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Structure hospitalière et positionnement du cadre de proximité

4- Peut-on comparer l’hôpital à une entreprise ?

L’approche économique hospitalière a vu le jour dans les années 1970 avec la crise économique française. Ce phénomène conjoncturel a favorisé les travaux sur l’"hôpital entreprise" dont toutes les analyses concourent à nous montrer la nécessité de maîtriser les dépenses de santé et plus singulièrement les dépenses hospitalières. « L’hôpital figure parmi les organisations les plus complexes et ses administrateurs s’efforcent de lui appliquer des modalités de gestion et de rationalisation semblables à celles qui prévalent dans les grandes entreprises » (Paicheler, 1995, p.8).

L’hôpital est soumis à de profondes évolutions comparables à celles que connaissent les services et l’industrie, issues des demandes diversifiées des patients et de leur famille et donc à la recherche de la qualité, d’interdépendance croissante entre services voire entre hôpitaux. Et ces évolutions se produisent dans un contexte de préoccupation budgétaire de maîtrise des dépenses de santé contraignant à rechercher une meilleure efficacité du système. « La santé est un bien marchand, en ce sens qu’il est, d’une façon ou d’une autre, vendu et acheté. Il est acheté par une clientèle de mieux en mieux informée et de plus en plus exigeante sur la qualité du "produit". Il est vendu soit par des entreprises nationales (hôpitaux publics) soit par des entreprises privées (hôpitaux privés). […] Il n’y a donc aucun monopole. La monnaie d’échange est assurée par la "sécu" et les assurances ou les mutuelles complémentaires » (Iborra, Johanet, 1989, p.75).

Traditionnellement, l’activité des établissements de santé se comptabilisait en lits, journées d’hospitalisation, entrées de malades, durée de séjour et taux de remplissage des lits, en hospitalisation complète ou incomplète (de jour, de nuit ou de semaine). Mais ces outils sont désormais inadaptés par leur absence de qualité économique et managériale. « Progressivement, les hôpitaux sont sortis du cadre d’une gestion essentiellement comptable, patrimoniale et passive pour entrer dans l’ère de règles ou de pratiques empruntées au management des entreprises modernes » (Bonnici, 1998, p.14).

On peut considérer que les hôpitaux sont entrés dans une phase spécifique de rationalisation, qui, pour le dire en termes wébériens, ne touche pas seulement à la manière dont les moyens sont mis au profit d’une fin, mais aussi à la définition même de l’activité.

« Dans les évolutions des systèmes de santé on peut constater des transformations liées aux dynamiques de la normalisation qui participent aux politiques de santé. On constate en effet

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un développement des certifications qualité, des règles de sécurité, des dispositifs gestionnaires au plus près de l’activité. Ainsi les politiques publiques de ces dernières décennies ont cherché à introduire progressivement la dimension économique dans la décision de soin. L’instauration d’un système d’information de santé n’a pas seulement une finalité comptable et statistique mais elle tend à évaluer l’efficacité des activités thérapeutiques et soumettre l’activité médicale au contrôle de la représentation nationale et aux services de l’administration. Ces transformations ne sont pas sans effet sur les charges de travail, la répartition des activités et l’échange des informations, notamment parce qu’elles introduisent de nouvelles dépendances entre services. Ce travail d’organisation est d’autant plus complexe que différentes réformes se succèdent et sédimentent des pratiques, des règles, des habitudes qui se superposent sans toujours permettre le fonctionnement souple et réactif nécessaire aux professionnels » (Bercot, Mayere, 2009).

Toute entreprise propose un produit qu’elle doit vendre pour en tirer les bénéfices et par là même rentabiliser le capital investi. La notion de santé et d’économie semblent s’opposer. Le patient est-il un client, c'est-à-dire un consommateur ? Economiquement, les rôles du consommateur, du décideur et du payeur sont tenus par la même personne. Or, pour la santé, le consommateur c’est le patient, le décideur c’est le médecin et le payeur est l’organisme de remboursement (Sécurité sociale, mutuelle). Le consommateur recherche le meilleur résultat à moindre coût. Pour la santé, le consommateur est privé de calcul économique par l’impossible connaissance de l’avenir sur l’évolution de sa santé.

