• Aucun résultat trouvé

2.2 Fuel starvation lié aux modes d’alimentation en hydrogène

2.2.2 Fuel starvation en mode bouché

2.2.2.3 Phénomènes locaux

Lors d’un épisode de fuel starvation, certaines zones sont pauvres en hydrogène, tandis que dans d’autres, sa pression partielle augmente, ce qui limite les surtensions (et améliore le trans-fert de masse) [162]. Par conséquent, la densité de courant se répartit de manière hétérogène au sein de la cellule.

Pour reproduire un appauvrissement localisé en hydrogène, Liang et al. [204] ont étudié la distribution de la densité de courant d’une cellule soumise à différentes stœchiométries d’hydro-gène (de 0.2 à 1). Leur cellule, décrite plus longuement en [205], est composée de cinq segments (segment n˚1 : entrées air et hydrogène). La figure 2.16 montre les évolutions des densités de courant locales (avec un courant global maintenu à 46 A) lorsque la cellule est alimentée avec de l’hydrogène, à une stœchiométrie égale à 1. Initialement la répartition de la densité de courant est assez homogène. La consommation progressive de l’hydrogène entraîne une baisse de concentration depuis la sortie anodique, ce qui a pour conséquence de diminuer la densité de courant locale dans la zone du segment n˚5 (sortie). Au fur et à mesure, cette baisse s’étend aux segments amont (de 5 à 2). En parallèle, on observe que la baisse de la densité de courant

d’un segment est compensée par une hausse du courant fourni par les segments correctement alimentés. A la fin du cycle, les densités de courant des segments n˚2 à 5 sont proches de zéro. Pour le segment n˚1, la densité de courant est en revanche passée de 10 A à plus de 40 A. Durant ce laps de temps, la tension de cellule a chutée de 0.75 V vers une valeur proche de 0 V. Lors de cette étude, Liang et al. [204] ont donc montré les évolutions locales de la densité de courant pour un épisode de fuel starvation. En revanche, ils n’ont pas abordé la question des dommages causées à l’AME.

Fig. 2.16 – Évolutions des densités de courant locales pour une cellule segmentée développée par Liang et al. [204]. L’anode est alimentée par de l’hydrogène (pur à 99.5%) à une stœchiométrie de 1. L’air et l’hydrogène circulent en co-courant et les segments sont numérotés dans la direction d’écoulement des gaz (c.-à-d. segment n˚1 : entrées air et hydrogène). La densité de courant globale est maintenue à 46 A par la charge. L’AME (230 cm2) est composé d’une membrane Nafion 212 et de deux couches catalytiques avec pour chacune d’entre elles un chargement en platine de 0.8 mg/cm2.

Baumgartner et al. [206] se sont intéressés à l’évolution des potentiels locaux (anode et cathode) lors d’épisodes de fuel starvation d’une cellule fonctionnant en mode bouché. Pour mener leurs investigations, ils ont utilisé une cellule équipée de quatre électrodes de référence placées du côté de l’anode (figure2.17). Le potentiel de l’électrolyte est mesuré par l’intermé-diaire d’une bande de Nafion dont une extrémité est en contact avec la membrane (côté anode). L’autre extrémité est plongée dans un récipient contenant 2 mL d’acide sulfurique à 0.1 M et dans lequel plonge également une électrode de référence au sulfate mercureux. Afin de garantir une bonne conductivité protonique, la bande de Nafion est humidifiée en passant à travers une solution d’eau distillée (figure 2.17a).

La figure2.18b montre les évolutions de la tension de cellule et des potentiels à l’anode et à la cathode aux niveaux des positions 1 (entrées air/hydrogène) et 4 (sorties air/hydrogène) lors du fonctionnement en mode bouché. L’accumulation d’eau et/ou d’azote est à l’origine d’une chute de la tension aux bornes de la cellule. Le compartiment anodique est purgé lorsque la tension de cellule atteint 0.4 V . Environ 500 secondes sont nécessaire pour passer d’une tension de cellule de 0.75 V à la valeur seuil qui déclenche la purge. L’évacuation des espèces accumulées

2.3. Conclusions

(a) Schéma AME + électrode de référence (b) Plaque anodique

Fig. 2.17 – Dispositif expérimental utilisé par Baumgartner et al. [206] (a) Schéma qui présente la structure du montage de l’AME et la connection qui permet la mesure du potentiel de l’électrolyte. (b) Plaque distributrice à l’anode (surface active : 25 cm2) et positions des quatre électrodes de référence. L’hydrogène circule à travers quatre canaux en triple serpentins.

lors de la purge permet de retrouver les performances.

