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pluvial : vers la gestion intégrée des eaux pluviales

En milieu urbain, notamment dans les pays industrialisés, les eaux pluviales sont évacuées depuis les années 1960 via des réseaux de canalisations enterrées [Chocat et al.]. Les parties de réseaux situées en amont sont plus récentes car liées à l’expansion spatiale des villes. Tandis que les réseaux de la partie aval sont le plus souvent anciens. Leur réalisation peut parfois dater de plusieurs décennies [Chamoux et al.]. Ces réseaux n’ont pas toujours connu de réhabilitation, bien qu’ils soient confrontés à des événements pluvieux qui provoquent des flux et des volumes pour lesquels ils n’ont pas été dimensionnés, tels par exemple la crue du 3 octobre 1988 à Nîmes [Chocat et al.].

Photo 1.II.1 Inondation à Nîmes le 3/10/1988. Crédit

photo : nimes.fr

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I.

Aspects quantitatif et qualitatif

Le schéma ci-dessous présente l’ensemble des phénomènes que subissent les eaux pluviales en milieu urbain lorsqu’elles quittent l’atmosphère :

Les réseaux d’assainissement sont directement alimentés par les volumes qui proviennent du ruissellement en surface. Le ruissellement, bien qu’inévitable, est fortement modifié en milieu urbain.

D’une part, sur un bassin versant donné, le volume ruisselé est augmenté par la saturation plus ou moins rapide des sols perméables : proximité d’une sous-couche imperméable, présence d’un aquifère peu profond qui se remplit durant la pluie et donc diminue la capacité du sol à s’infiltrer. D’autre part, on observe l’accroissement des pointes de débits ruisselés, à cause de l’imperméabilisation des sols en milieu urbain. L’image ci-dessous présente la corrélation qui existe entre l’imperméabilisation des sols, et l’accroissement qualitatif et quantitatif des hydrogrammes de ruissellement.

Schéma1.II.1 Pertes au ruissellement, Source : Pr O. Blanpain.

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Ainsi, la modification des caractéristiques des sols urbains entraine des dysfonctionnements des réseaux d’assainissement, allant jusqu’à leur mise en défaut.

Ces dysfonctionnements sont principalement de deux types : les débordements des réseaux et les chocs de pollutions subis par le milieu naturel en aval du réseau ou à la sortie des ouvrages de délestage du réseau.

Selon un rapport du Sénat français, entre 15 et 25% de la pollution charriée lors du ruissellement pluvial vient de la pollution atmosphérique (sauf pour les hydrocarbures où cette valeur atteint 90%). Les eaux pluviales se chargent alors de polluant principalement en lessivant les sols urbains :

-des déchets solides ;

-des minéraux sous forme solide ;

-des particules de pollution atmosphérique ; -des métaux lourds ;

-des hydrocarbures ;

-des produits liés à l’entretien du territoire ou à ses activités ; -des matières organiques potentiellement pathogènes.

Les principaux indicateurs définis pour caractériser ces différents types de polluants sont :

Image 1.II.2 Effet de l’urbanisation sur le volume et le débit de ruissellement.

Source : Drainage Manual, Association des routes et transports du Canada, 1982

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-les Matières En Suspension : MES ;

-la Demande Chimique en Oxygène : DCO

-la Demande Biologique en Oxygène (à 5 jours) : DBO5 -l'azote Total Kjeldahl : NTK

-l'ammoniaque : NH4 -le Phosphore total : Pt

Le tableau ci-dessous présente les valeurs moyennes des masses de pollutions annuellement rejetées en 1995 [Chebbo et al., 1995] et 1997 [Chocat et al., 1997]. Il montre que l’on retrouve les mêmes polluants dans les eaux pluviales et dans les réseaux unitaires.

Paramètres de

pollution En collecteur unitaires

En collecteurs pluviaux MES 1000 à 2000 1000 à 2000 DCO 1000 à 2000 1000 à 2000 DBO5 800 à 1500 100 à 500 Hydrocarbures 5 à 80 4 à 35 Plomb 0,7 à 2,2 0,6 à 1,8

Le ruissellement pluvial est également à l’origine des débordements constatés dans les réseaux d’assainissement unitaires et séparatifs. En 2003, on estimait l’âge moyen des conduites d’assainissement à 55ans en France, avec un taux de renouvellement de 0,65% par an, alors que d’après l’INSEE, la superficie urbaine a doublé sur une période similaire. Ces chiffres montrent que l’évolution des réseaux d’assainissement n’a pas suivi l’accroissement des surfaces urbaines. De ce fait, les systèmes d’assainissement doivent gérer des volumes ruisselés pour lesquels ils n’ont pas été dimensionnés. Il en résulte une mise en charge fréquente des réseaux, et des débordements. A titre d’exemple, Renard et Riquier [2008] démontrent que les débordements dans l’agglomération de Lyon sont directement liés aux pluies exceptionnelles.

