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5. Pouvoir pathogène

5.5 Infections de la sphère ORL

5.5.1 Pharyngite aiguë

La pharyngite (ou angine), est une inflammation d’origine infectieuse des amygdales palatines voire de l’ensemble du pharynx. Elle constitue un syndrome qui associe une fièvre, une gêne douloureuse à la déglutition (odynophagie), et des modifications de l’aspect de l’oropharynx. L’angine érythémato-pultacée du SGA est caractérisée par des amygdales gonflées, rouges, recouvertes d’un enduit ou de points blanchâtres. Parmi les bactéries responsables d’angines et justifiant un traitement antibiotique adapté se trouvent : Corynebacterium diphteriae, Fusobacterium nucleatum/Treponema vincenti (angine ulcéro-nécrotique ou angine de Vincent) et Streptococcus pyogenes, la plus fréquemment rencontrée. Les angines bactériennes hors SGA sont beaucoup plus rares et se différencient facilement de l’angine érythémateuse ou érythémato-pultacée à SGA par le tableau clinique différent. En revanche, la distinction entre angine à Streptococcus pyogenes et certaines angines virales est plus difficile et ne peut pas se limiter à la simple clinique. On estime que l’angine érythémateuse est due au SGA dans seulement 15 à 25% des cas chez l’adulte, et 25 à 50% des cas chez l’enfant, notamment à l’occasion de phénomènes épidémiques (119), mais reste exceptionnelle avant l’âge de 3 ans.

Si les angines à SGA évoluent le plus souvent favorablement en 3-4 jours et ce, même en l’absence de traitement antibiotique, dans de rares cas, elles peuvent donner lieu à des complications septiques locorégionales, à type d’otite, sinusite, mastoïdite, phlegmon périamygdalien, abcès rétropharyngé, adénite ou cellulite cervicale (120), et à des syndromes post-streptococciques tels que RAA et GNA. Du fait de l’existence de telles complications, il a été longtemps admis en France, de traiter systématiquement par antibiotique toutes les angines. Mais l’incidence de ces complications devenant très faible dans les pays industrialisés, le bénéfice de l’antibiothérapie systématique au regard des inconvénients individuels et collectifs qu’elle entraîne a poussé la communauté médicale à revoir ses pratiques. La prise en charge des angines a changé radicalement en 1996. Afin de limiter l’extension de la résistance bactérienne de plus en plus décrite dans le cadre d’infections communautaires,

mais également de limiter les dépenses inutiles, des recommandations concernant la prise en charge des infections ORL sont établies par la SPILF (119) puis par l’ANSM (anciennement AFSSAPS) en 1999, réactualisées en 2011 (121). Elles limitent l’antibiothérapie pour les angines érythémateuses aux seules angines à SGA dépistées par un test de diagnostic rapide (TDR) disponible en cabinet de ville.

Pour rappel, devant une angine érythémateuse, les recommandations actuelles de l’ANSM préconisent :

- de pratiquer un TDR chez tous les enfants à partir de 3 ans (inutile avant l’âge de 3 ans) et chez les adultes ayant un score clinique de Mac-Isaac ≥ 2

- seul un TDR positif confirme l’étiologie à SGA et justifie la prescription d’antibiotiques - un TDR négatif ne justifie pas de contrôle supplémentaire par culture, ni de traitement

antibiotique. Seuls les traitements antalgiques et antipyrétiques sont utiles.

5.5.2 Scarlatine

La scarlatine débute brusquement par une fièvre à 39-40°C, des frissons, douleurs pharyngées et vomissements. Le patient présente au préalable une angine aiguë, suivie 24 à 48 heures après par un exanthème maculeux sans intervalle de peau saine dominant aux plis de flexion, une glossite (langue framboisée) d’évolution cyclique, et une desquamation post- éruptive en lambeaux au niveau des extrémités. En revanche, les formes frustres sont fréquentes. La souche infectante porte une ou plusieurs toxines érythrogènes (Spe), souvent acquises par conversion phagique : il s’agit d’une manifestation toxinique du SGA.

5.6 Infections ostéo-articulaires

Le SGA peut être responsable d’infections ostéo-articulaires à type d’arthrites septiques et d’ostéomyélites. D’après Ryan et al., le SGA serait à la troisième position (7%), derrière S. aureus (39%) et le pneumocoque (10%) des germes les plus fréquemment mis en évidence dans les infections articulaires (122). L’arthrite septique est une urgence thérapeutique. Elle engage le pronostic vital, du fait du risque de septicémie, et le pronostic fonctionnel, avec le risque de séquelles articulaires. Notons que les manifestations initiales du rhumatisme articulaire aigu, une complication post-streptococcique, peuvent mimer une arthrite septique mais il ne s’agit en aucun cas d’un processus infectieux.

