Parallèles entre les résultats et les écrits scientifiques

L’analyse des résultats présentés dans le chapitre précédent en fonction des écrits scientifiques issus du cadre conceptuel a permis d’émettre différents constats, ce qui permettra, par la suite, d’établir les stratégies d’innovation et les tactiques les plus appropriées pour le territoire analysé.

Tout d’abord, la réalisation d’entrevues avec des gestionnaires de l’industrie touristique hivernale de plein air de Charlevoix a permis de mettre en lumière qu’il y a plus d’entreprises qui voient la saisonnalité de façon négative que de façon positive. En général, les écrits scientifiques sur le tourisme tendent à défendre le même point de vue, soit que la saisonnalité est généralement perçue de façon négative (Baum et Lundtorp, 2001; Fernández-Morales et al., 2016; Hinch et Jackson, 2000; Hudson et Cross, 2005; Pegg et al., 2012), bien qu’un certain nombre de chercheurs abordent aussi les aspects positifs reliés à la saisonnalité (Baum et Lundtorp, 2001; Connell et

al., 2015; Murphy, 1985). Ainsi, il y a une certaine concordance entre l’information

ayant été obtenue sur le terrain, soit lors des entrevues d’entreprises touristiques hivernales de plein air de Charlevoix, et les écrits scientifiques analysés. À cet égard, il est intéressant de noter que malgré la reconnaissance générale des effets négatifs de la saisonnalité, la publication d’écrits scientifiques sur le sujet est peu nombreuse ces dernières années, d’autant plus quand on la compare avec les publications sur l’innovation en tourisme.

Ensuite, la tactique liée à la diversification des produits et des services est un moyen pour contrer la saisonnalité qui est très utilisé. Les résultats de l’étalonnage ont permis de confirmer ce constat, puisque cette stratégie d’innovation était grandement

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présente dans les résultats analysés de cette méthode de collecte de données. Il est notamment possible d’y découvrir qu’il existe une bonne diversité d’activités intersaisons et hivernales étant utilisées par les différentes entreprises et organisations étudiées. Par la suite, les aboutissants des entrevues réalisées dans la région de Charlevoix soutiennent aussi ce constat. C’est-à-dire que bon nombre des acteurs de l’industrie touristique du territoire analysé utilisent aussi cette stratégie d’innovation pour contrer la saisonnalité. Enfin, de façon générale, les écrits scientifiques mettent aussi de l’avant la popularité de cette stratégie par rapport à la problématique étudiée. En effet, dans plusieurs cas, le fait d’allonger les extrémités de la saison touristique et de diversifier l’offre de produits touristiques sont souvent présentés comme les mesures les plus communes dans le but de contrer la saisonnalité (Baum et Hagen, 1999; Baum et Lundtorp, 2001; Butler et Mao, 1997).

De surcroît, la tactique visant la mise en place de festivals et d’évènements de diverses natures (sportive, musicale, familiale, etc.) aux extrémités de la saison touristique hivernale, et même durant d’autres saisons de l’année, est aussi très utilisée pour contrer la saisonnalité, et ce, pour toutes les méthodes de collecte de données utilisées. Dans l’étalonnage, il a été possible de constater qu’au Québec et en Colombie-Britannique, cette tactique est très présente. De façon plus spécifique, en Colombie-Britannique, ce serait les centres de ski de taille plus importante au niveau économique qui utiliseraient le plus cette tactique pour contrer la saisonnalité. Les résultats des entrevues ont permis d’affirmer que cette tactique pour contrer la saisonnalité est aussi utilisée par certains acteurs interrogés de la région de Charlevoix.

Par la suite, les écrits scientifiques sont en adéquation avec les résultats de deux autres méthodes de collecte de données à ce sujet. En fait, plusieurs chercheurs affirment que la stratégie d’innovation liée aux produits et aux services, regroupant différentes tactiques, est un bon moyen afin de contrer les effets de la saisonnalité durant les extrémités de saison et durant la basse saison touristique (Baum et Hagen, 1999; BarOn, 1975; Baum et Lundtorp, 2001; Butler et Mao, 1997 ; Hudson et Cross, 2005).

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D’autre part, l’analyse des résultats des différentes méthodes de collectes de données par rapport aux écrits scientifiques a permis de constater que, de façon générale, les acteurs de l’industrie touristique avaient tendance à combiner différentes stratégies d’innovation pour contrer la saisonnalité. Ainsi, ce résultat est présent dans l’étalonnage, les entrevues et de façon implicite dans les écrits scientifiques. En fait, dans ces derniers, ce constat est peu abordé par les chercheurs ayant pour sujet les stratégies pour contrer cette problématique (Baum et Hagen, 1999).

