatre points de vue suivants : transports, urbanisme, environnement et politique et n’ont pas reçu un traitement adéquat.

∗∗ Selon nos enquêtes (avril 2005) 90 % des 250 personnes interrogées trouvent que la circulation à Constantine est plus difficile qu’à Alger

Photo n° 7

Accrochages véhicules/véhicules et véhicules/piétons au carrefour place des martyres au centre-ville.

(Photo de l’auteur, février 2008)

Tableau n°30 : Les causes de l’embouteillage qui n’ont pas reçu un traitement adéquat dans :

a) la planification de transports

1 - La dissociation du système de transports des objectifs globaux

2 - La croissance de l’agglomération et la création de nouveaux quartiers périphériques non suivis en matière de transports collectifs d’un ajustement du réseau conforme aux besoins de la population

3 - L’absence d’un système de TC performant condamne les habitants à trouver des solutions particulières : remplacer les T.C par la VP beaucoup plus consommatrice d’espace

4 - L’absence de moyen de prévision de l’embouteillage (comptages réguliers des trafics, plans de circulation, etc.…)

5 - Le point de vue trop technique des interventions (relevant soi-disant de la planification des transports)

b) La planification urbaine

6 - L’absence d’organisation des déplacements avant et après la privatisation des T.C.

7 - Difficultés de gérer l’urbanisation (l’utilisation incontrôlée des sols)

8 - La croissance urbaine sans planification et / ou la création spontanée et déséquilibrée de nouveaux quartiers

9 - La centralité et la concentration des équipements administratifs et commerciaux au centre-ville

10 - L’augmentation de la mobilité motorisée des secteurs périphériques par l’utilisation des véhicules particuliers.

11 - L’inexistence de zones piétonnières dans les quartiers centraux, pousse les gens (flâneurs, lèche-vitrine …) à circuler sur la chaussée, d’où le développement d’une concurrence sauvage entre différents modes aggravant davantage l’embouteillage et les accidents

12 - Les difficultés de fluidité des véhicules sont une conséquence de l’utilisation anarchique de l’espace

13 - La localisation déséquilibrée des équipements collectifs force les gens à prendre d’autres moyens motorisés de transports particuliers, et par conséquent augmente leur volume dans

des rues déjà embouteillées.

14 - L’insuffisance, la mauvaise qualité de la distribution de la voirie dans les secteurs périphériques impliquent la consolidation des processus de la ségrégation socio-spatiale

c) L’environnement

15 - La géographie, facteur qui favorise l’embouteillage de Constantine

16 – La dégradation de l’environnement de certains secteurs périphériques amène les gens à passer leur temps libre ailleurs, d’où la tendance de ces secteurs à devenir « cité-dortoir » 17 - L’incompatibilité entre l’espace dynamique (véhiculaire) et l’espace statique (habitation)

d) Aspect politique

18 – La politique (implicite) en faveur de l’automobile : « ces embouteillage sont imputables à la politique du « tout automobile » »

La comparaison des tableaux 29 et 30 nous conduit à l’importante conclusion suivante : la source du problème relève beaucoup plus de la planification urbaine, que d’autres facteurs. Toutefois, et ceci pour de multiples raisons d’ordre politico-économique et technique, elle n’est pas prise en compte. Il est à signaler également, que la technique des transports se limite à traiter le mal par des interventions sans relation avec sa source ou son origine. Ce qui fait que ce raisonnement suit toujours la logique de rétablissement de l’équilibre entre la demande et l’offre, sans se soucier des causes et conséquences de ce déséquilibre.

I -3 - Les points de vue de la presse locale et nationale

Partie intégrante de la crise urbaine, la crise des modes des transports urbains se manifeste chaque jour à travers le phénomène de l’embouteillage.

Devant la détérioration des conditions de déplacements et la situation alarmante que vit la grande ville algérienne en général, et la ville de Constantine d’une façon particulière, aujourd’hui cette ville nous donne une impression générale de chaos et de tension permanente. Infractions constantes, style de conduite désordonnée…Tout pour conférer à la ville le visage d’une cité en ébullition.

Les journaux locaux et nationaux participent à l’identification des problèmes et des causes de ces difficultés en présentant de temps en temps le résultat d’enquêtes ou en diffusant des informations sur la situation

A propos de ces problèmes nous présentons ci-dessous les résumés des articles dans la presse :

A- il y a déjà plus de vingt ans (1984 et 1985), le quotidien local Annasr de langue

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