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1. EXPOSITION A L’AMIANTE ET CONSEQUENCES SUR LA SANTE: ETAT DES

1.2. L’AMIANTE ET SES CONSEQUENCES SUR LA SANTE

1.2.2. Les pathologies malignes

Le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a classé l‘amiante comme

cancérogène avéré chez l‘homme (groupe 1) depuis 1977 (143). L‘amiante est également

classée comme tel au sein de l‘union européenne depuis 1993 (directive 67/548/CEE). Après

le mésothéliome et le cancer du poumon, le CIRC vient également de reconnaître le lien entre

l‘exposition à l‘amiante et le cancer du larynx et des ovaires (18). D‘autres sites de cancers

sont également suspectés, avec toutefois un niveau de preuve encore insuffisant chez l‘homme

: le cancer colorectal, le cancer du pharynx et le cancer de l‘estomac (19, 24, 25, 144). Si son

usage est interdit en France depuis 1997, l’amiante reste présent dans l’industrie de

désamiantage et sous forme résiduelle dans les bâtiments et dans l’environnement. Aucun

effet sur la santé n'a été prouvé à ce jour concernant l'ingestion d'amiante par voie buccale, du

fait par exemple de la présence du minéral dans l'eau.

Les pathologies malignes causées par une exposition à l'amiante sont essentiellement de deux

types :

1.2.2.1. Les cancers broncho-pulmonaires

Le cancer broncho-pulmonaire est un cancer particulièrement fréquent dans le monde et pour

lequel de nombreux facteurs étiologiques d’origine professionnelle sont identifiés (145). En

France, selon un rapport technique de l’Institut national du cancer (Inca), en 2015, les cancers

broncho-pulmonaires représentaient la première cause de mortalité par cancer chez les

hommes (taux de mortalité estimé à 34,3 pour 100 000 personnes-années) et la deuxième

cause chez les femmes après le cancer du sein (taux de mortalité estimé à 13,7 pour 100 000

personnes-années) (146).

Dans la littérature internationale, les fractions de cancers du poumon attribuables à

l’exposition à l’amiante varient pour les hommes entre 10-20 % (147-149) et 14 % (150). En

France, selon une étude réalisée par l’InVS en 2003, 12 % des cancers du poumon des

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hommes de plus de 55 ans et environ 7% de ceux de 35 à 55 ans peuvent être imputés à une

exposition à l’amiante au cours de leur vie professionnelle (151). L’OMS a estimé en 2004

que 41000 décès et 370000 DALYs pouvaient être attribués au cancer du poumon dû à

l’exposition à l’amiante (17). Cependant, aucune particularité clinique ou radiologique ne

distingue les cancers broncho-pulmonaires liés à l’amiante de ceux d'autres origines.

Le temps de latence entre la première exposition et le développement de la maladie est

généralement supérieur à 20 ans. Il existe une relation dose-effet entre l'intensité de

l'exposition à l'amiante et le risque de cancer bronchique (12), mais à ce jour, aucune valeur

seuil n’a pu être définie (8). Le tabagisme augmente le risque de cancer pulmonaire résultant

de l’exposition à l’amiante (13, 14).

D'une façon générale, il ressort de l'examen des observations brutes recueillies dans le cadre

de différentes études (152, 153), que les accroissements de risque de cancer du poumon les

plus modérés sont observés chez les mineurs et fabricants de produits de friction; ils sont plus

élevés chez les fabricants d'amiante ciment et d'autres produits manufacturés et plus élevés

encore chez les travailleurs de l'amiante textile. Ainsi, c'est lorsque les fibres sont les plus

individualisées, les plus longues et les plus fines (comme dans le cas de l'amiante textile par

exemple) que les risques sont les plus élevés; à l'inverse, dans les situations où les fibres sont

moins individualisées, moins longues et moins fines (comme par exemple dans l'extraction et

le premier traitement des minerais), les risques de cancer du poumon sont les moins

importants.

En France, le cancer broncho-pulmonaire primitif est reconnu comme maladie professionnelle

et relève de la partie C des tableaux n° 30 (Tableau 4) et 47 (Tableau 5), et dans les tableaux

n° 30 bis (Tableau 6) et n° 47 bis (Tableau 7).

