I. 2.1.2 « Effet de taille »
II.2 Banc de microtraction 103
II.2.1.2 Outils de mesures
Force
L’essai de traction mesure une force et un déplacement de manière à fournir une
estimation de la relation contrainte-déformation d’un élément de volumedV.
La mesure de force se fait à l’aide d’une cellule miniature21 montée en série avec
l’éprouvette de microtraction. Dans le cadre de cette étude, deux capteurs ont été utilisés :
1,5 N et 40 N. À l’aide de ces deux capteurs, et compte tenu de la souplesse de la platine,
il est possible de réaliser des mesures de la force précises entre zéro et un newton avec le
capteur1,5 N, et entre quatre et douze newton avec le deuxième.
PART.II II.2 Banc de microtraction
FIG. II2 - 2 – Premier prototype d’une platine de traction symétrique développé par
Michel Ignat, Charles Josserond et Laurent Debove. La cinématique de l’essai est
similaire à celle d’un système de levage pour véhicule léger.
II.2 Banc de microtraction PART.II
FIG. II2 - 3– Illustration des différents moyens techniques mis en œuvre pour mesurer
un déplacement, et ainsi remonter à un calcul de déformation. Le capteur embarqué
se trouve aligné sur la glissière assurant le déplacement des mors, désignée par « axe
de traction » et les interféromètres visent des cibles perpendiculaires à « l’axe de
l’éprouvette ». L’angle entre les deux axes est désigné par angle «α». Enfin, le microscope
réalise une observation locale de l’éprouvette, et réalise une estimation dense du champ
de déformation.
D’un point de vue géométrique, le capteur est composé d’un cylindre comprenant la
membrane sensible, et de deux axes filetés. La tolérance géométrique sur l’alignement des
mors est relativement large (du moins sur les capteurs qui ont été utilisés dans le cadre de
cette étude), impliquant une forte probabilité d’une occurrence de déplacements hors axe
liés à un mauvais alignement des deux mors. Des actions correctives ont donc été envisagées ;
elles sont présentées dans le paragraphe II.2.2.1.
Déplacement
Comme évoqué dans la partie I.3.3, plusieurs approches peuvent être suivies pour réaliser
ces mesures. En particulier, le champ de déformation se déduit de mesures de déplacement
faites soit par extensométrie optique (DIC par exemple), soit partiellement à partir d’une
mesure de déplacement globale — entre mors.
Dans la suite de cette étude, nous désignerons par « axe de traction » l’axe de translation
de deux mors. En raison des incertitudes géométriques élevées, introduites notamment par le
capteur de force, cet axe est de manière générale non confondu avec « l’axe de l’éprouvette »,
ou encore l’axe des mors. Cette distinction est schématiquement représentée en figure II2 - 3.
PART.II II.2 Banc de microtraction
Capteur embarqué, une première solution: Dans sa version initiale, la platine de
microtraction, utilisait un capteur de déplacement mesurant un taux de réflectance laser22.
Cette technologie a été retenue pour plusieurs raisons : elle est adaptée aux larges plages
de mesure souhaitées (de quelques microns à plusieurs millimètres), et la mesure de
déplacement est peu sensible aux erreurs angulaires.
Plusieurs inconvénients ont toutefois été rencontrés lors de la phase de validation des
mesures :
– ce capteur est excentré en raison de l’encombrement nécessaire pour les mors. Il se
trouve aligné sur la glissière assurant la translation des deux parties du mécanisme
désignée par « axe de traction ». La mesure de déplacement inclut donc l’allongement
de l’éprouvette, la déformation du système d’attache des éprouvettes, la déformation
du capteur de force, et, pour finir, la déformation subie par le bâti. Une telle chaine de
mesure rend délicate l’extraction de la déformation de la partie utile de l’éprouvette.
