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1.1 La pile à combustible à membrane échangeuse de protons

1.1.2 Verrous technologiques

1.1.2.1 Filière hydrogène : production, stockage et distribution

L’hydrogène est l’élément le plus simple et le plus abondant de l’univers. En revanche, il n’existe pas, isolé, à l’état naturel mais il est toujours lié à un autre élément : principalement le carbone et l’oxygène.

La production d’hydrogène. Actuellement, la production annuelle d’hydrogène avoisine les 60 millions de tonnes (soit environ 140 Mtep5) [28]. Par comparaison, les besoins énergétiques français pour les transports, pour l’année 2013, se sont élevés à près de 49 Mtep6[29]. Toutefois, cet hydrogène se destine essentiellement à l’industrie chimique et pétrochimique. La production d’ammoniac (NH3), qui se fait essentiellement par synthèse directe à partir de dihydrogène et de diazote (N2), représente environ 50% de la consommation mondiale d’hydrogène [30]. A partir de différentes matières premières, plusieurs procédés permettent de produire de l’hydrogène. Malheureusement, l’essentiel de la production actuelle est issu de matières fossiles : l’obtention

5. Mtep : millions de tonnes d’équivalent pétrole. Il s’agit d’une unité de mesure qui correspond au pouvoir calorifique d’une tonne de pétrole (soit 1 tep vaut environ 42 GJ ).

6. De manière simplifiée, si l’hydrogène produit dans le monde était destiné à alimenter des véhicules équipés de PEMFC, cela couvrirait près de trois fois les besoins du parc automobile français (soit 120 millions de véhicules contre 1 milliard d’automobiles en circulation dans le monde).

d’hydrogène à partir du reformage du méthane (1.1) est la technique la plus économique et la plus répandue (environ 48% de la production totale) [31].

CH4+ H2O → CO + 3H2 (1.1)

On retrouve ensuite la production d’hydrogène à partir d’huiles (hydrocarbures liquides) et de charbon avec respectivement 30% et 18% de la production totale [31, 32]. Ces modes de production sont polluants puisqu’ils émettent du CO2 et d’autres gaz à effet de serre. La mise au point de procédés de capture de CO2 (Carbon Capture and geological Storage, CCS) peut permettre de réduire, à court et moyen terme, l’impact environnemental de la production d’hydrogène à partir d’énergies fossiles.

Parmi les autres modes de production, l’électrolyse de l’eau offre la possibilité de produire de l’hydrogène à partir d’électricité décarbonnée. L’électrolyse de l’eau (1.2), est une technique qui permet de décomposer une molécule d’eau (H2O) en dihydrogène (H2) et en dioxygène (O2) grâce à un courant électrique. La surproduction d’électricité renouvelable ou nucléaire serait à l’avenir un moyen de produire de l’hydrogène « vert », peu ou pas carboné.

H2O → H2+ 1

2O2 (1.2)

Avec de faibles rendements d’électrolyseur, cet hydrogène reste coûteux [33]. De nombreux efforts sont fait pour améliorer ce rendement, notamment en fonctionnant dans des conditions de pression et de température élevées [33–35]. En revanche, ces conditions favorisent les dégra-dations des matériaux et limitent la durée de vie des électrolyseurs [32].

Le stockage de l’hydrogène. L’hydrogène a une densité énergétique massique de 143 M J/kg, ce qui est trois fois plus important que les hydrocarbures liquides (gazole, essence, GPL butane, GPL propane, etc.). En volume, la densité d’énergie est de 5.6 MJ/l pour de l’hy-drogène à 700 bar, ce qui est trois fois plus faible que ces mêmes hydrocarbures liquides [36]. Même à haute pression, ces chiffres traduisent la difficulté de stocker de l’hydrogène gazeux face aux carburants liquides et même au gaz naturel. La liquéfaction de l’hydrogène permet d’améliorer la quantité d’énergie contenue dans un litre d’hydrogène (elle passe à 10.1 MJ/l) mais le processus de liquéfaction est plus énergivore et requiert des installations complexes [32]. En effet, l’hydrogène devient liquide à -253˚ C, ce qui nécessite entre 10 et 40% de puissance supplémentaire par rapport à la compression [37] si bien que l’hydrogène liquide est jusqu’à deux fois plus cher que l’hydrogène comprimé [38]. Le stockage de l’hydrogène comprimé dans des réservoirs reste aujourd’hui la solution la plus répandue, bien que d’autres techniques de stockage soient en cours de développement.

Parmi les solutions alternatives, on retrouve le stockage sous forme solide. Après sa produc-tion, l’hydrogène peut être stocké « dans » différents composés de haute capacité (c.-à-d. avec une grande surface spécifique) : les hydrures métalliques [39,40], les alliages métalliques à base de magnésium [41], quelques matériaux à base de carbone [42], ou d’autres hydrures complexes à base de bore et d’aluminium [43,44]. Selon leurs structures, ces métaux sont capable de créer une liaison chimique avec l’hydrogène. A faible température, l’hydrogène et le métal sont liés, tandis que l’hydrogène gazeux se libère lorsque le solide est chauffé. La quantité d’hydrogène stockée peut alors atteindre entre 8 et 20% de la masse du solide [44]. A noter que la diffusion de l’hydrogène à travers le solide peut conduire à une fragilisation des matériaux [45,46]. Pour des raisons de sécurité, ce type de stockage doit faire l’objet d’une maintenance régulière.

1.1. La pile à combustible à membrane échangeuse de protons La distribution de l’hydrogène. Différentes options existent quant au transport et à la distribution de l’hydrogène. Il peut être acheminé sous forme gazeuse ou liquide et transporté par camions ou par pipelines. La compétitivité de chaque technique dépend du volume d’hy-drogène transporté mais également de la distance à couvrir. Les pipelines sont caractérisés par un faible coût de fonctionnement mais nécessitent des infrastructures importantes et de lourds investissements. Cette méthode est préférée pour un volume de transport important sur de très longues distances. Il existe aujourd’hui plusieurs milliers de kilomètres de pipelines, à travers le monde, qui sont utilisés pour acheminer de l’hydrogène pour le compte de l’industrie chimique et pétrochimique. Parmi les réseaux de distribution les plus importants, on retrouve le réseau nord européen géré par Air Liquide (figure 1.13). Il est constitué de 879 km de pipelines trans-portant de l’hydrogène, dans une zone qui s’étend du sud des Pays-Bas au nord de la France en passant par la Belgique.

Fig. 1.13 –Réseaux de distribution nord-européen gérés par Air Liquide avec de l’oxygène (en bleu : 1.034 km), de l’azote (en vert : 732 km), de l’hydrogène (en rouge : 879 km) et du monoxyde de carbone (en noir : 56 km) circulant dans des pipelines [47].

En supposant que les véhicules équipés de PàC arrivent sur le marché de manière massive, il faudra rapidement développer des infrastructures pour la distribution au grand public, pour le moment quasi inexistantes. Dans un premier temps, il serait judicieux de proposer des unités de production et de distribution décentralisées qui minimisent les investissements. A plus long terme, la stratégie pourrait être de centraliser la production avec un réseau de distribution ramifié et plus étendu. A noter qu’il n’existe pas une seule et unique stratégie de développement mais que plusieurs scénarios peuvent être envisagés. Plusieurs auteurs [30, 32, 48, 49] se sont intéressés aux différentes options qui nous seront offertes pour le développement d’une filière hydrogène durable. Mais en parallèle, il nous faudra répondre aux deux verrous technologiques majeurs et souvent interdépendants : le coût et la durée de vie des systèmes PEMFC.