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Paramètres influençant la résistance au cisaillement

Chapitre 3 REVUE DE LA LITTÉRATURE

3.8 Le cisaillement

3.8.2 Paramètres influençant la résistance au cisaillement

Plusieurs paramètres influençant la résistance au cisaillement. Parmi ceux-ci, l’on retrouve la résistance en compression du béton, la taille nominale des particules de granulats, la

quantité de barres d’armature longitudinale, la portée en cisaillement et la profondeur effective de la section étudiée. Ce dernier paramètre est relativement important puisqu’il fait intervenir le facteur d’échelle.

3.8.2.1 Résistance en compression

La résistance en compression du béton est indirectement liée à la résistance au cisaillement d’un élément, car celle-ci est utilisée pour approximer la résistance à la traction. En effet, la résistance à la traction est souvent exprimée comme une fonction de la racine carrée de la résistance à la compression (CAN/CSA S6-14). Lorsque la résistance à la compression est très élevée (indirectement la résistance à la traction), des changements importants peuvent subvenir dans le mécanisme d’engrènement des granulats. En effet, pour des résistances en compression élevées, les fissures traversent les granulats plutôt que de les contourner, laissant un faciès de fissures plus lisse (tel qu’expliqué à la section 3.8.1.3).

3.8.2.2 Granulats

Puisque les granulats forment environ 70% du volume d’un béton dit ordinaire, ils influencent directement les propriétés mécaniques de par leur forme, leur texture, leur rigidité et leur taille. Leur importance est particulièrement marquée dans la résistance au cisaillement, car le mécanisme d’engrènement des granulats est tributaire de leur qualité et de leurs paramètres physiques. Une augmentation dans la taille des granulats a comme effet d’augmenter la capacité à transmettre les efforts à travers une fissure. Toutefois, l’effet bénéfique de l’augmentation de la taille des granulats ne semble valable que pour des granulats de diamètre inférieur à 25mm (Sherwood, Bentz, et Collins, 2007). Au-delà de cette dimension, les plus gros granulats sont source de concentrations de contraintes et, par conséquent, de fissuration. La texture des granulats est également un facteur important, car un granulat rugueux retardera l’apparition de la fissuration sans modifier la résistance en compression du béton.

3.8.2.3 Quantité d’armature longitudinale

La quantité de barres d’armature longitudinale influence deux paramètres qui sont l’effet goujon et l’engrènement des granulats. Ainsi, une augmentation de la quantité d’armature longitudinale augmente nécessairement la force nécessaire pour les déformer (effet goujon). L’augmentation de la surface nette d’acier longitudinal aura également comme

effet de diminuer l’ouverture des fissures, augmentant ainsi le transfert d’effort entre les lèvres de la fissure (Sherwood, Bentz, et Collins, 2007).

3.8.2.4 Portée en cisaillement

La portée en cisaillement, ou effet d’arche est un mécanisme qui, à différents niveaux d’importance, permet de transférer une quantité d’effort directement aux appuis par une bielle de compression ayant la forme d’une arche. Ce mécanisme est fonction de la portée de cisaillement (a/d) qui se définit comme étant le rapport entre la distance du point d’application de la force (a) et le bras de levier des armatures de flexion (d). La proportion des efforts directement transférables aux appuis s’intensifie lorsque la charge se situe près des appuis, soit lorsque a/d est faible. La Figure 3-15 montre bien l’importance de ce phénomène, et ce, particulièrement pour des portées de cisaillement de 2,5 et moins. Pour ces ratios, la ruine de l’élément est principalement causée par la rupture d’un ancrage ou par l’écrasement du béton au niveau des appuis ou de la charge. Dans de telles situations, ces résistances doivent être déterminées à l’aide de la méthode des bielles et tirants, telle que présentée dans la norme CAN/CSA S6-14.

Le Tableau 3-1, présente en détail les modes de rupture en fonction du rapport d’élancement a/d.

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Figure 3-15 : Résistance au cisaillement et à la flexion en fonction de la portée de cisaillement (Massicotte, 2013).

Tableau 3-1 : Modes de rupture en fonction de l'élancement a/d pour des éléments en béton armé.

Géométrie & Élancement Mode de rupture

Poutre très profonde : a/d < 1

Rupture de l’ancrage des barres d’armature à l’appui ou par écrasement du béton

Poutre profonde : 1 < a/d < 2.5

Rupture par écrasement du béton dans la zone comprimée (Fissures inclinées et redistribution des forces internes).

Poutre élancée : 2.5 < a/d < 6

Rupture en cisaillement-flexion (Pas de redistribution des forces internes)

Poutre très élancée : a/d > 6

Rupture en flexion. (Plastification des barres d’armature de flexion avant l’apparition de fissure inclinées)

Ainsi, un a/d faible (< 2,5) représente des poutres dites « profondes ». La profondeur d’une poutre conditionne le taux de charges redirigées aux appuis par une bielle de compression diagonale (Kuchma et Collins, 1998). Kani (1967) a montré que pour des rapports a/d très grands, la résistance à la rupture est augmentée, puisque dans ce cas, c’est la résistance à la flexion qui entre en jeu. Les poutres élancées (2,5 < a/d < 6) sont donc les plus sujettes à céder en cisaillement.

3.8.2.5 Effet d’échelle dans les éléments en béton armé

L’effet d’échelle est un phénomène selon lequel une augmentation de l’épaisseur de la section d’un élément en béton armé, avec peu ou pas d’étrier, résulte en une diminution de la contrainte de résistance au cisaillement. Cette relation peut être observée sur la Figure 3-16, où la résistance unitaire en cisaillement (axe des ordonnées) est présentée en fonction du bras de levier d (axe des abscisses).

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Figure 3-16 : Contrainte de cisaillement unitaire en fonction de la hauteur effective (Collins et Kuchma, 1999).

Pour les structures peu ou pas renforcées en cisaillement, le mécanisme d’engrènement des granulats est responsable de près de 70% de la résistance au cisaillement total. Tel que présenté à la Section 3.8.1.3, ce mécanisme dépend à la fois de l’ouverture des fissures et de la taille des granulats. Il a été démontré à l’aide de nombreuses recherches que les fissures de cisaillement ont tendance à être plus espacées lorsque l’épaisseur de l’élément tend à augmenter. Étant donné que l’ouverture des fissures à mi-hauteur d’un élément peut être approximée comme étant le produit de la déformation unitaire à mi- hauteur et de l’espacement des fissures, une augmentation dans l’espacement de celles-ci se traduit par une augmentation dans leur ouverture. Cela diminue directement la capacité des granulats à transmettre les efforts de cisaillement au droit des fissures, réduisant du même coup la résistance du béton à l'effort tranchant.

L’espacement des fissures et indirectement l’ouverture de celle-ci dépend en fait de l’espacement entre les rangs d’armatures ou bien entre le rang d’armature et le centre du noyau de béton en compression (dv). La Figure 3-17 présente les résultats de résistance

unitaire au cisaillement obtenus pour différentes hauteurs d’éléments et pour différentes configurations d’armature.

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Figure 3-17 : Contrainte de cisaillement unitaire en fonction de la hauteur effective pour différentes configurations d’armature (Collins et Kuchma, 1999)

Comme il est possible d’observer à la Figure 3-17, l’ajout d’armature de peau ou d’étrier permet d’obtenir une meilleure répartition des fissures, réduisant ainsi leur ouverture unitaire ce qui permet de contrôler l’effet d’échelle.