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R(C). Pour voir que cette application induit aussi un isomorphisme de ˇT (C) et R(C), il suffit de remarquer que ces graphes sont obtenus de la mˆeme mani`ere `

a partir de T (C), respectivement ˆR(C). 

Remarque : La proposition que l’on vient de d´emontrer permet aussi de v´erifier la correction de la construction de l’arbre dual de d´esingularisation d’un germe de courbe plane. En effet, on peut obtenir imm´ediatement `a partir de celui-ci l’arbre de rupture r´eduit. Si ce dernier n’est pas isomorphe `a l’arbre d’Eggers, la construction est incorrecte. Ce test est effectif dans la mesure o`u il est plus facile, une fois connues les s´eries de Newton-Puiseux des branches de C, de construire l’arbre d’Eggers, plutˆot que l’arbre dual de la d´esingularisation minimale. Pour ce dernier, des constructions algorithmiques ont ´et´e d´ecrites dans [36] et [18].

4.5 Plombage d’apr`es un graphe pond´er´e

Dans cette section, nous amor¸cons le pan topologique de ce travail, en rap-pelant les notions de sph`ere de Milnor, d’entrelacs K(C) et de compl´ementaire M (C) de l’entrelacs dans une sph`ere de Milnor, ainsi que la description par plombage de M (C) `a l’aide d’une r´esolution plong´ee minimale de C. Nous construisons des repr´esentants particuliers des tores de plombage, ce qui est utilis´e ensuite dans la section 4.11.

Consid´erons le plan des coordonn´es x, y muni de la m´etrique euclidienne canonique. Si ǫ > 0, nous notons par S3(ǫ) la sph`ere de rayon ǫ centr´ee en 0. Pour ǫ0 suffisamment petit et 0 < ǫ ≤ ǫ0, toutes les sph`eres S3(ǫ) sont transverses `a la courbe C. On les appelle des sph`eres de Milnor par rapport `a C. Cette notion `a ´et´e introduite dans [44] pour l’´etude topologique g´en´erale des singularit´es d’hypersurfaces analytiques.

Si S3(ǫ) est une sph`ere de Milnor par rapport `a C, l’intersection K(C, ǫ) = C∩ S3(ǫ) est une union de cercles plong´es dans S3(ǫ), c’est-`a-dire un entrelacs de cette sph`ere. Le nombre de composantes de cet entrelacs est ´egal `a r, le nombre de branches de la courbe C. Les divers entrelacs obtenus ainsi, pour ǫ < ǫ0, sont isotopes. Soit M (C, ǫ) le compl´ementaire d’un voisinage tubulaire ouvert de K(C, ǫ) dans S3(ǫ). Les M (C, ǫ) sont des vari´et´es orient´ees `a bord, diff´eomorphes entre elles. Soit alors K(C) ֒→ S3 un entrelacs fixe isomorphe aux entrelacs K(C, ǫ) ֒→ S3(ǫ) pour ǫ < ǫ0 et M (C) le compl´ementaire d’un voisinage tubulaire de K(C) dans S3. Pour d´ecouvrir le contexte qui vit naˆıtre cette construction dans les ann´ees 1890, on pourra consulter [14].

Exemple : Si C est la courbe d´efinie dans la section 4.4, l’entrelacs K(C) est isotope `a celui du dessin qui suit. On a fait d’abord une projection st´er´eographi-que de S3 par rapport `a un point situ´e sur l’entrelacs K(C0) d’une droite C0: αx + βy = 0 transverse `a C, puis une projection plane parall`element `a l’image de K(C0). En pointill´e on a repr´esent´e la projection plane d’un disque de R3 permettant de transformer l’entrelacs en tresse. Ce disque sera utilis´e lorsque l’on poursuivra cet exemple `a la fin de la section 4.7. En g´en´eral les entrelacs K(C) sont des “entrelacs toriques it´er´es”, comme il est expliqu´e dans [53], [4] et [35].

