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Le pétrole dans l’économie camerounaise de 1995 à nos jours

2. L’état des lieux de l’économie camerounaise

2.2. Le pétrole dans l’économie camerounaise de 1995 à nos jours

À partir de l’année 1995, la production du pétrole enregistre une tendance à la baisse. Depuis quelques années maintenant, l’épuisement des réserves suite à cette exploitation est devenu une préoccupation économique majeure pour le pays, qui doit repenser son modèle de

9 Réfère à la réduction de la quantité de travail nécessaire pour accomplir une tâche. 10 The World Bank (2015).

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 1985 1990 1995 2000 2005 2010

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croissance. Des efforts d’investissement ont certes été mis en œuvre depuis 2005 pour accroître la production du pétrole. Toutefois, les incertitudes demeurent sur la production effective du pétrole dans le futur posant ainsi la question des relais de la croissance à moyen terme (Chauvin, 2012).

La part du secteur pétrolier dans le PIB n’a cessé d’évoluer depuis 1994. Elle a atteint 7% en 1995 puis 10% en 2006, avant de baiser à 6% en 2009 (FMI 2011). Par ailleurs, le secteur pétrolier tient une place non négligeable pour les finances publiques et l’équilibre des comptes extérieurs : sa contribution, supérieure au quart des recettes budgétaires sur la décennie

précédente, est environ 45% des recettes d’exportations.11

Figure 10 : Évolution comparer de PIB te les exportations du pétrole et produit minier.

Source: Nos calculs à partir des données de l’OMC et de la banque mondiale l

L’analyse de la figure 10 révèle qu’après 1996, le Cameroun a connu une croissance positive qui dépasse les 4% entre 1996 à 2003, et une inflation raisonnable de moins de 3% (OECD/AfDB, 2002). Depuis le début des années 80, le Cameroun pouvait être considéré comme un pays dépendant du pétrole. Cependant, dès la fin des années 1990, le Cameroun devient de

11 Chauvin (2012) 49 51 53 55 57 59 61 63 65 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4 4,5 5 5,5 6 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 Croissance annuelle du PIB (%) Exportations de Pétrole et produits miniers en % du pays

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mois en mois dépendant du pétrole. Ce dernier ne représente que 5.6% du PIB en 1999 alors qu’il

contribuait à hauteur de 20 % dans le début des années 80 (OECD/AfDB, 2005).Le PIB a continué

à diminuer de 2002 à 2005 même avec la construction de l’oléoduc Doba-Kribi qui a pu stimuler le secteur de la construction et des travaux publics. Cette diminution est due essentiellement au coût de production élevé, au manque et au lent renouvellement des équipements existants ainsi qu’à la baisse de la production de pétrole (OECD/AfDB, 2006). De 2006 à 2009, le PIB a augmenté en raison des réformes dans le secteur pétrolier fait en 2004. Cependant, cette augmentation ne résulte pas d’une augmentation de la production (OECD/AfDB, 2007). Depuis la baisse du PIB en 2009 due à la crise financière de 2008 (OCDE et al, 2010), le PIB est en progression continue en raison de la hausse de la production pétrolière et de l’augmentation de la demande intérieure qui est en lien avec les projets d’infrastructures (OECD et al. 2013)

Selon Chauvin (2012), l’analyse des secteurs de productions révèle l’existence d’autres sources de croissance en dehors du secteur des hydrocarbures. En particulier, on peut relever la diversification du secteur agricole et la contribution du secteur des services (banques, transports…). Néanmoins, les problèmes de gestion sont autant d’obstacles à la croissance (climat des affaires, environnement politique). À cet effet, la nouvelle orientation des autorités publiques est la promotion de l’agriculture et le projet d’amélioration des infrastructures (obsolètes) : extension du réseau électrique et des routes. La poursuite de ces mesures pour améliorer la productivité devrait contribuer à relancer la production.

