• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3 REVUE DE LA LITTÉRATURE

3.4 Les effets de la réaction

Les dommages associables à la RAS peuvent généralement être identifiés lors de l’inspection routinière de l’ouvrage en service (inspection visuelle). Toutefois, ce n’est que par un examen plus approfondi (examen pétrographique) ainsi que par des essais effectués en laboratoire (sur des carottes prélevées au sein de ces structures) que l’on

8

Grandeur exprimant le rapport entre la masse d'eau de gâchage et la masse de ciment d'un béton.

9

peut confirmer la présence et la cause de la RAS sur le processus d’endommagement (Bérubé et al., 2005).

L’expansion due à la RAS au sein de structures, telles que des ponts ou barrages, se manifeste par la présence de l’un ou de plusieurs des phénomènes suivants:

- Déformations importantes;

- Mouvements différentiels causés par un gradient de gonflement hétérogène affectant la structure ;

- De la fissuration polygonale ou orientée en fonction des contraintes de confinement,

- De la décoloration du béton à proximité des fissures,

- L’exsudation de gel de silice à partir de fissures ainsi que l’éclatement localisé (ou pop-out) au-dessus de particules réactives situées près de la surface (Figure 3-2) (Thomas et al., 2013).

________________________

Figure 3-2 : Section de l’échangeur Robert-Bourassa-Charest (démoli en 2010) démontrant différents symptômes communément associés à la RAS, tels que de la fissuration (orientée dans le cas des sections armées de

colonnes et du tablier), décoloration autour des fissures, exsudations, etc. (Bérubé et al., 2005).

3.4.1 Expansion du béton

L’expansion du béton est l’une des principales conséquences de la RAS. En fonction du type d’ouvrage et des conditions auxquelles il est soumis, cette expansion peut être hétérogène entre les différentes composantes d’une même structure atteinte de RAS. Cela peut donc engendrer différents dommages tels que de la fissuration causés par des mouvements différentiels, l’éclatement des joints de dilatation, et un désalignement entre les éléments structuraux, etc. Bien que la RAS puisse être responsable de ces désordres, ces dommages peuvent aussi être la conséquence d’autres mécanismes, tels que l’attaque aux sulfates, l’action des charges, les variations thermiques, les mouvements/tassements de fondations, etc.

Le suivi de l’expansion et des mouvements différentiels du béton se trouvant dans une structure existante peut être réalisé à même la structure à l’aide de différentes techniques (extensomètres, méthodes de nivellement, etc.). Smaoui et al. (2004) ont également proposé différents outils spécialisés de laboratoire, notamment le Stiffness Damage Test (SDT) et le Damage Rating Index (DRI), pour permettre d’estimer l’expansion atteinte par le béton affecté de RAS.

3.4.2 Fissuration

3.4.2.1 Macrofissuration « superficielle »

La fissuration accompagnée d’une décoloration brunâtre et d’exsudats de gel de silice (Figure 3-3) est l’un des symptômes de la RAS le plus facile à identifier visuellement. Le motif caractéristique de la fissuration rencontré à la surface d’éléments structuraux légèrement armés ou en béton non armé est de type polygonal (ACI Committee 221, 1998). Les éléments contenant une quantité importante de barres d’armature, telles que les dalles/tabliers, poutres ou colonnes d’un pont, présenteront pour leur part une fissuration qui sera orientée parallèlement à la direction du confinement principal.

Ainsi, lors de l’inspection d’une structure endommagée et potentiellement atteinte de RAS, les caractéristiques de la fissuration de surface telle que le motif, l’ampleur de cette

fissuration en fonction du confinement et de l’apport d’humidité ainsi que la localisation des éléments affectés sont très importante, car ils fournissent des indices sur leur cause. Malgré ces indices, il reste très difficile à partir d’une simple inspection visuelle, de savoir avec certitude si la fissuration est bien causée par la RAS ou plutôt par d’autres phénomènes tels que le gel-dégel, contraction thermique, retrait, chargement, etc.).

