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Physiopathologie des lésions par explosion

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D) Physiopathologie des lésions par explosion

1-Conséquences physiques de l’explosion 1-1- Conséquences mécaniques

Une explosion génère une onde de pression statique dite onde de choc, responsable des lésions de blast proprement dites et provoque une onde de pression dynamique dite souffle responsable des lésions secondaires (blessures par projectiles) et tertiaires (projection des victimes observée lors des explosions).

Onde de pression statique = Onde de choc

Cette onde de pression statique comporte une première onde de pression positive brève et de grande amplitude suivie par une onde de pression négative sans importance physiopathologique.

La phase de surpression induit une augmentation très brutale et très brève de la pression ambiante sans déplacement gazeux. Cette onde progresse à la vitesse du son dans le milieu, et son amortissement varie avec le milieu et la distance. Cette variation brutale de la pression se manifeste à l’intérieur des volumes de gaz enclos (alvéoles pulmonaires, oreille interne) par une compression puis une décompression responsables de ruptures pariétales. Une phase de décompression suit immédiatement la phase de surpression. Cette phase de dépression a une amplitude très faible, mais sa durée est 10 fois supérieure à celle de l’onde de surpression. Son rôle éventuel dans la genèse des

Onde de pression dynamique = vent ou souffle (17).

Une explosion provoque le déplacement d’une grande masse d’air animée d’une vitesse initiale très élevée, ou onde de pression dynamique. Ce souffle (blast wind) suit l’onde de surpression. Tout obstacle rencontré par cette masse d’air en mouvement subit de sa part une pression dynamique et donc une accélération brutale. La vitesse initiale du souffle à proximité immédiate de l’explosion est très importante, et la pression dynamique qu’il peut exercer est aussi importante que la pression de l’onde de choc ; à distance de l’explosion, cette pression dynamique chute très rapidement. L’accélération brutale appliquée aux tissus et aux organes est responsable de forces de compression et d’arrachement. Il s’agit de lésions comparables à celles observées lors d’une décélération brutale d’un traumatisme fermé et qui expliquent la possibilité de lésions d’organes pleins.

Ces forces d’inertie responsables de phénomènes de compression et d’arrachement affectent préférentiellement des tissus adjacents de densités différentes : mobilisé par l’onde de choc, ces tissus se trouvent déplacés à des vitesses qui varient selon la densité propre à chaque tissu. Il s’en suit une impaction des tissus ou organes les moins denses par les plus denses, puis des ruptures de leurs interfaces lors du retour à la position initiale.

Ainsi observe-t-on des lésions d’impaction du grill costal sur le parenchyme pulmonaire dans les traumatismes fermés comme dans le blast.

Cette onde de pression dynamique est également responsable des lésions dites secondaires (blessures par projectiles) et tertiaires (projection des victimes) observées lors d’une explosion.

La destruction des structures dans laquelle s’est produite l’explosion peut être aussi responsable de lésions d’ensevelissement.

1-2- Conséquences thermiques

Une explosion s’accompagne également d’une libération importante de chaleur qui est capable d’entrainer des brûlures soit par flash, soit par incendie secondaire. L’explosion peut, par ailleurs, s’accompagner de la libération de gaz toxique entraînant des lésions par inhalation (18).

Cet effet thermique est limité dans le temps et dépend de la nature de l’explosif (déflagrant > détonant) et la présence éventuelle de produits inflammables (phosphore, napalm).

Il y a souvent des lésions pulmonaires par inhalation.

L’inhalation de fumées est le plus souvent responsable des perturbations respiratoires précoces. Les fumées émises au cours d’un incendie peuvent être composées de facteurs toxiques, responsables d’intoxication générales (intoxication au CO et aux Cyanures) et de produits corrosifs qui entrainent des brûlures chimiques et de la muqueuse respiratoire.

Cliniquement ces lésions d’inhalation seront suspectées en cas de brûlures survenues en espace clos, de brûlures localisées au niveau du visage, ou encore en cas de constatation d’une voie rauque, d’un wheezing, d’un stridor ou de dépôts de suie au niveau des muqueuses nasales et buccales (19).