De plus, la reproductibilité d’un essai à l’autre est perturbée par les désalignements
nécessairement introduits par les interventions sur le capteur de force, qui induisent
une erreur angulaire entre l’axe de traction et l’axe de l’éprouvette,
– d’autres inconvénients apparaissent, comme la sensibilité du capteur à un
endomma-gement de la cible : une simple rayure ou une poussière peuvent perturber le taux
de réflectance de la cible, et induiront nécessairement des dérives dans la mesure du
capteur si ce dernier n’est pas très régulièrement ré-étalonné,
– de plus, le capteur laser se trouve à l’extrémité d’un renvoi coudé sur un câble blindé de
diamètreΦ =0,8 cm. La rigidité de flexion de ce câble est suffisante pour venir perturber,
même à grande distance, la dynamique de l’essai. En particulier, le déplacement du
câble peut introduire sur l’enregistrement de la force des variations supérieures à
150 mN. Cette valeur est à comparer avec les40 mNappliqués sur certaines éprouvettes
d’aluminium autoportantes (résultats présentés en partie III),
– enfin, un autre inconvénient majeur de cette technologie est le rapatriement des
données vers l’ordinateur, qui se fait via un port série (vitesse de transfert limitée, et
information « noyée » dans une chaine de caractères relativement longue). Ce point
n’est pas critique pour des essais quasi-statiques, mais devient vite problématique
dès que l’on souhaite dépasser 4Hz de fréquence d’acquisition (en particulier pour
l’utilisation de l’étage piézoélectrique), ou pour des essais de relaxation et/ou fluage
qui nécessitent l’utilisation d’une régulation en boucle fermée.
L’utilisation des interféromètres laser et l’utilisation d’une méthode d’extensométrie
optique — la corrélation d’image — répondent en partie aux critiques soulevées pour le
capteur embarqué.
II.2 Banc de microtraction PART.II
FIG. II2 - 4 – Exemple d’exploitation d’une analyse par corrélation d’image obtenu
sur une éprouvette bicouche {Polymère+Cuivre}. Le médaillon représente le champ de
déformation évalué au point de fonctionnement repéré sur la courbe caractéristique de
l’essai.
Extensométrie optique: Dans le cas présent, deux méthodes sont utilisées en parallèle. La
première consiste à réaliser une observation directe de l’éprouvette, par une acquisition
cadencée de clichés, qui est ensuite analysée par corrélation d’image (DIC) pour obtenir
une mesure dense des champs de déplacement et de déformation (un exemple de mesure
obtenue par DIC est présenté en figure II2 - 4).
Le système d’acquisition23 réalise des observations optiques avec un grossissement
variant entre trente-cinq et sept mille fois (pour un écran 15 pouces). L’acquisition se fait
en noir et blanc24, avec une fréquence maximale de1 Hz. Les éprouvettes les plus larges sont
observées à l’aide d’un grossissement×350, et les plus étroites avec un grossissement×700.
Cette technique présente principalement deux avantages :
– l’observation d’une partie sélectionnée de l’éprouvette permet de réaliser une mesure
de déformation qui n’est pas perturbée par les zones de transition où la section n’est pas
constante. Ainsi, l’ensemble observé par corrélation d’image peut être classiquement
assimilé à un élément de volume.
– l’obtention d’un champ dense de déplacement mène à la mesure non seulement de
l’allongement axialεx mais également à une mesure de la contraction transverseεy. Il
est ainsi possible d’avoir une estimation du coefficient de Poissonνtel que défini par
l’équation I3.36.
L’annexe A.6.1 présente, dans la configuration retenue dans le cadre de cet essai, une
estimation de l’erreur de parallaxe qui peut être introduite par un système d’observation dont
l’axe optique n’est pas rigoureusement parallèle à la normale du plan de traction. Le calcul
de cette imprécision s’appuie notamment sur l’utilisation de la faible profondeur de champ
inhérente aux systèmes optiques de type microscope. Avoir une image nette de l’éprouvette
dans tout le champ garantit une certaine perpendicularité du plan de l’éprouvette à l’axe
optique. Ainsi, l’erreur commise sur la mesure de déplacement ne dépasse pas0,25 %. L’erreur
23
Il s’agit d’un microscope KH-7700 fourni par Hirox.