« La régulation marchande se fonde sur la confrontation producteur-consommateur. Cette confrontation est quasi inexistante dans la relation médecin-patient. Cette absence de confrontation s’appuie sur trois singularités de l’activité ou consommation sanitaire :

- la consommation sanitaire a des effets collectifs (vaccinations), et du même coup, devient utile pour l’ensemble de la population ;

- la consommation sanitaire est relative à l’incertitude. La maladie et l’accident sont imprévisibles ;

- la consommation sanitaire se rattache à l’asymétrie d’information entre le médecin et le patient » (Ribaut, Aromatario, 1991, p.180).

Les notions économiques de l’entreprise - prix de revient, marge, bénéfice - ne sont pas présents à l’hôpital. Néanmoins, le directeur d’hôpital a un rôle de gestionnaire au même titre qu’un directeur d’entreprise.

L’hôpital est avant tout un service public devant assurer la continuité, l’égalité des soins et l’adaptation de l’hôpital aux besoins de la population. Pourtant, aujourd’hui, les restrictions

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budgétaires s’imposent et les diverses mesures allant dans ce sens doivent être appliquées. L’hôpital est actuellement pris en étau entre le devoir de soigner, de satisfaire le besoin légitime des malades et l’obligation de se soumettre au contrôle de l’Etat et des financeurs, de soigner donc à moindre coût.

Jean De Kervasdoué montre que l’hôpital est à la fois une entreprise publique et un établissement de santé. (Kervasdoué, 2004, p.64) Selon lui, comme une entreprise, l’hôpital a pour organe de décision un conseil d’administration (CA) et un directeur, et pour organe consultatif un comité technique d’établissement (CTE) et un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHST). De plus, l’hôpital peut, selon De Kervasdoué, être comparée a une entreprise publique puisque le directeur est ordonnateur des dépenses et les agents sont des fonctionnaires. Tout comme une entreprise publique, l’hôpital est soumis au contrôle financier et au Code des marchés publics et composé de commissions administratives paritaires (CAP). Le directeur d’établissement peut avoir à rendre des comptes devant la chambre régionale des comptes, la cour des comptes, les tribunaux administratifs, judiciaires ou pénaux. Il peut être contrôlé par l’Inspection générale des affaires sociales et plus rarement par l’Inspection générale des finances. Mais plus qu’une entreprise, l’hôpital est un établissement public de santé composé des commissions médicale d’établissement (CME) et du service de soins infirmiers (CSSI), d’un conseil de service et de département, et d’un comité de lutte contre les infections nosocomiales (CLIN). Jean De Kervasdoué résume cet emboîtage institutionnel par le schéma suivant :

71 Schéma 3 : Emboîtage institutionnel (Ibid., p.71)

Instances décisionnelles Instances consultatives

Le soin n’a pas de valeur économique, mais il est une valeur culturelle. Au sein de la structure hospitalière, les multiples catégories professionnelles développent des logiques différentes. Là où l’administrateur porte sur l’hôpital une logique de production de soins, le médecin ou l’infirmière y délivrent des soins et le malade les reçoit. Beaucoup d’auteurs considèrent de façon très schématique le soin comme une profession de service, mais un service qui implique la production d’un bien : le soin, des consommateurs : les patients, et des producteurs : les professionnels. Ce regard sur l’hôpital est également porté par nombre de politiciens dont les discours convergent pour freiner la croissance des dépenses de santé. « L’institution hospitalière voudrait être gérée comme une entreprise économique où le rôle de l’Etat apparaît prépondérant » (Autret, 2002, p.11).

L’organisation administrative de l’hôpital public est caractérisée par la lourdeur et la complexité organisationnelle. Selon Jean De Kervasdoué, « l’hôpital est par nature une

L’hôpital est un établissement de santé

L’hôpital est une entreprise publique

CME Comptable

du Trésor

CSSI

CLIN CAP

Conseils de service ou de département L’hôpital est une

entreprise

CA Directeur

CTE CHST

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organisation complexe de par la multiplicité des rôles, des acteurs, des techniques et des attentes souvent contradictoires du public et des autorités de tutelle » (Kervasdoué, op.cit., p.6). L’organisation hospitalière se caractérise par une multiplication de pouvoirs. Dans l’hôpital cohabitent de nombreuses fonctions : soignantes, médicales, techniques, administratives, etc. Il existe une hiérarchie entre ces fonctions, sans qu’aucune d’elles ne dispose de la connaissance globale permettant la seule décision. « La hiérarchie entre les fonctions empêche la connaissance globale nécessaire à toute décision » (Clément, 1993, p.171).