Le diagnostic sera confirmé par la fibroscopie bronchique qui montrera, en fonction de la gravité de l’atteinte de la muqueuse bronchique : érythème, œdème, dépôt de suie, érosion de la muqueuse.

En somme, au décours d’une explosion, les traumatismes dus à l’onde de choc ne représentent qu’un aspect particulier parmi les lésions pouvant être observées chez un blasté, à qui ils donnent néanmoins sont caractère spécifique.

Quant aux traumatismes secondaires et tertiaires, aux brûlures, aux intoxication et lésions d’ensevelissement, ils peuvent se rencontrer dans beaucoup d’autres circonstances (traumatologie routière, accidents du travail, catastrophes) (17).

Figure 5 : Effets d’une explosion

2-Classification

La survenue d’une explosion génère toute une série d’effets sur les objets et les individus à proximité. L’onde de choc, décrite précédemment, « s’impacte » et transmet son énergie aux objets et individus à proximité de l’explosion mais

se dissipe rapidement. Elle est suivie par le souffle qui propulse de nombreux fragments, d’origines diverses, qui sont autant de causes de lésions pénétrantes. La violence du vent projette d’ailleurs les victimes sur les structures et objets environnants, source de véritable dislocation du corps et peut participer, avec l’onde de choc, à l’effondrement de bâtiments. La chaleur peut entraîner des incendies et les flammes et les fumées entraîner asphyxies, brûlures et

lésions d’inhalation. Des lésions spécifiques se rajoutent en cas d’utilisation d’armes non conventionnelles.

Historiquement, les lésions causées par une explosion sont divisées en lésions primaires, secondaires et tertiaires. En 2007, les autorités Américaines ( Center for Deases control and Prevention) ont retenu quatre catégories de lésions liées à une explosion : primaires, secondaires, tertiaires et quaternaires (20).

Les lésions primaires (ou lésions de blast proprement dites) sont causées par l’onde de choc (blast wave) et touchent surtout les organes creux. Les lésions les plus fréquemment rencontrées sont ainsi tympaniques, pulmonaires et

Les lésions secondaires sont dues à la projection de débris divers, d’éclats, de fragment d’explosifs, d’objets mobilisés par le souffle de l’explosion ou de particules ajoutées à l’explosif dans le but d’augmenter les lésions induites (boulons, clous).

Les lésions tertiaires sont liées à la projection de la victime ou à l’effondrement des structures adjacentes (autre fois considérées comme des lésions quaternaires).

Les lésions quaternaires regroupent les autres lésions liées à l’explosion : les brûlures, l’exposition à des substances toxiques (radiations, fumées), l’asphyxie, le syndrome de stress post traumatique(22).

Le département Américain de la défense a également reconnu l’existence de lésions quinquénaires de blast. Celles-ci seraient les conséquences des produits toxiques de l’explosion ( radiations, métaux et éventuellement bactéries ou virus). Il s’agit en fait d’un état hyperinflammatoire associant : hyperthermie, sudation, pression veineuse centrale basse et inflation hydrique, rapportés chez des victimes d’explosion dans les séries Israéliennes (20). La pertinence clinique de cette catégorie de lésions n’a pas encore été établie.

Les théories initiales considéraient que seuls les organes à contenue gazeux étaient sensibles aux effets de l’onde de choc : appareil auriculaire, poumon et tube digestif. A l’opposé les organes homogènes dépourvus de compartiments gazeux, ont longtemps été considérés comme insensibles aux effets de l’onde de choc. Des observations des lésions d’organe pleins, comme l’œil, l’encéphale et le cœur, semblent pouvoir être rapportés uniquement à l’onde de choc(2,22,23),

3-Facteurs lésionnels

3-1- Paramètres physiques de l’onde de choc

Les principaux paramètres déterminant les lésions du blast sont le gradient de pression et, à un moindre degré, le temps d'ascension de la pression et la durée de pression positive. En effet, l'énergie transmise varie comme le produit

ΔP² * Tpos. Le seuil de lésion est généralement considéré comme proche de 1

bar (100 kPa). Une surface réfléchissante est un facteur d'aggravation des

lésions. Il faut souligner que les lésions sont alors plus graves du côté exposé à cette surface.

