• Aucun résultat trouvé

Ouvrage Périodique, Critique et Moral, Historique et Politique

1. Auto-représentation.

Les « Avis du libraire » des tomes de l'année 1765-1766 présentent les Éphémérides comme un périodique « dans le goût du Spectateur Anglois »154. Il s'agit d'un journal anglais créé en 1711

par Joseph Addison et Richard Steele. Ce dernier avait également fondé le Tatler en 1709 qui fut remplacé par ce nouveau titre de presse. Son contenu ne concernait que faiblement la politique. Pierre Albert parle d'un « modèle du journalisme de réflexion »155. Il tirait à plus de 20 000

exemplaires. Ce succès influença donc les feuilles périodiques du royaume de France. L'imitation revendiquée du Spectator concernait une centaine de titres entre 1720 et 1789. Jean Sgard les qualifie de « désinvoltes ». Écrits à la première personne, parfois par un narrateur fictif, ils traitaient de morale, de littérature, d'une culture générale familière au plus grand nombre des lecteurs, tout cela sans ordonnancement particulier156. Baudeau conserve la globalité de cette configuration en y

ajoutant les thèmes commerciaux et agricoles. Son journal revendique une certaine légèreté dans la présentation des sujets lorsqu'il s'adresse aux lectrices mais ne prend pas de ton désinvolte ni humoristique avec les lecteurs. Le terme de « citoyen » accolé à celui des « Éphémérides » témoigne de son ambition civique au sens d'une instruction morale. Si le journal se présente dans le premier tome comme « Critique et Moral », le second ajoute « Historique et Politique » ce qui le distingue encore des « Spectateurs ». Comme le montre l'article de l'Encyclopédie, la politique était considérée comme une branche de la philosophie qui touchait au pouvoir et au gouvernement. Elle était associée à la morale en ce que l'étude du pouvoir amène à raisonner sur les mœurs de la personne représentant ou incarnant l'autorité. Les deux termes se rapportent aussi à l'étude des conduites de cour157. L'article « Politique » de l'Encyclopédie partage avec les Économistes le souci

du bon gouvernement – antimachiavélien –, dont le règne d'Henri IV en donne un exemple privilégié. La première version du journal de Baudeau mélange également la philosophie politique et l'histoire au profit d'un objectif d'ordre civique. L'économie politique s'appuie effectivement sur ce terrain philosophique de la politique et de la morale en ce que ses discours critiquaient les règles de la société de cour et proposaient un autre ordre social et gouvernemental fondé sur le principe d'un « marché librement concurrentiel »158. Baudeau cultivait donc les mêmes centres d'intérêts que

les économistes avant sa conversion. Les avis des tomes de 1767 précisent ce lien entre la

154 Eph., 1765, t. 1, in HERENCIA, Bernard, Les Éphémérides... op. cit., p. 249. 155 Pierre ALBERT, op. cit., pp. 13-23.

156 Jean SGARD, op. cit., p. 253.

157 « Politique », Encyclopédie, vol XII, 1765, p. 917.

philosophie et l'économie politiques en nommant le périodique : « recueil Moral et Politique ». L'économie ne constitue alors qu'un élément de la philosophie. Le passage à la physiocratie renverse ce rapport.

La lettre de la « société des Trois Amis » qui constitue l'article « Des associés aux Éphémérides » présente les attentes de lecteurs devant un journal inspiré du Spectator. La philosophie politique n'occupe pas alors la place principale, mais la littérature et l'histoire doivent bénéficier de leurs contributions. Le périodique n'est pas vu comme l'entreprise d'un seul homme mais comme le fruit d'un travail concernant le cercle des hommes de lettres. La spécialisation n'est donc pas envisagée. Il convient au contraire d'établir un lieu porteur de réflexions multiples qui ne renient pas le divertissement : « Le Spectateur Anglois est l'Ouvrage d'une Société de Gens de Lettres ; Adisson et Richard Steele n'auraient pû seuls y suffire, quelque vaste que fût leur génie : mais nous voulons savoir si vous admettrez indifféremment tous ceux qui se présenteront pour fournir des matériaux à votre Ouvrage, parce que nous aurions dessein d'y concourir tous les trois de notre mieux. »159.Ces trois lecteurs se présentent ensuite selon leurs goûts différents. Chacun

