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Chapitre 3 Dispersion et pertes dans les micro-résonateurs

3.2 Pertes internes dans les micro-résonateurs

3.2.2 Pertes dues à la rugosité

Dans les guides à haut contraste d'indice, la rugosité est considérée comme la principale contribution aux pertes [30], [31]. Elle est donc particulièrement importante pour les guides exploitant la filière SiN ou GaAs, et présentant de fortes valeurs de champs à leurs interfaces avec l'extérieur. Par ailleurs, les techniques de fabrication des guides engendrent nécessairement des parois latérales dont la rugosité est non négligeable (les parois supérieures et inférieures étant généralement relativement lisses à l’issue des procédés de fabrication). Ainsi, dans un guide ou une cavité de section bidimensionnelle, les pertes par rayonnement dus à la rugosité affecteront de manière plus importante les modes TE (polarisés parallèlement aux plans horizontaux) car leurs oscillations s’effectuent perpendiculairement aux parois latérales et leur intensité aux interfaces est plus importante [30]. Les modèles théoriques visant à estimer ces pertes par rugosité ont tout d'abord été développés dans les années 1970 [32], [33]. Par la suite, ils ont été simplifiés et leur précision améliorée [34]. La majeure partie d'entre eux est basée soit sur la théorie des modes couplés [35], [36] soit sur la méthode des courants volumiques [34], [37], [38]. Le modèle de Payne-Lacey [34], aujourd’hui largement accepté en raison de sa simplicité, de son efficacité et de sa précision raisonnable, utilise cette dernière méthode pour estimer les pertes par rugosité dans un guide de type slab. Il permet en effet d'aboutir, moyennant une approximation détaillée par la suite, à une expression analytique simple, visant à établir une limite supérieure pour les pertes par propagation. La méthode des courants volumiques permet également d'aboutir à une expression analytique approchée dans le cas d’une cavité circulaire de type micro disque [37]. La rugosité des parois latérales est généralement représentée par une distribution mono dimensionnelle de moyenne nulle f(z) où z est la direction de propagation (voir fig 3.23) permettant de quantifier l'écart de la paroi réelle à la paroi d'un guide idéal.

Fig. 3.23 : Schéma représentant les parois d’un guide slab non-idéal, dont la rugosité est décrite par les

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La nature de cette rugosité est décrite par la fonction d'autocorrélation de f(z)

𝐶(𝑢) = 〈𝑓(𝑧)𝑓(𝑧 + 𝑢)〉 (3.9)

Où les crochets représentent une moyenne d'ensemble. Dans bien des cas [34], [38], la fonction d’autocorrélation peut-être correctement approximée par un modèle exponentiel

𝐶(𝑢) = 𝜎²𝑒𝑥𝑝 (−|𝑢|

𝐿𝑐) (3.10)

Ou Gaussien

𝐶(𝑢) = 𝜎²𝑒𝑥𝑝 (− 𝑢²

𝐿𝑐²) (3.11)

Avec 𝜎 la rugosité rms et Lc sa longueur de corrélation. On suppose que les deux parois latérales ont la même distribution statistique de rugosité mais que celles-ci sont mutuellement décorrélées.

La méthode des courants volumiques considère que la rugosité agit comme autant de perturbations d'indice par rapport à une paroi idéale (voir fig 3.23). En se propageant, le champ électrique du disque ou du guide idéal génère, dans les régions où la perturbation s'exerce, une polarisation matérielle correspondant de manière équivalente à une densité de courant électrique J permettant de représenter les imperfections des parois. L'évaluation de la puissance rayonnée par cette densité de courant passe par le calcul du potentiel vecteur en champ lointain dont J est la source et permet d'accéder au taux de pertes. Les nombreux détails mathématiques de cette procédure (non présentés ici) impliquent entre autres le calcul de la densité spectrale de puissance de la distribution de rugosité, qui s'exprime comme la transformée de Fourier de sa fonction d’autocorrélation.

3.2.2.1 Dans les anneaux et les guides droits

Afin de simuler les pertes par rugosité dans les guides droits, les anneaux et de manière générale dans les structures dont le guidage s'effectue au moyen de deux interfaces parallèles, nous avons donc choisi d'implémenter le modèle de Payne-Lacey [34]. De cette manière nous approximons les pertes dans un guide courbé par celles que le champ subirait dans un guide droit de section identique. Cette approche sera donc valable pour les résonateurs de grand rayon par rapport à la longueur d'onde, c'est- à-dire lorsque les pertes par courbure sont négligeables. Nous avons observé précédemment que c'est effectivement le cas pour des résonateurs dont le rayon excède 50 μm. Par ailleurs, remarquons pour fixer les idées, qu'à mesure qu'augmente le rayon d'un anneau dont la distribution d'indice est symétrique, l'intensité du champ optique sur la paroi extérieure tend à diminuer et la distribution totale du champ tend à se symétriser ce qui permet de traiter les parois internes et externes de l'anneau de façon identique, à la manière d'un guide slab droit.

