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Outils dédiés à l’analyse du mouvement

CHAPITRE 2. Etude du geste médical et sur un prototype de robot existant

2.1. Outils dédiés à l’analyse du mouvement

De longue date, l’homme s’est efforcé d’observer et d’analyser le mouvement en général.

Ainsi, Aristote (384-322 av. JC) et Léonard de Vinci (1452-1519) par exemple ont mené des recherches sur la description et le mouvement du corps de êtres vivants. Aujourd’hui, il existe plusieurs types de systèmes d’acquisition de mouvements. Boutin a classifié ces différentes techniques en fonction de leur mode de fonctionnement [Boutin 09]. Six d’entre elles sont regroupées ci-dessous en trois catégories différentes.

2.1.1. Les différentes catégories

Les systèmes optoélectroniques permettent d’étudier le mouvement en détectant des marqueurs collés sur le ou les sujets à observer. Les systèmes Vicon Nexus, Motion Analysis et SAGA sont conçus pour localiser des marqueurs dits « passifs ». Un post-traitement via un logiciel spécifique permet de labéliser et de différentier les marqueurs. Le système Optotrack Smart Markers peut gérer des marqueurs « actifs » qui émettent chacun des ondes de fréquences différentes. Ce procédé permet de distinguer ces marqueurs les uns des autres sans post-traitement. De plus, aucun éclairage spécifique n’est requis. Mais l’inconvénient de ce

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système est l’obligation d’alimenter et de synchroniser les marqueurs via un dispositif embarqué qui peut altérer les mouvements du sujet.

Enfin, des systèmes non optiques permettent également d’enregistrer des mouvements. Des instruments de mesure (accéléromètres, gyroscopes…) fixés sur le sujet, peuvent estimer les mouvements de celui-ci. XSens propose à cet effet des centrales inertielles ainsi que des combinaisons humaines. Moins précis que les systèmes optiques, ces produits sont cependant moins coûteux et offrent des volumes de visualisation plus larges et sans le phénomène d’occlusion qui est un problème récurent chez ces derniers.

Figure 2.1. Centrale inertielle XSens MTi [XSens, www].

Figure 2.2. Combinaisons XSens MVN [XSens, www].

Des structures exosquelettes passives peuvent être utilisées pour mesurer le mouvement d’un sujet humain. Composé de segments rigides reliés par des articulations mesurées, ce type de système peut s’avérer peu pratique à l’utilisation en fonction des dimensions morphologiques de l’opérateur. En général, ces dispositifs sont dédiés à des thématiques bien définies. La main exosquelette de l’Institut PPRIME permet l’analyser le mouvement des doigts d’un opérateur et de les transposer sur une main robotique pour des fins de manipulation dextre [Chaigneau 08]. Le système BlueDRAGON a été utilisé par l’Université de Washington (Seattle) pour étudier la cinématique des outils en chirurgie mini-invasive [Rosen 02]. L’Université de Cassino a conçu un système de capture de mouvement par câbles CATRASYS (CAssino TRAcking SYStem). Un point du sujet est relié par des câbles à plusieurs dispositifs capables de mesurer leurs variations de longueur. Le principe de triangulation permet alors de déterminer la position dans l’espace de ce point.

2.1.2. Le système utilisé : Vicon Nexus

En plus de ses compétences en synthèse de mécanismes, l’équipe ROBIOSS (RObotique BIOmécanique Sport et Santé) de l’Université de Poitiers s’intéresse activement à l’analyse des pratiques sportives ainsi qu’aux aspects cliniques du mouvement et de l’ergonomie. Dans cette optique, ses chercheurs se sont dotés du système de capture de mouvements Vicon Nexus. Ce dispositif basé sur la détection et le suivi de marqueurs passifs est composé d’un ensemble de caméras à haute résolution (caméras MX), de marqueurs réfléchissants et d’une plateforme d’acquisition assurant la connectique des différents équipements de mesure. Le système peut être accompagné de caméra classique pour l’enregistrement vidéo de la scène pour illustration (voir Figure 2.3). L’ensemble est géré par un poste informatique équipé du logiciel spécifique Nexus.

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Figure 2.3. Illustration du matériel Vicon Nexus. Caméras MX T-40 (a), plateforme d’acquisition (b), poste informatique (c), champ de vision (d), sujet (e), caméra standard (f).

Images de [Li 12].

Les caméras T40 utilisées ici ont une résolution maximale de 4 méga pixels (2325 x 1728) et peuvent enregistrer jusqu’à 370 images par seconde (voir Figure 2.4). Elles sont reliées au poste informatique par l’intermédiaire de la plateforme d’acquisition. Celle-ci permet également la connexion de caméras numériques classiques et la gestion d’entrées-sorties analogiques. Ces caméras sont équipées chacune de 320 LED de haute puissance qui émettent une lumière infra-rouge de longueur d’onde de 850 nm (d’où l’ambiance rougeâtre sur certaines photographies).

Figure 2.4. Caméras T-40. Figure 2.5. Six différents marqueurs réfléchissants

Cette lumière est alors réfléchie par les marqueurs réfléchissants. Il en existe de différentes tailles et formes selon les besoins de l’expérimentation (voir Figure 2.5). Chacune de ces caméras peut ainsi les détecter et estimer leur position dans un plan normal à l’axe de vision de la caméra. Avec deux caméras, on peut ainsi estimer la position dans l’espace de chaque marqueur par triangulation. On gagne en précision à chaque fois que l’on ajoute une caméra au système. Le fait d’ajouter des caméras permet également de contrer les phénomènes d’occlusions. Si un obstacle mobile empêche la détection d’un marqueur par une caméra, une autre prendra le relais.