Le tableau 2 représente la répartition du PIB par secteur. De l’analyse, il ressort qu’une bonne performance du secteur primaire, qui enregistre une tendance à la hausse de 2005 à 2006. Cette hausse est due aux nouvelles plantations de cacao qui ont atteint leur maturité, ce qui a engendré l’augmentation de leur production de 4.5% (AfDB/OECD, 2008). Aussi, la hausse de leur prix mondial a également contribué à ce résultat. Pour la période de 2006 à 2008, cette bonne performance s’explique par le progrès dans les secteurs de l’élevage, de la pêche, et de la foresterie. La politique du gouvernement, ayant favorisé la distribution des matériels aux éleveurs, la création d’entrepôts pour le stockage des produits et pour faciliter leur commercialisation, a participé à cette performance du secteur primaire. L’augmentation de la

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part des terres agricoles exprimée en pourcentage de la superficie totale du Cameroun (une

hausse de 19.49% en 2007 à 20.63% en 201212) a soutenu la croissance de ce secteur. Entre 2008

et 2011, le secteur primaire a connu un ralentissement dû à la mauvaise performance des exportations de l’agriculture industrielle. Aussi, le ralentissement dans l’économie mondiale en 2008 (précisément dans la zone euro et la chine) a baissé la demande pour certains produits primaires exportés par le Cameroun (foresterie et son exploitation). Par contre, en 2013, le Cameroun a enregistré une croissance économique de 5.56%13 qui est due à la reprise des exportations au niveau de l’agriculture industrielle. Ces secteurs ont bénéficié de la fourniture de nouveaux équipements agricoles dans l’exploitation du riz, et de la fourniture aux producteurs des engrais et pesticides (AfDB et al. 2014).

12 La banque mondialem 13 La banque mondialen

23 Tableau 2 : Répartition du PIB par secteur 2005-201314

2005 2006 2008 2009 2011 2013

Secteur primaire

L'agriculture, la chasse, la sylviculture, la pêche 20,4 21 23,4 23,3 23,4 22,5

Secteur secondaire 31.8 33.3 29 29.7 29.9 29.7

Mines et carrières 9,2 11,2 9,6 7,9 7,2 8,2

Fabrication 18,5 17,8 15 16,1 16,2 14,5

Électricité, gaz et eau 1 1,1 1,1 1 1 1

Construction 3,1 3,2 3,3 4,7 5,5 6

Secteur tertiaire 47.7 45.6 47.7 46.9 46.6 47.8

Vente en gros et de détail, les hôtels et restaurants 22,1 21,4 21,3 20,1 19,4 19,9

Transport, entreposage et communications 4,4 4,8 6,7 5,2 7 7,2

Autres services 10,4 10,6 1,2 10,3 1,2 1,2

Finance, immobilier et services aux entreprises 6,5 5,2 10,5 6,3 10,9 11

Services gouvernementaux généraux 4,3 3,6 8 5 8,1 8,5

Produit intérieur brut aux prix / coût de base

de facteur 100 100 100 100 100 100

Source : Nos calculs à partir de : BAfD, et al. (2011), AfDB, et al. (2012) et AfDB et al. (2014).

Le secteur secondaire est dominé par l’activité de fabrication (16.35% en moyenne de contribution au PIB). La contribution du secteur secondaire au PIB est de 29% en 2008 et 29.7% en 2009 (tableau 2), ce qui représente une diminution importante comparativement aux années précédentes (31.8% et 33.3 respectivement en 2005 et 2006). Cette faible performance s’explique par le faible niveau d’industrialisation de l’économie, auquel s’ajoute la faible utilisation des inputs en particulier énergétiques, résultant de la baisse de la production depuis 2007 avec l'épuisement des principaux puits. Ainsi, la concurrence des produits asiatiques plus compétitifs. Le secteur de la construction grâce à un approvisionnement continu en ciment a aidé

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à maintenir le secteur secondaire15. Après 2008, la part du secteur secondaire dans le PIB est

pratiquement stable. En effet, la contribution des mines et carrières a continuellement baissé, mais cette baisse est récompensée par la bonne performance du secteur construction. Les efforts de l’État ont bien produit des résultats au travers de l’amélioration du réseau routier (construction des barrages lom pangar, Memve’ele et Mekin) (AfDB et al, 2014).

Le secteur tertiaire est dominé par l’activité de commerce en gros et de détail, hôtelleries et restaurations (20.7% en moyenne de contribution au PIB). La trajectoire du secteur des services est plus au moins stable au cours de ces périodes (2005-2013). En 2005, la part du secteur des services dans le PIB a atteint 47% (tableau 2), grâce à l’expansion rapide du secteur communication et transports.