156 CHAPITRE 4. ENTRELACS DANS LES VARI ´ET ´ES IRR ´EDUCTIBLES 2 3 1

K(C

K(C

K(C ) )

)

La vari´et´e M (C) peut ˆetre d´ecrite `a l’aide du graphe D(π, C) d’une d´esingularisation plong´ee π : Σ→ C2de C. Consid´erons la fonction distance :

d : (

C2→ R

(x, y)→ |x|2+|y|2 .

Les sph`eres S3(ǫ) sont les lignes de niveau de d. Comme π est un iso-morphisme de Σ− E(π) sur C2 − {0}, les sph`eres S3(ǫ) sont diff´eomorphes `

a (d◦ π)−1(ǫ) et M (C) est diff´eomorphe au compl´ementaire dans (d◦ π)−1(ǫ) d’un voisinage tubulaire de l’intersection avec la transform´ee stricte de C.

Intuitivement, lorsque ǫ → 0, la vari´et´e (d ◦ π)−1(ǫ) se rapproche de plus en plus de E(π). Au voisinage de chaque composante L(P ) de E(π), en dehors de voisinages arbitraires des points de E(π)∩ S, la vari´et´e (d ◦ π)−1(ǫ) tend `a ˆetre une partie du bord d’un voisinage tubulaire de L(P ), c’est-`a-dire un sous-fibr´e du sous-fibr´e en cercles sur L(P ) de nombre d’Euler (L(P ), L(P )), le nombre d’auto-intersection de L(P ) dans Σ.

Au voisinage des points de E(π)∩ S, ces divers fibr´es sont reli´es par une op´eration de “plombage”. Cette op´eration a ´et´e introduite par D.Mumford dans [45] dans le but de d´ecrire le bord d’un voisinage sp´ecial d’une singularit´e nor-male de surface complexe. D.Mumford y utilise le syntagme “plumbing fixture”. Les aspects topologiques de l’article de Mumford ont ´et´e r´esum´es `a chaud dans [27]. F.Hirzebruch s’int´eressa `a des g´en´eralisations du plombage en dimen-sions sup´erieures (voir aussi [28], o`u on “plombe” des fibr´es en boules particuliers et non pas en sph`eres comme dans notre cas). Dans [27], Hirzebruch affirme que l’on peut construire des sph`eres exotiques `a l’aide de ces plombages g´en´eralis´es ; il faudra attendre quelques ann´ees et les travaux de Brieskorn pour commencer `

a avoir une vision plus claire du lien entre singularit´es analytiques complexes et sph`eres exotiques (voir [44]).

Il semble que c’est dans [27] et [52] qu’apparaissent les premi`eres consid´era-tions portant directement sur des graphes duaux de diviseurs exceptionnels,

4.5 PLOMBAGE D’APR `ES UN GRAPHE POND ´ER ´E 157

ainsi que la construction de 3-vari´et´es plomb´ees le long de graphes pond´er´es abstraits, que nous expliquons dans la suite de cette section.

Revenons au germe C de courbe plane. Le fait important permettant de d´eduire une description de M (C) est que les transform´ees strictes π(Ci) sont des curvettes de certaines composantes de E(π). Ceci implique que les intersections π(Ci)∩(d◦π)−1(ǫ) sont des fibres de certains des morceaux plomb´es. La vari´et´e M (C) s’obtient donc en enlevant les voisinages tubulaires de ces fibres.

Afin de d´ecrire M (C) `a l’aide de l’op´eration de plombage, il suffit de connaˆıtre le graphe D(π, C) ainsi que la pond´eration de ses sommets noirs - les sommets de D(π) - par les nombres d’Euler :

e(P ) := (L(P ), L(P )) < 0. (75)

De mani`ere g´en´erale on d´efinit l’op´eration de plombage le long d’un graphe pond´er´e. Si G est un graphe connexe dont les sommets blancs sont tous termi-naux, ayant au moins un sommet noir et que e :NG → Z, g : NG → Z sont deux fonctions, nous disons que G est un graphe pond´er´e. Pour chaque sommet P ∈ NG consid`erons une surface de Riemann SP close de genre g, orient´ee si g≥ 0. Si g < 0, la surface SP est diff´eomorphe `a la somme connexe de| g | plans projectifs RP2. De plus, pour chaque P ∈ NG, consid`erons un fibr´e en cercles νP : MP → SP, de nombre d’Euler e(P ), o`u MP est une vari´et´e de dimension 3 orient´ee. Nous disons dans ce cas que MP est fibr´ee en cercles par l’application νP. Une autre fibration en cercles de MP est dite isotope `a νP, si elle est obtenue `

a partir de νP en composant `a droite par un diff´eomorphisme de MP isotope `a l’identit´e.

