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Chapitre II : Le muscle squelettique, machine contractile et acteur métabolique

I. Structure et fonctionnement du muscle strié squelettique

2. Organisation moléculaire de la myofibrille

Figure 15: Représentation schématique des évènements moléculaires régulant l’activation des cellules satellites durant la régénération d’une fibre musculaire suite à une lésion.

a- Le sarcomère : unité contractile

En microscopie photonique, les myofibrilles ont un aspect strié dû à des indices de réfraction différents des diverses zones des fibres (Figure 16 A). Ainsi, on peut observer des bandes sombres dites bandes A (Anisotrophe) étant coupées en leur milieu par une rayure plus claire : la zone H (de l’allemand Heller signifiant « plus pâle »), seulement visible lorsque les fibres musculaires sont au repos. Cette zone H est interrompue en son milieu par une zone plus sombre : la ligne M (de l’allemand Mittel, « centre »). On observe également des bandes claires dites bandes I (Isotrophe) au centre desquelles se trouve une région plus foncée : le disque Z (de l’allemand Zwischen, « entre »). La région d’une myofibrille comprise entre deux disques Z, d’une longueur d’environ 2,4 µm, constitue le sarcomère, unité contractile de la fibre musculaire (Bloom & Fawcett, 1962 ; Sciote & Morris, 2000) (Figure 16 B).

Ce sarcomère est placé en série et contient deux types de myofilaments : l’un épais, de myosine, et l’autre fin, d’actine. Au niveau de cette structure, les filaments fins sont attachés de part et d’autre d’un matériel protéique essentiel, le disque Z, tandis que les filaments épais s’attachent au niveau de la ligne M. C’est le chevauchement des filaments fins et épais qui constituent la bande A. Au cours de la contraction musculaire, le glissement des filaments les uns sur les autres entraîne une diminution de la zone H, correspondant à un raccourcissement des sarcomères. En plus du réseau d’acto-myosine, le sarcomère contient également deux autres réseaux de filaments : la titine et la nébuline.

b- Les filaments fins et épais

¾ Les filaments fins

Ils ont un diamètre d’environ 7 nm et sont constitués de plusieurs types de molécules dont les principales sont l’actine, la tropomyosine et la troponine. L’alpha actine monomérique (ou actine globulaire) se polymérise pour former des filaments (actine filamenteuse) composés de deux chaînes linéaires qui s’enroulent l’une autour de l’autre pour former une double hélice (Figure 16 C). La tropomyosine va se lier au niveau des sillons des filaments d’actine et ainsi bloquer les liaisons avec la myosine lorsque que la fibre est au repos. La contraction est alors inhibée. De plus, un complexe de troponines (I, T

A

B

C D

C D

Figure 16: Structure du sarcomère, des filaments d’actine et des filaments épais de myosine dans un muscle squelettique.

A. Photographie en microscopie électronique d’une coupe longitudinale de muscle squelettique B. Schéma montrant les composants principaux du sarcomère

C. Schéma d’un filament fin d’actine D. Schéma d’un filament épais de myosine

et C) est attaché au système actine-tropomyosine afin de contrôler et réguler les interactions actine-myosine (Gomes et al, 2002). En effet, la troponine I et T inhibent l’activité ATPasique de la myosine, en présence de tropomyosine. La troponine C, elle, fixe le calcium et par conséquent joue un rôle déterminant dans la régulation calcique de la contraction.

