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PARADIGMES NARRATIFS EN PROCES ET FICTIONNALISATION

« Certes, aucune analyse ne démarre sans grille conceptuelle explicite ou ‹’Ž‹…‹–‡Ǥ ƒ‹• …‡––‡ ‰”‹ŽŽ‡ ‡ ’‡—– ²–”‡ “—ǯ— ‹•–”—‡– ’”‘˜‹•‘‹”‡ ±…‡••ƒ‹”‡‡––”ƒ•ˆ‘”±†ƒ•Žƒ’”ƒ–‹“—‡†‡ŽǯƒƒŽ›•‡ǤȋǥȌ‡…‘…‡’–ƒ†±“—ƒ– ǯ‡•– Œƒƒ‹• †±Œ Žǡ ‹Ž‡•– –‘—Œ‘—”•  ’”‘†—‹”‡ ‡– •‡ ˆ‘”‰‡ †ƒ• Ž‡ Œ‡— †‹ƒŽectique ‡–”‡ Ž‡• …‘…‡’–• †±Œ ’”‘†—‹–• ’‘—” ”‡†”‡ …‘’–‡ †ǯƒ—–”‡• ”±ƒŽ‹–±• ȋǤǤǤȌ. » (A. Djeghloul, 1980: 7). YƵ͛ŝů Ɛ͛ĂŐŝƐƐĞ ĚĞ ƌĠĂůŝƚĠƐ ĂďƐƚƌĂŝƚĞƐ͕ ŽƵ ĚĞ ƌĠĂůŝƚĠƐ ĐŽŶĐƌğƚĞƐ͕ ƵŶĞ ŐƌŝůůĞ ĐŽŶĐĞƉƚƵĞůůĞ ŝŶĚŝŐĞŶƚĞŽƵŝŵƉƌŽǀŝƐĠĞŶ͛ĂƉƉŽƌƚĞƌŝĞŶĚĞũƵĚŝĐŝĞƵdžăůĂƉƌĂƚŝƋƵĞĚĞů͛ĂŶĂůLJƐĞƐĂŶƐƋƵĞ la vigilance épistémologique ne soit atteinte de bricolage, ou Ě͛ĂŵďŝƚŝŽŶĚĠƐĂůŝĠŶĂŶƚĞ. Pourtant, de par la nature peu ou prou emblématique des phénomènes littéraires, toute sorte de grille fluente pourrait porter caution Ě͛ƵŶĞŵŽĚĠůŝƐĂƚŝŽŶquasi-opérante ĂƵ ƐƚĂĚĞ Ě͛ƵŶĞ ƌĠǀŝƐŝŽŶ ĂƚƚĞŶƚŝǀĞ ĂƵdž moindres détails du socle sensible de ů͛ĞdžƉĠƌŝĞŶĐĞůŝƚƚĠƌĂŝƌĞ͘A ce niveau, une épistémè idoine à essence phénoménologique prend corps en s͛ĞĨĨŽƌĕĂŶƚ ĚĞ ƌĞƚƌŽƵǀĞƌ ůĞ ƐĞŶƐ Ě͛ġƚƌĞ au projet littéraire, laquelle épistémè se défait du « vêtement Ě͛ŝĚĠĞƐ » (J. Fontanille, 1999 : 226), qui se laisse ƐƵƌƉƌĞŶĚƌĞ ƉĂƌ ůĞƐ ŝůůƵƐŝŽŶƐĚ͛ŽƉƚŝƋƵĞ ƉŽƵƌ ƉƌŽďůĠŵĂƚŝƐĞƌ ů͛ĠŵĞƌŐĞŶĐĞ ĚƵ ƐĞŶƐ͕ŽƵ ůĞ devenir du projet signifiant.

Toujours est-il, comme « comƉƌĞŶĚƌĞ ĞƐƚ ů͛ĂĐƚĞ ŵġŵĞ ĚƵ ĚĞǀĞŶŝƌ ĚĞ ů͛ĞƐƉƌŝƚ.» (J. C. Coquet, 1997 : 127), ƐĂŝƐŝƌ ů͛ŝŶƚƵŝƚŝŽŶ sensible dans le monde fictif « l͛aperception »55 est

ů͛ĂĐƚĞ ŵġŵĞ ĚƵ devenir épistémique sous-jacent au flux perceptif dans ů͛ĞdžƉĠƌŝĞŶĐĞ esthétique. De fait, le devenir de ů͛aperception dans le dit littéraire est conditionné tantôt par ů͛ĞƐƚŝŵĂƚŝŽŶ ĚĞ la profondeur de ů͛ŝŶƚĞŶƚŝŽŶŶĂůŝƚĠ fictive, tantôt par la synthèse d͛esquisses56 dans ůĞ ƉƌŽũĞƚ Ě͛ĂƌƚŝƐĂƚŝŽŶ. Pour ainsi dire, toute sorte de régression systématique et contrôlée sur le flux perceptif dite Emotion esthétique émergerait grâce au corps occupant le centre de présence ͨů͛ŝŶƐƚĂŶĐĞ ĚŝƐĐƵƌƐŝǀĞ», et

55

-« >͛ĂƉĞƌĐĞƉƚŝŽŶĞƐƚůĂ première des activités signifiantes : elle interprète simultanément la signification des objets de son champ, les rapports entre ces objets et leurs rapports avec le sujet percevant, en termes logiques (inclusion, causalité, etc.), narratifs (attente, imminence, menace, etc.), et affectifs (désir, crainte, etc.).» (D. Bertrand, Sémiotique littéraire, in Questions de sémiotique, (sous la dir.) A. Hénault, Op. cit., 313). 56

- Concept husserlien qui désigne la manière dont les objets se donnent au sens de façon

ƌĞŶĚƌĂŝƚ ĐŽŵƉƚĞ ĚĞ ů͛ĞdžŝƐƚĞŶĐĞ Ě͛ƵŶĞ ĞƐƚŚĠƐŝĞ de plénitude, et par là-même des défauts Ě͛ġƚƌĞ : «ů͛ĠŵŽƚŝŽŶ ĞƐƚŚĠtique née de ce corps à corps entre le texte et

ů͛ŝŶƐƚĂŶĐĞ ĚĞ ĚŝƐĐŽƵƌƐ͕ Ğƚ ƉůƵƐ ƉƌĠĐŝƐĠŵĞŶƚ ĞŶƚƌĞ ůĞ ĚŝƐĐŽƵƌƐ Ğƚ ƐŽŶ ĠŶŽŶĐŝĂƚĂŝƌĞ͕ elle ƐĞƌĂŝƚĂůŽƌƐƉƌŽĚƵŝƚĞƉĂƌů͛ŝŶƚƵŝƚŝŽŶĚĞƉůĠŶŝƚƵĚĞ͕ƋƵĞƉƌŽĐƵƌĞŶƚĨƵŐŝƚŝǀĞŵĞŶƚů͛ĞƐƚŚĠƐŝĞ͕ et, plus durablement, le sentiment de cohérence, de cohésion, et de perfection. » (J. Fontanille, 1999 : 239).

Eclairage nouveau, et fécond, certes, mais qui ne saurait satisfaire aux ĞdžŝŐĞŶĐĞƐĚ͛ƵŶĞ modélisation de la présence sans que cette dernière ne soit schématiquement modulée; elle arbore des résonances sur la profondeur des phénomènes, et moins davantage des simulacres authentiques. De fait, pŽƵƌ ĚŝƌĞ ů͛ĂŵƉůŝƚƵĚĞ Ě͛une approximation sémiotisante ĚƵ ƉŚĠŶŽŵğŶĞ ůŝƚƚĠƌĂŝƌĞ͕ ĞŶŽ̟ƚ fusionne différents réseaux épistémologiques ĞŶ ǀƵĞ Ě͛ƵŶĞ ƉůĠŶŝƚƵĚĞ ĞƐƚŚĠƚŝƐĂŶƚĞ : « >Ă ůŝƚƚĠƌĂƚƵƌĞ Ɛ͛LJ

rencontre régulièrement avec la philosophie [;] la description phénoménologique peut déboucher sur des considérations politiques [;] ůĂ ƉƌĠŽĐĐƵƉĂƚŝŽŶ ĠƚŚŝƋƵĞ Ɛ͛ĂƉƉƵŝĞ ƐƵƌ des réflexions esthétiques ou psychologiques.» ;͘ĞŶŽ̟ƚ͕/ďŝĚ : 90). A vrai dire, à partir de cette constellation cogitative ů͛ĞdžŝƐƚĞŶĐĞ Ɛ͛ŝŶǀĞƐƚŝƚ dans le littéraire sur le plan tant éthique que spirituel; entre ŵŽĚĞ Ě͛ĞdžƉƌĞƐƐion artistique et doxique, la description ƉŚĠŶŽŵĠŶŽůŽŐŝƋƵĞƚƌŽƵǀĞƐĂƌĂŝƐŽŶĚ͛ġƚƌĞƉŽƵƌĚŝƌĞůĞƐĚĠĨĂƵƚƐĚ͛ġƚƌĞ͘

Sans que le présent projet de sémiotisation prétende à ů͛ĞdžŚĂƵƐƚŝǀŝƚĠĚƵƉŽŝŶƚĚĞǀƵĞ Ě͛ƵŶĞŽƉƚŝƋƵĞphénoménologique, ƵŶĞƚĞůůĞŝŶǀĞƐƚŝŐĂƚŝŽŶĞŶŐĞŶĚƌĞƉŽƵƌů͛ĞƐƐĞŶƚŝĞůůĞƐ ŝŶŐƌĠĚŝĞŶƚƐĚ͛ƵŶĞlecture herméneutique ƚŽƵƚĞŶƌĞŶĚĂŶƚĐŽŵƉƚĞĚĞů͛ŚLJƉŽƚŚğƐĞƋƵĞ

«(͙) ůĞƌŽŵĂŶĞƐƚůĞƐĞƵůŐĞŶƌĞůŝƚƚĠƌĂŝƌĞŽƶů͛ĠƚŚŝƋƵĞĚƵƌŽŵĂŶĐŝĞƌĚĞǀŝĞŶƚƵŶproblème ĞƐƚŚĠƚŝƋƵĞĚĞů͛ƈƵǀƌĞ͘» (L. Goldman, citant Lukacs, 1964 : 33).