En milieu urbain, l’impact des inondations qui résultent du ruissellement pluvial se mesure à plusieurs niveaux :

Tableau1.II.1 Valeurs moyennes des masses annuellement rejetées (en kg/ha imperméable), à l’aval de bassins versants unitaires et pluviaux. Source : Chocat, 1997.

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-augmentation de la pollution : en ce qui concerne les réseaux unitaires, ceux-ci collectent et transportent simultanément les eaux pluviales et usées. L’augmentation du volume d’eau pluviale dans un réseau de ce type, entraîne automatiquement l’augmentation des volumes rejetés par les déversoirs d’orages, et donc l’augmentation de la pollution du milieu naturel. Si l’on élimine les branchements illégaux et l’injection des eaux parasites, on voit que concernant les réseaux unitaires, l’augmentation de la pollution est directement liée à l’augmentation des volumes pluviaux collectés. Dans le cas des réseaux séparatifs, la corrélation est similaire, bien que la pollution soit différente. En effet, comme nous l’avons indiqué plus haut, une grande partie des polluants présents dans les eaux pluviales provient du lessivage des sols urbains et des canalisations.

-rupture partielle de fourniture des services urbains : télécommunication, électricité, eau potable

-éboulements et effondrements ;

-dysfonctionnement des infrastructures urbaines : routes coupées, voie ferrées fermées, etc. ; qui engendre un coût économique et un impact psychologique sur les populations;

-dégradations des biens des particuliers : caves inondées, véhicules déplacés voire endommagés, etc.

-mise en danger de la vie humaine. Le National Weather Service des Etats- Unis a enregistré 55 décès directement liés aux conséquences des inondations pendant l’année 2014 [United States Flood Loss Report-Water Year, National Weather Service, 2014].

Depuis la loi sur l'eau du 16 décembre 1964, la gestion des réseaux d’assainissement a été confiée de façon optionnelle aux communes ou aux communautés de communes regroupées au sein des EPCI. Avec l’adoption de la loi NoTRE (Nouvelle organisation Territoriale de la République) en 2015, la compétence en matière de gestion des eaux pluviales sera obligatoirement exercée par les communautés de communes, au plus tard au 1er Janvier 202. Elle l’est déjà pour les communautés urbaines et les métropoles. Selon le site eaufrance.fr, en 2008, 20580 communes devaient ainsi gérer près de 100 000km de réseau pluvial en système séparatif, et près de 97000km en unitaire. Ainsi face aux dysfonctionnements constatés des réseaux d’assainissement, générés par le ruissellement pluvial, se pose alors la question des moyens à mettre en œuvre pour la remise à niveau des réseaux unitaires.

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En Europe par exemple, et en France particulièrement, le législateur s’est emparé de cette question. La Directive Eaux Résiduaires Urbaines – DERU – du 21 Mai 1991 et la loi sur l’eau du 3 Janvier 1992 renforcées par les arrêtés du 22 Décembre 1994 et du 22 juin 2007, imposent aux communes de mettre en œuvre la réduction de l’impact des rejets des systèmes d’assainissement collectif sur le milieu naturel aux réseaux.

II. Différents moyens et solutions possibles.

L’expérience montre que sur le plan quantitatif, les dysfonctionnements des réseaux d’assainissement collectifs sont constatés, le plus souvent, lors des grands événements pluvieux. En effet, les débits d’eaux usées sont connus, réguliers, et donc prévisibles. A l’opposé, les débits générés par les précipitations varient en fonction de la pluviométrie locale et des paramètres du bassin versant impacté. Les paramètres relatifs à la pluie sont imposés par la nature : intensité de pluie, type de nuage, climat local, etc. Il faut donc identifier les paramètres sur lesquels il est possible d’agir : le ruissellement en surface, l’infiltration dans le sol, la gestion des flux dans le réseau, etc.

Les dysfonctionnements se manifestent de différentes façons : mise en charge des canalisations, débordement sur la voie publique, débits importants des déversoirs d’orages par temps de pluie, surcharge hydraulique des stations d’épuration, pollution du milieu naturel exutoire du réseau d’assainissement.

De nouveaux outils réglementaires et techniques ont été développés pour permettre aux collectivités locales de pallier et/ou de prévenir les dysfonctionnements des réseaux d’assainissement classiques, en ce qui concerne la réduction de la pollution que ceux-ci génère et la limitation des risques d’inondation par ruissellement pluvial.