Concernant la stratégie d’innovation institutionnelle liée à la tactique du partenariat et de l’association, celle-ci est grandement utilisée de façon générale. Les entrevues ont révélé l’intérêt pour les entreprises interrogées de la région de Charlevoix pour développer le maillage au niveau des différents produits touristiques hivernaux, soit autant pour les activités de plein air que pour les restaurants, les établissements d’hébergement ou des entreprises avec des activités intérieures étant ouverts durant l'hiver. De plus, certains partenariats présentés dans les entrevues ne représentaient pas des éléments permettant de contribuer à réduire les effets de la saisonnalité, c’est-à-dire qu’ils ne permettaient pas d’amener concrètement des éléments afin de contrer ce phénomène. L’étalonnage a dévoilé que cette tactique est beaucoup utilisée par certaines des entreprises et des organisations qui ont été sélectionnées puisqu’elle permet de diversifier l’offre tant au niveau des produits du tourisme hivernal, que pour les activités d'intersaisons. En effet, son utilisation varie tout dépendant du lieu ayant été analysé. Donc, cette tactique est très utilisée par les entreprises sélectionnées de la Colombie-Britannique et aux États-Unis, alors qu’au Québec, les associations et les partenariats ne contribuent pas nécessairement à diversifier l’offre d’une entreprise dans l’objectif de contrer la saisonnalité. Ce sont plutôt des regroupements de centre de ski sous le nom d’une seule compagnie propriétaire (exemple : Resorts of the Canadians Rockies (RCR) qui regroupe notamment Stoneham et le Mont-Sainte-Anne), ce qui est très différent d’une association complémentaire, soit entre des entreprises de diverses natures, permettant une diversification des produits touristiques. De façon générale, malgré la grande utilisation de cette tactique, très peu de chercheurs l’abordent pour contrer la saisonnalité. Seul Connell et al. (2015) soulignent l’importance de la mise en place d’un regroupement d’entreprises dans une communauté pour maintenir une certaine

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offre touristique, c’est-à-dire des services et des attraits, tout au long de l’année, afin de réduire les effets engendrés par la basse saison touristique. Donc, les résultats obtenus lors des entrevues et de l’étalonnage se rattachent dans une certaine mesure aux écrits de Connell et al. (2015).

Ensuite, à propos de la stratégie d’innovation de procédés, l’amélioration de l’équipement et des infrastructures est une tactique dont l’utilisation varie grandement en fonction des méthodes de collecte de données analysées. L’étude des entrevues a permis de révéler que cette tactique est utilisée pour contrer la saisonnalité par certaines entreprises interrogées de la région de Charlevoix. Par exemple, l’utilisation de canons à neige en début et fin de saison, l’utilisation de motoneiges spécifiques pour les conditions du terrain au début et à la fin de l’hiver et la pratique du traineau à chien à des endroits plus élevés en altitude au début et à la fin de la saison touristique hivernale sont des tactiques employées dans cette région. En ce qui concerne les résultats de l’étalonnage, il a pu être conclu que l’information à ce sujet pouvait être très complexe à obtenir tout dépendant de la localisation de l’entreprise étudiée. Par exemple, l’information à ce sujet était disponible pour les entreprises situées aux États-Unis, alors qu’elle ne l’était pas ou très peu pour la Colombie-Britannique et le Québec. Lorsque l’information était disponible, il était possible de constater que bon nombre de stations de ski faisant partie de l’échantillon avaient recours à l’amélioration des canons à neige pour contrer la saisonnalité. De plus, les compagnies sélectionnées utilisaient aussi l’amélioration de différents équipements mécaniques et motorisés, tels que les remontées mécaniques, les motoneiges et les dameuses, mais aussi à l’amélioration des établissements. Concernant les écrits scientifiques, peu de chercheurs abordent cette tactique pour contrer la saisonnalité. La revue de littérature effectuée au début de cette recherche met en lumière que seul Hudson et Cross (2005) abordent cette tactique en mettant de l’avant l’utilisation de canons à neige comme innovation technologique, ceux-ci étant beaucoup utilisés pour minimiser les effets de ce phénomène. Ainsi, les résultats obtenus dans cette recherche concernant la stratégie d’innovation de procédés cadrent avec les informations obtenues à ce sujet dans les écrits scientifiques.