Pour ce faire, une mise en perspective sur le corps des êtres esthétisés au travers des phénomènes langagiers se voit exploré dans le corpus romanesque de B.SANSAL. « De la sŝŶŐƵůĂƌŝƚĠĚĞů͛ƈƵvre : du déjà-dit au déjà-pensé », du « projet créatif sansalien : de ů͛ŝŶƚĞŶƚŝŽŶŶĂůité narrative dans le métatexte », et « des géographies psychologiques

ĂƵdž ƉĂLJƐĂŐĞƐ Ě͛ąŵĞ ĚĂŶƐůĞ ƌŽŵĂŶĞƐƋƵĞ » ŽĨĨƌĞŶƚ ƵŶĞ ǀƵĞ Ě͛ĞŶƐĞŵďůĞƐƵƌ ƋƵĞůƋƵĞƐ ingrédients de la matrice constitutive du dit littéraire sansalien. «Dits littéraires en

mouvance et artefact textuel» est la suite logique Ě͛ƵŶĞ ƌĠĨůĞdžŝŽŶ sémio-phénoménologique sur ce dit fictif ; elle engendre : «De la totalisation sémiosique en

perspective », « de la chrono-topie comme forme de vie », et «des interférences ĚŝƐĐƵƌƐŝǀĞƐ ă ů͛ĞĨĨĞƚ-sujet». Le Dire fictionnel entre artifices et faire institutionnel

permet en définitive de porter un regard critique sur le dynamisme ontologique, sur le devoir d'Histoire, et sur le politique entre idéologèmes et stéréotypes.

II-I- Glissement méthodologique du corps au corpus ͗ů͛ƈƵǀƌĞĚĞŽƵĂůĞŵ^ĂŶƐĂůĞŶ question (s)

« YƵĞůƐƐŽŶƚůĞƐĂŶŶĞĂƵdžŶĠĐĞƐƐĂŝƌĞƐĚ͛ƵŶďĞĂƵƐƚLJůĞ ? » (M. Proust, 1987-1989 : 889). Selon Proust, ŝů Ɛ͛ĂŐŝƚ ĚĞ ůĂ ĚŝĨĨĠƌĞŶĐĞ ƉƵƌĞ ŽƵ ƋƵĂůŝƚĂƚŝǀĞ ƋƵŝ ƌĠƐŝĚĞ͕ Ě͛ƵŶ ĐƀƚĠ͕ «dans la

ĨĂĕŽŶ ĚŽŶƚ ŶŽƵƐ ĂƉƉĂƌĂŠƚ ůĞ ŵŽŶĚĞ͕ ĚŝĨĨĠƌĞŶĐĞ ƋƵŝ͕ Ɛ͛ŝů LJ ĂǀĂŝƚ ƉĂƐ Ě͛Ăƌƚ͕ ƌĞƐƚĞƌait le secret éternel de chacun» (Cité in D. Bertrand, 2000 : 15)͖Ě͛un ĂƵƚƌĞĐƀƚĠ͕ĚĂŶƐů͛ĠƚƌĂŶŐĠŝƚĠ linguistique : « les beaux livres sont écrits dans une sorte de langue étrangère.» (Cité in

D. Bertrand, Ibid). ĞůĂƐŽƌƚĞ͕ů͛ĂƌƚƚƌĂŶƐĐĞŶĚĞůĂƉƌŽũĞĐƚŝŽŶƵŶŝĨŽƌŵŝƐĂŶƚĞĚĞƐŽďũĞƚƐĞƚ

des visions sous-ũĂĐĞŶƚĞƐ ă ů͛ĂƉƉƌĠŚĞŶƐŝŽŶ ƋƵŽƚŝĚŝĞŶŶĞ Ğƚ ĞŵƉŝƌŝƋƵĞ ĚƵ ŵŽŶĚĞ ƉŽƵƌ concevoir une pluralité de mondes virtuels et singuliers.

« ‹•‹ǡ Žǯ±…”‹˜ƒ‹ –‘—…Š‡  Žƒ ˜±”‹–±ǡ ȏ‡– •—„•±“—‡‡–Ȑ ȋǥȌ ‹Ž ƒ……°†‡ ƒ—š ‡••‡…‡•ǡƒ‹•”±˜°Ž‡“—ǯ‡ŽŽ‡•ǯ‡š‹•–‡–“—‡ †ƒ•†‡•²–”‡•ǡ†ƒ•†‡•…‘”’• ’±–”‹• †‡Žƒ‰ƒ‰‡ǡ†ƒ•—Žƒ‰ƒ‰‡“—‹ǯ‡•–“—‡…‡Ž—‹†‡•…‘”’•Ǥ‡ style, peut conclure Ǥ‡Ž‡—œ‡ǡȋ”‘—•–‡–Ž‡••‹‰‡•ǡ ǡͷͿͽͶȌǡǯ‡•–’ƒ•ŽǯŠ‘‡ǡƒ‹•Žǯ‡••‡…‡‡ŽŽ‡-²‡ǡƒ—–”‡‡–†‹–ǡŽƒ†‹ˆˆ±”‡…‡“—‹•‡”±’°–‡ǡ‡–“—‹ˆƒ‹–“—‡Ž‡•–›Ž‡†ǯ—‰”ƒ† ±…”‹˜ƒ‹‡•––‘—Œ‘—”•Ž‡²‡‡––‘—Œ‘—”•—ƒ—–”‡“—ǯ‹Ž‡•–ƒbsolument singulier et transindividuel.».(C. Dumoulié, 2002 : 114).

Déplaçons la réflexion de Proust ĞƚĚĞĞůĞƵnjĞǀĞƌƐůĞĐŽƌƉƵƐĠƚƵĚŝĠ͖ĐĞůƵŝĚĞů͛ƈƵǀƌĞ de B. Sansal, il y aurait matière de traiter des bien-fondés de son projet créatif ͗ƋƵ͛LJĂ-t-il de véritablement singƵůŝĞƌĚĂŶƐů͛ƈƵǀƌĞĚĞ^ĂŶƐĂů ? Sachant que ses premiers écrits ƌĞůğǀĞŶƚĚƵĚŽŵĂŝŶĞĚĞů͛ĠĐŽŶŽŵŝĞ͕ƋƵĞůůĞsorte de marque sémiosique

singularise-t-elle sa conscience intentionnsingularise-t-elle -visée programmatique de son projet créatif en

littérature-, et perceptive -différence qualitative pure dont parle Proust- ? En tant

ƋƵ͛ŚŽŵme de lettres, comment au travers Ě͛une certaine urdoxa artistique (D. Bertrand,

Op. cit. : 314) accède-t-il aux essences des objets du monde à incarner? Le choix délibéré

Ě͛Ƶne certaine forme de corporéité langagière traduit-il, de la sorte, une aperception absolument singulière et transindividuelle͍ ŶƚƌĞ ůĞ ƉĂƌĂŠƚƌĞ Ğƚ ů͛ĂƉƉĂƌĂŠƚƌĞ ou les ƉĂƌĂĚŽdžĞƐĚĞů͛ĂƉƉƌĠƐĞŶƚĂƚŝŽŶ, recourt-il à une cosmogonie figurative, dans le sens de paratopie ou de scénographie, basée sur une appréhension empirique et sensible du monde tant réel que fictif? De par le choix des modes de figurativité, de narrativité, et Ě͛ĂĨĨĞĐƚŝǀŝƚĠ͕ Ƌuels sont les anneaux nécessaires ƉŽƵƌ ƋƵĂůŝĨŝĞƌ ƐŽŶ ĠĐƌŝƚ Ě͛ŝŶĠĚŝƚ- ou reconnu par la communauté littéraire en tant que tel?