La balance des paiements

La situation de la balance des paiements de 1998 à 2009 est consignée dans le tableau 3.

25 Tableau 3 : Situation de la balance des paiements du Cameroun (en milliards de FCFA) 1998-2009

1998/99 1999/00 2000/01 2001/02 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009

Estim.

SOLDE DU COMPTE COURANT (transferts publics

inclus) -186.1 203.6 -34.7 -694.4 -278.2 -314.9 -616.6 -540.3 -347.7 -125.3 -117.6 -379.9 -830.8

SOLDE DU COMPTE COURANT (transferts publics

exclus) -252.6 136.6 -126.3 -796.1 -309.1 -327.9 -656.7 -547.7 -354.0 -212.5 -167.1 -436.5 -939.0

Transferts publics 66.5 67.0 91.6 101.7 30.9 13.0 40.2 7.4 6.3 87.3 49.5 56.6 108.2

SOLDE DU COMMERCE EXTÉRIEUR 205.9 460.4 363.6 -221.1 69.1 106.4 100.8 86.0 146.1 304.5 272.2 188.7 -312.4

Exportations, FOB 1037.4 1366.4 1521.4 1244.5 1386.6 1369.1 1406.1 1469.8 1670.2 1952.6 2045.4 2284.7 1700.2 pétrole 313.3 636.5 772.9 586.1 640.4 576.4 525.1 563.5 735.2 981.3 1001.5 1204.3 750.2 Cacao 109.0 81.7 97.6 103.2 106.3 164.7 141.6 141.7 130.9 137.0 111.6 148.7 174.7 Café 55.7 80.1 56.5 31.5 54.0 37.1 40.4 40.4 33.4 34.5 37.6 37.9 26.1 Coton 40.9 51.3 65.4 66.0 74.3 66.6 63.6 76.7 70.1 54.2 68.9 45.6 40.0 Bois 251.1 221.2 206.3 184.2 201.1 176.7 194.1 230.3 218.0 267.7 325.9 298.7 264.2 Aluminium 56.1 69.1 70.8 54.4 70.1 56.1 55.4 85.2 85.0 87.3 92.9 89.3 64.2 Banane 30.2 30.7 36.1 31.5 33.9 32.1 41.3 39.4 35.9 33.7 29.3 34.3 36.8 Caoutchouc naturel 20.4 12.8 14.0 14.2 14.6 16.0 18.8 20.7 23.5 34.0 28.5 30.8 23.5 Divers 160.8 182.9 201.9 173.4 192.0 243.4 325.9 271.8 338.1 322.9 349.3 395.2 320.4 Importations, FOB -831.6 -905.9 -1157.8 -1465.6 -1317.5 -1262.6 -1305.3 -1383.8 -1524.2 -1648.1 -1773.2 -2096.0 -2012.6 Balance des services (non-facteurs) -178.1 -180.0 -254.6 -370.5 -169.5 -197.3 -518.0 -433.5 -372.5 -387.1 -391.1 -504.7 -582.9

Balance des revenus -289.4 -152.3 -245.2 -217.6 -241.3 -262.7 -310.4 -273.6 -201.6 -205.7 -126.0 -202.8 -119.5

dont :- intérêts publics (débit) -258.4 -111.3 -197.0 -176.1 -185.5 -174.5 -172.3 -135.4 -111.1 -111.7 -31.1 -30.6 -20.0 -intérêts privés (débit) -38.0 -50.0 -58.0 -52.2 -75.6 -98.2 -189.9 -190.9 -143.1 -145.3 -147.3 -149.5 -151.7

Solde des transferts courants 75.5 75.5 101.6 114.7 63.5 38.6 111.0 80.9 80.4 163.0 127.2 138.9 184.0

dont :- publics (nets) 66.5 67.0 91.6 101.7 30.9 13.0 40.2 7.4 6.3 87.3 49.5 56.6 108.2

