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L’analyse de la bibliographie montre que de nombreux critères liés au milieu et aux pratiques agricoles peuvent permettre de prédire les propriétés agroécologiques de praires. Cependant,

57 jusqu’à présent la majorité des études n’a tenté de prédire que quelques propriétés, généralement soit agronomiques soit écologiques, et peu d’études prennent en compte une grande diversité de milieux et de pratiques agricoles.

Les objectifs scientifiques de cette thèse sont d’identifier les critères permettant de prédire les propriétés agroécologiques des prairies du massif vosgien, et les compromis entre propriétés. Ils visent à mieux comprendre comment le milieu et les pratiques agricoles influencent la végétation des prairies, puis comment cette végétation s’exprime au travers des propriétés agronomiques et écologiques. Ces résultats seront ensuite utilisés à des fins technico-économiques, afin de développer un outil d’aide à la médiation utilisable à la fois par les agriculteurs et leurs conseillers agricoles et écologues.

Face à la multitude de propriétés étudiables, je me suis concentré sur les propriétés agroécologiques ayant démontré leur importance lors de précédentes études. Ces propriétés doivent aussi être quantifiables suffisamment rapidement pour être étudiées pendant la thèse. Je ne me suis donc par exemple pas intéressé aux services culturels fournis par les prairies, bien que les paysages ouverts soient caractéristiques des sommets vosgiens et de forte attractivité sur le plan touristique.

La question principale de ce travail de thèse est :

Comment prédire les propriétés agroécologiques des communautés prairiales et comprendre leurs interactions ?

Cette question peut se décomposer en plusieurs parties (Figure 7)

- Q1a : Comment les pratiques agricoles et le milieu permettent de prédire la végétation des prairies du massif vosgien ?

Les pratiques agricoles et le milieu sélectionnent la composition botanique, mais tous les critères prédictifs n’ont pas la même importance. Il est donc nécessaire d’identifier les critères permettant au mieux de prédire la composition botanique des prairies permanentes.

Les hypothèses sont que la composition botanique est principalement déterminée par des variables liées au milieu (l’humidité, la température et l’acidité du sol) et aux pratiques (fertilisation et nombre d’utilisation).

- Q1b : Quelles connaissances de la végétation, des pratiques agricoles et du milieu permettent la prédiction des propriétés agroécologiques des prairies permanentes ?

Les pratiques agricoles et le milieu sélectionnent la composition botanique, qui s’exprime à travers les propriétés agroécologiques. Pouvoir estimer directement les propriétés depuis les connaissances du milieu et les pratiques permettrait de simplifier l’estimation par les non-botanistes, alors que l’estimation des propriétés uniquement avec les connaissances de la flore répondrait mieux aux attentes des naturalistes.

L’hypothèse est qu’il est préférable d’utiliser à la fois la connaissance de la composition botanique, du milieu et des pratiques pour permettre la meilleure prédiction possible des propriétés agroécologiques des prairies permanentes.

58 - Q2 : Parmi les différentes méthodes de typologie de la végétation prairiale (phytosociologie, agronomique et fonctionnelle), quelle(s) méthode(s) ou combinaison(s) de méthodes permet(tent) d’estimer les propriétés agroécologiques des prairies ?

L’utilisation de modèles statistiques incluant le milieu, les pratiques et la composition botanique peut être difficile à prendre en main. Les typologies peuvent alors être utilisées pour estimer plus simplement des propriétés agroécologiques. Cependant, chaque typologie répond à des objectifs différents, par des méthodologies propres. Les hypothèses sont que la phytosociologie permet de bien prédire les propriétés écologiques, et la typologie agronomique permet de prédire les propriétés agronomiques. La typologie fonctionnelle pourrait être combinée aux approches précédentes afin d’améliorer la prédiction des propriétés prairiales.

- Q3 : Les différentes propriétés agronomiques et écologiques sont-elles synergiques ou antagonistes ? Ou, autrement dit : est-il possible que la production de la prairie réponde aux attentes de l’éleveur en termes de quantité et de qualité fourragère, tout en maintenant la qualité écologique ?

Il est généralement admis que propriétés agronomiques et écologiques sont antagonistes. En effet, rendements et qualités fourragères sont souvent dus à une forte fertilisation et à une utilisation précoce de la prairie, qui nuisent à la diversité floristique. Cependant, il semble nécessaire de compléter cette équation par des propriétés désormais chères au grand public et aux agriculteurs. L’hypothèse est que la prise en compte de ces nouvelles propriétés agronomiques (santé animale et du consommateur, souplesse d’exploitation) et écologiques (valeur polinisateurs, stock de carbone) pourraient être favorisées par la biodiversité et donc créer de nouvelles synergies.

- Q4 : Comment transformer efficacement les connaissances scientifiques en conseils portés aux agriculteurs ?

Les agriculteurs utilisent parfois leurs prairies depuis de nombreuses années, et peuvent donc facilement comparer les rendements entre prairies. De même, l’abondance des plantes à fleurs, souvent considérée comme une preuve de diversité, est facilement observable par les agriculteurs. A l’inverse, la qualité fourragère des prairies est une notion plus abstraite, dépendante des attentes de l’agriculteur, estimable de la composition botanique mais qui nécessite parfois des analyses en laboratoire pour être précisément évaluée. L’hypothèse est que les typologies agronomiques de prairies permanentes sont des outils facilement utilisables, mais qui doivent être associés à d’autres outils pour répondre à toutes les attentes des agriculteurs et de leurs conseillers. Enfin, des propositions seront amenées pour permettre aux typologies de répondre au mieux aux attentes des différents acteurs de terrain, sur le fond comme sur la forme.

Le premier chapitre couvrira les question Q1a et Q1b, c’est-à-dire la prédiction de la végétation par les pratiques et le milieu, et la prédiction des propriétés agroécologiques par les pratiques, le milieu et la végétation. Le chapitre 2 répondra à la question Q2 à propos de la prédiction des propriétés agroécologiques par les typologies prairiales : ce chapitre est une traduction de l’article Permanent grassland classifications predict agronomic and environmental characteristics well, but not ecological characteristics publié dans la revue Ecological Indicators (Mesbahi et al., 2020). Le chapitre 3 s’intéressera à la question Q3 à propos de l’étude et de la prédiction des compromis et synergies entre propriétés agroécologiques. Enfin le

59 chapitre 4 répondra à la question Q4 sur la transmission des connaissances scientifiques aux acteurs de terrain. Pour finir, une partie Discussion permettra de discuter les résultats des précédents chapitres un à un, puis de confronter les résultats.

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MATERIELS ET METHODES GENERAUX

62 L’objectif de cette partie est de présenter les matériels et méthodes utilisés dans chacun des chapitres suivants, afin de ne pas répéter les éléments fondamentaux.

Le massif vosgien y sera tout d’abord présenté puis la collecte de données sera expliquée : quelles sont les données de précédentes études que j’ai pu valoriser et quelles nouvelles données j’ai dû collecter. Les protocoles de relevés botaniques, de collecte de fourrage et de sol, les détails sur les analyses fourragères, d’antioxydants et de sol, ainsi que l’enquête auprès d’agriculteurs seront présentés dans cette dernière partie.

Les analyses statistiques et les calculs des propriétés agroécologiques seront expliqués plus tard, dans les chapitres 1 à 4 propres à chaque étude.