Pour bien traiter de ůĂ ƐŝŶŐƵůĂƌŝƚĠ ĚĞ ƐŽŶ ƈƵǀƌĞ͕ un parcours démystificateur de ů͛ĂƌƌŝğƌĞĨŽŶĚĚĞƐŽŶƉƌŽũĞƚĐƌĠĂƚŝĨͨ du déjà-dit au déjà-pensé », « ĚĞů͛ŝŶƚĞŶƚŝŽŶŶĂůŝƚĠ narrative dans le métatexte », et « des géographies psychologiques aux paysages Ě͛ąŵĞ » cristallise une certaine proximité aux essences phénoménologiques dans ce projet romanesque.

II-1-1- ^ŝŶŐƵůĂƌŝƚĠĚĞů͛ƈƵǀƌĞ : du déjà-dit au déjà-pensé :

«Les taupes ont besoin de toucher pour voir, rétorquais-je en plastronnant. ǯƒ˜ƒ‹• — …‘’ƒ• †ƒ• Žǯà‹Žǡ Œǯ±–ƒ‹• ˆ‹‡” †‡ ƒ Ž—…‹†‹–±Ǥ ‡ •‡• †‡ Žǯ‘„•‡”˜ƒ–‹‘ •ǯ±‘—••‡ƒ˜‡…Ž‡•‘—…‹‡–†‡•‡—‹•ǡŒǯ‡ƒ‹’Ž—•“—‡ƒ’ƒ”–ǡŒ‡‡Ž‡•˜‘‹•’Ž—• arriver Ǥ–ŽǯŸ‰‡ǯƒ””ƒ‰‡’ƒ•Žƒ˜—‡Ǥ» (B. Sansal, « La vérité est dans nos amours perdus.», in Algérie littérature et arts, 2003 :257).

ƵƐƐŝǀŝƐŝŽŶŶĂŝƌĞ ƋƵ͛ŝů ƐŽŝƚ ĞŶ ĂůůŝĂŶƚ ů͛ĞdžƉĠƌŝĞŶĐĞ ƉĞƌĐĞƉƚŝǀĞ ă ĐĞůůĞ ĚĞ ůĂ ƌĠĨůĞxivité ; ĂƵƐƐŝ ĐŽŶƐĐŝĞŶĐŝĞƵdž ƋƵ͛ŝů ƐŽŝƚ ĞŶ Ɛ͛ĠůĞǀĂŶƚ ĐŽŶƚƌĞ ůĞƐ ƐŝŵƉůŝĨŝĐĂƚŝŽŶƐ Śątives et ů͛ĞŶĨĞƌŵĞŵĞŶƚĚĂŶƐů͛ŽƌŶĞŵĞŶƚĂů͕ů͛ŝŵŵƵĂďůĞ͕ů͛ĂĐĐŝĚĞŶƚĞůƉŽƵƌĠƉŽƵƐĞƌů͛ĞƌƌĂŶĐĞ͕Ğƚ ůĞ ǀĞƌƚŝŐĞ ĚĂŶƐ ů͛ĂƉƉƌĠŚĞŶƐŝŽŶ ĚĞ ů͛ŝŶĂĐŚĞǀĠ Ğƚ ĚĞ ů͛ŝŵƉĞƌĐĞƉƚŝďůĞ ŵŽƵǀĞŵĞŶƚ ĚĞ ůĂ vie ; Sansal rattache -au delà du dégoût, de la répugnance, du désespoir, et de ů͛ĠŐĂƌĞŵĞŶt dus aux forces contraignantes de la nature et de la vie- le principe de la ĐŽƌƉŽƌĠŝƚĠ ă ĐĞůƵŝ ĚĞ ů͛ĂĨĨĞĐt pour dire le littéraire. Fier de sa lucidité en quêtant les

ƌĠĂůŝƚĠƐ ĂƉŽĐĂůLJƉƚŝƋƵĞƐ Ğƚ ĨůĂƚƚĞƵƐĞƐ ƋƵ͛ĞůůĞƐ ƋƵĞůůĞƐ ƐŽŝĞŶƚ͕ il se livre à une charge virulente et corrosive dans une langue sensuelle, brutale (B.Sansal, Le serment des barbares,

1999 :4eme de couverture), et colorée pour décaper les vernis derrière les apparences des

êtres :

« Si Boualem Sansal ne pourra jamais courir plus vite que les balles, sa lucidité et son franc-parler voyagent à la vitesse du son laissant derrière lui les pourfendeurs

de nos libertés. ». (K.Madani, Le fantastique pour issue ? 2002 :11, in

http://www.inventaire.invention.com/Sansal.htm)

Cette écriture truculente, et pamphlétaire, tout en étant singulière, traduit une forte ƚĞŶĚĂŶĐĞĚ͛ŝŶƐĐƌŝƉƚŝŽŶ« buissonnière » qui porte les signes ăůĂĨŽŝƐĚĞů͛ltérité et de la redécouverte de « soi » au travers des poncifs et des stéréotypes à caractère ĚĠŵLJƐƚŝĨŝĐĂƚĞƵƌ͕ ŵŽƌĂůŝƐĂŶƚ Ğƚ ƐĞŶƚĞŶĐŝĞƵdž͘ WŽƵƌ ĂŝŶƐŝ ĚŝƌĞ͕ Đ͛ĞƐƚ ƵŶĞ ůŝƚƚĠƌĂƚƵƌĞ ƋƵŝ ĚĠŶŝĞů͛ĞŶĨĞƌŵĞŵĞŶƚ͕ĚĠĐŽŶƐƚƌƵŝƚƉĂƚŝĞŵŵĞŶƚůes limites géographiques, et « démonte

les paysages mentaux pour reconstruire un espace plus grand que celui dans lequel veulent le confiner à tout prix͕΀͙΁, les hasards de la naissance et le piège des frontières politiques.» (K. M. Ammi, Op.cit :94).

Ce nouvel espace expressif sansalien démonte a priori les poncifs tant bien que mal dénigrant de la langue française, et des français ; car pour lui : « avec le temps on

aurait réussi à en faire de bons algériens.» («>͛ĂůŐĠƌŝĞŶ ĚĞ ůĂ >ŝƚƚĠƌĂƚƵƌĞ &ƌĂŶĕĂŝƐĞ ŽƵĂůĞŵ

Sansal », in www.Marianne-en-ligne.fr, n° 328, 2003). Affichant ainsi son engagement quant à

ů͛ĞdžƉƌĞƐƐŝŽŶ Ě͛ƵŶĞ Mémoire en chantier (A.Mahiou, J-R Henry, « >͛,ŝƐƚŽŝƌĞ ƚƵĞ », 2001 : 333), Sansal Ɛ͛ĂĚŽŶŶĞăů͛ĠĐƌŝƚƵƌĞƌŽŵĂŶĞƐƋƵĞƚŽƵƚĞŶĚĠƉůŽLJĂŶƚdes paraboles, et une sorte Ě͛épistémè empirique pour légitimer son dire au travers du dépouillement et de la persuasion.

YƵŽŝƋƵ͛on en dise sur cette prise de position stéréotypie et tranchante (décisive) « [le

dit sansalien est] un paidoyer ŝŶũƵƌŝĞƵdž Ě͛ƵŶ ƌĠǀŝƐŝŽŶŶŝƐƚĞ ŶŽƐƚĂůŐŝƋƵĞ ĚĞ ů͛Algérie Française.» (« A qui prêter le serment des barbares », in Algéria interface : 2000), il faudrait croire

que les processus de productivité textuelle57tiendraienƚĐŽŵƉƚĞĚƵĚĞǀĞŶŝƌĚĞů͛ƈƵǀƌĞ au-ĚĞůă ĚĞƐ ƉƌŽĐĠĚĠƐ Ě͛ĂƌƚŝƐĂƚŝŽŶ : Đ͛ĞƐƚ ƵŶ ĚĞǀĞŶŝƌ ĂƐƐƵŵĠ ƉůĞŝŶĞŵĞŶƚ͕ Ě͛ƵŶĞ ƉĂƌƚ͕ dans ů͛ŝŶĐŽŵƉůĠƚƵĚĞĚĞů͛ĂƉƉƌĠŚĞŶƐŝŽŶdu sensible par le sujet percevant « le clivage

de son être ĞŶƚƌĞ ůĞ ƉĂƌĂŠƚƌĞ Ğƚ ů͛ĂƉƉĂƌĂŠƚƌĞ ; lequel clivage est conçu à travers « ů͛absence-présence de son inconscient » ; Ě͛ĂƵƚƌĞƉĂƌƚ͕dans la grossièreté des objets

perçus car :

