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Parcours de Mme F., 53 ans, en centre de rééducation professionnelle (CRP) [parcours

Dans le document Handicap et emploi : (Page 48-51)

2 LES TEMOIGNAGES RECUEILLIS LORS DES ENTRETIENS INDIVIDUELS

2.6 Parcours de Mme F., 53 ans, en centre de rééducation professionnelle (CRP) [parcours

Une expérience professionnelle de plus de 30 ans dans le secteur industriel

Mme F. est titulaire d’un CAP de sténodactylo. Pendant ses études de sténotypie, elle ne se sentait

« pas à l’aise », et après l’obtention de son diplôme, elle décide d’accepter l’offre d’embauche d’une entreprise industrielle, dans laquelle elle travaillait régulièrement, notamment l’été, depuis l’âge de 14 ans. Elle est recrutée en tant que manutentionnaire, en « sortie de chaine ».

Très active, elle « n’arrive pas à se cantonner à une tâche », et elle développe progressivement ses compétences en apprenant à conduire les machines, puis à les régler. Les postes de travail qu’elle occupe successivement se caractérisent cependant par une pénibilité physique importante, liée notamment aux contraintes de posture (station debout) et de port de charges – même si les années passant, des évolutions techniques (telles que la mise en place d’élévateurs) ont permis de les atténuer.

Après une dizaine d’années dans cette entreprise, elle est recrutée dans une autre entreprise de plus grande taille, du même secteur d’activité. Elle acquiert rapidement de nouvelles responsabilités, notamment en encadrant une équipe de plus de vingt personnes, dont elle doit organiser le travail. Elle s’investit énormément dans son travail et son entreprise, qu’elle considère comme une « seconde famille ». Elle s’implique en outre dans le comité d’entreprise avec une participation active et fructueuse au dialogue social dans l’entreprise.

Son travail reste cependant très contraignant sur le plan physique, avec toujours de nombreuses tâches de manutention et une station debout et des déplacements quasi-permanents – elle

« marchait alors probablement plus de vingt kilomètres par jour en moyenne ».

Une usure et une dégradation des conditions et des relations de travail, débouchant sur de graves problèmes de santé et une longue période de rupture professionnelle

Une dizaine d’années après son embauche dans cette entreprise, Mme F. commence à souffrir de problèmes de dos d’une intensité croissante. Elle n’est cependant pas arrêtée par son médecin traitant (elle ne l’a « pas demandé »), mais doit marcher pendant plusieurs mois avec des béquilles tout en travaillant. Ses douleurs deviennent insupportables, et elle doit finalement être opérée. Elle est placée en arrêt maladie durant trois mois.

Au terme de son arrêt maladie, elle rencontre deux fois le médecin du travail, qui émet des recommandations (éviter le port de charges lourdes, respecter des temps de pause pour s’assoir, etc.), qu’elle ne peut respecter au regard des contraintes de rythme et d’organisation du travail. Ses douleurs de dos reviennent et s’installent à nouveau, en dépit d’un lourd traitement médicamenteux.

En parallèle, le climat relationnel se dégrade fortement entre elle et son supérieur hiérarchique direct. Elle est progressivement écartée par ce dernier des circuits d’information et mise à l’écart, son employeur refusant d’intervenir et lui enjoignant de « faire comme si de rien n’était ». Elle tente alors de déposer une plainte pour harcèlement moral au commissariat, sans qu’il y soit donné suite.

Elle engage un contentieux – toujours pendant – devant les prudhommes.

Au bout de quelques années, elle est à nouveau arrêtée pour ses problèmes de dos. Elle reprend ensuite le travail mais au bout de quelques jours, elle « craque » et tombe dans une profonde

dépression qui, conjuguée à sa souffrance physique persistante, l’amène à se replier sur elle-même et à s’isoler complètement. Elle est placée en arrêt maladie et pendant plus d’un an, elle « reste allongée chez elle sans bouger, sans pouvoir sortir de son lit ni s’habiller ». C’est son médecin traitant, qu’elle voyait très rarement, qui prend un jour la mesure de sa situation et l’oriente vers un centre médico-psychologique pour adultes. Elle y est prise en charge et participe à diverses activités (jeux de société) qui lui permettent de se « resocialiser », très progressivement.