Selon Clément, aucun pouvoir au sein du système hospitalier n’aurait une prééminence sur l’ensemble au point d’assurer l’élémentaire coordination du système. (Ibid., p.169) L’organisation hospitalière apparaît à ce titre dysfonctionnel et son caractère bureaucratique n’apparaît que plus évident. En fait, « tout est fait par les soi-disant responsables pour qu’ils reportent sur leurs subordonnés leurs responsabilité. Le caractère hiérarchique n’est pas le moindre qui caractérise une institution bureaucratique. Cela va de pair avec l’élaboration d’une procédure qui permet l’expression de la hiérarchie en réglementant tous les aspects de la vie professionnelle de chacun » (Ibidem).

Pour Max Weber, la bureaucratie constitue l’une des formes du "désenchantement du monde" et exprime le type même de la domination légale-rationnelle. (Weber, 1995) L’autorité y est fondée sur la compétence, et non sur la tradition ou le charisme du chef ; le pouvoir est hiérarchisé ; la division du travail y est effective ; et il y a un degré élevé de spécialisation des responsabilités, des droits et de l’autorité. Selon Max Weber, le type idéal de l’organisation bureaucratique est caractérisée par :23

- une continuité des fonctions, l’agent n’est pas propriétaire de sa fonction et ne peut pas la transmettre ;

- un fonctionnement selon des règles impersonnelles et précises, sans affectivité et non adaptable à des cas particuliers ;

- une existence d’une hiérarchie et de modalités de contrôle ;

- une définition rigoureuse des postes, des fonctions et des compétences.

Si Weber voit dans cette impersonnalité un trait de la modernité garant de la rationalité, il méconnait les effets pervers qui peuvent se développer au sein de telles structures.

Michel Crozier, dans sa définition de la bureaucratie, met l’accent sur ses faiblesses :

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Les critiques de cet idéal type sont néanmoins nombreuses : Merton, Selznick, Crozier, etc. sans être jamais fondamentalement remis en cause.

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- un grand nombre de structures formelles, accompagnées d’un foisonnement de circulaires, notes de service, procédures, protocoles ;

- une peur de la relation en face à face, l’utilisation des procédures permet d’éviter cette relation ;

- une routine et un ritualisme. La rigidité et la référence à la réglementation deviennent des contraintes intégrées dans les comportements, l’importance donnée au facteur d’ancienneté amplifie ce phénomène ;

- une stratification et une spécialisation. De nombreux échelons hiérarchiques existent et la centralisation des décisions maintient éloignée l’instance de décision du niveau d’exécution. Les informations circulent difficilement entre la base et le sommet ;

- un fonctionnement par réseaux parallèles, le plus souvent en dehors de la ligne hiérarchique normale. (Crozier, 1971)

A priori, l’hôpital peut apparaître comme le type idéal de la bureaucratie. Henri Mintzberg décrit d’ailleurs l’hôpital comme une bureaucratie professionnelle24

où domine le pouvoir de l’expert. (Mintzberg, 1981) L’expert s’identifie davantage à son corps professionnel qu’à l’organisation. Le professionnel dispose d’une expertise et d’une large autonomie25

(c’est le cas en particulier des médecins). Cette bureaucratie professionnelle est décentralisée et démocratique. Pourtant, la complexité du système hospitalier est plus ardue encore.

Ainsi, d’après l’organigramme hospitalier, le personnel médical n’a pas de pouvoir hiérarchique, pourtant l’observation montre que les médecins exercent une autorité à tous les niveaux de la structure de l’hôpital : sur les infirmières, le personnel de service et sur les directeurs eux-mêmes lorsque les médecins font partie du conseil d’administration. Ainsi, « on voit donc apparaître deux lignes d’autorité, l’une profane –représentée par l’administration- et l’autre professionnelle, incarnée par les médecins. La ligne d’autorité administrative s’impose à l’ensemble des personnels hospitaliers, il s’agit d’une autorité de nature bureaucratique qui fonctionne selon une hiérarchie clairement déterminée. En revanche, la ligne d’autorité médicale est de nature charismatique et l’une des caractéristiques du charisme est de braver les règles administratives » (Carricaburu, Ménoret,

24 Henri Mintzberg distingue la bureaucratie professionnelle de la bureaucratie mécanique, cette dernière étant fondée sur une autorité de position qui est de nature hiérarchique. Le pouvoir formel est clairement situé au sommet, les procédures sont très formalisées et les règles de communications formelles prolifèrent.