«ȏǥȐ ‘—• ‡ •‘‡• ’ƒ• ƒ••‡œ •—„–‹Ž• ’‘—” ƒ’‡”…‡˜‘‹” Žǯ±…‘—Ž‡‡– probablement absolu du devenir ǢŽ‡’‡”ƒ‡–ǯ‡š‹•–‡“—‡‰”Ÿ…‡‘•‘”‰ƒ‡• grossiers qui résument et ramènent les choses à des plans communs alors que rien ǯ‡š‹•–‡ •‘—• …‡––‡ ˆ‘”‡Ǥ ǯƒ”„”‡ ‡•–  …Šƒ“—‡ ‹•–ƒ– —‡ …Š‘•‡ ‡—˜‡ǡ ‘—• affirmons la ˆ‘”‡’ƒ”…‡“—‡‘—•‡•ƒ‹•‹••‘•’ƒ•Žƒ•—„–‹Ž‹–±†ǯ—‘—˜‡‡– absolu. [Le texte est lui aussi cet arbre dont nous devons la nomination (provisoire) à la grossièreté de nos organes] ». (F. Wahl, « le texte » Cité in todorov, « texte », Appendice, Cité in O. Ducrot, T. Todorov 1972, Cité in Encyclopéidia Universalis, 2004)

ŶŽƚƌĞƐĞŶƐ͕ƌŝĞŶŶ͛ĞƐƚƉůƵƐŐĂƌĂŶƚĚĞůĂŶŽŶĨůĞdžŝďŝůŝƚĠĚĞůĂĐŽŶƐĐŝĞŶĐĞ intentionnelle Ğƚ ƉĞƌĐĞƉƚŝǀĞ ƋƵĞ ůĞƐ ƉƌŽĐĠĚĠƐ Ě͛ŝntellection sous-ũĂĐĞŶƚƐ ă ů͛ĞdžƉƌĞƐƐŝŽŶ ĚĞ ůĂ corporéité dans des labyrinthes textuels tant réels que fictifs. Il en est ainsi en raison du caractère irrécusable, et indélébile de la surface phénoménale de ƚŽƵƚĞ ƈƵǀƌĞ littéraire ; à savoir « le texte ». Toutefois, il se trouve que cette matérialité reste une ĨŽƌŵĞ Ě͛ĂƵƚŚĞŶƚŝĨŝĐĂƚŝŽŶ ƉƌŽǀŝƐŽŝƌĞ ĚĂŶƐ ůĞ Ěŝƚ ůŝƚƚĠƌĂŝƌĞ même si elle constitue un attribut inestimable du langage de « sécurité mnésique ». Ce même champ

phénoménal, mondes doxiques Ě͛ŝŶƐƚŝƚƵƚŝŽŶƐĚ͛objets à la fois perçus et perceptibles, Ɛ͛ĠůĂƌŐŝƚ ă ůĂ ƐƵŝƚĞ ĚĞƐ ŽƉĠƌĂƚŝŽŶƐ ĚĞ ƌĞƐƚŝƚƵƚŝŽŶ ĚƵ ƐŝŐŶŝĨŝĂŶƚ Ğƚ Ě͛ŝŶƚĞƌƉƌĠƚĂƚŝŽŶ canonique du signifié en un peaufinage analytique, et même spéculatif ; ou en quelque sorte en un champ phénoménal de productivité de la signifiance. YƵ͛ĞŶĞƐƚ-il pour le dit littéraire sansalien ?

Dans le dit littéraire sansalien, la mise en perspective des phénomènes Ɛ͛ĂƉƉƵŝĞ ƐƵƌ des configurations narratives essentiellement mimétiques, qui émergent du profane pour épouser une attitude dénonciatrice des mondanités et des contingences ŚŝƐƚŽƌŝƋƵĞƐĞŶƋƵġƚĞĚ͛ƵŶ ŵŽŶĚĞŝŶĐŽƌƌƵƉƚŝďůĞĚĂŶƐů͛ŝŵĂŐŝŶĂŝƌĞ:

57

« ǯƒ‹„‡•‘‹†‡”ƒ…‘–‡”†‡•Š‹•–‘‹”‡•˜”ƒ‹‡•Ǥ ‡ǯƒ‹‡ pas Žƒˆ‹…–‹‘Ǥ ‡ǯ‹•…”‹• dans le réel et dans des histoires auxquelles je suis personnellement mêlé. [ǥȐƒ réalité est complexe, derrière elle il y a un monde insoupçonnable, un monde imaginaire ; notre âme se tapie derrière cette réalité, alors je déplace cette réalité dans un autre univers.» (A. Hannifi, Entretien avec B. Sansal, Littérature, quotidien, etc., 2006, in www.pied-noir-en).

Cet univers fictif nécessite une médiation sémiosique, une certaine projection de ů͛ŝŶƚĞŶƚŝŽŶŶĂůŝƚĠ ƐƵbjective, qui inscrit leƐ ŽďũĞƚƐ ĚƵ ŵŽŶĚĞ ƉĞƌĕƵ ĚĂŶƐ ů͛engrenage ĞƐƚŚĠƚŝƐĂŶƚ Ě͛ƵŶĞ ĐŚĂŠŶĞ ƐŝŐŶŝĨŝĂŶƚĞ, et qui, « soumise ă ƚŽƵƚ ŵŽŵĞŶƚ ă ů͛ĂƉƉĂƌŝƚŝŽŶ

ƐŽƵĚĂŝŶĞ Ě͛ƵŶ ƐŝŐŶŝĨŝĂŶƚ ŝĐŽŶŝƋƵĞ͕ ŵŽƚŝǀĞ ůĞ ĨƌĂLJĂŐĞ Ě͛ƵŶĞ ƉƵůƐŝŽŶ ƐĐŽƉŝƋƵĞ ƉƌŽƉƌĞ ă pourvoir le sujet de ůĂ ƉĞƌĐĞƉƚŝŽŶ Ě͛ƵŶĞ ŝŶƚĞŶƚŝŽŶŶĂůŝƚĠ ƚĞŶĚĂŶĐŝĞƵƐĞ͕ ƋƵŝ ƉĂƌƚŝĐŝƉĞƌĂ toujours à tracer le graphe symbolique du procès subjectal.» (J. Gérard, 1999 :14). Par un simple concours de circonstances, mais aussi par une vocation hasardeuse, ů͛ĠĐƌŝƚ sansalien se revġƚŝƚĚ͛ƵŶĞŝŶƚĞŶƚŝŽŶŶĂůŝƚĠƚĞŶĚĂŶĐŝĞƵƐĞconsolidée par son expérience perceptive en tant ƋƵ͛ĂŶĐŝĞŶ ,ĂƵƚ ĨŽŶĐƚŝŽŶŶĂŝƌĞ ĚĞ ů͛ŝŶĚƵƐƚƌŝĞ. Agissant contre la léthargie d͛ƵŶ régime politique, à ses yeux, anarchique et barbare (cf. Poste Restante :

Alger, Ibid), il se voit investi de briser les murs du silence et des exclusions pour mettre à

nu la cruauté du réel : « ũĞ ƌĞůĂƚĞ ůĂ ƐŝƚƵĂƚŝŽŶ ĚĞ ŵĂŶŝğƌĞ ĐƌƵĞ Ğƚ ǀŝŽůĞŶƚĞ͘ >ŽƌƐƋƵ͛ŝů Ɛ͛ĂŐŝƚ ĚĞ ĐŚŽƐĞƐ ĞdžƚƌġŵĞƐ Ğƚ ĚŽƵůŽƵƌĞƵƐĞs, je ne peux accepter la prudence, cela me semble être une chose mièvre de la lâcheté. Ici, le style allusif ne sert à rien. » (Odile Le Biban, 1999 : 5).

Affirmant son engagement en quêtant la mémoire collective dérobée, Sansal « ruse

ĂǀĞĐ ů͛,ŝƐƚŽŝƌĞ »- ƚĞůůĞ ĞƐƚ ů͛expression de Hanifi (Ibid). Il aƌƉĞŶƚĞ ĐĞƚƚĞ ƉĂƌƚ Ě͛,ŝƐtoire refoulée, et déguisée pour ũŽƵĞƌůĞƌƀůĞĚ͛ƵŶĐŚƌŽŶŝƋƵĞƵƌ à la fois acharné, et obsédé par la visite de territoires perdus, et enfouis dans ů͛ĂďƐĞŶĐĞ͘ Son Ecriture ĞƚŚŶŽŐƌĂƉŚŝƋƵĞƐƵƌŝŶǀĞƐƚŝƚů͛,istoire pour la calibrer, pour remédier au trouble de la conscience collective, et pour faire face à ce réflexe amputatoire du propre de ů͛,ŝƐƚŽŝƌĞ : «L͛ŚŝƐƚŽŝƌĞŶ͛ĞƐƚƉĂƐů͛ŚŝƐƚŽŝƌĞƋƵĂŶĚůĞƐĐƌŝŵŝŶĞůƐĨĂďƌŝƋƵĞŶƚƐŽŶĞŶĐƌĞĞƚƐĞ

passent la plume. Elle est la chronique de leurs alibis. Et ceux qui la lisent sans se brûler ůĞĐƈƵƌƐŽŶƚĚĞĨĂƵdžƚĠŵŽŝŶƐ. » (Le serment des barbares, 1999 : 461).