Au terme de trois ans d’arrêt maladie, elle est convoquée par le médecin de la sécurité sociale qui lui propose une pension d’invalidité, dont elle obtient le bénéfice. Elle fait ensuite d’elle-même valoir à son employeur qu’elle doit être licenciée pour inaptitude – elle prend dans ce cadre contact avec le service de santé au travail et découvre que son employeur a arrêté de payer ses cotisations à ce titre. Elle contacte l’inspection du travail, sans succès, « à défaut de sanction sur l’absence d’adhésion à un service de santé au travail ». Au bout de quelques mois, son employeur finit sur son insistance par ré-adhérer à un service de santé au travail, et elle est licenciée pour inaptitude.

Un remarquable parcours de reconversion professionnelle

Lors de sa visite auprès du médecin de la sécurité sociale, ce dernier lui recommande de déposer une demande de RQTH auprès de la MDPH. C’est la première fois qu’elle « entend parler » du handicap, cela « ne lui serait jamais venu à l’esprit de faire une telle demande ». Son médecin traitant l’aide alors à remplir le dossier, et c’est le médecin du centre médico-psychologique qui lui recommande de « cocher la case formation », pour qu’elle puisse entamer une démarche de reconversion professionnelle – car étant « accro au travail », elle souhaite « à tout prix » retravailler.

Mme F. s’inscrit en parallèle à Pôle emploi et est convoquée au bout de trois ou quatre mois. Elle rencontre alors une psychologue du travail qui est « très bien informée » sur sa situation. Lors de cet entretien, elle évoque le fait qu’elle réalise occasionnellement des tâches de comptabilité dans l’entreprise de son fils – la comptabilité étant sa matière préférée lors de ses études. La psychologue du travail lui conseille de contacter deux CRP proposant des formations de reconversion en la matière.

Elle obtient peu de temps après la décision favorable de la MPDH (avec laquelle elle n’a eu aucun contact physique) concernant sa RQTH et sa demande d’orientation « formation ». Elle contacte alors par elle-même un premier CRP, qui la reçoit immédiatement. Après un petit test qu’elle réussit, elle est admise au CRP et intègre, dans les semaines qui suivent, une formation de 20 mois de secrétaire comptable (niveau IV).

Lorsqu’elle démarre sa formation, elle est encore « très fragile psychologiquement », d’autant plus qu’elle n’a « aucune connaissance en informatique ». Elle est cependant accompagnée par une formatrice « extraordinaire » et reprend progressivement confiance en elle.

Elle effectue dans le cadre de sa formation un premier stage dans une grande entreprise industrielle, qui se passe « très bien ». Elle ne cherche cependant pas à y être embauchée, car les tâches de comptabilité y sont « trop répétitives et sectorisées ».

Elle effectue ensuite un deuxième stage dans une PME de moins de dix personnes, qui débouche d’abord sur un contrat de formation en alternance – elle passe un jour par semaine dans l’entreprise, et ensuite, rapidement, sur une promesse d’embauche écrite en CDI au terme de son contrat. Elle doit cependant insister pour finir sa formation car son futur employeur souhaitait la recruter à temps plein immédiatement. Elle effectue par ailleurs « par elle-même » des recherches sur internet sur l’Agefiph afin de bénéficier d’aides à l’aménagement de son poste de travail, avec

l’accord de son futur employeur et sur les conseils de l’ergonome du CRP, qui est passé dans sa future entreprise.

Mme F. vient d’obtenir son titre de secrétaire comptable, ce qui constitue pour elle une très grande satisfaction – elle avait, avant de rejoindre le CRP, de grandes appréhensions sur sa capacité à apprendre et à retrouver un emploi, au regard notamment de son âge.

2.7 Parcours de M. H., 43 ans, salarié en entreprise adaptée [parcours

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