Intensité de la surpression de crête ΔP :

Cette intensité est fonction de la charge explosive et de la distance à laquelle l’organisme exposé est placé. Plus les niveaux de pression augmentent plus les lésions organiques et les destructions matérielles sont plus importantes (24).

Durée de la surpression de crête tpos :

Plus la durée de surpression est longue, plus les conséquences sont importantes (25).

Vitesse de montée de l’onde positive ΔP/Δt :

Ce paramètre détermine les seuils lésionnels du blast chez l’homme, donc les conséquences physiopathologiques et les lésions organiques les plus

Tableau VI : Relation entre pic de surpression et effet vulnérant (26)

Tableau VII : Durée de la surpression en fonction de la charge explosive (27)

Charge de l’explosif en TN Durée de la surpression en Ms (tpos)

25 kg 2

1800 kg 10

1 kilotonne 100

Ces différents paramètres physiques permettent aussi de classifier les différents types d’ondes de chocs (28).

L’onde résultat du bruit impulsionnel a une durée de montée de crête supérieure à 5ms. Le niveau de pression de crête n’est pas pris en compte.

L’onde de choc faible a une durée de montée à la pression de crête inférieure à 5ms et la différence de pression de crête inférieure à 1 bar. Deux exemples courants sont la détonation d’une arme à feu et le « bang » des avions supersoniques.

L’onde de choc forte a une durée de montée à la pression de crête inférieure à 5ms, et une différence de pression de crête supérieure à 1 bar. Elle engendre le blast. A niveau de pression de crête et de front de montée égaux, une onde de choc s’avère plus nocive pour une durée totale prolongée.

3-2- Conditions physiques de propagation de l’onde de choc

L’onde de choc se propage dans toutes les directions avec une vitesse initiale de 4000 à 8000 m /sec (29). La vitesse de propagation et l’atténuation de

la surpression dépend de différents facteurs :

3-2-1-Le milieu de propagation

Selon le milieu ambiant au sein duquel se propage l’onde de choc, on distingue des blast en milieu aérien, liquide ou solide.

La vitesse de propagation de l’onde de choc dépend du milieu environnant. La vitesse initiale de l’onde de choc peut atteindre 4000 à 8000m/s. Pour mémoire, la vitesse de propagation du son dans l’air est de 330 m/s, dans l’eau de 1500 m/s et de 5000 m/s dans le métal.

De la même façon, la vitesse de propagation de l’onde de choc est quatre fois plus élevée dans l’eau que dans l’air et jusqu’à 15 fois plus élevée dans l’acier avec des amortissements beaucoup plus faibles (26) . Ainsi l’onde de choc se propage d’autant plus vite que le milieu est dense.

Les lésions du blast aérien concernent surtout les organes creux. Deux éléments caractérisent le blast liquidien : le rayon létal trois fois supérieur à celui d'un blast aérien, et les parties immergées de la victime sont généralement indemnes, car l'onde de pression ne traverse pratiquement pas l'interface eau-air. Le blast liquidien se caractérise également par une très grande fréquence des lésions abdominales, digestives.

Dans le cas du blast solidien, l'onde de pression est transmise par un matériau solide et incompressible au contact de la victime avec une vitesse considérable (jusqu'à 5 000 m · s-1). Le blast solidien se caractérise par des

lésions osseuses et vasculonerveuses prédominantes (30). Le pied de mine et le

choc de pont sur un navire constituent des exemples militaires de blast solidien.

3-2-2- L’environnement

L’explosion peut avoir lieu à ciel ouvert ou en milieu fermé. Lors de la réflexion d’une onde de choc sur un obstacle, il se forme une onde réfléchie dont le pic de pression peut amplifier celui de l’onde incidente. Cela qui explique la gravité particulière des lésions par onde de choc observées lors d’explosions en milieu clos, où la fréquence de blast sévère est très élevée par rapport à celui observé dans des explosions à l’air libre (31).