Force est de constater que le souci de porter un regard pénétrant, avec une ĐůĂŝƌǀŽLJĂŶĐĞ ĂĐĐƌƵĞ ĂƵ ƉŽŝŶƚ Ě͛ĞŶŐĞŶĚƌĞƌ ĚĞƐ ĐƌŝƚŝƋƵĞƐ Ěésobligeantes ou mêmes cocasses ne singularise que ů͛ĠĐƌŝƚƵƌĞƐĂŶƐĂůŝĞŶŶĞăŵŽŝŶƐ͕ƉŽƵƌƌĞũŽŝŶĚƌĞD͘ůĂŶĐŚŽƚ dans « >Ğ ƉĂƌĂĚŽdžĞ Ě͛LJƚƌĠ » ͕ ĚĞ ƐĂŝƐŝƌ ĐĞƚƚĞ ǀŝŽůĞŶĐĞ Ě͛ĠĐƌŝƚƵƌĞ ĐŽŵŵĞ ĐŽƌŽůůĂŝƌĞ

Ě͛ƵŶĞĠĐƌŝƚƵƌĞĚĞůĂǀŝŽůĞŶĐĞ: « ů͛ĠĐƌŝƚƵƌĞĂƉƉĂƌĂŠƚůŽƌƐƋƵĞƋƵĞůƋƵĞĐŚŽƐĞĚĂŶs la vie se

dérègle ͗ƉŽƵƌĠĐƌŝƌĞ;͙ͿůĂƉƌĞŵŝğƌĞĐŽŶĚŝƚŝŽŶ͕Đ͛ĞƐƚƋƵĞůĂƌĠĂůŝƚĠĐĞƐƐĞĚ͛ĂůůĞƌĚĞƐŽŝ͕ seulement alors, on est capable de voir et de donner à voir.» (M. El Houssi, « Apulée ou la création aventureuse », in racines du texte maghrébin, 1997 : 151).

Rétablir un continuum de la mémoire des lieux, et authentifier le dit littéraire par des ƚĠŵŽŝŐŶĂŐĞƐƐƵƌů͛ĂĐƚƵĂůŝƚĠŶĞdénote que les propriétés intrinsèques de la littérature algérienne de l͛urgence. Celle-ci ne retient ƉŽƵƌ ů͛ĞƐƐĞŶƚŝĞů ƋƵĞ ůĂ Ěŝmension ƌĠĨĠƌĞŶƚŝĞůůĞ ĞŶ ĚĠũŽƵĂŶƚ ů͛ŝŶƚĂŶŐŝďůĞ͕ ĞŶ enrichissant ů͛espace textuel par un certain brouillage évènementiel, par une sémiosis iconoclaste, par des isotopies du voyage, du retour, et de réminiscences, et plus particulièrement par un labyrinthe temporel à géométrie parfois rotative͕ Ě͛ĂƵƚƌĞƐ ĨŽŝƐ ĐŽƐŵŝƋƵĞ ŽƵ ƐƉŝƌĂůŽ̟ĚĞ͘ Ayant pour motif ů͛ĞdžƉƌĞƐƐŝŽŶ ĚĞ ůĂ ǀŝŽůĞŶĐĞ Ğƚ ĚĞ ů͛ĂŵĞƌƚƵŵĞ ĐŽůůĞĐƚŝǀĞ͕ ĐĞƚƚĞ ĨŽƌŵĞ Ě͛ĠĐƌŝƚƵƌĞ ĚŝƚĞ

blanche (CH. Bonn, « Paroles Déplacées », in Migrations des identités et des textes, 2004 :7) cesse de ů͛ġƚƌĞ en adoptant tantôt ůĂ ǀŝŽůĞŶĐĞ ĚĞ ů͛ĠĐƌŝƚƵƌĞ ĚĂŶƐ ůĞ ƌŽŵĂŶ ŶŽŝƌ, tantôt des déplacements génériques par la délocalisation des paradigmes- un certain éclatement et subversion des genres repensant la notion même de la littérarité.

Ainsi, en restituant dans ů͛ĠĐƌŝƚ, essentiellement pamphlétaire, la charge esthétique de ů͛ŽƌĂů͕ ů͛ĠĐƌŝƚƵƌĞ ĨŝĐƚŝŽŶŶĞůůĞ ŝŶƐƚĂůůĞ ƵŶ ƌĠƉĞƌƚŽŝƌĞ ůĂŶŐĂgier subversif oscillant entre

barbarisme, quand une syntaxe erronée est si fréquente ĚĂŶƐ ů͛ĞdžƉƌĞƐƐion, et oraliture, quand ů͛ĠĐƌŝƚƵƌĞƉƵŝƐĞĚĂŶƐů͛ŚĠƌŝƚĂŐĞĨŝĐƚŝĨŽƌĂůͨ͘ Force est de constater que

[pour Sansal]͕ ĐŽŵŵĞ ƉŽƵƌ Ě͛ĂƵƚƌĞƐ ĠĐƌŝǀĂŝŶƐ ĂůŐĠƌŝĞŶƐ Ğƚ ĨƌĂŶĐŽƉŚŽŶĞƐ͕ ůĂ ůĂŶŐƵĞ ĨƌĂŶĕĂŝƐĞ͕ ůĂŶŐƵĞ ĚĞ ůĞƵƌ ĠĐƌŝƚƵƌĞ͕ ĞƐƚ ƵŶ ůŝĞƵ ĚĞ ŵŝƐĞ ĞŶ ƈƵǀƌĞ ĚĞ ůĂ ĐŚĂrge ĐŽŶƚĞƐƚĂƚĂŝƌĞĞƚĐƌĠĂƚƌŝĐĞĚĞů͛ŽƌĂůŝƚĠƉƌĞŵŝğƌĞ. »(J-R. Henry, (Sous la dir.) de A.Mahiou, Ibid :

projettent, recopient, et même façonnent le fond culturel dans une perpétuelle mouvance en fonction des impératifs esthétiques, et même des tracés idéologiques souvent empruntés inconsciemment : « >ĞƐĠĐƌŝǀĂŝŶƐŵĂŐŚƌĠďŝŶƐƐ͛ĞŶĨŽŶĐĞŶƚĚĂŶƐůĞ grand fond du culturel pour se ressourcer. Le roc se mue en or, la racine transmet le ďƌƵƚ ĚĞ ů͛ĠƚŚŝƋƵĞ Ğƚ ĐĞƚ ĠďƌĂŶůĞŵĞŶƚ ĚĞ ů͛ŝĚĞŶƚŝƚĠ ĚĞǀŝĞŶƚ ůĂ ŵĂƚƌŝĐĞ ĚĞ ƚŽƵƚĞ interrogation esthétique. Mais ΀͙΁ l͛ĂůďĂƚƌŽƐŵaghrébin sait-il que le poids «empêche de voler » ? » (H. Salha, H. Hamaidi, Préambule, in racines du texte maghrébin, Op. cit. : 5-6).

Certainement pas pour B. Sansal car son projet de création artistique devient le ƉƌŽĚƵŝƚ Ě͛aventures et de quêtes inlassables ĞŶƐ͛ŝŵƉŽƐĂŶƚ comme un lieu décisif de retraits, de métamorphosĞƐ͕ Ğƚ Ě͛ŝŶĐĂƌŶĂƚŝŽŶƐ ; même si, dans son écrit, iů Ɛ͛investit :

«KŶĂƚŽƵƚů͛ĂŝƌĚ͛ƵŶĂůďĂƚƌŽƐƚŽŵďĠĚƵĐŝĞůĚĂns un panier de bachi-bouzouks.» ;>͛ĞŶĨĂŶƚ

ĨŽƵĚĞů͛ĂƌďƌĞĐƌĞƵdž͕ 2000 : 18). Les effets de prisme se traduisent, a fortiori, dans le texte

ƐŽŝƚ ĚĞ ĨĂĕŽŶ ĞŵďůĠŵĂƚŝƋƵĞ ƐŽƵƐ ĨŽƌŵĞ ĚĞ ƚĞdžƚĞƐ Ě͛ŝĚĠĞƐ͕ ĚĞ pamphlets, de textes Ě͛ŚƵŵŽƵƌŶŽŝƌ͕ĞƚĐ. (Poste restante ͗ ůŐĞƌ >ĞƚƚƌĞ ĚĞ ĐŽůğƌĞ Ğƚ Ě͛ĞƐƉŽŝƌ ă ŵĞƐĐŽŵƉĂƚƌŝŽƚĞƐ͕ ϮϬϬϲͿ,

