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B. La cornée

6. Innervation sensitive de la cornée

6.2. Organisation de l’innervation cornéenne

Dans les espèces canine et féline, les nerfs ciliaires abordent le bulbe oculaire par sa face postérieure, puis progressent rostralement par un trajet intra scléral avant de rejoindre l’espace suprachoroïdal.

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 Innervation péricornéenne

Aux abords de la cornée se forme un plexus nerveux, superficiel et dense, dessinant un anneau de 0,8 à 1 mm de large au niveau du limbe. Ce réseau, appelé plexus péricornéen, est constitué d’axones d’origines variées qui se regroupent et s’anastomosent. Ces fibres nerveuses sont en effet issues à la fois de la conjonctive bulbaire, de la sclère, de la périphérie des vaisseaux du limbe et de la partie antérieure du plexus sous-épithélial. On distingue deux parties au sein du plexus péricornéen (Fig.31) :

- La zone la plus externe, dite épisclérale, est composée principalement de faisceaux nerveux péri-vasculaires. Elle comporte aussi un réseau nerveux peu fourni à hauteur du stroma limbique, constitué d’axones individualisés suivant des directions aléatoires.

- La zone plus interne, dite péri-cornéenne, comporte des faisceaux nerveux de faible diamètre qui se ramifient et s’anastomosent pour former un réseau nerveux plus dense. Certains de ces axones prennent une direction centripète et s’anastomosent avec les cellules nerveuses de la partie antérieure du plexus sous-épithélial. (MARFURT 2001; EVANS 2013)

Figure 32. Innervation du limbe sclérocornéen : le plexus péricornéen (d’après (MARFURT 2001))

Microscopie photonique.

A. Zone la plus externe du plexus : la zone épisclérale. Le réseau nerveux est peu dense et constitué de fibres nerveuses associées aux artères et veines irrigant le limbe. B. Zone péri-cornéenne. Le maillage nerveux est dense et formé de cellules nerveuses de

petit diamètre qui s’anastomosent ensuite en grande majorité avec les axones du plexus sous-épithélial.

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Une partie des fibres nerveuses quittent le plexus péricornéen en faisceaux et pénètrent la cornée de manière radiaire à hauteur de la membrane basale de l’épithélium. Une fois au sein de la cornée, ces faisceaux se divisent rapidement en groupes de fibres nerveuses de plus petite taille qui s’intercalent entre les cellules de l’épithélium cornéen. Ce réseau innerve la région péri-limbique sur 2 à 4 mm de largeur, il participe donc à la sensibilité périphérique de la cornée. (BELMONTE 1997; BARRETT 2001)

 Innervation cornéenne

La majorité des fibres nerveuses pénétrant la cornée traverse le limbe groupée en faisceaux nerveux de grande taille, disposés de manière radiaires et répartis à intervalle régulier. Ces faisceaux pénètrent la cornée à hauteur de la partie moyenne du stroma cornéen. (cf. Fig.32) Chez l’Homme, on trouve 30 à 80 faisceaux (JIUNCHENG 2010). Chez le chien, on en compte entre 14 et 18. (BARRETT 2001). Dans l’espèce féline, leur nombre varie de 16 à 20, avec une moyenne de 19. (CHAN-LING 1989)

A partir du limbe, les troncs nerveux prennent une direction ascendante et centripète, tout en se ramifiant de façon dichotomique et répétée. Les branches issues de ces divisions s’anastomosent pour former un réseau complexe en partie antérieur du stroma cornéen, le plexus sous-épithélial. D’autre part, les axones perdent leur myélinisation à environ 1 mm du limbe et se retrouvent entourées uniquement par les cellules de Schwann. Ils évoluent au sein de la matrice extracellulaire du stroma cornéen, à proximité des kératocytes qui les enveloppent parfois dans des extensions cytoplasmiques. (MULLER 2003) Le plexus sous- épithélial constitue un maillage nerveux dense qui couvre toute la surface cornéenne sans interruption. Au sein de ce réseau, d’une épaisseur de 0,4 à 0,5 mm, la densité nerveuse est plus importante dans la partie antérieure que postérieure. (Fig.33-34) (MARFURT 2001; GUM 2013)