Ainsi, le taux de perte par rugosité par unité de longueur dans un guide planaire s'exprime, dans le modèle de Payne-Lacey, comme

𝛼𝑟𝑢𝑔𝑔𝑢𝑖𝑑𝑒 = 𝜎𝑟𝑚𝑠 2 √2𝑘0𝑛1 𝑔. 𝑓𝑒 (3.12) Avec 𝑔 = 𝜌²𝑣² 1 +𝜉𝑑2 (3.13)

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𝑣 = √𝜌² + 𝜉² = √𝑛12𝑘

02− 𝑛22𝑘02 (3.14)

Est appelé fréquence réduite.

Le paramètre 𝜎𝑟𝑚𝑠 représente la rugosité rms, d la demi-largeur du guide, 𝑛1 l’indice du cœur, 𝑛2

l’indice du milieu extérieur vers lequel rayonnent les champs dus aux courants volumiques. Dans ce modèle, 𝑓𝑒 est un terme qui dépend de la longueur de corrélation. Lorsqu'un modèle exponentiel est

utilisé pour cette dernière, on peut montrer [34] que si la longueur de corrélation engendre un taux de perte maximal, 𝑓𝑒 prend la forme d'une relation indépendante de la longueur d'onde et de la géométrie

du guide, de sorte que :

𝑓𝑒= 1

√2 (3.15)

Cette approximation permet alors d'estimer une limite supérieure pour les pertes par rugosité en s'affranchissant de la mesure de la longueur de corrélation. La figure 3.24 représente ainsi les pertes dues à la rugosité subies par un résonateur rectangulaire arrondi aux angles avec h=0,5 µm, w=1,25 µm, et 𝜎𝑟𝑚𝑠 = 3nm. Cette valeur de rugosité rms, quoique faible, reste technologiquement atteignable sur la filière Si3N4/SiO2[4]. Nous voyons donc que ces pertes présentent une variation lente et

diminuent, comme attendu, à mesure que la longueur d'onde augmente. En effet, lorsque la taille d'un élément diffusant typique est fixée (comme c'est le cas ici via la rugosité rms), les longueurs d'ondes croissantes subissent de moins en moins les imperfections de la paroi, qui leur « apparaît » alors de plus en plus lisse à mesure que le rapport 𝜆⁄𝜎𝑟𝑚𝑠 augmente.

Fig. 3.24 : Evolution en longueur d’onde des pertes dues à la rugosité dans un résonateur rectangulaire

arrondi aux angles avec h=0,5 µm et w=1,25 µm et 𝜎𝑟𝑚𝑠=3nm.

3.2.2.2 Dans les disques.

Lorsque le guidage est de type mode de galerie, c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'interface interne et le champ est confiné par la paroi externe et la caustique interne, les approximations ne sont pas les mêmes. L'évaluation de la puissance rayonnée vers l'extérieur via les courants volumiques peut s'effectuer en intégrant la valeur moyenne de la densité d'énergie sur une coquille cylindrique

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d’épaisseur infinitésimale comprenant tous les points situés à l'intérieur de la zone de perturbation d'indice [36],c’est-à-dire dans une région très proche de la surface du disque idéal. En utilisant un modèle Gaussien pour la longueur de corrélation et en ne retenant dans les intégrales que les fonctions de Bessel radiales, Borselli et. al. proposent une expression du facteur de qualité associé à la rugosité :

𝑄𝑟𝑢𝑔𝑑𝑖𝑠𝑞𝑢𝑒 = 3𝜆0 3 8𝜋7 2⁄ 𝑛 1𝛿𝑛²𝜂 𝑉𝑑 𝑉𝑠2 (3.16) Où 𝜂 =𝑛𝑒𝑓𝑓 2 (𝑛 1 2− 𝑛 2 2) 𝑛12(𝑛 𝑒𝑓𝑓 2 − 𝑛 2 2) (3.17)

Avec 𝛿𝑛² = 𝑛12− 𝑛22 et 𝑉𝑑= 𝜋𝑅2ℎ est le volume physique du disque de hauteur h et de rayon R,

tandis que 𝑉𝑠 = √𝑅𝐿𝑐ℎ𝜎 représente le volume typique d’un élément diffusant.

Afin d’être comparés aux autres contributions de pertes dans les disques AlGaAs/AlOx, les résultats afférents sont représentés sur la figure 3.29.