ƐŽŝƚĚĞĨĂĕŽŶƐĂƌĐĂƐƚŝƋƵĞĞŶĚĠŵĂƐƋƵĂŶƚů͛ŝŶǀŝƐŝďůĞ pour outrepasser ů͛ŽƌĚŝŶĂŝƌĞĞƚĚŝƌĞ ů͛ĞdžƚƌĂŽƌĚŝŶĂŝƌĞ : « dans le texte, fut-il lapŝĚĂŝƌĞ͕ŝůLJĂĚĠĐŝĚĠŵĞŶƚƵŶŵLJƐƚğƌĞŽƶů͛ŽŶŶĞ

peut jamais le scruter impunément. Avant de dire, les mots résonnent.» (Ibid : 261). Echos et résonances du « dit » se réfugient dans des configurations sibyllines le

serment des barbares, Dis-moi le paradis, tantôt pour démasquer les mouvements

mythiques « ă ĐŽƵƉ Ě͛ŝŵĂŐĞƐ ĨĠƌŽĐĞƐ ;͙Ϳ ΀ƉŽƵƌ] une magistrale leçon du passé.» (Le

serment des barbares, Ibid) ; tantôt pour « faire table rase » de ce même passé « pour

ĐƌŽŝƌĞ ĞŶ ů͛ĂǀĞŶir en toute quiétude.» (Dis-moi le paradis, Ibid : 10). Or, « on dit pour se

libérer. » (E.F.A.C. : 11), mais « dans le malheur, on est autiste par prudence, on ne veut

ĂũŽƵƚĞƌ ă ƐĂ ƉĞŝŶĞ ĐĞůůĞ ĚĞ ƐĞƐ ƐĞŵďůĂďůĞƐ͕ ŽŶ Ěŝƚ ĐĞ ƋƵ͛ĞŶ ǀĞƵƚ ďŝĞŶ ĚŝƌĞ͕ ŽŶ ƚĂŝƚ ƐĂ vérité avec sa méfiance se voulaŶƚ Ě͛ĂďŽƌĚ ƌĠƉƌŽďĂƚŝŽŶ͕ ŽŶ ĂũŽƵƚĞ ĂǀĞĐ ůĞ ĚĠƐŝƌ ĚĞ convaincre. » (Ibid).

Dans « Harraga » (2005), et « Petit éloge de la mémoire » (2007) la vérité est portée vers ĐĞůůĞ ĚĞ ů͛ƵƚƌĞ ŽƵ ĚĞ ů͛ƚƌĂŶŐĞƌ ƐŽŝƚ ƉĂƌ ůĞ ƚƌƵĐŚĞŵĞŶƚ ĚĞ ů͛ĠŵŝŐƌĂƚŝŽŶ ƉŚLJƐŝƋƵĞ « brûleurs de route ͕ͩŽƵƉĂƌů͛ĠǀĂƐŝŽŶŵŽƌĂůĞĞƚůĞǀŽLJĂŐĞĚĂŶƐůĞƚĞŵƉƐ : «ǯ‡•– Ž‡’Ž—•Ž‘‹–ƒ‹ǡ…‡Ž—‹“—‡Œǯƒ‹‡‡š’Ž‘”‡”“—‹‡†‘‡Ž‡’Ž—•†‡ˆ”‹••‘• ȏǥȐ‡’Ž‹••‡œ„‹‡˜‘–”‡…Ž‡’•›†”‡ǡŽ‡˜‘›ƒ‰‡…‘’–‡“—ƒ–”‡‹ŽŽ‡‡–—‡ƒ±‡• et il n y a pas de hƒŽ–‡Ǥ ƒ†‹•ǡ‡…‡•–‡’•ˆ‘”–Ž‘‹–ƒ‹•ǡƒ˜ƒ–ŽƒƒŽ±†‹…–‹‘ǡŒǯƒ‹ vécu en Egypte au pays de ’Šƒ”ƒ‘Ǥ ǯ› •—‹•± ‡– …ǯ‡•–Ž que je suis mort, bien ƒ˜ƒ…±‡Ÿ‰‡ǥ » (Petit éloge de la mémoire, 2007 : 4eme de couverture).

>͛Histoire se donne à lire comme une variable idéologique du présent. De par ces ŵŽŵĞŶƚƐ Ě͛ŝĚĠŽůŽŐŝƐĂƚŝŽŶ ĚĞ ůĂ ĨŝĐƚŝŽŶ, ůĂ ƌĠŝŶƚĞƌƉƌĠƚĂƚŝŽŶ ŝĚĠŽůŽŐŝƋƵĞ ĚĞ ů͛,ŝƐƚŽŝƌĞ Ɛ͛ŝŶƐĐƌŝƚ ĚĂŶƐ ůĞ ƚĞdžƚĞ sous la forme d'un déjà-pensé collectif retravaillé par les procédés de textualisation :

«ǯ‹aginaire …ǯ‡•– Žƒ ”‡•–‹–—–‹‘ †ǯ— ”±‡Ž ’Ž—• ˜”ƒ‹ “—‡ Ž—‹-même, et doté par surcroît de ces multiplicateurs que sont les qualités propres de la nouvelle et du roman ǣ Žǯƒ—–‘‘‹‡ †— …‘–‡—”ǡ Žƒ –‡•‹‘ •—” — ‘— ’Ž—•‹‡—”• ƒš‡•ǡ Žǯƒ……‡– portant au gré de Žǯƒ—–‡—”ǡ •—” Ž‡ †±„ƒ– ’Š‹Ž‘•‘’Š‹“—‡ ‘— •‘…‹ƒŽǡ Žǯƒ˜‡–—”‡ romanesque, le chatouillement affectif, la recherche stylistique etc. Cette diversité †ǯƒ……‡–—ƒ–‹‘ …ƒ”ƒ…–±”‹•‡ Ž‡• †±˜‡Ž‘’’‡‡–• Ž‡• ’Ž—• ”±…‡–• du genre.» (J. Berques, 1974 : 248-249).

Le déjà-pensé est de prime à bord matérialisé dans toute configuration fictionnelle par

« un déjà-ĚŝƚĚ͛ƵŶĞĞdžŝƐƚĞŶĐĞƉƌĠĞxistante au roman.»58; à savoir par des intitulés. Or, Đ͛ĞƐƚbien dans une optique sémiotisante du déjà-pensé que ce déjà-dit déterminerait ůĞƐŵŽĚĞƐĚ͛ĂƉƉƌĠŚĞŶƐŝŽŶĚƵŵonde fictionalisé dans le déjà-exprimé «le scriptible», soit par certains jeux de référentialisation, ŽƵĚ͛ĂƉƉƌŽdžŝŵĂƚŝŽŶ ; soit par des modes de symbolisation, voire de distanciation partielle ou de dénégation différenciatrice. De la ƐŽƌƚĞ͕ů͛ĞĨĨŝĐŝĞŶĐĞĚĞůĂĐŚĂŠŶĞŵĠƚĂƉŚŽƌŝƋƵĞƐ͛ŝŶƐƚĂůůĞƉĂƌune première base sensible de la présentification en rétention ; celle du paratexte manifestant une médiation extéroceptive de territoires ĚƵǀŝƐŝďůĞĞƚĚĞů͛ŝŶǀŝƐŝďůĞ« le littéraire ».

Le déjà-ƉĞŶƐĠ ĚĂŶƐ ů͛ĠĐƌŝƚƵƌĞ ƐĂŶƐĂůŝĞŶŶĞ ĞƐƚ ƚƌĂĚƵŝƚ ƉĂƌ ƵŶ ĚĠũă-dit fondé sur ů͛ŝŶĐŽŵƉůĠƚƵĚĞŽƵůĞĚĠĨĂƵƚĚ͛ġƚƌĞĚĞůĂ dicibilité dans Le serment des barbares, et

Dis-moi le paradis, ƉĂƌůĞĚĠĨĂƵƚĚ͛ġƚƌĞƉĂƚŚĠŵŝƋƵĞĚĂŶƐ>͛ĞŶĨĂŶƚĨŽƵĚĞů͛ĂƌďƌĞĐƌĞƵdž, et

58

- Conception de claude duchet sur le titre « une écriture de la socialité », Cité in T. Vauterin, « Codes littéraires et codes sociaux dans la titrologie du roman québécois au XXe siècle, 1997 :7.

pragmatique dans Harraga. Les flux perceptifs agencés dans ces déjà-dits engendrent des esquisses ou des silhouettes sur le monde esthétisé ; esquisses miroirs de ů͛ĂƉĞƌĐĞƉƚŝŽŶ Ğƚ ĚĞ ů͛ŝŶƚĞŶƚŝŽŶŶĂůŝƚĠ ĂƵĐƚŽƌŝĂůĞƐ. L͛ŝŶĐŽŵƉůĠƚƵĚĞ ŝŶŚĠƌĞŶƚĞ ă ůĂ ǀŝƐĠĞ sensibůĞƚŝĞŶĚƌĂŝƚ͕ĞŶů͛ŽĐĐƵƌƌĞŶĐĞ͕ĂƵdž ŵŽĚĞƐĚ͛ĞƐƚŚĠƚŝƐĂƚŝŽŶ en modulant des effets ĚĞƉƌĠƐĞŶĐĞŽƵĚ͛ĞdžŝƐƚĞŶĐĞ͘