d'eux s'intéresse à une matière particulière qui tout à la fois les sépare dans le champ des savoirs mais les rassemble dans leur société et dans le périodique « Critique et Moral, Historique et Politique ». Ils se définissent donc sous les trois portraits du philosophe, du littérateur et de l'historien. Ces trois catégories recouvrent l'horizon d'attente de lecteurs cultivés, amateurs ou hommes de lettres. Dans la lignée du mouvement intellectuel de la philosophie des Lumières, le lecteur philosophe est caractérisé par la morale et la politique :

Obligé, par état pendant quelques années, d'approfondir les Sciences exactes et celle des Dogmes de la Religion, il a fini par s'attacher d'inclination à la Morale, et sur-tout à la Politique : il aime la solitude de son Cabinet, et trouve mille délices dans le commerce des Morts illustres, Anciens et Modernes, (…) il s'occupe sérieusement de tous les Livres nouveaux étrangers ou nationaux, qui traitent de tous les objets de l'administration et des principes du Gouvernement160

La philosophie est comme envisagée par opposition aux sciences exactes et à la religion. Comme le montrait l'article de l'Encyclopédie, la morale persiste sans la foi161, ce qui évince le

sentiment religieux des préoccupations du philosophe des Lumières. Le paradoxe proposé par ce lecteur – qui est membre du clergé – dans les numéros suivants porte pourtant sur l'organisation terrestre de l’Église et son utilité pour l’État. Cette réflexion envisage ainsi l’Église d'un point de vue politique et social et non pas théologique. D'autre part, la géométrie, l'arithmétique et les

159 « Des Associés aux Éphémérides », Eph., 1765, t. 1, pp. 84-85. 160 Ibid., pp. 87-88.

mathématiques ne sont pas comprises dans le sujet à traiter pour le périodique de philosophie politique. La position par rapport à ces sciences semble ici déterminer la différence entre cette partie de la philosophie et l'économie politique. La suite du paradoxe développé par l'ecclésiastique- philosophe s'attarde pourtant sur la dimension économique de l’Église et son rôle dans l'agriculture, le commerce et l'impôt162. Les sujets d'ordre économique constituent en effet une partie de la

philosophie politique. L'intérêt pour les auteurs illustres, « Anciens et Modernes » se retrouve dans le journal au travers des extraits de la traduction de Valere Maxime par La Place qui ajoutait des comparaisons avec des exemples modernes. À cette érudition de cabinet se confronte le portrait du littérateur dont la caractéristique première relève du divertissement :

L'enjouement et la vivacité se peignent sur la figure de l'autre : il aime les Sociétés choisies, les repas délicats, les conversations amusantes, il apprend et raconte volontiers les nouvelles publiques et les anecdotes du jour ; se permet le persiflage et les railleries malignes, fait quelques vers, lit des Contes, des Brochures, tous les Romans, tous les Journaux, et prend plaisir surtout aux Pieces de Théâtre163

Le second lecteur intéressé par les Éphémérides est ici semblable à celui des « Spectateurs » par l'absence de rupture mise entre la littérature, le livre – et singulièrement le roman –, et la presse. Le périodique est placé sur le même plan que les autres. La préoccupation cognitive laisse place à l'avidité d'une lecture divertissante dans un cadre mondain et partagé. La presse culturelle est rangée du côté de la quantité et du plaisir plus que de la qualité et de l'instruction. Cette description donne une image négative du littérateur perçu comme fourbe, mondain et frivole. Le périodique doit pourtant le contenter en même temps que le philosophe. Ce portrait n'est pas sans rappeler celui des lectrices envisagées par Baudeau dans son article « Des Feuilles Périodiques »164. Le format de la

brochure est invoqué comme représentatif des pratiques de la lecture féminine. Dans cet extrait, il l'est aussi pour les littérateurs. La parution hebdomadaire du journal de Baudeau dans la première année de parution peut confirmer cette pratique désinvolte de la lecture au sens où elle s'effectue rapidement. Pour autant, Baudeau donne bien à ses feuilles une valeur d'enseignement165 qui, sans

être un simple loisir, peuvent convenir aux hommes comme aux femmes dès lors qu'ils portent un intérêt pour la philosophie politique sous l'angle civique et patriotique. Le troisième lecteur précise ce point en expliquant l'occupation de l'historien :

son systême est que le Patriotisme doit être le flambeau de l'Historien dans ses Recherches, et son unique but la rédaction de ses Ouvrages. On a cru, dans un de ceux qu'il avoit entrepris, qu'il se hâteroit de 162 « Paradoxes », Eph., 765, t. 1, p. 202.