-privés (nets) 9.0 8.5 10.0 13.0 32.6 25.6 70.8 73.5 74.1 75.8 77.7 82.3 75.8

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Il ressort de l’analyse de ce tableau que le solde courant (transferts publics inclus) est déficitaire après l’année 2000. Il en est de même lorsqu’on exclut les transferts publics. Par contre, la situation est inverse pour le solde du commerce extérieur. Autrement dit, ce solde est de manière générale positif sur toute la période (excepté la période 2001/2002). Les exportations sont constituées essentiellement par le pétrole, suivi respectivement du bois et du cacao. Les exportations du pétrole gardent une tendance à la hausse à partir de 2003. La tendance de l’évolution du compte courant est assez contrastée sur la période d’étude (une alternance assez irrégulière de phases d’amélioration et de détérioration). Son solde est passé de -34.7 en 2000 à -694.4 en 2001. Le solde des transferts courants est marqué par des variations assez irrégulières. En termes de répartition entre le public et le privé, il n’y a pas une prédominance d’un secteur particulier sur la période d’étude de 1998/98 à 2001/02, l’État est le principal contributeur; par contre, de 2001 à 2005 c’est le secteur privé.

Figure 11 : La balance commerciale camerounaise en % du PIB (1996-2011)

Source : Nos calculs à partir des données de la banque mondiale p

La balance commerciale représente une part très importante de la balance des payements. Ainsi, ses fluctuations affectent directement et dans la même trajectoire la balance des payements.

-9 -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 1 996 1 997 1 998 1 999 2 000 2 001 2 002 2 003 2 004 2 005 2 006 2 007 2 008 2 009 2 010 2 011

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Sur la figure 11, la balance commerciale camerounaise est excédentaire entre 1996 et 2000. La dégradation des échanges hors secteur pétrolier est cachée par cet excédent de la balance commerciale depuis 1995. Sur cette période, les importations ont augmenté alors que les exportations en dehors du pétrole restent stables. Cette situation est expliquée par la hausse de la demande en liaison à la dévaluation de la monnaie locale en 1994 (OECD/AfDB, 2002).

Suite à la baisse des cours internationaux et les troubles de fonctionnement au niveau des structures de production, on assiste à un abandon des exportations traditionnelles. Une nouvelle structure est mise en place. De 2001 à 2002, la balance commerciale camerounaise a connu un déficit. Ce déficit est dû à la diminution de la production du pétrole et à l’importante importation suite à la construction de l’oléoduc Doba-Kribi (AfDB/OECD, 2003).

La hausse des termes de l’échange, la fin de la construction de l’oléoduc Doba-Kribi et la baisse des importations reliées à ce projet sont à l’origine de l’amélioration du solde commerciale en 2003 (+0.33%) (OECD/AfDB, 2004). L’excèdent de la balance commerciale en 2006 (2.05%) est appuyé par la hausse des prix du pétrole ainsi que sa production et l’amélioration des exportations en dehors du secteur pétrolier (OECD/ AfDB, 2007). La détérioration de la balance commerciale à partir de 2007 est le fruit d’une importante baisse au niveau des exportations pétrolières et le déficit du solde du compte curant (le déficit de la balance des biens et services (tableau 3)).

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Les finances publiques entre 1996-2012

Figure 12 : Les finances publiques en pourcentage de PIB (1996-2012)

Source : Nos calcule à partir des données de : OECD/AfDB (2005), OECD/AfDB (2006),

OECD/AfDB (2007), AfDB/OECD (2008), OECD et al. (2009), OCDE et al. (2010), AfDB, et al. (2012) et AfDB et al. (2014).

Sur la figure 12, on remarque trois grandes périodes dans l'évolution des finances publiques. De 1996 à 2003, on observe un excédent. Cette amélioration des finances publiques est due à la nouvelle taxe introduite sur la valeur ajoutée (TVA) ainsi que les réformes structurelles et l’augmentation des recettes pétrolières. Le déficit enregistré en 2004 qui atteint -0.6% est en partie dû aux arriérés de paiement. Les revenus pétroliers ont en effet été utilisés pour rembourser une partie de ces arriérés (OECD/AfDB, 2006). À partir de 2004, la balance des paiements devient à nouveau excédentaire, et ce jusqu’en 2007. Ce résultat découle des efforts consentis pour améliorer la collecte des recettes en dehors du pétrole (OCDE et al. 2010). Cependant, les finances publiques sont en déficit depuis 2009. Les raisons qui ont favorisé ce déficit sont la fuite des recettes fiscales due à l’activité informelle (fraude fiscale). L’aggravation du déficit en 2011 (-3.5%) observée

-5 0 5 10 15 20 25 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

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sur le graphique est liée à l’organisation des élections présidentielles ayant occasionné des dépenses importantes (AfDB et al, 2012).