Dans la zone proche de l’entrée des réactifs (position 1), on observe une légère augmentation du potentiel à l’anode (de l’ordre de 0.1 V ) à la fin du cycle. Les auteurs attribuent cette hausse à l’augmentation de la surtension de l’électrode négative suite à la baisse de pression partielle de l’hydrogène. Dans le même temps, la hausse (probable) de la densité de courant dans cette région crée une augmentation de la surtension au niveau de l’électrode positive ainsi qu’une augmentation de la chute ohmique (liée à la résistance protonique de la membrane). De ce fait, la tension aux bornes de la cellule diminue. Puisque les hausses de potentiel à l’anode sont faibles, le potentiel à la cathode reste proche de la tension de cellule.

Près de la sortie des réactifs (position 4), l’appauvrissement en hydrogène entraine une hausse du potentiel à l’anode suivie d’une augmentation significative de potentiel à la cathode. La perméation de l’oxygène (depuis la cathode vers l’anode) à travers la membrane, la corrosion du carbone et les réactions liées au platine peuvent également contribuer à la hausse de potentiel aux interfaces membrane/électrodes. Quelques instants avant la purge, le potentiel à la cathode atteint 0.9 V . Ces augmentations localisées de potentiel s’accompagnent d’émissions de CO2 en sortie air, qui témoignent de la corrosion du support carboné au niveau de l’électrode positive (figure 2.18a). Pour compléter ces observations, Matsuura et al. [207] ont mis en évidence la diminution de l’épaisseur de la cathode dans la zone soumise au fuel starvation après un fonctionnement en mode bouché.

2.3 Conclusions

La durée de vie limitée est l’une des principales barrières qui freinent la commercialisation à grande échelle des PEMFC. Parmi les phénomènes à l’origine d’une dégradation prématurée

(a) Tension de cellule + émissions de CO2 (b) Tension de cellule + potentiels locaux Fig. 2.18 – (a) Tension de cellule et émissions de CO2 (en ppm) lors d’un fonctionnement en mode bouché. La cellule conçue par Baumgartner et al. [206] est équipée de quatre électrodes de référence qui permettent de mesurer localement les potentiels à l’anode et à la cathode. Le compartiment anodique est purgé lorsque la tension de cellule atteint 0.4 V . (b) Évolutions de la tension de cellule et des potentiels locaux en position 1 (figure du haut) aux niveaux des entrées air/hydrogène et en position 4 (figure du bas) aux niveaux des sorties air/hydrogène lors d’un fonctionnement en mode bouché. La cellule (surface active de 25 cm2) fonctionne à un courant imposé de 10 A et sa température est maintenue à 70˚C. L’hydrogène en entrée est sec tandis que le compartiment cathodique est alimenté avec de l’air humidifié à 70% à une stœchiométrie de 2.2.

2.3. Conclusions de l’ensemble membrane-électrodes, on retrouve le fuel starvation. Dans le cas des démar-rages/arrêts, de nombreux efforts ont été fait pour comprendre les mécanismes de dégradation liés à la présence d’un front air/hydrogène à l’anode.

En ce qui concerne le mode bouché, peu d’études se sont intéressées aux dommages causés par le déficit en hydrogène. En effet, il s’agit de phénomènes essentiellement locaux difficiles à étudier à l’échelle d’un stack. Comme présenté au cours de ce chapitre (cf. § 2.2.2.3), Liang et al. [204] ont eu recours à l’utilisation d’une cellule segmentée pour mesurer la distribution locale de la densité de courant lors d’un épisode de fuel starvation. De leur côté, Baumgartner et al. [206] ont eu recours à l’utilisation d’électrodes de référence afin de mettre en évidence les hausses de potentiel (anode et cathode) près de la zone fermée pour quelques cycles de fonctionnement en mode bouché. Ces mesures ont été couplées à la mesure de CO2 en sortie de cathode et à des analyses post mortem d’AME. Toutefois, la diversité des conditions de fonctionnement et des techniques utilisées ne conduisent qu’à une interprétation partielle des résultats. A notre connaissance, aucune étude ne s’est intéressée, pour l’heure, à l’impact sur le long-terme du fuel starvation en mode bouché.

Les objectifs des travaux présentés dans ce manuscrit sont donc de (i) comprendre les mécanismes de dégradation de l’AME lors d’un fonctionnement prolongé en mode bouché et (ii) contribuer au développement d’un nouveau test de vieillissement accéléré (AST) basé sur une dégradation rapide et localisée des matériaux en cœur de pile.

Pour répondre à ces objectifs, un banc d’essais a été mis en place (présenté dans le chapitre suivant). Il s’appuie sur l’utilisation d’une cellule segmentée équipée d’électrodes de référence qui permet une mesure simultanée des densités courant et des potentiels (anode/cathode) locaux. Ces mesures sont complétées par différentes caractérisations électrochimiques et par la mesure de la concentration de CO2 en sortie air qui permet de quantifier la corrosion du support carboné.

Chapitre 3

Outils de diagnostic et descriptif du banc

d’essai

Sommaire

3.1 Outils de diagnostic . . . 70