Il faut toutefois souligner que dans les explosions en espace clos, la probabilité de se retrouver à faible distance de l’explosion est également plus élevée, ce qui participe à la gravité du blast. De même la gravité du blast est d’autant plus importante que la victime (à égale distance de l’explosion) est contre le mur ou, pire, dans le coin d’une pièce, du fait de la réflexion de l’onde de choc.

Les explosions en espace clos entrainent plus de blast primaires à cause des réflexions de l’onde incidente sur les parois qui s’accompagne de phénomènes de résonances et de l’apparition d’une succession d’ondes vulnérantes. Leibovici rapporte une incidence de blast pulmonaire qui varie de 6 à 33% selon l’attentat en milieu ouvert ou fermé(21).

D’autre part, l’explosion peut entrainer l’effondrement des bâtiments et d’autres structures, responsable des lésions d’écrasement et d’ensevelissement. Lors d’une explosion, la mortalité initiale rapportée est de 4% en milieu ouvert et 8% en milieu fermé et de 5% en cas d’effondrement des structures adjacentes (32).

Tableau VIII : Gravité des explosions en fonction de l’environnement

3-2-3-Le type d’explosifs

Les explosifs sont classés en explosifs à basse énergie ( LE ou low-order explosives ) et explosifs à haute énergie ( HE ou high-order explosives ).

Les explosifs à haute énergie produisent, lors d’une détonation, une onde de choc qui se répand à une vitesse supersonique, typiquement à l’origine des lésions de type blast primaires. Ils comprennent notamment : le trinitrotoluène (TNT), le C-4, le Semtex, la nitroglycérine, la dynamite et les mélanges ammonium-nitrate-fuel-oil (ANFO).

Les explosifs à basse énergie créent, lors d’une déflagration une explosion subsonique sans onde de choc, à l’origine des lésions de blast secondaires, tertiaires ou quaternaires. Ce sont, par exemple : la poudre à canon, les Cocktails Molotov ou les feux d’artifices (31).

3-2-4- La distance

L’onde de choc s’atténue avec la distance, mais cette atténuation est réduite par le degré de confinement. Ainsi l’atténuation est très rapide en propagation sphérique (cas du milieu ouvert : 3 dimensions), moins rapide en propagation radiale (cas d’une rue étroite entre des bâtiments élevés ou d’un étage d’immeuble en ‹‹open space›› : 2 dimensions) et très limité en propagation axiale (cas d’un tunnel étroit : 1 dimension). Expérimentalement, en milieu ouvert, l’explosion d’1 kg de TNT à 1m engendre une surpression de 1200 kPa ; elle n’est plus que de 280 kPa à 2m (33).

3-2-5-Facteurs en rapport avec la victime

En dehors de l’importance du terrain, existent plusieurs paramètres influençant la sévérité des lésions et dépendant de la victime.

La position du sujet par rapport à l’explosion : doit être prise en compte. La gravité des lésions diminue avec l’éloignement de la source de l’explosion. De même, un sujet couché dans l’axe du déplacement de l’onde de choc présente des lésions moins graves qu’en position debout face à l’explosion (24,34).

Le poids de la victime : influe également sur la gravité des lésions, celles-ci étant d’autant moins graves que la victime est lourde(35).

La nature de la surface absorbante : Expérimentalement, les moyens de protection de type bouclier sont inefficaces contre l’onde de choc, on observe même une aggravation des lésions. De même, les gilets pare-balles portées par les forces de l’ordre, s’ils sont efficaces contre les lésions secondaires par projection d’éclats ou de débris, ne protègent pas l’organisme contre les lésions de blast et sont susceptibles de les aggraver(17). Quant aux protections auriculaires, du type casque antibruit, elles assurent vis-à-vis de l’onde de choc une protection efficace, mais ne doivent pas laisser passer un blast pulmonaire alors que les tympans sont intacts(36).

4- Etiologies(28)

Les conditions de survenue des ondes de choc sont très importantes à connaître car, parfois c’est sur cette seule donnée que la possibilité d’un blast va être évoquée. Il est très difficile d’établir un catalogue étiologique exhaustif mais si certaines circonstances sont d’emblée évocatrices, d’autres sont plus surprenantes.

On peut distingues plusieurs catégories :

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