A ce titre, la « dicibilité » ĞƐƚƵŶŵŽŶĚĞĚĠŝĐƚŝƐĂŶƚĚĞů͛ĠŶŽŶĐŝĂƚŝŽŶ͕impliquant ad hoc ů͛esquisse Ě͛ƵŶĞ ƉƌĠƐĞŶĐĞ Ě͛acteurs ou de « diseurs ». Dans le premier roman Le

serment des barbares͕ů͛ĞƐƋƵŝƐƐĞĚĞƐĂĐƚĞƵƌƐĞƐƚĨĂŝƚĞƐƵŝǀĂŶƚƵn mode dénégateur de ů͛ĠƚŚŝƋƵĞ͕ un mode Ě͛ĠƚƌĂŶŐĠŝƚĠ : le vocable « barbare », ŵŽƚ Ě͛origine grec (XIVes), représente celui qui est incapable de parler le grec, donc Đ͛Ğst un étranger inculte

(J.Mathieu-Rosay, 1985) ; il désigne aussi par étymologie les borborygmes de ceux qui ne

parlent pas (D Bougnoux, 1999 : 101). De surcroît, il est un être non civilisé, sauvage, impitoyable et cruel ; et de par sa nature grossière, iůĞƐƚŝŶĐĂƉĂďůĞĚĞƐ͛ĞŶƚĞŶĚƌĞĂǀĞĐ les autres͕ĚĞƐ͛ĞŶƚƌĞƚĞŶŝƌĂǀĞĐĞƵdž͕ ou même de tenir à ses paroles. Comment, alors, des barbares pourraient-ils prêter serment? Tandis que le serment dénote un ĞŶŐĂŐĞŵĞŶƚ ƉĞƌƐŽŶŶĞů ǀŝŐŽƵƌĞƵƐĞŵĞŶƚ ĞdžƉƌŝŵĠ ĞŶ ĐĞ ƋƵ͛ŝů ĂĨĨirme solennellement une idée «une parole tenue» ; des barbares prêtent ce même serment pour faire persister leur cruauté dont le refus ou la méconnaissance et la négation des acteurs, ů͛ĂǀĞƵŐůĠŵĞŶƚ de leurs actes, ůĞ ĚĠĨĂƵƚ Ě͛ġƚƌĞ Ě͛ƵŶĞ ǀŽůŽŶƚĠ Ěe droiture sont les ƉƌĠŵŝƐƐĞƐĚ͛Ƶne appréhension problématisante de la visée intentionnelle : qui sont les acteurs ? Sont-ils de simples étrangers ou plutôt des gens impitoyables ? Entre promesses et leurres, quelles sont les conditions de félicité supposées compenser ce ĚĠĨĂƵƚ Ě͛ġƚƌĞ͍ Il revient aux fonctifs textuels59 sous différents degrés sensibles de spécifier la présence perceptive, et par là même de ĐŽŶƐƚƌƵŝƌĞů͛ĞĨĨŝĐŝĞŶĐĞŶĠĐĞƐƐĂŝƌĞă ů͛ĠƚĂďůŝƐƐĞŵĞŶƚĚĞůĂĨŝĚƵĐŝĞ « ce croire collectif lié au processus interprétatif ».

59

/ůŶ͛en demeure pas moins que ĐĞŵġŵĞĚĠĨĂƵƚĚ͛ġƚƌĞ͕ĐĞůƵŝĚĞů͛ŝŶĐŽŚĠƌĞŶĐĞŽƵĚĞůĂ ƉĞƌĨŽƌŵĂŶĐĞĚĞů͛ĞŶŐĂŐĞŵĞŶƚŶĞƚŝĞŶƚƉĂƐ uniquement au serment mais il caractérise toute sorte de « dit ». >͛ŝŶĐŽŵƉůĠƚƵĚĞ ƐĞ ũŽƵĞ ĞŶƚƌĞ ů͛ĞdžƉƌĞƐƐŝŽŶ ĚƵ ǀƌĂŝ͕ Ğt celle du faux. Ainsi, dans « Dis-moi le paradis », le vrai est probablement rattaché au premier vocable « dis », le faux est par contre déguisé dans le dernier vocable « para-dis » dont le préfixe veut dire « à coté de ou protection contre ». Un au-delà du déjà « dit » permet, dès lors, de postuler la part réservée au réinvestissement des moments de ů͛ŚŝƐƚŽŝƌĞrévolus de la diction en une expérience narrativisée ĞƚƐŝŶŐƵůŝğƌĞ͛͘ĂŝůůĞƵƌƐ͕ la forme tonique du « moi ͩ ŵĂŶŝĨĞƐƚĞ ů͛ĂƚƚŝƚƵĚĞ ƉƐLJĐŚŽůŽŐŝƋƵĞ Ě͛ƵŶ être « ego » cherchant à impliquer un « alter-ego » dans sa quête de ce lieu « le paradis » où les âmes des justes jouissent de la béatitude éternelle. Quant à la valeur explétive du « dis-moi », elle est à Ɛ͛arc-bouter à ů͛ĞdžƉƌĞƐƐŝŽŶ pour faire entendre ů͛ŝŶƐŝƐƚĂŶĐĞ ƐƵƌ ů͛ŝŶĐĂƌnation de ce lieu inéluctablement « terrestre », par un agent-diseur, et omniscient comparativement au sujet avide de connaître plus sur cet espace͘>͛ŝŶƚŝŵŝƚĠ caractérise le rapport entre les deux êtres implicites -rapport corps à corps- sans pour autant que leurs identités soient identifiables ou perceptibles. Nonobstant cette concision à valeur allocutoire, le déjà-pensé semble être programmé sous forme Ě͛ĠƉŝƐƚĠŵğ ŶĂƌƌĂƚŝǀŝƐĠe͕ ĂƵƚƌĞŵĞŶƚ Ěŝƚ ůĂ ƉůĠŶŝƚƵĚĞ Ě͛ŽƌĚƌĞ ƐĠŵĂŶƚŝƋƵĞ ne serait affectée ƋƵ͛à travers la densité des isotopies figuratives « polyisotopie figurative », « la synesthésie », et « la perception multimodale». l60

>͛ŝŶĐŽŵƉůĠƚƵĚĞĞƐƐĞŶƚŝĞůůĞŵĞŶƚĚ͛Žrdre pathémique dans >͛ĞŶĨĂŶƚĨŽƵĚĞů͛ĂƌďƌĞĐƌĞƵdž ĚĠĐŽƵůĞĚ͛ƵŶĞŝŶƋƵŝĠƚƵĚĞĐĂĐŚĠĞ͕Ě͛ƵŶŵĂŶƋƵĞŽƵĚ͛ƵŶĐŽŵƉůĞdžĞĚ͛ŽƌĚƌĞĂĨĨĞĐƚŝĨƋƵŝ ĨĂŝƚƋƵ͛ƵŶĞŶĨĂŶƚƐ͛ĂƚƚĂĐŚĞĨŽůůĞŵĞŶƚăƵŶĂƌďƌĞĐƌĞƵdž͘ Par ailleurs, le vocable enfant dérive du mot latin (XIe) infans pour désigner celui qui ne parle pas. Encore une fois «le dit» constitue uŶ ĚĠĨĂƵƚ Ě͛ġƚƌĞ. Chez un enfant la quiétude provient des affects précaires, et fugitifs rattachés à des images-écrans, des certitudes incertaines, et des voix ambivalentes, mais toujours innocentes.

60

- LĞ ĨůƵdž ƉĞƌĐĞƉƚŝĨ ĞŶŐĞŶĚƌĞ ůĞƐ ƉĂƌƚŝĞƐ ƐĂŝůůĂŶƚĞƐ ĚĂŶƐ ů͛ŝŶƐƚĂŶĐĞ ŶĂƌƌĂƚŝǀĞ ƋƵŝ Ă ǀĂůĞƵƌ ƉŽƵƌ ĞůůĞƐ-mêmes « iconicité ͩŽƵƉŽƵƌĚ͛ĂƵƚƌĞƐͨ typicité ». (J. Fontanille, Cité in Costantin (M.), et al., Op. cit., 181-182).

Ainsi, sa propre voix est celle qui :

« pourchasse les s–±”±‘–›’‡•ǡȋǥȌ†‘—–‡†—„‹‡ˆ‘†±†‡Žǯ—–‹Ž‹•ƒ–‹‘†ǯ—‘–-ce qui conduit à préciser le jeu entre personnage enfant et narrateur adulte- discute †‡ Žƒ …ƒ’ƒ…‹–± ’‡”…‡’–‹˜‡ †‡ ȏŽǯ‡ˆƒ–Ȑǡ  ˆƒ‹”‡ Žƒ ’ƒ”– †‡• …Š‘•‡•ǡ  —ƒ…‡” Ž‡• jugements, à déceler la •‘—”…‡†ǯ—‡•‘—ˆˆ”ƒ…‡Žƒ–‡–‡ǤŽŽ‡–‡†ƒ—••‹Ž‡•’‹°‰‡•ǡ propose de combler les lacunes de la mémoire, mais Enfance conserve sa dislocation, sa dispersion, ses interrogations, son lot de souvenirs-écrans non élucidés, son opacité, les tropismes y prolifèrent plus que les évènements : répulsions et passions enfantines, mouvements de diastole de systole, angoisses et bonheurs paroxystiques. » (F. Dugast-Portes, Ibid. : 134).