Ces diverses vari´et´es de dimension 3 seront plomb´ees d’apr`es le graphe G. Pour chaque sommet P ∈ NG, consid´erons un ensemble A(P )⊂ SP, form´e de points not´es IP(a), associ´es aux arˆetes a de G passant par P .

Pour chaque I ∈ A(P ), consid´erons un disque ouvert D(I) ⊂ SP, centr´e en I, les divers disques ´etant deux `a deux disjoints. Notons :

NP := νP−1(SPG I∈A(P )

D(I)).

La vari´et´e NP a un bord compos´e de tores, chaque tore correspondant `a une arˆete de G contenant P . Notons τP(a) le tore associ´e `a l’arˆete a. Il est muni d’un m´eridien mP(a) et d’un parall`ele lP(a) privil´egi´es. Le m´eridien est l’image d’une section de νP triviale sur D(IP(a)). Le parall`ele est une fibre de νP. Les classes d’isotopie sur τP(a)des deux courbes sont d´efinies de mani`ere unique.

Consid´erons maintenant l’union disjointeF

P∈NGNP, que l’on quotiente en identifiant τP(a) et τQ(a) par un diff´eomorphisme qui ´echange m´eridiens et parall`eles privil´egi´es et ce, pour chaque a∈ AG, de sommets P, Q∈ NG. Nous obtenons ainsi la vari´et´e M (G, g, e) et un morphisme d’identification :

G P∈NG

NP → M(G, g, e).Ψ (76)

Consid´erons aussi le 2-complexe S(G, g) obtenu `a partir de F

P∈NGSP en identifiant les points IP(a), IQ(a) pour chaque arˆete a de sommets P et Q.

158 CHAPITRE 4. ENTRELACS DANS LES VARI ´ET ´ES IRR ´EDUCTIBLES

Le bord de M (G, g, e) est form´e de tores associ´es bijectivement aux sommets blancs de G. La vari´et´e M (G, g, e) contient un ensemble de tores{τ(a)}a∈A′

G, les images par Ψ des tores τP(a). Le compl´ementaire deS

a∈AGτ (a) dans M (G, g, e) est fibr´e en cercles. Pour chaque a∈ A

Gjoignant les sommets P et Q, les images par Ψ des fibres de νP et νQ ont comme nombre d’intersection ±1 sur τ(a). Ceci provient de la d´efinition de l’op´eration de plombage. Nous les appelerons les fibres privil´egi´ees de τ (a). Elles sont donc d´etermin´ees `a isotopie pr`es par les fibrations νP et νQ.

Voici la pr´esentation de la vari´et´e M (C) par plombage que nous avions annonc´ee :

Proposition 4.5.1 Si C est un germe r´eduit de courbe plane, que π est une d´esingularisation plong´ee de C et G = D(π, C), que la fonction g est identique-ment nulle et que la fonction e est donn´ee par la formule (75), alors la vari´et´e M (G, g, e) est diff´eomorphe `a M (C). Le 2-complexe S(G, g) est isomorphe au diviseur exceptionnel r´eduit E(π).

Pr´ecisons l’explication intuitive donn´ee au d´ebut de cette section. Pour chaque point P ∈ π(C)∩ E(π), soient un ouvert UP ⊂ Σ et un syst`eme de coordonn´ees locales (xP, yP) centr´e enP qui r´ealise un isomorphisme de UP sur l’ensemble{(xP, yP),| xP |< 1, | yP |< 1}, tels que :

| π(C)| ∩ UP ={xPyP = 0} ∩ UP, | π(C)| ∩ UP ={xP = 0} ∩ UP. Introduisons alors l’ensemble :

YP :={| xP |<| yP |}.