PART.II II.2 Banc de microtraction
sur le module d’élasticité vaut également environ0,25 %. Une telle amplitude justifie le choix
d’utiliser une seule caméra pour les mesures d’extensométrie optique, et non pas un système
complexe de triangulation à l’aide de deux caméras pour réaliser une stéréovision (comme
dans le cas des essais macroscopiques).
Néanmoins, plusieurs inconvénients ont été rencontrés. Tout d’abord, la mesure du
champ de déplacement ne se fait pas en temps réel ; et l’étape de post-traitement nécessaire
pour l’obtention du champ de déformation s’avère pour l’instant relativement longue. De
plus, sa mise en œuvre n’est pas systématiquement réalisable. En effet, elle nécessite, dans
la configuration actuelle, une surface suffisamment contrastée pour pouvoir distinguer de
manière unique deux ensembles de pixels différents. Dans le cas des éprouvettes métalliques,
cette condition n’a pas été vérifiée.
Interférométrie laser: En tenant compte des remarques précédentes, il a donc été
nécessaire de faire appel à une technique complémentaire, plus souple d’utilisation :
l’allongement entre mors, à savoir une mesure globale de déplacement. Bien que plusieurs
auteurs ne considèrent pas cette mesure comme suffisamment précise [Sharpe 08], des
précautions ont été prises pour garantir la qualité des résultats (ces différents points sont
détaillés dans la section suivante). Cette technique est d’autant plus avantageuse qu’elle
permet de réaliser des mesures en temps réel, et qu’elle demeure simple d’utilisation. La
mesure du déplacement se fait à l’aide d’un système d’interférométrie laser25, composé de
deux faisceaux opposés — ciblant chacun un mors — et d’une électronique réalisant le
traitement du signal. Ce système fonctionne jusqu’à plusieurs kilohertz et est compensé en
pression et en température.
La chaîne de mesure est considérablement réduite (notamment par rapport au capteur
à taux de réflectance laser) : les cibles des faisceaux ont été ajoutées directement sur les
mors, au plus près de l’ancrage des éprouvettes. Ainsi, l’allongement mesuré ne prend
en compte que l’allongement de la partie autoportante et le glissement éventuel de la
tête de l’éprouvette dans les mors — ce déplacement parasite ne se produit généralement
pas26et son éventuelle présence liée à un défaut de montage est détectée lors d’une étape
préliminaire de vérification de la rigidité du montage.
Un système d’alignement des faisceaux laser fait appel à la superposition d’un
signal oscillant, et à l’analyse harmonique de la réponse captée. La figure de Lissajou
correspondante et les pourcentages de taux de réflectance permettent, avant chaque essai,
d’aligner les interféromètres sur l’axe de l’éprouvette — et non sur l’axe de traction comme
pour le capteur embarqué. Ces capteurs de déplacement sont conçus pour fonctionner aussi
bien sur des surfaces réfléchissantes que sur des surfaces mates.
Ces mesures étant sans contact, avec des sondes fixes extérieures au mécanisme, aucune
perturbation n’est induite par les masses de l’instrumentation.
25
Vibromètres S-PS de SIOS, compatibles avec une mesure de déplacement oscillant jusqu’à plusieurs
kilohertz.
II.2 Banc de microtraction PART.II
Enfin, deux logiciels sont fournis avec le système électronique. L’un permet la réalisation
d’essais « quasi-statiques », jusqu’à une fréquence de 100 Hz tandis que l’autre permet de
monter à plusieurs kilohertz en travaillant sur une analyse fréquentielle du signal reçu.
Dans le cas de mesures in-situ, les interféromètres ne peuvent plus être utilisés car ils
nécessitent l’alignement de la platine de microtraction avec deux têtes de mesure externes.
Dans ce cas de figure, le capteur de déplacement embarqué permet de réaliser une mesure
moins précise, mais nécessaire au pilotage de la platine. En raison des inconvénients de ce
type de capteur, il est principalement utilisé pour le pilotage et ne constituera pas la mesure
principale de déplacement (mobilisation de techniques d’extensométrie lors des mesures
in-situ, soit par AFM ou par imagerie électronique par exemple).
Dans le document
Caractérisation micromécanique de matériaux en couche mince destinés aux micro- et nano- technologies
(Page 116-122)