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III. Analyse qualitative

5. Particularités de la population migrante

Nous mettons en exergue ici les difficultés liées à cette population qui semblait avoir des problématiques propres.

5.1. Accès aux droits de séjour

En premier lieu, l’accès au droit de séjour était un frein énorme pour l’accès à une couverture maladie :

P-1 : « Elle m'a dit que je n'avais pas le droit d'avoir des soins ici parce que je n'ai pas de papiers et aucune ressource ici. »

P-2 : « Mais tant que je n'ai pas de papier on ne peut pas renouveler ça encore [l’AME] […] Et quand je suis revenue ici, comme je n'ai pas de papiers on ne m'a pas traitée. […] En fait ma carte AME était terminée. Ils ont amené le dossier pour renouveler, mais ils ont refusé si je n'amène pas le titre de séjour, sinon ils ne renouvèlent pas ça. »

P-4 : « Parce que je n'avais pas de situation pour aller là-bas. [chez un docteur] […] J'ai pas de papiers, et je ne trouve pas quelqu'un pour me dire, si tu n'as pas de choses comme ça tu peux aller. »

5.2. Le rôle clé des associations et de la PASS

Afin d’avoir accès au système de soins, les personnes migrantes ont eu recours à l’aide des associations telle que la CIMADE, ou à celle de la PASS qui était un lieu ressources concernant l’accès aux soins :

P-1 : « Docteur x, on s'est rencontré à la CIMADE. J'étais allé à la CIMADE j'ai vu d'abord un assistant social. […] il vaut mieux aller là-bas à la PASS plutôt que me dire tout ça. Mais moi aussi si je suis malade je vais aller là-bas en premier, on peut me garder tout ça. »

P-2 : « J'ai connu la PASS par l'école de la CIMADE. A partir de là il y avait une femme qui s'appelle x qui m'a rencontré, qui m'a dit d'aller voir la PASS. »

P-3 : « C'est toujours la même personne de la CIMADE. […] Je suis allé à la PASS, c'est là- bas qu'ils m'ont aidé. »

5.3. Une vision salutaire du territoire Réunionnais et des soignants

Les personnes semblaient avoir en commun également de se sentir protégées par le système de santé à La Réunion en comparaison au système de santé dans le territoire d’origine. Cela semblait influer positivement sur leur recours aux soins :

P-1 : « J'ai pris le risque de mettre ma femme et ma fille, nous trois dans un kwassa kwassa pour venir jusqu'à Mayotte. […] Moi j'avais envie de rester ici à La Réunion. Parce que si je reste ici, ma fille aura de bons soins. Si on rentre à Mayotte il n'y a pas de spécialité. Même aux Comores il n'y a rien. […] Si je vais quelque part, je n'ai pas peur de la police, je vais aller sans problème. Je n'ai plus peur comme avant. Maintenant je vois que je suis à l'aise. […] ici je n'ai pas de doute, je peux aller là où je veux, je n'ai pas peur. »

P-2 : « Et quand j'étais aux Comores, et à Mayotte, depuis que je suis ici je me sens mieux […] Quand une personne est très malade, on n’a pas la capacité de la soigner à Mayotte, on l'envoi ici par EVASAN. […] Il vaut mieux que je reste ici au lieu de rentrer là-bas. »

P-3 : « Parce que à Mayotte il y a beaucoup d'ennuis, beaucoup de délinquance, j'avais peur. Et je suis ici, tranquillement. »

P-5 : « Quand j'étais là-bas, j'avais peur car ils ne pouvaient pas me traiter. »

P-6 : « Depuis que je suis venu ici on a tout changé. Alors là c'est facile d'y aller au médecin. » P-7 : « Ici à La Réunion, non. Parce qu’ici il y a des professionnels et des médicaments tout ce qu'il faut. Mais peut-être à Mayotte il faudrait se poser des questions ! »

L’hôpital pouvait même être vu comme un lieu refuge par certains :

P-1 : « Il ne peut pas y avoir la police à l'hôpital, je suis en sécurité. Personne ne va me déranger. »

P-2 : « Ils m'ont dit si un jour cela ne va pas, je pourrais aller à l'hôpital au lieu de rentrer aux Comores. »

Le médecin semblait pour les personnes concentrer des pouvoirs importants sur leurs conditions de vie :

P-1 : « On a vu le docteur qui disait qu'on transfère pour aller à La Réunion. »

P-2 : « […] mais normalement ici c'est le médecin qui a le pouvoir au niveau de la préfecture. […] Mais le médecin ne m'a pas donné d'accès. »

5.4. Langue et interprétariat

Plusieurs personnes ont mentionné la barrière de la langue comme frein à l’accès aux soins, l’interprétariat professionnel n’a jamais été mentionné :

P-2 : « Et cela me décourage car je ne sais pas parler français. […] je ne peux pas parler le français, alors je n'arrive pas à m'exprimer, vous voyez. »

P-5 : « [Vous y allez avec quelqu'un qui traduit ?] Non, on se comprend un peu seulement. […] Oui, c'est compliqué de se faire comprendre. »

P-6 : « Oui, parce que je ne maitrise pas trop le français […] parce qu’il y a beaucoup de fois. Par exemple quand il dit quelque chose, je dis non j'ai pas compris. »

5.5. Problématique d’équivalence de la sécurité sociale entre deux territoires.

Une personne a mentionné un problème d’équivalence de droits à la sécurité sociale. Sa couverture maladie était à jour à Mayotte (avec la Caisse de Sécurité Sociale de Mayotte : CSSM), mais n’a jamais pu bénéficier de soins remboursés sur La Réunion. « J'étais à la sécu de Mayotte. Ici ça ne marchait pas. Alors je suis allé à la sécurité sociale. Depuis le mois d'octobre, elle ne m'a rien dit […] C'est à cause de la CMU. Parce que l'assurance maladie de Mayotte ne passe pas ici. » (P-3)

5.6. Problématique des Evacuations Sanitaires (EVASAN)

Le dispositif des EVASAN et les droits qui en découlent semblaient mal connus par les professionnels ce qui pouvait être un frein à l’accès aux soins :

P-1 : « Madame x elle m'a dit que je n'avais pas le droit d'avoir des soins ici parce que je n'ai pas de papiers et aucune ressource ici. Je dois aller à Mayotte […] J'étais passé à la PASS, j'ai trouvé x, elle m'a expliqué, […] je lui ai tout raconté, on m'a demandé de remplir un dossier pour envoyer, pour une demande de titre de séjour pour rester ici pour enfant malade. J'ai tout fait, j'ai envoyé. Aussi on m'a répondu, jusqu'à aujourd'hui j'ai reçu un titre de séjour. »