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Des interventions extrêmement tardives, limitées et peu effectives en matière de maintien en

Dans le document Handicap et emploi : (Page 21-24)

2 CARACTERISTIQUES DES PARCOURS PROFESSIONNELS DES PERSONNES RENCONTREES

3.3 Des interventions extrêmement tardives, limitées et peu effectives en matière de maintien en

L’analyse des parcours fait nettement ressortir l’enjeu déterminant que constitue le maintien en emploi des personnes atteintes de problèmes de santé ou souffrant d’un handicap reconnu, et de la prévention, en amont, des facteurs d’usure professionnelle et de pénibilité qui sont souvent, en tout ou partie, à la source du handicap.

De manière générale, l’analyse des parcours met en évidence des carences majeures concernant deux enjeux fondamentaux en matière de prévention de la désinsertion professionnelle :

○ les insuffisances voire parfois l’inexistence de toute forme de prévention « primaire » des risques professionnels dans certaines entreprises, sur des postes de travail exposés à des facteurs de pénibilité physique et d’usure professionnelle (port de charges lourdes, postures pénibles, travail répétitif, station debout prolongée (voir le parcours détaillé n°2.6 de Mme F., 53 ans, ou le parcours n°39 de M. AZ., 56 ans) ;

○ une absence totale de recours à la formation au bénéfice des personnes exposées à une telle pénibilité, et donc largement à risque de désinsertion professionnelle et de

« basculement » dans une situation de handicap – pour lesquelles la mise en place de filières de reconversion précoce aurait pourtant un sens réel.

De manière plus spécifique, concernant les acteurs institutionnels du maintien en emploi, l’analyse des parcours met en exergue différents éléments :

l’intervention des services de santé au travail, lorsqu’elle existe, est loin d’être efficace : de nombreux témoignages mettent en évidence les carences passées et actuelles de la « couverture » et de la prise en charge des salariés par les services de santé au travail :

 plusieurs personnes ont indiqué n’avoir pas été suivies par un médecin du travail au cours de leur vie professionnelle, à défaut d’adhésion de leur entreprise à un service de santé au travail, ou en étant parfois dans l’impossibilité de se rendre aux visites, la personne n’étant pas « libérée » par son employeur (cf. le parcours n°39 ci-dessus mentionné) ou devant s’y rendre « sur ses jours de congés ». Dans plusieurs parcours, le seul contact avec la médecine du travail est intervenu alors que le problème de santé était déclaré, voire que le salarié devait être licencié pour inaptitude (avec deux parcours détaillés n°2.3 et n°2.6 dans lesquels la personne a effectué par elle-même les démarches pour que son employeur adhère à un service de santé au travail) ;

 même lorsque l’entreprise a adhéré à un service de santé au travail et que le salarié bénéficie d’un suivi, l’ineffectivité de son action est très souvent mise en avant : les interventions du médecin du travail sont trop tardives et ne se situent pas dans un registre de prévention « primaire » de l’usure et des risques professionnels ; ses recommandations, le cas échéant, sont trop générales (« il faut faire attention » - voir notamment le parcours n°32 de Mme AM., 56 ans) ou, lorsqu’il formule des réserves précises, dénuées de portée car non mises en œuvre (« le coût est trop élevé », « les aménagements sont impossibles », et surtout « il faut tenir la cadence, les rythmes de production », « il ne faut pas retarder l’équipe » et « chaque jour, il faut bien faire le travail » - voir notamment le parcours détaillé n°2.7 de M. H., 43 ans) ; au-delà, le « canal » du médecin du travail n’est pas utilisé par le salarié (« pour être reconnu apte, on dit n’importe quoi », « on ne lui dit pas grand-chose, le but est d’avoir le certificat d’aptitude et de repartir le plus rapidement possible »), ou il est « discrédité auprès de la direction car utilisé à tort et à travers » (voir notamment le parcours détaillé n°2.4 de Mme D., 45 ans). Enfin, rares sont les cas où le médecin du travail est à l’origine d’une démarche de demande de RQTH ;

du côté de la sécurité sociale, l’analyse des parcours met en évidence le caractère encore très limité des démarches de prévention de la désinsertion professionnelle : quasiment aucune des personnes rencontrées n’a fait l’objet d’un

« repérage » lors de la multiplication de ses arrêts maladie ou d’un arrêt maladie de longue durée ; une seule d’entre elles a reçu, au cours d’un arrêt maladie de deux ans, un courrier d’invitation de la CARSAT à une réunion d’information collective auquel elle n’a pas donné suite, « parce qu’elle pensait pouvoir s’en sortir seule » (cf. le parcours n°22 de M. AC, 42 ans, actuellement suivi en dispositif d’emploi accompagné). La seule visite avec le médecin de la sécurité sociale intervient au terme de l’arrêt maladie de longue durée, et est en général orientée sur la question de la pension d’invalidité, sans que celle du maintien en emploi soit réellement évoquée ; outre l’impact psychologique parfois éprouvant du fait d’être reconnu comme « invalide », de nombreuses personnes ont eu alors plutôt le sentiment d’être « poussées » vers l’inactivité – dans un cas, de manière très explicite (cf. le parcours n°51 de M. BS, 52 ans) ;

○ aucune des personnes rencontrées n’a pu faire état de liens entre les différents réseaux (médecin traitant, médecin du travail, médecin de la sécurité sociale), ce qui illustre le cloisonnement et le manque de coordination de leurs interventions ;

○ enfin, quasiment aucune des personnes rencontrées n’a évoqué une intervention du Sameth, ce qui illustre sans doute la faible couverture des besoins par ce réseau.

Concernant les entreprises, les témoignages recueillis mettent en évidence :

○ des comportements variés, qui dépendent beaucoup de la volonté et de la capacité de l’entreprise à intégrer et à accompagner le salarié en situation de handicap. Celles-ci ne dépendent pas toujours de la taille de l’entreprise, même si le maintien en emploi est manifestement plus important dans les grandes entreprises dont les politiques relatives au handicap sont bien développées ;

○ la difficulté perçue par les personnes relevant d’un handicap psychique « invisible », et dont la « compensation » est moins aisée que d’autres types de handicap (notamment parce qu’elle touche souvent plus à l’organisation et au rythme de travail qu’à un

« simple » aménagement technique du poste de travail – cf. le parcours détaillé n°2.4 mentionné supra) ;

○ la mauvaise information des entreprises sur les aides existantes : celles-ci ne pensent pas spontanément à se tourner vers le service de santé au travail (par exemple pour un besoin d’appui sur un aménagement de poste de travail), et semblent avoir du mal à accéder aux aides de l’Agefiph ;

○ l’enjeu « culturel » de « sensibilisation » au handicap en direction des managers, qui doivent être accompagnés et formés à cet égard, mais également en direction du collectif de travail ; l’enjeu également de « dédramatiser » ce faisant le sujet du handicap (« cela va vite de dédramatiser le sujet du handicap ») ;

○ l’attention particulière qui doit être portée, y compris dans les entreprises où le maintien en emploi est réel, à la question de l’évolution et des perspectives de carrière des personnes en situation de handicap – qui reste un point faible et une source de questionnement pour nombre d’entre elles (voir notamment le parcours n°47 de Mme BE., 47 ans, le parcours n°53 de M. BF, 35 ans, et le parcours n°54 de M. BQ, 56 ans).

3.4 Un accompagnement vers l’emploi trop « distendu », et souvent perçu

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