Politique fiscale

Depuis 1994, des réformes structurelles, principalement l’introduction de la taxe sur la valeur ajoutée, ont contribué à renforcer le budget de l’État. Ces réformes ont permis d’améliorer la transparence dans les recettes fiscales non pétrolières. Les recettes pétrolières constituent un important soutien pour les revenus gouvernementaux. Toutefois, ces recettes sont volatiles et fluctuent au rythme des variations du cours du pétrole16.

Selon une étude de l’OECD/AfDB (2005), les recettes fiscales du pays ont connu une baisse en 2004 en raison des arriérés de paiement. La principale source de revenus du Cameroun était constituée des revenus obtenus à partir des droits de transit versés par les usagers du pipeline (Tchado-camerounais), ainsi que les impôts qui s’y attachent. Les reformes entreprises dans le système d’impôt en 2004 ont permis d’améliorer la collecte des impôts. Les difficultés budgétaires rencontrées ont conduit à un déficit budgétaire entre 2001 et 2005.

Selon OECD/AfDB (2006), l’augmentation des recettes du gouvernement a été de 19.8% en 2006. Cette hausse est due à la progression des exportations du pétrole (394 milliards de francs CFA, contre 276 milliards) et les revenus non pétroliers. Plus d’impôts ont été collectés sur les entreprises de la téléphonie et des efforts dans la collecte ont également contribué à cette augmentation. Ces efforts budgétaires ont permis au gouvernement camerounais de régulariser la situation des arriérés de paiement envers le FMI et le compte Pays Pauvre Très Endetté (PPTE) en 2005. En dépit de ces efforts, les finances publiques souffrent de faiblesses structurelles persistantes: elles continuent à être fortement tributaires de revenus du pétrole. La charge fiscale17 est de 10,4%,

16 AfDB/OECD (2003),

17Se définit au sens économique comme le fait que le coût des taxes est supérieur au prélèvement de

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principalement en raison de l'assiette fiscale étroite, en grande partie due à l’importance du secteur informel.

En 2008, on assiste à une perte dans les recettes non pétrolière due en partie à la réduction des taxes et/ou les exonérations fiscales sur l’importation de certains produits de première nécessité (riz, sucre, lait…). Les impôts directs, indirects et les taxes sur le commerce international sont les autres sources des recettes fiscales. En termes de contribution, avec environ 40% des recettes fiscales, la taxe sur la valeur ajoutée constitue la principale source de revenus de l’État. Elle est suivie ensuite des impôts directs, qui constituent 26% de ces recettes, et enfin la taxe sur le commerce international pour 19% dans les recettes fiscales (OCDE et al. 2010). Selon la même source, les impôts directs sont constitués de l’impôt sur les sociétés (IS) et de l’impôt sur les revenus des personnes physiques (IRPP). Le taux de l’IS est de 38.5% et l’IRPP est calculé sur la base des revenus nets du contribuable et ces taux varient selon les catégories de revenus. Les impôts indirects sont constitués essentiellement par la TVA dont le taux légal est de 17.5%.

Les réformes fiscales en cours à cette époque étaient : l’élargissement de l’assiette fiscale au secteur informel (ayant un fort potentiel de recettes), la télédéclaration et la réforme sur les transferts et les revenus versés à l’étranger. Une loi sur la fiscalité locale a été promulguée dans le cadre de la décentralisation. D’après l’estimation de l’OCDE et al. (2010), le secteur informel représente près de 40 % du PIB et emploie près de 90 % des actifs occupés. L’État envisage la création d’un impôt synthétique unique en vue d’améliorer la collecte d’impôts dans ce secteur.