Bien que ces fissures puissent sembler très importantes en surface d’un élément de béton affecté par la RAS, celles-ci ne pénètrent que très rarement à plus de 50 mm sous la surface libre de l’élément. Toutefois, les sections massives, telles que des barrages, peuvent être affectées par des fissures pouvant atteindre des profondeurs de l’ordre de 450 mm (ISE, 1992). Ces « macrofissures » de surface feront alors place à un réseau interne de microfissuration, ce qui sera discuté plus en détail plus loin.

Dans la littérature, plusieurs auteurs considèrent que cette macrofissuration superficielle est la conséquence d’un retrait différentiel entre le béton de peau (section se trouvant en surface) et le béton au cœur (section interne de l’élément) (Courtier, 1990 ; ACI Committee 221, 1998). Celle-ci serait la conséquence d’une expansion intermittente dans le béton de peau (causé par les variations dans les conditions d’expositions), alors que le béton situé au cœur de l’élément subit une expansion plus constante, de par les conditions d’humidité plus stable. Cela pourrait expliquer en partie pourquoi les fissures de surface ne pénètrent que très peu à l’intérieur du béton et aussi pourquoi la fissuration des échantillons testés en laboratoire est plutôt homogène (conditionnement à 100% HR).

________________________

Figure 3-3 : Fissuration superficielle et exsudats blanchâtres sur un élément de béton affecté par la RAS (Bérubé et al., 2005).

3.4.2.2 Microfissuration

Contrairement à la macrofissuration « superficielle », la microfissuration se situe à l’intérieur de la masse de béton. Ces fissures proviennent des pressions internes de gonflement engendrées par la RAS au sein même des particules réactives (Figure 3-4). Avec la progression de la réaction, ces microfissures se propagent de particule en particule, et ce, dans toutes les directions.

Afin de pouvoir étudier ces défauts au cœur même du béton, un examen pétrographique sur plaque polie (ou en lame mince) est généralement requis. Afin d’augmenter la visibilité des fissures, la surface peut être au préalable traitée à l’aide d’une résine colorée ou fluorescente (Bustamente Bedoya., 2015). La méthode par excellence demeure l’examen d’un échantillon du béton au Microscope Électronique à Balayage (MEB) équipé d’un analyseur chimique en énergie dispersive. Cela permet de confirmer la présence et la nature des produits de la RAS de par leur microtexture et leur composition chimique.

A) B)

________________________

Figure 3-4 : Schémas illustrant la macrofissuration (surface) et la microfissuration (portion interne) générées dans des bétons affectés par la RAS où le granulat réactif se situe dans le granulat grossier (A) et le granulat fin (B) (Dennis Palmer, 1992).

3.4.3 Gel de réaction

Le gel de réaction est un produit très révélateur de la réaction alcalis-silice. Celui-ci, lorsque présent en surface de l’élément de béton affecté, se manifeste sous la forme d’exsudats blanchâtres présents à proximité des fissures (Figure 3-3) (Bérubé et Fournier, 1986). Cet exsudat est généralement accompagné de traces d’efflorescence (ou lessivage de chaux carbonatée en présence du CO2 de l’atmosphère).

Ce gel peut également être observé au microscope lors de l’examen pétrographique réalisé sur des bétons affectés par la RAS. Ce gel est situé dans les fissures présentes au sein des particules de granulats réactifs, de la pâte de ciment ou encore dans les vides d’air.

3.4.4 Auréoles de réaction

Lors de l’examen pétrographique réalisé sur des plaques de béton polies, il est possible d’observer des auréoles de réaction autour des particules de granulats réactifs. Ces auréoles se présentent sous la forme d’une section plus foncée en périphérie de certaines particules de granulats réactifs (Bérubé et Fournier, 1986).

3.4.5 Éclatement du béton (pop outs)

L’expansion causée par la RAS engendre la création d’effort interne. Il arrive que ces efforts, lorsque générés près de la surface, soient suffisants pour engendrer l’éclatement d’un petit cône de pâte/particule de granulats (ACI Committee 221, 1998). Certaines particules de granulats gélives peuvent également engendrer un tel phénomène. L’éclatement du béton n’est donc pas directement attribuable à la RAS.