¾ Les filaments épais

Ils sont constitués de plusieurs molécules de myosine formées de deux chaînes lourdes (MHC, Myosin Heavy Chain). Chaque MHC possède une queue, ainsi qu’une tête globulaire où s’associent deux chaînes légères (MLC, Myosin Light Chain) dont l’une est dite « essentielle » (ELC, Essential Light Chain) et l’autre « régulatrice » (RLC, Regulatory Light Chain) (Figure 16 D) (Rayment et al, 1993). On trouve de nombreuses isoformes de myosines lourdes et légères, dont l’expression varie suivant le type de muscle et est adaptée aux forces développées. Des protéines liées aux myosines (MyBP, Myosin Binding Proteins) s’associent aux filaments épais et participent au bon déroulement de la polymérisation de la myosine (Okagaki et al, 1993).

c- Les protéines du disque Z

Le disque Z apparait comme une ligne fine et dense formant les bords du sarcomère dans les muscles striés. Il révèle un réseau de filaments réticulés qui transmettent la tension et abritent d’innombrables protéines ayant diverses fonctions (Luther, 2009). Au niveau du

disque Z, les extrémités dites « barbues » des filaments d’α-actine s’entrecroisent et

s’ancrent via l’α-actinine, une protéine ubiquitaire que l’on trouve dans les cellules

eucaryotes (Blanchard et al, 1989). En plus de son rôle structural, il est connu que l’α

-actinine a un rôle majeur dans la signalisation cellulaire et dans l’ancrage d’autres protéines du disque Z (Sjoblom et al, 2008).

En effet, en plus des filaments d’actine, beaucoup d’autres protéines vont s’ancrer au niveau de ce disque Z parmi lesquelles on trouve la titine, la nébuline ou la protéine CapZ (Figure 17) :

- Titine : cette protéine, aussi appelée connectine, correspond au troisième réseau de filament (Granzier & Labeit, 2005). Les molécules de titine sont des protéines élastiques

Figure 17: Représentation schématique de l’ancrage des filaments fins et épais aux

Figure 17: Représentation schématique de l ancrage des filaments fins et épais aux

disques Zvial’intermédiaire de plusieurs protéines parmi lesquelles on retrouve l’α

-actinine, la titine, la nébuline et CapZ.

Ce schéma montre également la présence de la desmine au niveau du disque Z. Cette protéine appartient aux costamères et permet l’ancrage des filaments d’acto-myosine au niveau du sarcolemme de la cellule.

géantes d’environ 3000 kDa capables d’interagir avec de nombreuses protéines comme l’actine, la myosine ou la calmoduline. Ceci lui confère de nombreuses fonctions, que ce soit au niveau de la contraction, de la gestion des forces mécaniques, ou lors de la myofibrillogenèse. De par ces nombreuses interactions, la titine contrôle l’assemblage des protéines sarcomériques régulant l’élasticité du sarcomère. Elle permet, notamment, aux filaments fins et épais d’être liés au disque Z et à la ligne M.

- Nébuline : c’est une protéine géante du sarcomère qui se fixe sur le disque Z via

son extrémité N-terminale. Elle s’étend sur toute la longueur des filaments d’α-actine où elle

forme un filament composite avec le complexe actine/tropomyosine/troponine. La nébuline joue un rôle important dans l’assemblage, la structure et la fonction du disque Z, et sa longueur semble dicter celle des filaments d’actine (Kruger et al, 1991 ; Pappas et al, 2008). De plus, cette protéine participerait à la régulation de la contraction musculaire en inhibant l’activité ATPasique de la myosine (McElhinny et al, 2003).

- CapZ : cette protéine est localisée au niveau du disque Z où elle se lie à l’α

-actinine, formant un complexe d’ancrage des filaments fins d’α-actine (Papa et al, 1999). En

liant les extrémités « barbues » des filaments d’actine, CapZ permettrait d’organiser et d’aligner ces filaments et ainsi aurait un rôle dans la régulation de la dynamique de l’actine.

En plus de son interaction avec l’α-actinine, Pappas et al. en 2008 ont montré que la

localisation de CapZ au niveau du disque Z est permise par sa liaison avec la nébuline.

d- Costamères et jonctions myotendineuses

Pour transmettre efficacement la force, le cytosquelette contractile doit être attaché au sarcolemme des myofibrilles. Les muscles striés squelettiques contiennent deux systèmes de liaison membranaire possédant des similarités structurales et moléculaires : les costamères et les jonctions myotendineuses (Figure 18).