163 Eph., 1765, t. 1, pp. 88-89. 164 Ibid., p. 10.

flatter la vanité, ou d'amuser la curiosité frivole. Il a ri de ces espérances, et se donne le temps d'approfondir la connoissance des usages et des mœurs antiques et modernes, comparés entr'eux, et mis au creuset du véritable Esprit Citoyen166.

L'histoire est prise sous l'angle moral plus que politique. Son utilité naît notamment de la comparaison. Le lecteur reprend les termes de Baudeau pour présenter son journal. Le désir de s'adresser en citoyen à ses semblables rejoint une préoccupation de la philosophie politique en se reportant sur l'être moral de l'individu. Il s'agit pourtant moins de politique que de philosophie en ce que les réflexions proposées concernent peu la notion de sujet au profit de celle plus large de citoyen pour reprendre la distinction établie par l'Encyclopédie167.

Les plus simples réflexions, des exemples, des vues et des idées, seront une récolte précieuse pour nos Feuilles : tout ce qui tend à réformer ou à épurer l'Esprit National et à rendre le Patriotisme plus ardent et plus efficace, appartient à cet Ouvrage168

Le terme de patriotisme est directement lié à celui de citoyen. La signification de « l'amour de la patrie » se recoupe avec la définition morale et politique de la connaissance des « droits du genre humain »169. Dans les Éphémérides, ces deux termes relèvent surtout de la morale en tant que

connaissance d'un ordre social fondé sur la liberté dans les bornes de la raison et de la nature. Baudeau tempère ainsi le « zèle patriotique » du philosophe, atténue le goût du littérateur pour le simple divertissement mais confirme la tâche de l'historien qui est celle de la restitution de la vérité d'un peuple ou d'un gouvernement170. Cette réponse de Baudeau fait de son journal un genre

particulier de « Spectateur » qui retire le désir d'agrément pour ne garder qu'une relative liberté de ton orientée dans le champ de la philosophie politique. Ainsi certaines critiques de lecteurs reprises dans les articles « Critique et apologie des Éphémérides » regrettent cette fausse imitation du journal d'Addison. Ces lecteurs attendaient un périodique divertissant sans être pour autant frivole, dans l'esprit des salons mondains plus que d'un journal d'apprentissage171. Baudeau sélectionne ces

critiques pour se démarquer et montrer l'originalité de son entreprise qui, bien que développant sa publicité par le succès des « Spectateurs », cherche par ce procédé à instruire les « citoyens » sur leur identité politique et morale. La lettre du lecteur dont Baudeau défend l'authenticité en la décrivant comme étant adressée d'Orléans par le Journal d'agriculture172, qualifie certains morceaux

166 Eph., 1765, t. 1, pp. 90-91.

167 Encyclopédie, 1753, vol. III, p. 489. 168 Eph., 1765, t. 1, pp. 93-94.

169 « Patriotisme », Encycl., 1765, vol. XII, p. 181. 170 Eph., 1765, t. 1, pp. 94-96.