Le SGA peut également engendrer des ostéites, par inoculation directe, ou extension par contiguïté d’un foyer septique cutané, ou des ostéomyélites (plus fréquentes chez les enfants) : infections osseuses acquises par voie hématogène. Dans ce dernier type d’infections, le SGA serait le second germe le plus fréquent, après S. aureus (123).

5.7 Infections gynéco-obstétricales

Le SGA peut être responsable d’infections gynéco-obstétricales à type de vulvo-vaginites, et d’endométrites, voire de péritonites pelviennes notamment en post-partum définissant les fièvres puerpérales. La fièvre puerpérale est due à la pénétration du SGA dans l’utérus après l’accouchement. Les patientes d’obstétrique sont particulièrement vulnérables aux infections invasives à SGA acquises via la rupture des barrières cutanées et muqueuses au moment de la délivrance. L’infection est d’abord locale, au niveau de l’endomètre, mais en l’absence de traitement efficace, évolue dans la plupart des cas en quelques semaines vers une septicémie mortelle. Le délai moyen de survenue des symptômes est relativement long, de 4 à 7 jours après l’accouchement. L’incidence des fièvres puerpérales était estimée à 0,06 cas pour 1.000 naissances dans une étude américaine de la fin des années 90 (124). Le taux de létalité dû aux fièvres puerpérales a été estimé à 3,5% dans cette même étude, bien inférieur aux taux rapportés à la fin du 19ème siècle avec près de 25 à 30% de décès. L’origine de l’infection peut

être endogène, le SGA étant présent initialement chez la patiente, ou nosocomiale, due à la transmission du SGA par le biais du personnel soignant notamment. Les épidémies rapportées d’infections invasives du post-partum à SGA sont généralement associées à une exposition à du personnel soignant infecté (125–128), et quelques rares cas de transmission attribuée à un autre patient (129), ou un équipement hospitalier contaminé (bidet (130), pomme de douche (131)). Les cas de transmissions nosocomiales peuvent être prévenus par des mesures d’hygiène renforcées, et doivent faire l’objet d’investigations afin de limiter le risque d’épidémie. En France, un guide a été rédigé en 2006 par le CSHPF concernant la prévention et l’investigation des infections hospitalières à S. pyogenes (132). Il rappelle, entre autre, l’importance du lavage des mains et l’obligation du port du masque chirurgical pour les sages- femmes et accoucheurs, ainsi que pour tout le personnel présent en salle d’accouchement et les accompagnants en cas de symptômes ORL.

5.8 Infections pleuro-pulmonaires

Le SGA peut être responsable de pneumopathies et pleurésies purulentes. Les pneumonies représentent 11 à 17% des infections invasives selon les études épidémiologiques (80,105). Les pneumonies à SGA sont souvent associées au SCTS et au décès. Des cas d’épidémies ont été décrits, notamment un cas groupé de pneumonies à SGA au sein d’une famille (133).

5.9 Infections intra-abdominales

5.10 Infections cérébro-méningées

D’après le réseau de surveillance français EPIBAC, les cas de méningites représentaient seulement 2% de l’ensemble des infections invasives à SGA en 2003. Ce type de présentation clinique est donc très rare.

5.11 Complications post-streptococciques

Les complications post-streptococciques sont des affections inflammatoires aseptiques à pathogénie auto-immune. On distingue :

- le rhumatisme articulaire aigu (RAA) ou maladie rhumatismale avec atteintes articulaire, mais également cutanée, du système nerveux central, et surtout cardiaque définissant la cardiopathie rhumatismale chronique (CRC) ;

- la glomérulonéphrite aiguë (GNA) de pronostic souvent favorable ;

- la chorée de Sydenham (ou danse de Saint-Guy) parfois associée à des atteintes rhumatismale et cardiaque ;

- l’érythème noueux et le purpura rhumatoïde qui peuvent relever d'une étiologie streptococcique.

Ces maladies post-streptococciques se déclarent généralement 1 à 6 semaines après une infection initiale à SGA, symptomatique ou non. Le processus exact de la pathogenèse n’est pas complètement élucidé mais est clairement auto-immun. Des dépôts de complexes immuns pourraient jouer un rôle, ainsi que des communautés de structure entre des antigènes streptococciques liés aux protéines M ou aux toxines, et des macromolécules tissulaires de l’hôte telles que laminine, myosine, collagène… (134). Certains types M auraient un pouvoir plutôt néphritogène ou rhumatogène.

D’après Carapetis et al., la prévalence mondiale des infections sévères à SGA serait au moins de 18,1 millions de cas avec 1,78 million de nouveaux cas chaque année. Et la plus grande part de ces infections serait représentée par les maladies cardiaques rhumatismales (CRC), avec une prévalence d’au moins 15,6 millions de cas dont 282 000 nouveaux cas et 233 000 décès chaque année (11). Là où les infections invasives à SGA représentent 663 000 nouveaux cas et 163 000 décès chaque année. Les complications post-streptococciques représentent donc un poids non négligeable des infections sévères à SGA au niveau mondial touchant surtout les pays en voie de développement.