25 Pour le dictionnaire Larousse, le terme d’autonomie dénote « l’indépendance, la possibilité de décider pour un organisme, pour un individu, par rapport à un pouvoir central, à une hiérarchie, à une autorité ». Mais ce terme a également une connotation plus vaste de valeurs affectives (comme l’indépendance et la liberté) qui viennent enrichir et perturber la signification du terme.

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2004, p.28). La direction d’établissement et le corps médical disposent chacun de compétences et de zones de pouvoir spécifiques, leur activité est de nature différente, et de ce fait, la répartition du pouvoir est inégale. Selon Danièle Carricaburu et Marie Ménoret, le corps médical a un pouvoir d’influence largement plus important que celui de la direction administrative lorsque que l’on compare la complexité de leurs tâches, le statut professionnel des individus et l’importance sociale de l’activité. (Ibid., p.29) Ainsi, bien que les médecins ne soient pas les hiérarchiques directes des infirmières, ils leur donnent des ordres. Jean De Kervasdoué part du constat que les hôpitaux existent pour permettre aux médecins et au personnel de soigner les malades qui se présentent. Or, il en déduit que l’organisation hospitalière fonctionnerait bien si l’on donnait le pouvoir aux seuls médecins. Mais il constate que cela n’a jamais été le cas : les ordres religieux, la royauté ou l’Etat sont toujours intervenus pour que le pouvoir des médecins ne soit pas absolu. (Kervasdoué, op.cit., p.43) Dans l’organisation hospitalière, s’est mise en place une division du travail réglée autour de la profession médicale, prenant la forme d’une hiérarchie de paramédicaux. Anselm Strauss a montré comment le caractère professionnalisé du milieu hospitalier joue sur l’ordre qui s’y négocie. Des professionnels ou des "profanes", aux formations et aux objectifs divers se trouvent à des étapes différentes de leurs carrières et ainsi s’inscrivent dans des modes distincts d’investissement dans le métier. (Arborio, 2009, p.51)

Chaque corps de profession essaye de légitimer son pouvoir et sa place au sein de l’hôpital. Pour exemple, la commission médicale d’établissement est l’instance consultative la plus importante dans les établissements publics de santé. A côté, la commission du service de soins infirmiers, composée de trois collèges : cadre infirmier, infirmier et aide-soignante, et présidée par le directeur de service de soins infirmiers, sert surtout à légitimer la place et le rôle du personnel soignant non médical dans l’établissement public de santé. A cette complexité de l’institution hospitalière, il faut également de plus en plus prendre en compte la place grandissante de la technique, mais aussi les acteurs extérieurs qui font partie de l’environnement de l’hôpital : les réseaux, et les patients qui deviennent eux aussi de nouveaux acteurs du soin. « Le nombre et la diversité des intervenants de l’hôpital vont en augmentant : en une semaine d’hospitalisation, un malade pourra voir jusqu’à une cinquantaine de personnes différentes se succéder auprès de son lit. La spécialisation extrême des praticiens, l’intervention massive de consultants externes renforcent la segmentation et l’éclatement du collectif de soin, avec des risques de retentissement sur les malades comme sur les personnels, plus spécialement les infirmières, car ce sont elles qui assurent l’interface

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principale entre les patients et la "machine" de l’hôpital » (Grosjean, Lacoste, 1999, p.4). L’hôpital doit repenser sa gestion dans le cadre de financements limités et redéfinir ses orientations en tenant compte des autres acteurs impliqués dans le système local de soins : le secteur privé, les médecins libéraux ou les CHU par exemple.

