Chapitre I- Plasticité du muscle squelettique II. Phénotype des muscles squelettiques Les fibres musculaires diffèrent entre elles par leur diamètre, le nombre de myofibrilles qu’elles contiennent, leur équipement mitochondrial, leur vascularisation ainsi que leurs 11 propriétés métaboliques et contractiles (vitesse à laquelle les têtes de myosines se détachent de l’actine). En effet, les fibres musculaires possèdent un métabolisme glycolytique, oxydatif ou oxydo-glycolytique, et sont à contraction rapide ou lente. Les propriétés contractiles et métaboliques des fibres ont permis de les classer en 2 types : fibres de type I et fibres de type II. Différentes isoformes de chaînes lourdes de myosine existent dans le muscle strié squelettique, certaines associées à une vitesse de contraction rapide (MyHC IIa, MyHC IId/x, MyHC IIb), d’autres à une vitesse de contraction lente (MyHC-I) (Tableau 1). Durant le développement ou la régénération, certaines isoformes apparaissent de manière transitoire ou peuvent être tissu spécifique. Il s’agit des fibres embryonnaire, néonatale, fœtale, extra-oculaire ou encore mandibulaire (Rushbrook et al., 1994; Gagniere et al., 1999; Weiss et al., 1999; Pette & Staron, 2000). II.1 Méthodes d’études du phénotype musculaire Plusieurs techniques sont utilisées pour distinguer les différents types de fibres. La mesure de l'activité ATPase des fibres musculaires sur coupes histologiques est la technique la plus utilisée dans le passé. En effet, les différences d’activité enzymatique des ATPases de la myosine sont révélées par une double incubation des coupes dans des solutions tampon acide (pH 4,3 puis 4,6), puis alcaline (10,3). Au microscope, les fibres lentes (I) apparaissent alors en foncé, les fibres rapides IIa en clair et les fibres rapides IIb en gris (Barrey, 1994). Cependant cette méthode basée sur l'activité enzymatique globale des fibres analysées ne permet pas de se prononcer de manière précise sur leur contenu en protéines contractiles spécifiques. La technique d’électrophorèse 1D permet de séparer les différentes isoformes de myosine en fonction de leur taille à partir d’extraits musculaires. (Kohn & Myburgh, 2006; Mizunoya et al., 2008a). Il existe plusieurs isoformes des chaînes lourdes et légères de myosine dont l’expression est étroitement régulée au sein des muscles squelettiques ou en réponse à des changements d’activité contractile. L’expression de ces isoformes dépend du type de fibre (rapide, lente) mais aussi de l’espèce. Par exemple, chez le rat 4 isoformes de chaînes lourdes de myosine (MyHC) ont été identifiées. Il s’agit des isoformes MyHC I, MyHC IIa, MyHC IIb, MyHC IIx. Bien que le gène soit présent dans le génome humain, l’isoforme MyHC IIb est absente chez l’homme, et seules les isofomes MyHC I, MyHC IIa et MyHC IIx sont présentes. Ainsi chez l’homme l’isoforme la plus rapide, hormis dans le muscle extra-oculaire 12 (où l’isoforme MyHC extra-oculaire est exprimée), est l’isoforme MyHC IIx alors que chez les rongeurs, il s’agit de l’isoforme MyHC-IIb. De nos jours, les différentes isoformes de myosines sont souvent mises en évidence par immunohistologie. En effet, les chaînes lourdes de la myosine lente et rapide ont des propriétés antigéniques distinctes ce qui a permis de préparer des anticorps monoclonaux anti-myosine lente et anti-anti-myosine rapide (Danieli Betto et al., 1986; Barrey, 1994). Il est donc possible d’identifier les différentes isoformes de chaînes lourdes de myosines et également de distinguer les fibres hybrides (à métabolisme oxydo-glycolytique). Ceci permet ainsi d’étudier les transitions de fibres. Type de fibres I IIA IIX IIB Contraction Lente Rapide MyHC I IIa IIx IIb Activité ATPasique Faible Forte Métabolisme Oxydatif Oxydo-glycolytique Glycolytique Vitesse de