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1. UN MODÈLE DU CONCEPT DE CRÉATIVITÉ

2.4. Les outils de jugement

Les outils de jugement doivent fournir une rétroaction qui aide l’étudiante et l’étudiant à apprendre et à développer une compétence (Louis, 2004; Scallon, 2004). Dans ce cas, le jugement porté sur le rendement ou la performance doit être exprimé, expliqué et justifié. Selon le contexte d’évaluation, le jugement peut être exprimé de façon analytique ou globale. En évaluation formative, un jugement analytique peut fournir un portrait décortiqué des points forts et des points à améliorer lors d’une performance ou d’un rendement. Dans une épreuve finale, le jugement peut prendre la forme globale d’un ensemble d’observations ou demeurer analytique. Ce qui importe est de faire le constat de la maîtrise d’une ou de plusieurs compétences.

Le jugement, analytique ou global, des indices observables peut s’exprimer sous la forme d’une échelle d’appréciation, outil de jugement souvent appelé échelle descriptive (Scallon, 2004). L’échelle descriptive s’inspire des rubriques ou guides de notation (scoring rubrics) des écrits américains (Scallon, 2004; Tardif, 2006). Son utilisation est recommandée en évaluation de productions complexes exigeant la manifestation d’une ou de plusieurs compétences. Plusieurs auteures et auteurs en évaluation des compétences ainsi qu’en évaluation des apprentissages en créativité s’entendent sur cette recommandation (Lavoie, 2009; Leroux et Bigras, 2003; Lindström, 2007; Louis, 2004; Scallon, 2004; Starko, 2005; Tardif, 2006; Treffinger

et al., 2002). Toutes ces auteures et tous ces auteurs décrivent comment les construire

et en fournissent des exemples. Comme leurs techniques de construction d’échelle descriptive ont plusieurs points en commun, nous avons choisi d’exposer les suggestions de Scallon (2004) à ce sujet en commençant par la distinction entre une échelle analytique et globale.

Une grille d’évaluation à échelle descriptive analytique contient plusieurs échelles, une pour chacun des critères. Une grille d’évaluation à échelle descriptive globale se compose d’une seule échelle. Elle contient quatre ou cinq paragraphes

décrivant les différents niveaux d’atteinte des compétences à évaluer par le degré de qualité perçue de l’ensemble des critères d’évaluation de la performance. Dans les deux cas, la notation peut s’exprimer a) par des chiffres, par exemple de 1 à 5, b) par les premières lettres de l’alphabet, de A à E, c) par un pourcentage ou d) par rapport à des pondérations retenues.

Qu’elle soit analytique ou globale, les avantages de l’utilisation d’une échelle descriptive sont multiples. St-Pierre (2004, p. 37) en résume plusieurs :

Les outils qualitatifs, à échelle descriptive, s’avèrent prometteurs pour l’évaluation de compétence et ils seraient sans doute à privilégier dans une perspective formative. Ils soutiennent la réflexion critique, aident à argumenter le jugement et proposent l’exploration de pistes d’amélioration. Ils exposent les critères et les différents niveaux où l’élève peut se situer. En outre, ils assurent une certaine équité, s’adaptent bien aux situations authentiques et donnent toute sa place au jugement de l’évaluatrice ou de l’évaluateur. Toutefois, leur élaboration peut être très laborieuse.

Effectivement, le travail de construction d’échelles descriptives ne se réalise pas sans effort et doit être validé par les personnes qui vont l’utiliser (Scallon, 2004). Idéalement, le travail de construction et de validation se réalise en équipe d’enseignantes et d’enseignants.

Scallon (2004) résume quelques principes d’ordre méthodologique d’après Popham (2000) pour construire une échelle descriptive. Elle se compose de critères d’évaluation, de niveaux qualitatifs et d’une stratégie de notation analytique ou globale. Trois mises en garde s’imposent a) éviter de choisir des critères trop spécifiques qui ne sont pas généralisables à toutes les productions d’une même famille de situation problème ou de tâche, b) éviter de choisir des critères trop larges ou abstraits qui peuvent susciter une subjectivité et c) éviter une surcharge de détails qui rendent les paragraphes longs et fastidieux dans leur utilisation.

Selon la procédure de construction d’une échelle descriptive analytique ou globale de Scallon (2004), il s’agit avant tout de cerner des critères de qualité ou de comportements indicateurs liés à la capacité ou à la compétence à évaluer. Les critères sont en lien avec la tâche demandée qui est exprimée en terme d’objets à évaluer. Il importe de bien qualifier les critères d’évaluation par une définition explicite et concise afin de s’assurer d’une compréhension commune par les personnes qui les utiliseront. En reliant les indications de Scallon (2004) à quelques qualités et caractéristiques des 3P centraux du concept de créativité de Filteau (2009), les critères d’évaluation associés à la créativité peuvent se rapporter a) à des qualités de production par exemple, la réalisation d’un produit recherché, innovateur, fonctionnel et adapté au contexte, b) à des étapes d’un processus observé par exemple, l’application d’un processus dynamique et pertinent ou c) à des comportements indicateurs liés à des gestes précis par exemple, l’initiative soutenue à résoudre des problèmes rencontrés.

D’après Scallon (2004), pour établir le niveau supérieur de l’échelle descriptive, il faut composer une phrase pour chacun des critères (analytique) ou un paragraphe incluant l’ensemble des critères (globale). Puis, pour chacun des échelons, il faut graduer le niveau qui peut exiger de nuancer un critère ou de l’exclure. Pour fournir une rétroaction plus précise, il est possible d’ajouter une liste de vérification indiquant les éléments nécessaires à la réussite des critères d’évaluation ou une liste d’exemples fréquents de faiblesses associés aux critères. En cochant les éléments présents ou manquants, il est donc possible d’expliciter et de justifier le jugement.

Nous avons examiné les notions d’assessment, de compétence, de situation complexe et des outils de jugement sous l’angle de l’évaluation des compétences en faisant des liens avec le modèle du concept de créativité de Filteau (2009) ainsi qu’avec certains écrits sur l’évaluation des apprentissages en créativité. Il s’agit maintenant de porter un regard plus précis sur le domaine d’évaluation relié à la créativité.