¾ Les costamères

Les costamères sont des structures membranaires permettant l’attachement de l’appareil contractile à la membrane basale des fibres musculaires et qui s’ancrent au niveau du disque Z et de la ligne M (Pardo et al, 1983 ; Porter et al, 1992). Ces structures

Figure 18:Structure et composants des costamères et des jonctions myotendineuses au niveau du sarcolemme.

coordonnent la transduction de la force contractile du disque Z vers le sarcolemme, où la force est transmise latéralement aux extrémités du muscle. Les costamères permettent également de conserver l’intégrité structurale de la membrane au cytosquelette durant la contraction. Ils sont composés de trois réseaux distincts mais liés entre eux : le système intégrines/adhésions focales, le complexe dystroglycane, et le système spectrine.

Les intégrines sont des protéines transmembranaires hétérodimériques qui permettent l’attachement du cytosquelette d’actine à la matrice extracellulaire. Chaque sous-unité possède un domaine extracellulaire large qui se lie directement aux composants de la

matrice, ainsi qu’un domaine cytoplasmique qui interagit avec le cytosquelette d’actine via

son association avec plusieurs protéines comme la taline, la vinculine ou l’α-actinine

(Calderwood et al, 2000). En plus de leur rôle dans l’attachement du cytosquelette, les intégrines jouent également un rôle dans la signalisation. Cette double fonction leur permet de détecter un stress mécanique et d’activer les voies de transduction du signal intracellulaire, produisant des changements dans la transcription des gènes et une réorganisation du cytosquelette (Shyy & Chien, 1997).

Le complexe dystroglycane (DGC) est un complexe de protéines multimériques dont le noyau est composé de dystrophine. Cette protéine permet la connexion entre la matrice

extracellulaire environnante, le sarcolemme et le cytosquelette sous-jacent en liant la β

-dystroglycan à l’actine costamérique. En absence de dystrophine, l’actine costamérique n’est plus étroitement associée avec la membrane basale des myofibres, ce qui résulte en un affaiblissement du sarcolemme, le rendant susceptible à des dommages induits lors de la contraction (Petrof et al, 1993). D’autres composants du DGC ont un rôle essentiel dans la stabilisation du cytosquelette musculaire. C’est le cas des sarcoglycanes, protéines

membranaires s’associant aux β-dystroglycanes qui sont, eux, des récepteurs

transmembranaires capables de lier la laminine. Enfin, le DGC inclue également des

molécules adaptatrices que sont l’α-dystrobrévine et les syntrophines. Ces protéines servent

de connexion entre la dystrophine et la signalisation de l’oxyde nitrique. Le complexe dystroglycane a donc un rôle structural mais il participe également à la signalisation cellulaire.

Le système spectrine est abondant au niveau des costamères, cependant sa fonction dans cette jonction est encore peu connue (Porter et al, 1992). Les dimères de spectrines sont associés à l’ankyrine G, aux ATPases sodium et potassium dépendantes et à la MLP

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(Muscle LIM Protein), ce qui assure l’ancrage à la membrane. On retrouve des

hétérodimères α et β de spectrine avec la MLP au niveau des disques Z, alors que les

hétérodimères β sont localisés dans la ligne M. Le système spectrine participe donc à un

réseau allant de la membrane au sarcomère.

¾ Les jonctions myotendineuses

Les jonctions myotendineuses sont des structures uniques du muscle squelettique qui constituent le point terminal des myofibrilles. C’est au niveau de ces jonctions que les forces générées par la contraction des myofibrilles sont transmises au travers du sarcolemme pour agir sur le tendon (Charvet et al, 2012). Tout comme les costamères, elles possèdent un système d’intégrines ainsi que le complexe dystroglycane, seul le système spectrine étant

absent (Bao et al, 1993). Taline, vinculine et α7 intégrines sont également très enrichies dans

ces structures.