1.2.2.2. Le mésothéliome

C’est une tumeur primitive agressive développée à partir des cellules mésothéliales, il atteint

toutes les séreuses mais principalement la plèvre (90 %), puis le péritoine (10 %) et

exceptionnellement le péricarde. Le lien possible entre l’exposition à l’amiante a été rapporté

pour la première fois par Wagner en 1960 (154). Le diagnostic de mésothéliome est difficile.

Dans la majorité des cas, le diagnostic de mésothéliome malin n’est posé que tardivement, car

les manifestations cliniques sont peu spécifiques (douleurs thoraciques, épanchement pleural,

altération de l’état général, dyspnée et toux) et ne surviennent qu’à un stade avancé de la

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maladie. Les mésothéliomes pleuraux malins peuvent être classés en trois types histologiques

principaux :

 La forme épithélioïde est la plus fréquente (70 % des cas) ;

 La forme sarcomateuse (10 %) inclut une sous-variante de mauvais pronostic dite

desmoplastique ;

 Et la forme mixte, ou biphasique, associe les deux types précédents.

Le mésothéliome pleural est considéré comme une tumeur très spécifique d’une exposition

dans le passé à l’amiante, hormis l'exposition à l'amiante (et à d'autres fibres, comme

l'érionite) (155), aucun autre facteur causal n'est établi, ni même soupçonné de façon

convaincante. Dans une expertise collective de l’Inserm, la part attribuable des mésothéliomes

liés à une exposition à l’amiante est estimée à 83,2% chez les hommes et à 38,4% chez les

femmes (156), les emplois exposant à l’amiante étant le plus souvent occupés par les hommes

(157). Typiquement, la période de latence entre exposition et maladie est longue, entre 15 et

40 ans (35 ans en moyenne). Cette latence peut être raccourcie en cas d’exposition intense. La

relation dose-effet a été clairement démontrée, sans qu’il ne soit possible d’identifier un seuil

en dessous duquel le risque de mésothéliome serait nul (66, 158).

Selon l’OMS, en 2004, 59000 décès dans le monde et 773000 DALYs pouvaient être attribués

au mésothéliome dû à l’exposition à l’amiante (17). Selon les données du programme national

de surveillance du mésothéliome coordonné par SPF, l’incidence du mésothéliome en France

n’a pas évoluée significativement entre 1998 et 2006, et le nombre moyen annule de

nouveaux cas de mésothéliomes au cours de cette période était estimé entre 535 et 645 cas

chez les hommes et entre 152 et 210 cas chez les femmes (159). Le PNSM couvre 30% de la

population française. En 2012, l’InVS (devenu SPF) en partenariat avec le Centre

d’épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc) de l’Institut nationale de la santé

et de la recherche médicale (Inserm) a publié les résultats de modélisation de l’évolution de la

mortalité par mésothéliome pleural en France. Cette étude avait pour objectif d’actualiser les

résultats publiés il y a une douzaine d’années qui prévoyaient alors que le pic de la mortalité

masculine par mésothéliome aurait lieu vers 2020-2030 avec un nombre de décès annuel

compris entre 1 000 et 1 500 (160).

Depuis 2012, le mésothéliome est devenu une maladie à déclaration obligatoire (MDO) en

France, quel que soit le site anatomique (décret n°2012-47 du 16 janvier 2012 complétant la

liste des maladies faisant l'objet d'une transmission obligatoire de données individuelles à

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l'autorité sanitaire, arrêté du 6 février 2012). Un des objectifs de cette DO est de contribuer à

décrire les modalités d’exposition extraprofessionnelle (161).

En France, le mésothéliome est reconnu comme maladie professionnelle et relève des parties

D et E des tableaux n°30 (Tableau 4) et 47 (Tableau 5).

La reconnaissance de maladies professionnelles (MP) liées à l’amiante a progressé depuis

1985, avec un pic observé en 2007 (un peu moins de 7000 cas) et 4065 maladies reconnus en

2013, dont 1415 cancers (Figure 6). La forte croissance du nombre de maladies

professionnelles reconnues en France tient notamment aux pathologies induites par l'amiante,

en particulier le cancer broncho-pulmonaire et le mésothéliome (cancer du mésothélium de la

plèvre), tous les deux très graves.

Figure 6 : Progression du nombre de maladies professionnelles liées à l’amiante reconnues

par le régime général de la sécurité sociale depuis 1985 (Source INRS)