ĞĚLJŶĂŵŝƐŵĞĞƚĐĞƚƚĞǀŝŐƵĞƵƌĚĂŶƐů͛ĞdžƉƌĞƐƐŝŽŶĚĞƐƐĞŶƐĂƚŝŽŶƐĞƚĚĞƐĠƚĂƚƐĚ͛ĞƐprit tiennent ĂƵĨĂŝƚĚĞůĂĐĂƌĂĐƚĠƌŝƐĂƚŝŽŶƉĂƌů͛ĞŵƉůŽŝĚƵƋƵĂůŝĨŝĐĂƚŝĨͨ fou ». Tout en étant ĞdžŽƌďŝƚĂŶƚ Ğƚ ŝŶƚĞŶƐĞ͕ ůĞ ƐĞŶƚŝŵĞŶƚ Ě͛ŝŶĐůŝŶĂƚŝŽŶ ĂĨĨĞĐƚŝǀĞ ŽƵ ŵġŵĞ ĚĞ ĚĠƌĂŝƐŽŶ ă ů͛ĠŐĂƌĚĚĞů͛ĂƌďƌĞƌĞƐƚĞů͛ŽďũĞƚĚ͛un entendement perplexe : le vocable « fou » renvoie à une personne ƋƵŝŶ͛est pleine que de vent ; elle est « Ě͛ƵŶĞƐƉƌŝƚǀŝĚĞ », Đ͛ĞƐƚůĞĐĂƐ ĚĞ ů͛ĂƌďƌĞ ƋƵŝ ĞƐƚ ͨ évidé » ou « creux ». Du coup, un croisement des essences des deux apparaîtres Ɛ͛ŝŶƐƚĂůůĞ dans leurs paraîtres; à savoir ů͛ĞŶĨĂŶƚ, une personne vide Ě͛ĞƐƉƌŝƚest ĠƉƌŝƐĞĚ͛ƵŶŽďũĞƚǀŝĚĞĚĞů͛ŝŶƚĠƌŝĞƵƌ « ů͛ĂƌďƌĞ ». Paradoxalement, un arbre (arbor XIe) requiert le sens botanique ou celui de la filiation. De fait, le signe de la vitalité, et notamment de la généalogie se trouve corrompu par le vide, et par extension « la mort ͩ͘ >͛ĂƉƉĂƌĂŠƚƌĞ indique, par contre, ůĂ ŐƌĂƚƵŝƚĠ ĚĞ ů͛ĂƚƚĂĐŚĞŵĞŶƚ ĂĨĨĞĐƚŝĨĞŶƚƌĞů͛ġƚƌĞĞƚů͛objet en raison non seulement ĚĞů͛ŝŶŶŽĐĞŶĐĞ͕ et de la crédulité du sujet mais aussi de ů͛aridité ĚĞů͛ŽďũĞƚ͘Or, « est ce un hasard au demeurant si le latin

ĚĞůŝďĞƌĚĠƐŝŐŶĞăůĂĨŽŝƐů͛ĠĐŽƌĐĞĚĞů͛ĂƌďƌĞƵƚŝůŝƐĂďůĞĐŽŵŵĞƐƵƌĨĂĐĞĚ͛ŝŶƐĐƌŝƉƚŝon et la ƋƵĂůŝƚĠĚ͛ŚŽŵŵĞůŝďƌĞ͍» (D. Bougnoux, 1999 : 92).

Tandis que ce déjà-dit proclame la fusion emblématique entre deux corps, le déjà-dit

Harraga suppose une dislocation ou même une séparation des corps : celui des

« brûleurs » avec celui de la terre natale « le pays ». ͛ĞƐƚ ƵŶĞ ƐŽƌƚĞ Ě͛ĞdžŽĚĞ clandestine et illicite, ƋƵŽŝƋƵ͛elle émane Ě͛un ĚĠƐŝƌĚ͛éloignement justifié, ses moyens ne le sont pas. En effet, «Harraga ͩ Ŷ͛ĞƐƚ ƋƵ͛ƵŶĞ ŵĞƐƵƌĞ ƉƌŝƐĞ ƉĂƌ ĐĞƌƚĂŝŶƐ « aventureux » afin de fuir leur réalité cherchant peut être « la terre promise » ; il Ɛ͛ĂŐŝƚďŝĞŶĚ͛ƵŶŵĂŶƋƵĞăĐŽŵďůĞƌ qui mérite même de risquer sa propre vie rien que

pour vivre un seul moment de bonheur comme celui dans lequel baigne les Autres. Relativement à cette vision pessimiste sur le monde réel, le monde virtuel devient la seule issue ͗ů͛Ă-ǀĞŶŝƌŶ͛ĞƐƚradieux que lorsque le goût de la vie serait ressenti par un devenir prometteur. Ainsi, des questionƐ Ě͛ŽƌĚƌĞ ă ůĂ ĨŽŝƐ ĠƚŚŝƋƵĞ Ğƚ mythique sont ŝŶĐĂƌŶĠĞƐ ĚĂŶƐ ƵŶ ƐĞƵů ǀŽĐĂďůĞ Ě͛Žƌŝgine arabo-dialectal celui de harraga : comme brûler les étapes ĐŽŶƐŝƐƚĞăĨƌĂŶĐŚŝƌƌĂƉŝĚĞŵĞŶƚůĞƐĠĐŚĞůŽŶƐĚ͛ƵŶĞŚŝĠƌĂƌĐŚŝĞ͕ĞƚĂůůĞƌ trop vite dans unĞ ĂĐƚŝŽŶ ͖ ďƌƸůĞƌ ůĂ ƌŽƵƚĞ Đ͛ĞƐƚ ĨƌĂŶĐŚŝƌ ƌĂƉŝĚĞŵĞŶƚ ůĞƐ ƉŽƌƚĞƐ Ě͛ƵŶ pays « douanes », sans pour autant se soumettre aux formalités administratives en préparant la paperasse imposée ; Đ͛ĞƐƚ ĂƵƐƐŝ ĨƌĂŶĐŚŝƌ ƌĂƉŝĚĞŵĞŶƚ ůĞƐ ĨƌŽŶƚŝğƌĞƐ ƐĂŶƐ que cette action ne soit parfaitement calculée.

« ǯ‡•– —‡ ƒŽ±†‹…–‹‘ “—‹ •‡ ’‡”’±–—‡ †‡ •‹°…Ž‡ ‡ •‹°…Ž‡ǡ †‡’—‹• Ž‡ –‡’• †‡• Romains qui avait fait de nous des circoncellions hagards, des brûleurs de fermes, Œ—•“—ǯ ‘• Œ‘—”• ‘î ˆƒ—–‡ †‡ ’‘—˜‘‹” –‘—• „”ðŽ‡” Žƒ ”‘—–‡ ‘—• vivons inlassablement prés de nos valises.» (H. : 95).

Pour ne pas ƚƌŽƉ Ɛ͛ĠĐĂƌƚĞƌ ĚĞ ĐĞƚƚĞ ĨƵŐƵĞ physique des êtres empêtrés, une fugue Ě͛ŽƌĚƌĞŵŽƌĂůŵĂŝŶƚŝĞŶƚůĂŵġŵĞǀŝƐĠĞůŽĐƵƚŽŝƌĞ͘/ůƐ͛ĂŐŝƚďŝĞŶĚĞƐŝůůŽŶŶĞƌƌĂƉidement ůĞƐ ĂůĠĂƐ Ě͛ƵŶĞ ƉĞŶƐĠĞ subversive ͖ ŽƵ ĚƵ ŵŽŝŶƐ ĚĞ ƉĂůůŝĞƌ ůĞƐ ĚĠĨĂƵƚƐ Ě͛ƵŶ entendement de ů͛ĂƵ-delà Ğƚ ů͛en deçà sans pour autant y être prédisposé. Indubitablement, être harraga dans son entendement fait allusion à un être « mutilé » dépourvu de moyens Ě͛ĞƐĐĂƉĂĚĞ, ou du moins de résistance quant aux paradoxes et aux absurdités de la vie.

ĞƚƚĞ ĨŽƌŵĞ Ě͛ŽƌĂůŝƚƵƌĞ marque une entreprise postmoderne de « décentrage » (M. >ĂƌŽŶĚĞ͕>͛ĠĐƌŝƚƵƌĞĚĠĐĞŶƚƌĠĞ ͗ůĂůĂŶŐƵĞĚĞů͛ĂƵƚƌĞĚĂŶƐůĞƌŽŵĂŶĐŽŶƚĞŵƉŽƌĂŝŶ, 1996 :10, Cité in C. W.

Francis, 2002 : 129), à savoir ĐĞůůĞ Ě͛ƵŶĞ plénitude contestable quant à la forme dans la