171 « Critique et apologie des Éphémérides », Eph., 1765, t. 1, pp. 259-260. 172 Eph., 28 avril 1766, p.257.

du journal de « sermons philosophiques »173. Baudeau reprend à son compte cette formule et affirme

sa volonté de prêche mi-religieux mi-philosophique : « sans calomnier notre Nation, on peut dire que son plus grand besoin est, dans le moment présent, l'honnêteté, les mœurs et l'amour du bien Public. Ce n'est plus par l'extérieur que nous péchons, c'est par l'esprit et par le cœur »174. La mode

et l'apparence, comme le goût du luxe ou de l'illusion sont condamnés par l'abbé journaliste mais ne constituent plus, selon lui, la faute principale de l'homme. Celle-ci se trouve autant dans son intellect que dans ses sentiments. Les faux raisonnements sont en effet les plus dangereux ennemis de la raison philosophique qui entend éclairer les erreurs. Fontenelle avait déjà cherché à dévoiler l'illusion de certaines croyances. Bien qu'ils la défendaient, les physiocrates eurent conscience des dangers de la liberté d'expression lorsqu'elle donnait une voix aux discours fallacieux mais Dupont montrait sa confiance dans la marche naturelle de l'évidence. La philosophie des Lumières se caractérisait par deux versants, l'un fondé sur la raison et l'autre sur les sens. En bon moraliste et homme des Lumières, Baudeau porte ses réflexions sur ces deux aspects pour convaincre et séduire dans le sens de l'intérêt général. La philosophie politique, en tant qu'elle traite de morale, devient un principe éducatif non seulement sur les relations entre les sujets par rapport à leurs devoirs, entre le citoyens par rapport à leurs droits, mais aussi entre les individus par rapport au commerce et à l'agriculture.

2. L'agriculture : thèmes agrariens

Graphique des contenus de la Chronique de l'Esprit national

173 Eph., 30 décembre 1765, p. 263. 174 Ibid., p. 266. Commerce Agriculture Histoire Littérature L'étranger Education Controverses, paradoxes 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 1765-1766

L'esprit agricole et l'organisation politique et morale de la société

Les thèmes du commerce, de l'agriculture et de l'histoire participent de la réflexion de philosophie politique en ce qu'il est possible d'en tirer des exemples et des principes de conduite qui règlent les liens sociaux et politiques. En cela, la Chronique de l'Esprit national est proche de la physiocratie, bien que Baudeau ne fit aucune référence à une doctrine constituée. Georges Dulac caractérise la ligne idéologique du journal comme suivant « un mercantilisme modéré et libéral tout en faisant l'éloge de l'agriculture »175. Les sujets portant sur l'agriculture tiennent en effet une place

importante qui témoigne non seulement de la sensibilité agrarienne de l'époque mais de la proximité intellectuelle de Baudeau avec la physiocratie. Alain Clément a montré que ces premiers numéros du journal ne dressaient pas le portrait d'un anti-physiocrate mais d'un publiciste proche des idées de Mirabeau bien que ses idées sur la valeur de la monnaie comme facteur de puissance pour un État s'apparentaient au mercantilisme176. L'idéalisation des campagnes est visible dans l'article « Des

vendanges » qui évoque les mœurs et usages antiques. Baudeau y démontre l'importance des vignobles dans la culture et la force d'un peuple. La vigne témoigne à la fois de la richesse du sol et permet l'instauration d'un commerce amical177. Les fêtes romaines de la vigne sont idéalisées

comme relevant d'une juste reconnaissance de la valeur des produits de la terre. Valeur qui touche à la médecine, au commerce et à la marine. Un certain mercantilisme transparaît en ce que le vin est érigé comme un atout économique pour la France qui lui dispense d'en importer mais au contraire lui permet d'imposer ces biens de qualité à l'exportation178. L'article « Du retour des vacances » fait

l'éloge d'une retraite annuelle à distance des villes. Cette installation provisoire à la campagne possède une vertu morale qui rapproche des pratiques anciennes référées à celles de l'élite romaine sans identification claire du régime politique. Baudeau emploie l'expression vague de « mœurs anciennes ». Il semble même nourrir de la nostalgie pour la société féodale179 et fait l'éloge de la

direction seigneuriale : « Que notre ancienne noblesse de robe et d'épée étoit respectable dans ses vieux donjons, quand la fureur des guerres et des partis ne la rendroit pas tyrannique pour quelques moments ! Toute la Paroisse étoit comme la famille du Seigneur ; lui même présidoit à la culture de

175 Georges DULAC, « Ephémérides du citoyen », in SGARD, Jean (dir.), Dictionnaire des journaux, p. 354.

176 CLÉMENT, Alain « Nicolas Baudeau, an anti-physiocrat? Éphémérides du citoyen prior to “conversion” (1765– 1766) », The European Journal of the History of Economic Thought, 22:3, 2015, p. 534 et pp. 537-538.