De fins faisceaux de cellules nerveuses quittent le plexus sous-épithélial et prennent une direction ascendante. Une partie d’entre eux émettent des terminaisons nerveuses nues dans les couches les plus superficielles de la cornée ainsi qu’au sein du stroma antérieur et moyen. L’autre partie des faisceaux traversent la membrane basale de l’épithélium cornéen et distribuent des branches nerveuses latérales, parallèles à la surface cornéenne, appelées « cordons épithéliaux ». (MULLER 2003) Ces cordons sont composés de 2 à 6 axones et s’étendent sur une longue distance dans une direction donnée. De plus, des cellules nerveuses individualisées de 0,05 à 2,5 µm s’anastomosent avec les cordons épithéliaux pour former le plexus subbasal, localisé entre la membrane de Bowman et la couche basale de l’épithélium. Ce réseau comporte à la fois des fibres nerveuses droites et des fibres moniliformes (en collier

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de perle). (MULLER 2003) Ces dernières produisent des extensions qui partent verticalement pour enfin atteindre la couche externe de l’épithélium. (Fig.33) L’aspect moniliforme de certaines cellules nerveuses est dû à la présence de nombreuses varicosités riches en mitochondries et en vésicules renfermant des particules de glycogène et des neuropeptides. Les extensions nerveuses s’immiscent entre les cellules de l’épithélium cornéen et émettent des terminaisons nerveuses en « boutons » (bulbes proéminents) à quelques microns de la surface cornéenne. Les cellules épithéliales et les fibres sensorielles sont en contact étroit. Cette innervation superficielle apporte la majeure partie de la sensibilité cornéenne. (BELMONTE 1997; BARRETT 2001)

71 Figure 33. Innervation cornéenne

Schéma représentant la cornée d’un chien, reconstituée à partir de 6 sections radiaires. Le sujet possède 15 faisceaux nerveux pénétrant la cornée au niveau du limbe, à hauteur de la moitié antérieure du stroma. (d’après (MARFURT 2001))

Figure 34. Représentation tridimensionnelle de l’innervation cornéenne.

Les nerfs ciliaires longs arrivent dans la région du limbe sclérocornéen et se divisent en plusieurs branches qui pénètrent la cornée. Elles forment au sein du stroma antérieur (B) un dense réseau nerveux, le plexus sous-épithélial. A l’opposée, la partie postérieure du stroma cornéen (A) est très pauvrement innervée.

Les fibres nerveuses traversant la membrane basale de l’épithélium forment un maillage dense à la base de l’épithélium cornéen (C), le plexus subbasal, qui émet des terminaisons nerveuses vers la partie superficielle de l’épithélium (D). (d’après (SAMUELSON 2013))

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Figure 35. Densité et répartition de l’innervation cornéenne

1. Des coupes de 30 µm d’épaisseur, parallèles à la surface cornéenne, sont réalisées à différents niveaux de la cornée. Les fibres nerveuses sont ensuite mises en évidence par immunohistochimie, donnant les représentations suivantes.

2. Les coupes cornéennes sont classées de la plus profonde à la plus superficielle.

A. La partie postérieure du plexus sous-épithélial se situe en partie moyenne du stroma cornéen.

Cette zone est faiblement innervée et comporte des axones de faible diamètre possédant une trajectoire rectiligne de direction aléatoire.

B. A l’inverse, la partie antérieure du plexus sous-épithélial est constitué d’un réseau dense et

complexe, formé de faisceaux nerveux de diamètres variés et d’axones individualisés qui s’anastomosent.

C. La coupe réalisée à hauteur de la couche basale de l’épithélium cornéen met en évidence le

plexus subbasal, comprenant les axones dits « cordons épithéliaux ». Ceux-ci cheminent parallèlement à la surface cornéenne et on distingue des groupes suivant globalement les mêmes directions (représentées par les flèches) même si individuellement les axones possèdent des directions variées.

D. Au sein de la partie la plus superficielle de l’épithélium cornéen, on distingue quelques

cordons épithéliaux (flèche) et surtout une riche innervation par les courtes branches terminales issues de ces cordons.

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 Densité nerveuse

Chez l’Homme, le plexus subbasal regroupe 5400 à 7200 cordons nerveux et un total de 19000 à 44000 axones. En s’appuyant sur la théorie selon laquelle un axone donnerait naissance à au moins 10 à 20 terminaisons nerveuses, on peut extrapoler qu’il y ait 315000 à 630000 nocicepteurs. En se basant sur une surface cornéenne de 90 mm², ceci équivaut à une densité d’environ 7000 nocicepteurs/mm². La densité de fibres nerveuses au sein de la cornée est en moyenne deux à trois fois plus élevée chez l’Homme qu’au sein des autres espèces. Les terminaisons nerveuses sont réparties dans toutes les zones de la cornée, de l’apex au limbe, même si la densité nerveuse varie en fonction des régions.

6.3. Fonctions de l’innervation sensitive de la cornée