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Obtention d’un modèle quasi-atomique par « fitting »

II. La combinaison des données issues de la Microscopie Electronique et de la cristallographie aux

II.3 Obtention d’un modèle quasi-atomique par « fitting »

La MET est une technique particulièrement adaptée pour obtenir la structure de gros complexes macromoléculaires. En effet, cette technique ne nécessite que peu de matériel biologique par rapport aux autres techniques de la biologie structurale (0,1 mg/ml pour la ME vs 10 mg/ml pour la cristallographie) mais la structure obtenue est à plus basse résolution par rapport à la

cristallographie qui restent à ce jour, avec la RMN, la seule technique de biologie structurale donnant accès à la structure atomique d’une macromolécule ; d’où le développement d’une méthode hybride de la biologie structurale : le « fitting ». Elle consiste à replacer, de manière suffisamment précise, à l’intérieur d’une reconstruction en MET les structures atomiques (RMN ou cristallographiques) des protéines qui lui correspondent pour reconstituer un modèle quasi-atomique.. Les premières méthodes mises au point calculent un recalage en corps rigide des structures atomiques (Figure 21). La structure atomique dans ce cas est considérée comme invariante et est déplacée sans déformation au sein de la reconstruction 3D issue de la ME. Très récemment, des méthodes de « fitting » flexible ont été développées. Les mouvements propres à la molécule sont calculés et la structure atomique est déformée en conséquence pour obtenir un meilleur résultat de « fitting ».

II. 3.1En corps rigide

Les premiers recalages datent de la deuxième moitié des années 90 (Roseman, 2000). Le placement des structures atomiques fût tout d’abord manuel à l’ « œil » et réalisé surtout sur des capsides virales icosaédriques en complexe avec une partie de leur récepteur (Bella et al., 1998; Olson et al., 1993) ou en complexe avec un fragment d’anticorps (Hewat & Blaas, 1996; Stewart et al., 1997). Afin d’améliorer la qualité du placement manuel et la position des structures atomiques dans la reconstruction 3D, la communauté scientifique adapta des programmes dérivés de la cristallographie et de la RMN. Phoebe Stewart et ses collaborateurs obtinrent le premier recalage automatique ainsi qu’un modèle quasi-atomique en 1993 pour la capside de l’Adénovirus de type 2 en utilisant le programme XPLOR, actuellement remplacé par CNS (Brunger et al., 1998). Par la suite, de nombreux programmes de « fitting » automatique ont été développés comme COLORES de Situs (Wriggers et al., 1999), COAN (Volkmann & Hanein, 1999), DOCKEM (Roseman, 2000), EMFIT (Rossmann, 2000), URO (Navaza et al., 2002) ou 3SOM (Ceulemans & Russell, 2004). Le package Situs développé par Willy Wrigggers ainsi que URO développé par Jorge Navaza sont actuellement les deux programmes les plus distribués pour la communauté scientifique.

La problématique imposée dans la procédure de « fitting » automatisée est une recherche en corps rigide dans six dimensions. En effet, il faut déterminer la position de la molécule selon trois degrés de liberté en rotation (recherche rotationnelle) et trois degrés de liberté en translation (recherche translationnelle) selon les axes Ox, Oy et Oz du repère dans lequel on se situe. Le choix

quant à l’utilisation de ces différents programmes doit prendre en compte plusieurs critères comme l’espace dans lequel se réalisent les calculs (réel ou réciproque). L’utilisation de l’espace réciproque accélère énormément le temps de calcul. Le 2ème critère dont il faut tenir compte est la prise en compte des symétries internes à la particule. En effet, pour une particule comme la capside des Adénovirus qui possède une symétrie d’ordre 60, il est nécessaire de fixer les symétries pendant la procédure de « fitting » pour éviter les superpositions d’atomes. Enfin, le dernier critère est le type de recherche effectuée par le programme. Certains logiciels comme COLORES ou EMFIT font une recherche exhaustive dans la totalité du repère défini par la reconstruction 3D. Il n’est donc pas nécessaire de réaliser un placement manuel approximatif avant de débuter la procédure. L’autre type de recherche implémentée dans URO ou EMFIT utilise la position définie par l’utilisateur lors du positionnement manuel. Le programme ne fait qu’affiner la position définie au départ par l’expérimentateur. Ce type de recherche réduit considérablement le temps de calcul mais nécessite un placement initial assez ajusté car URO ne tient pas compte des clashs entre capsomères.

Figure 21: Représentation schématique du processus de "fitting" automatique.

(a)La structure à recaler ainsi que la reconstruction 3D sont filtrées. Le type de filtre dépend du logiciel utilisé.

(b)Le programme recherche les paramètres de translation et de rotation. (c)Calcul de critères de qualité qui est très souvent un coefficient de corrélation. (d)Sélection du meilleur résultat et création d’un nouveau fichier avec la position mise à jour de la structure atomique dans le référentiel de la reconstruction de MET.

Le principe de la procédure de « fitting », illustré en Figure 21, reste identique quelque soit le programme utilisé. Le logiciel a tout d’abord recourt à une série de filtrages sur la reconstruction 3D et la structure atomique afin de faciliter le placement. Ensuite la recherche de la bonne position est

réalisée selon les 6 degrés de liberté de l’espace. Enfin le programme calcule des critères de qualité afin de déterminer la meilleure solution et écrit un nouveau fichier contenant la structure atomique à la meilleure position déterminée pendant la procédure de « fitting ». L’utilisation de programmes automatiques de « fitting » a permis le calcul précis de critères de qualité importants pour évaluer le résultat final de « fitting ». Plusieurs critères de qualité sont disponibles, en fonction du programme utilisé, mais le principal reste le calcul d’un coefficient de corrélation CC. D’autres critères de qualité peuvent être calculés comme le facteur cristallographique Rf ou le critère Q ou écart quadratique entre la densité de la reconstruction 3D et celle du modèle atomique. Chaque programme possède une façon propre de calculer les critères de qualité. Dans ces conditions, il est souvent difficile de comparer des modèles quasi-atomiques obtenus avec deux programmes différents.

II. 3.2Les modes normaux et le « fitting » flexible

Au cours du processus de « fitting » en corps rigide, l’expérimentateur peut rencontrer certains problèmes. Si l’état conformationnel dans la structure atomique est différent de l’état conformationnel observé dans la reconstruction 3D, le recalage des données donne souvent un résultat médiocre. Il est nécessaire dans ce cas de « déformer » la structure atomique de la protéine pour que son positionnement dans le modèle de MET soit correct. Pour cela, des programmes sont capables de modifier et de déformer une structure atomique en calculant les modes normaux de la molécule. Ces modes sont basés sur l’énergie vibrationnelle de la molécule étudiée. A chaque mode normal correspond une conformation de la molécule. Le calcul des modes normaux à basse fréquence va permettre de trouver les mouvements de grande amplitude qui domine la dynamique de la protéine étudiée.

Les deux principaux programmes disponibles pour réaliser une déformation d’une structure sont NMFF (Normal Mode Flexible Fitting) développé par une équipe américaine du Scripps institute (Tama et al., 2004) et elNémo/NORMA développé par une équipe CNRS de Marseille (Suhre et al., 2006). NORMA est en fait une combinaison du programme de « fitting » en corps rigide URO avec un calcul des modes normaux NMA (Normal Mode Analysis). Si on ne désire pas utiliser le programme, le serveur web elNémo est disponible pour le calcul des modes normaux d’une molécule (Suhre & Sanejouand, 2004).