177 Eph., 8 novembre 1765, pp. 24-25 et pp. 26-27.

178 Ibid., p. 25, « C'est à la nature invariable du sol et du climat, que la France doit la supériorité de ces liqueurs si douces et si salubres, qui portent aux extrémités du monde la joie et la santé. C'est en vain que les autres Peuples voudroient s'affranchir de ce joug si suave ; ils seroient ennemis d'eux-mêmes s'ils renonçoient à le porter ». Le commerce se substitue à la guerre mais conserve les termes d'une bataille.

179 Baudeau n'en évoque pas moins « les abus de la loi Féodale », Eph., 15 novembre 1765, p. 57. Cette période était assimilée à celle d'une anarchie par la division de l'autorité de l’État royal.

ses domaines, et connoissoit tous ses vassaux. Il carressoit les bons, et réprimoit les méchants »180.

Ses vues étaient donc proches de celles de Mirabeau qui défendait dans L'Ami des Hommes une « version agraire du féodalisme »181. La propriété terrienne est ici envisagée selon son organisation

sociale, politique et juridique. Le seigneur-propriétaire fait fructifier ses terres et met les hommes au travail dans un rapport de vassalité économique et symbolique. Baudeau conclut sur l'importance d'une nature paternelle qui génère des liens sociaux non conflictuels et dont l'organisation et le soutien constituent une force pour l’État. On retrouve ici l'idée physiocratique du gouvernement naturel fondé sur les lois de la nature. L'abbé inscrit son journal dans la perspective agrarienne : « Cette vérité n'est réservée qu'au petit nombre d'ames vertueuses, qui ne sont pas encore noyées dans le torrent général : c'est pour eux que nous développerons dans la suite, le rapport intime qui regne entre le véritable esprit agricole, et la félicité publique et privée »182. Dès le quatrième

numéro, sur les dix-huit qui constituent la première version des Éphémérides, Baudeau fait de la logique agricole un élément fondamental de l'organisation politique et morale de la société.

Les déclarations dans l'article « De l'esprit agricole » confirment la représentation d'un ordre naturel sur lequel l’État et l'administration doivent se fonder. La justification de ce principe tient moins dans un argumentaire savant et théorique que dans la sensibilité de l'évidence : « Nous devons conclure qu'un Etat sera réellement d'autant plus florissant, qu'il aura conservé un plus grand nombre de cœurs ruricoles, et d'autant plus près de sa décadence qu'il en contiendra moins »183.

L'agriculture est envisagée d'un point de vue politique et historique plus qu'économique. Elle sert de critère d'analyse dans l'étude de la pérennité des États et des Empires. Baudeau s'intéresse au passé « ruricole » de la France et évoque trois classes de la société qui rappellent celles distinguées par Quesnay. L'abbé mentionne la noblesse, qui peut se rapprocher de la classe des propriétaires, le « simple peuple Agricole » qui sont les paysans et « les Artisans et les Marchands des Villes » qui représentent la classe stérile. Ce partage de la société fut mis à mal par des dissensions internes mais surtout par des gouvernants belliqueux et par le développement des villes et du commerce. Baudeau oppose implicitement l'agriculture au commerce. Ce dernier, lorsqu'il étend les villes, s'exercent au détriment de l'esprit agricole184. Pour autant, l'agromanie de Baudeau est à relativisée en ce qu'il

n'évoque pas l'agriculture dans son fonctionnement économique et dans sa position théorique mais

180 Eph., 11 novembre 1765, pp. 45-46.

181 CLÉMENT, Alain « Nicolas Baudeau, an anti-physiocrat? Éphémérides du citoyen prior to “conversion” (1765– 1766) », op. cit., p. 539.

182 Ibid., p. 48.

183 Eph., 15 novembre 1765, pp. 51-52.

184 Après la politique belliqueuse de Richelieu, « Toutes les Cités furent peuplées de Commerçants et d'Ouvriers et