L’analyse développée par Chauvin (2012) révèle que les recettes budgétaires représentent en moyenne 18% du PIB sur la période de 2002-2009. Parmi les raisons évoquées pour expliquer cette faiblesse, l’auteur retient essentiellement l’existence d’activités informelles (notamment dans le secteur agricole) échappant ainsi au contrôle et au prélèvement fiscal. En outre, ces recettes dépendent de la conjoncture mondiale, du fait du poids des recettes pétrolières dans les recettes totales. Par ailleurs, les dépenses publiques sont caractérisées par de faibles investissements en capital (5% du

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PIB en moyenne sur la période de 2002-2009), ne permettant pas le renouvèlement du stock d’infrastructure existant.

Le taux de change réel

Dans certains pays africains, le taux de change est utilisé comme un outil de politique économique pour soit, rétablir la compétitivité (parce que ces économies exportent des produits primaires), soit orienter le mouvement des capitaux (opération d'open market). Le taux de change des pays de la zone franc est fixé par rapport à l’euro et ils ne peuvent donc individuellement changer le taux de change nominal, vu qu’il est exogène (Dubois, 2009). En conséquence, le Cameroun ne peut donc utiliser le taux de change nominal comme instrument des politiques économiques. En revanche, puisque la variation du taux de change nominal de l’Euro vis-à-vis du $ américain est fluctuante, les fluctuations du taux de change par rapport au $ US peuvent influencer le taux de change réel.

Figure 13 : Évolution du taux de change réel interne au Cameroun entre 1970 et 2001

(Indice base 100 = 1990)

Source : Linjouom (2004)

Selon Linjouom (2004), la figure 13 permet de mettre en évidence cinq grandes périodes dans l'évolution du taux de change réel. De 1970 à 1977, on observe une

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tendance haussière du taux de change réel. Cette évolution s'est traduite par une appréciation de 4.2% en moyenne annuelle. Dans le même temps, le Cameroun a enregistré un taux de croissance réel moyen de 4.6%.Entre 1978 et 1985 par contre, la tendance s'est inversée, le taux de change réel interne a été réduit de 2.8% en variation annuelle en dépit de l'augmentation des prix à la consommation de 10.7%. Ce contraste s'explique selon l’auteur par la hausse des prix de gros américains qui ont augmenté plus fortement que les prix à la consommation. Cette hausse résulte elle-même de l'accroissement des marges du secteur exportateur généré par l’exploitation pétrolière. En outre, entre 1987 à 1993, on observe une augmentation d’un taux de variation annuelle de 6.4% du taux de change réel, avec un ralentissement de la croissance économique. Il en découle naturellement une appréciation réelle qui met en relief une perte de profitabilité du secteur exportateur attribuable à la baisse des prix internationaux des principaux produits de base. L'année 1993 est marquée par la dévaluation du franc CFA. Cette dernière a favorisé des gains de compétitivité de 5.3% en moyenne annuelle sur la période 1994-1998 malgré les niveaux élevés de l’inflation (12.6% en moyenne annuelle sur la période). Enfin, sur la période 1999-2001, le taux de change réel interne a progressivement baissé. Cette tendance traduisait la reprise de la compétitivité externe du Cameroun avec des gains de 7.5% en moyenne annuelle sur la période correspondant à l'envolée des exportations de produits tels le café, le cacao, le coton, le bois, l'aluminium et celle des produits manufacturés.

En conclusion, il est fort intéressant de noter qu’après la découverte du pétrole à la

fin des 1970, le Cameroun a bénéficié d’importants revenus venant des exportations du pétrole. Des revenus qui ont affecté négativement son économie entre 1980 et 1985, cette période où le Cameroun registre un recul dans les autres secteurs, malgré que le PIB soit en croissance rapide sur la période avant qu’il chute en 1985. Dans ce sens, l’économie camerounaise a connu un changement dans sa structure, on passant d’une économie basée sur l’agriculture à une économie dépendante du pétrole. La dévaluation

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du franc CFA en 1994 n’a pas pleinement contribué à fonder une base structurelle diversifiée bien que cette dévaluation a engendré un rétablissement de la croissance ; il est à noter que la dette a pris de l’ampleur dans les années qui suivent (Aerts, 2004). Pendant la dernière décennie, le Cameroun a connu une certaine amélioration, avec une croissance stable et positive et une certaine diversification sectorielle caractérisée par une amélioration du secteur primaire et secondaire. Cependant, le problème de dépendance aux ressources naturelles demeure un souci important dans le futur.

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3. Vérification du syndrome hollandais au Cameroun par l’application du

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