contraction Activité ATPase myosine alcaline lente rapide rapide rapide Activité ATPase myosine acide élevée faible faible faible Résistance à la fatigue +++ ++ + + Métabolisme énergétique Activité SDH (succinate déshydrogènase) +++ +++ ++ + Activité αGPDH (α-phosphoglycérate déshydrogénase) + ++ +++/- +++ Activité phosphorylase + +++ +++ +++ Nombre de mitochondries +++ ++ + +/- Tableau1 : Classification des fibres lentes (I) et rapides (II) grâce à leur type contractile (révélé à l’aide d’anticorps anti chaînes lourdes de myosine (MyHC)) et à leur type métabolique (analysé par la révélation de l’activité succinate déshydrogénase (SDH)). Adapté 13 II.2 Les fibres de type I Les fibres de type I appelées également fibres lentes sont caractérisées par un petit diamètre et une vitesse de contraction lente. Ce sont des fibres très vascularisées, riches en myoglobine, en mitochondries et en enzymes oxydatives. Ces dernières sont caractérisées par une faible activité ATPasique acide résistante à pH4.3 (Padykula & Herman, 1955; Brooke & Kaiser, 1970). Les fibres de types I possèdent peu de myofibrilles et développent ainsi une force très faible. Elles fonctionnent selon un métabolisme oxydatif (aérobie), produisent peu d’acide lactique et sont donc très résistantes à la fatigue. La grande quantité de myoglobine permet d’assurer un bon transfert d’oxygène et leur confère une couleur rouge. Ces fibres sont surtout utilisées lors d’exercices peu puissants et prolongés (maintien de la posture). II.3 Les fibres de type II Les différents sous-types de fibres de type II sont toutes caractérisées par une vitesse de contraction rapide mais un approvisionnement énergétique pouvant être plus ou moins dépendant de l’oxygène. Les fibres de type IIb sont des fibres peu vascularisées, pauvres en mitochondries mais très riches en glycogène. De ce fait, elles fonctionnent selon un métabolisme glycolytique (anaérobie). Ces fibres sont peu irriguées et possèdent peu de myoglobine d’où la couleur blanche qui caractérisent les muscles composés principalement de ce type de fibres. Ces fibres sont très fatigables mais très puissantes et sont donc sollicitées lors des contractions rapides et des exercices intenses. Les fibres de type IIa possèdent moins de myofibrilles mais plus de mitochondries que les fibres rapides glycolytiques IIb. Dans ce type de fibres, les deux types de métabolisme coexistent (Peter et al., 1972). Elles fonctionnent donc selon un métabolisme oxydo-glycolytique. Les muscles composés de ce type de fibres sont donc dotés d’une grande faculté d’adaptation. Les fibres de type IIx sont relativement peu décrites dans la littérature et sont caractérisées par un métabolisme oxydo-glycolytique intermédiaires entre les fibres de type IIa et IIb. 14 II.4 Composition des muscles squelettiques La distribution des fibres dans un muscle donné définit ses propriétés contractiles et métaboliques. Il existe deux catégories de muscles : 1- Les muscles à fonction posturale sont majoritairement composés de fibres de type I à contraction lente. Ils jouent un rôle dans le maintien de l’équilibre lors du mouvement et de la station debout. C’est le cas du soleus par exemple. 2- Les muscles à fonction phasique ou muscles d’action sont composés principalement de fibres de type II à contraction rapide. Ils interviennent lors des mouvements volontaires par exemple. La composition en fibre d’un muscle donné peut changer sous l’effet de certains facteurs comme l’âge, le stress ou l’exercice (Kirkendall & Garrett, 1998; Pette & Staron, 2001; Quindry et al., 2011). On parle alors de transition de type de fibres. Dans le document Mécanismes impliqués dans l'atrophie et la récupération musculaire après immobilisation chez le rat : rôle des altérations de la matrice extracellulaire (Page 36-40)