L’enregistrement des mouvements se divise en plusieurs étapes. La première consiste à placer les caméras de façon à couvrir l’ensemble de l’environnement dans lequel se déplacera le sujet à étudier. Pour affiner ces réglages, le logiciel Nexus permet d’obtenir une vue de chaque caméra. Il faut ensuite régler les paramètres de détection de chaque caméra. Pour un enregistrement de qualité, trois paramètres doivent impérativement être minutieusement ajustés. Le niveau de lumière émise indique l’intensité d’éclairage des LED. Le seuil de détection est le niveau de lumière réfléchie à partir duquel la caméra considèrera un reflet lumineux comme un marqueur. Enfin, il est possible de régler pour chaque caméra la circularité minimale requise pour qu’un reflet lumineux soit considéré comme un marqueur.

Le bon réglage de ces paramètres permet au système de faire le tri entre les marqueurs que Caméras MX T-40

d e

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l’on souhaite détecter et les parasites ou autres reflets lumineux dus aux surfaces polies par exemple. En cas de besoin, on peut éventuellement masquer numériquement certaines zones couvrant des éléments problématiques.

Une fois la partie matérielle configurée, on passe à la calibration du système. Cette étape a pour but de faire connaître au système la position des caméras les unes par rapport aux autres sans quoi, aucune triangulation ne serait possible. Pour cela, on agite dans le champ de vision des caméras une baguette d’étalonnage munie de marqueurs et dont les dimensions sont connues du système (voir Figure 2.6). En envoyant ainsi plusieurs milliers de points aux caméras, le système reconstitue virtuellement leur disposition avec des erreurs d’estimations qui diminuent en fonction du nombre de points envoyés. Ces erreurs sont visualisables par l’utilisateur qui peut alors décider de « raffiner » la calibration si ces valeurs lui paraissent trop élevées. Cette baguette d’étalonnage est ensuite utilisée pour établir un repère de référence à l’environnement virtuel. Deux niveaux à bulles et des vis de réglage permettent d’affiner l’orientation de ce repère.

Figure 2.6. Baguette d’étalonnage.

Ceci étant effectué, on peut procéder à la capture de mouvement. Les marqueurs réfléchissants sont placés sur le sujet puis leurs déplacements sont enregistrés par le système.

Le choix de l’emplacement est très important car c’est leurs coordonnées dans l’espace que le système permet d’extraire. Lorsque l’enregistrement est terminé, le logiciel génère un fichier qu’il faudra ouvrir pour le « post-traiter ».

Ce post-traitement débute par la reconstruction de l’ensemble des marqueurs détectés lors de l’enregistrement. Cette opération permet de représenter graphiquement les marqueurs en fonction des paramètres de reconstruction. C’est en fonction de ces paramètres que le logiciel va rendre visible ou non un marqueur. La vitesse de déplacement des marqueurs indique le déplacement maximal des marqueurs entre deux images successives. Au delà de cette valeur, le système considèrera qu’il s’agit d’un autre marqueur puisqu’il ne peut pas se déplacer aussi vite. Le nombre minimum de caméras par marqueur est le nombre de caméras nécessaires pour détecter chaque marqueur. Si un marqueur est détecté par un nombre de caméras inférieur à ce paramètre, il ne sera pas pris en compte. Ce nombre ne peut pas être inférieur à deux. La séparation minimale de reconnaissance est la distance de séparation minimale admise entre deux reflets lumineux. En dessous de cette valeur, le système estimera avoir affaire à un seul et même marqueur. Il est très important de régler ces paramètres minutieusement afin d’obtenir la visualisation la plus propre possible et de réduire ainsi la complexité de la suite du post-traitement.

L’étape suivante consiste à labéliser les marqueurs afin de pouvoir les identifier tout au long de l’enregistrement. Ces marqueurs sont également regroupés en plusieurs « segments ». Un segment est la représentation d’un solide indéformable.

Marqueurs

Niveaux à bulle

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Figure 2.7. Marqueurs reconstruits. Figure 2.8. Marqueurs reconstruits et labellisés

Pour finir, il est possible qu’un marqueur disparaisse durant une séquence de durée variable.

On parle de « vide ». Il peut y avoir deux raisons différentes à ce phénomène. Soit le marqueur est toujours visible mais considéré comme non identifié durant la séquence. Soit le marqueur n’est plus visible à cause d’un nombre trop important d’occlusions ou parce que les paramètres de reconstruction le rendent « invisible ». Dans les deux cas, le logiciel Nexus permet à l’utilisateur de « combler un vide » en reconstruisant la trajectoire de ce marqueur sur cette séquence. Dans le cas d’un marqueur non identifié, il suffit de relabéliser le marqueur sur la séquence. En revanche, si le marqueur n’est plus détecté, Nexus peut reconstruire sa trajectoire via deux méthodes différentes. La première consiste à se baser sur la trajectoire du marqueur avant et après sa disparition. Le logiciel reconstruit alors une trajectoire en s’assurant que ses tangentes au début et la fin du vide soient respectivement confondues avec les tangentes de la trajectoire initiale avant et après ce même vide (méthode par « spline »). La deuxième méthode utilise la trajectoire d’un autre marqueur visible durant la même séquence. La trajectoire du marqueur ainsi recréée sera identique à celle du marqueur sélectionné (méthode par imitation).

Figure 2.9. Trajectoires reconstruites par imitation (a) ou par « spline » (b).

Lorsque le post traitement de l’enregistrement est terminé, il reste à exporter les coordonnées dans l’espace des marqueurs labellisés en fonction du temps de l’enregistrement. Le logiciel peut exporter ces données sous différents formats de fichier. Selon le choix de l’utilisateur, il peut s’agir de fichiers textes, de tableaux Excel... Une fois que cette étape est terminée, on peut passer à l’analyse quantitative du mouvement.