Il existe ǫ1 ≤ ǫ0 tel que pour 0 < ǫ≤ ǫ1, S3(ǫ)∩SP∈I(π,C)π(YP) soit un voisinage tubulaire de K(ǫ) dans S3(ǫ), o`u I(π, C) est l’ensemble des points de contact d´efini dans la section 4.2.

Consid´erons aussi pour chaqueQ ∈ E(π)∩S un ouvert UQ⊂ Σ et un syst`eme de coordonn´ees locales (xQ, yQ) centr´e enQ qui r´ealise un isomorphisme de UQ sur l’ensemble{(xQ, yQ),| xQ|< 1, | yQ|< 1}, tels que :

E(π)∩ UQ={xQyQ= 0} ∩ UQ. Introduisons aussi l’ensemble :

TQ:={| xQ|=| yQ|} ∩ UQ.

Il existe ǫ2≤ ǫ1tel que pour ǫ < ǫ2, τQ(ǫ) := S3(ǫ)∩π(TQ) soit un tore, pour toutQ ∈ E(π) ∩ S. Ces tores sont des repr´esentants sous-analytiques des tores τ (a), avec a∈ A

D(π,C), le tore τ (a) correspondant `a τQ(ǫ) siQ = L(P1)∩L(P2) et a ={P1, P2}.

Exemple : Reprenons l’exemple de la section 4.4, dont on a dessin´e l’en-trelacs au d´ebut de cette section. Nous repr´esentons dans la figure suivante un voisinage (d◦ π)−1([0, ǫ]) du diviseur exceptionnel E(π0) de la d´esingularisation minimale π0, ainsi que les transform´ees strictes π(Ci), 1≤ i ≤ 3. En pointill´e

4.5 PLOMBAGE D’APR `ES UN GRAPHE POND ´ER ´E 159

on a repr´esent´e les lieux {| xP |=| yP |} et {| xQ |=| yQ |}. Les zones ha-chur´ees sont les ensemblesYP. Le dessin repr´esente bien sˆur la partie r´eelle de la configuration complexe correspondante.

1 3 2 (C (C (C ) ) ) ’ ’

Remarque : Dans tout ce qui pr´ec`ede, il faut orienter les diverses vari´et´es qui interviennent. Lorsque l’on reconstruit la vari´et´e M (C) par plombage il y a des choix naturels d’orientation provenant du fait qu’une vari´et´e analytique complexe et le bord d’une vari´et´e orient´ee ont des orientations canoniques. En particulier, on recolle les tores en interchangeant m´eridiens et parall`eles tout en conservant leurs orientations canoniques. Lorsque l’on effectue le plombage d’apr`es un graphe quelconque, si l’on veut que la vari´et´e obtenue soit orientable, il y a aussi la possibilit´e de changer simultan´ement leur orientation. On peut tenir compte de ce choix en associant des signes aux arˆetes du graphe G, comme le fait W.Neumann dans [46]. Par la suite, nous laisserons de cˆot´e ces probl`emes de signes, car nous ne nous int´eresserons qu’aux valeurs absolues des divers nombres d’intersection.

Posons-nous `a pr´esent la question inverse : ´etant donn´ee une vari´et´e compacte orient´ee de dimension 3, obtenue par plombage selon un graphe pond´er´e, quelle structure suppl´ementaire faut-il garder afin de retrouver le graphe, ainsi que sa pond´eration ?

Il est en effet clair que la seule donn´ee du type topologique ou diff´erentiable de la vari´et´e ne suffit pas, puisque la mˆeme vari´et´e peut s’obtenir en plombant suivant des graphes diff´erents. Par exemple la vari´et´e M (C) peut s’obtenir `a partir du graphe D(π, C) de n’importe quelle d´esingularisation de la courbe C. La premi`ere structure suppl´ementaire `a conserver sera alors l’ensemble des tores du type τ (a).

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