Dans ce système d’organisation hospitalière, l’individu est toujours le chef de quelqu’un et le subordonné de quelqu’un d’autre. C’est ce qui fait, selon Jean-Marie Clément que personne n’est réellement au sommet puisque même le Directeur est soumis à la tutelle de l’Etat. (Clément, 1993, p.170) Ce système de fonctionnement est autant présent entre les différentes fonctions qu’à l’intérieur de chacune de ces fonctions. « L’hôpital n’est pas une entreprise mais une fédération de micro-entreprise que sont les services » (Perot, 1989, p.30).

L’organisation hospitalière se caractérise pourtant par une juxtaposition de fonctions qui s’ignorent délibérément. « L’ignorance entre les fonctions permet la toute-puissance de la hiérarchie » (Clément, op.cit., p.172). Ainsi, chaque fonction dispose de sa hiérarchie avec ses chefs et ses agents. La fonction soignante se trouve à l’intersection des fonctions administrative et médicale, et en subit les contrecoups. « Pour les uns, l’encadrement soignant doit être un écran vis-à-vis de l’administration, pour les autres le même encadrement doit être un porte-parole et une courroie de transmission vis-à-vis des médecins » (Ibid., p.173).

Michel Crozier et Erhard Friedberg étudient l’organisation comme un phénomène autonome, obéissant à ses propres règles de fonctionnement, non dictées par des contraintes extérieures. L’hôpital est alors envisagé comme un ensemble systémique à l’intérieur duquel les différentes parties (c'est-à-dire de multiples systèmes) sont en interaction. Le système est ainsi caractérisé par l’importance de chacune de ses parties, dont il constitue au final plus que la somme, dans un "construit" humain collectif et contingent, au sein duquel la liberté des acteurs, réelle et relative, intervient à tout moment. (Crozier, Friedberg, 1977)

Depuis la fin des années 1960, la question de l’organisation hospitalière se complique pour trois raisons principales :

- Les avancées constantes et rapides de la recherche. Le domaine médicale et paramédicale se spécialisent toujours plus et les connaissances ne cessent d’augmenter accompagnées des outils, des méthodes et des savoirs-faires qui s’y rattachent.

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- L’exigence de qualité et de sécurité passe dans la pratique et exige des procédures écrites qui ne font pas partie des habitudes plus orales de l’hôpital. (Ibid., p.45)

L’hôpital est une organisation dont l’efficacité repose essentiellement sur la compétence des professionnels. « La notion de bureaucratie professionnelle développée par Henri Mintzberg met l’accent sur l’originalité de l’organisation hospitalière où les services, unité de production indépendantes et spécialisées, dominent. La spécialisation des unités hospitalières est forte et les tâches de coordination constituent une fonction critique essentielle. […] Par ailleurs l’expertise spécialisée des professionnels n’est plus le seul fondement de l’organisation du travail : la logique statutaire joue un rôle de plus en plus important » (Schweyer, 2003, p.247-248).

La loi "Hôpital, patients, santé, territoire"26 de Roselyne Bachelot, ministre de la Santé, a pour objectif de réorganiser le système hospitalier et surtout de répondre à son état de crise, de réformer en profondeur la régulation de la démographie médicale, et d’amener les hôpitaux publics à l'équilibre budgétaire en 2012. Globalement, les adversaires de la loi dénoncent une logique d'"hôpital entreprise" contenue dans cette réforme.

La rationalité et l’efficience des coûts se retrouvent de plus en plus au cœur de la fonction hospitalière. C’est sans doute grâce à ses caractéristiques bureaucratiques qui présentent des aspects d’efficacité, comme le souligne Weber, que paradoxalement on parvient en partie à sauvegarde la qualité des soins. La multiplication des acteurs, l’augmentation quantitative et qualitative du personnel infirmier rendent nécessaire une organisation rationnelle. A ce titre, la production de protocoles, la définition rigoureuse des postes, des fonctions et des compétences permet de continuer à apporter des soins de qualité aux patients.

Les professionnels du soin doivent désormais intégrer la gestion dans leur activité, mais comment peuvent-ils équilibrer qualité de service et économie ?

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Le texte de loi a été adopté le 23 juin 2009 par l’Assemblée nationale et le 24 juin 2009 par le Sénat. Il est paru au Journal Officiel le 22 juillet 2009. Les textes d’application seront publiés vers la fin du premier semestre 2010.

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5- Rationalité et qualité

Où se situent les soignants entre mission de soin et contraintes budgétaires ?