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Par ailleurs, la tactique pour contrer la saisonnalité portant sur la variation du prix des produits hivernaux est très commune et est présente dans les résultats des entrevues, de l’étalonnage, mais aussi dans les écrits scientifiques. Les entrevues ont révélé que les acteurs du tourisme hivernal de Charlevoix ayant été sélectionnés utilisent beaucoup cette tactique, soit dans l'objectif de faire varier l’achalandage tout au long de l’hiver ou même pour attirer différents types de clientèle à divers moments de cette période touristique. L’étalonnage a aussi permis de constater que cette tactique est beaucoup employée dans certaines entreprises spécifiques, telles des stations de ski, mais que son utilisation varie tout dépendant de la localisation de l’entreprise étudiée. Par exemple, cette façon de faire pour contrer la saisonnalité est beaucoup plus présente dans les stations de ski des États-Unis que dans celles du Québec. En ce qui concerne la Colombie-Britannique, cette tactique est utilisée par bon nombre d’entreprises, mais ce sont celles de taille plus importante au niveau économique qui y ont recours le plus. En outre, les écrits scientifiques documentent bien cette tactique liée à la stratégie d’innovation de commercialisation (BarOn, 1975; Baum et Lundtorp, 2001; Butler et Mao, 1997; Hudson et Cross, 2005).

Les tactiques visant à améliorer la gestion des employés saisonniers, liées à la stratégie d’innovation de gestion, sont utilisées pour contrer la saisonnalité et ont une présence très variable dans les méthodes de collecte de données. Lors des entrevues, certaines entreprises de la région de Charlevoix ont montré de l’intérêt pour la mise en place de mesure pour favoriser la rétention des employés saisonniers, telles que la construction immobilière destinée aux travailleurs, le «partage» d’employés entre deux entreprises saisonnières (une hivernale et l’autre estivale) ou même la création, dans une même entreprise, d’activités disponibles à l’année qui pourraient être complémentaires en terme d’emploi à l’offre hivernale déjà existante. D’ailleurs, cette problématique est aussi reliée à la question de l’accessibilité de la région de Charlevoix qui peut être complexe et limitée durant l’hiver autant pour les travailleurs que pour les touristes. Par la suite, les entretiens ont aussi mis en lumière la problématique de l’assurance-emploi pour l’industrie touristique de la région de Charlevoix. En fait, tel que mentionné précédemment, ce programme d'aide représente un « compétiteur » important quant à l’embauche de personnel pour la saison hivernale. En fait, le problème serait que le montant reçu par les prestataires de

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l’assurance-emploi, lorsqu’ils sont dans une période de chômage, serait plus élevé que le salaire que les entreprises peuvent fournir pour un emploi saisonnier hivernal. Ce revenu aurait pour conséquence de réduire l’offre de main d’œuvre pour des emplois saisonniers.

De surcroît, cela se déroule dans un contexte où la population charlevoisienne est vieillissante, ce qui est un autre élément ayant pour conséquence de réduire l’offre de main-d’œuvre disponible dans la région.

Les écrits scientifiques portant sur ces tactiques pour contrer la saisonnalité, bien qu’ils ne soient pas très abondants, sont en adéquation avec l’information obtenue lors des entrevues. Seuls Hudson et Cross (2005) abordent ces méthodes pour réduire les effets de la saisonnalité sur l’offre de main-d’œuvre. Il y a, notamment, la mise en place de mesures ou de politiques étatiques visant à contrer cette problématique, la construction d’établissements à proximité de la destination touristique pour héberger les travailleurs et les consommateurs, ainsi que le développement de nouvelles activités économiques à proximité de la destination touristique (Hudson et Cross, 2005). En dernier lieu, quant à l’étalonnage, l’information concernant cette stratégie pour contrer la saisonnalité n’était pas accessible sur les sites internet des entreprises faisant partie de l’échantillon.

Enfin, le schéma présenté ci-dessous résume et positionne l’ensemble des concepts, éléments contextuels et principaux résultats faisant partie de ce projet de recherche (Figure 4). Comparativement à celui ayant été présenté précédemment, ce schéma est plus détaillé puisqu’il comporte des éléments contextuels, ainsi qu’une synthèse des principaux résultats exposés dans le chapitre précédent.

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Figure 4: Schéma synthèse de la problématique

En bref, ce parallèle entre les résultats issus de cette recherche et les écrits scientifiques déjà existants sur la saisonnalité a permis de mettre en lumière qu’il existe une multitude de solutions possibles à cette problématique. En fait, en prenant en compte la variation entre les territoires analysés, beaucoup de ces stratégies sont déjà présentes dans un bon nombre d’entreprises, bien que l’importance de leur utilisation soit aussi très variable entre les divers acteurs de l’industrie touristique. Par ailleurs, il est à noter que certaines stratégies pour contrer la saisonnalité mériteraient d’être plus étudiées au niveau scientifique dans l’objectif d’accroître la documentation disponible à ce sujet.