• Aucun résultat trouvé

Partie 1.A Prédiction de la végétation par le milieu et les pratiques

3. Résultats

3.1. Corrélations entre critères prédictifs

L’étude des corrélations entre critères prédictifs permet de mettre en évidence les liens entre critères. Ces liens permettront de mieux interpréter les critères qui seront sélectionnés dans les parties suivantes pour la prédiction de la végétation, des propriétés agroécologiques et des compromis entre ces propriétés.

3.1.1. Corrélations entre critères prédictifs

L’ACP entre critères (Annexe 6), montre de nombreuses corrélations entre critères prédictifs du milieu et des pratiques. Les cinq premières dimensions expliquent 33,0%, 12,9%, 10,3%, 8,0% et 5,5% de la variance, soit un total de 69,7%.

La première dimension de l’ACP montre un fort effet de l’altitude. Lorsque l’altitude augmente la pluviométrie augmente, et les températures et l’évapotranspiration diminuent. Concernant le paysage, on peut noter une corrélation positive entre l’altitude et la part de pelouses et pâturages naturels (CLC_321) et dans une moindre mesure avec la part de forêts de conifères (CLC_312) et de landes et broussailles (CLC_322). A l’inverse, les terres arables (CLC_211) et le tissu urbain (CLC_112) sont majoritairement présents à faible altitude. Les liens entre altitude et pratiques agricoles sont assez faibles : les prairies d’altitude sont légèrement plus fertilisées en N, P et K, plus pâturées, utilisées plus tardivement en terme de nombre de jours mais plus précocement en °C.j cumulés. Les sols d’altitude sont plus superficiels et acides (pH faible) et ont de fortes teneurs en aluminium et fer, mais faibles teneurs en CaO et MgO. Leur forte teneur

85 en carbone et matière organiques, ainsi qu’en azote total leur confère de forts CEC et rapport C/N. Les propriétés du sol et des pratiques s’expriment aussi via les indices d’Ellenberg, montrant un faible indice de fertilité et un faible état calcique des sols d’altitude, et une végétation légèrement plus adaptée au pâturage.

La deuxième dimension regroupe principalement des propriétés liées à la texture des sols. Elle est positivement corrélée à la teneur en argile et en limons, mais à de faibles teneurs en sables : ces textures permettent une CEC élevée ainsi qu’une forte réserve utile. Cette dimension montre aussi une corrélation positive avec le pH (sols basiques), et les teneurs en CaO, MgO et Na2O. Les sols argileux et limoneux sont dans des paysages de cultures (CLC_211) mais sont peu liés aux pratiques agricoles : ils sont légèrement moins fertilisés et utilisés plus tardivement. La troisième dimension est liée à de forte évapotranspirations en particulier entre les mois d’aout et d’octobre. Son paysage est riche en landes et broussailles (CLC_322) et en prairies de plaines (CLC_231), mais est peu lié aux pratiques agricoles : la troisième dimension est légèrement corrélée aux pâturages et à des utilisations plus précoces.

Les dimension 4 et 5 discriminent les prairies selon les pratiques agricoles. La dimension 4 est corrélée aux prairies de fauches peu fertilisées sur sols acides pauvres en MgO, K2O et CaO échangeables. Son paysage est plutôt composé de tissu urbain (CLC_112) et de forêts de conifères (CLC_312). La dimension 5 est corrélée aux prairies pâturées ayant de forts chargement (j.UGB/ha), un nombre élevé de jours pâturés et un nombre élevé de sessions de pâturage dans l’année. Cette dimension est corrélée à des utilisations précoces en nombre de jours et en °C.j cumulés.

L’ACP montre donc principalement un effet de l’altitude et des variables qui lui sont corrélées, qui expliquent 33% de la variance, et un effet de la texture qui explique près de 13% de la variance. L’effet des pratiques est moins important, il est en partie corrélé à l’altitude (les prairies d’altitude sont plus pâturées) mais se voit principalement dans les dimensions 4 et 5 qui rassemblent respectivement les prairies de fauche peu fertilisées et les pâtures fertilisées. Cependant ces dimensions n’expliquent que 8,0% et 5,5% de la variance.

3.1.2. Classifications des prairies selon les critères prédictifs

La classification hiérarchique en composantes principales permet de classer les prairies selon leurs critères du milieu et des pratiques (Figure 16). L’étude des sauts d’inertie indique que les prairies doivent être séparées en trois classes pour obtenir la classification la plus solide, cependant l’identification de sept classes permet de maximiser le nombre de classes sans isoler de prairies.

Ces classes rassemblent les prairies ayant des critères du milieu (climat, sol, paysage) et des pratiques agricoles similaires. Tous les liens significatifs (p < 0,05) sont présentés en Annexe 8, et les principaux liens ainsi que leurs valeurs pour chaque critère et classe sont présentés dans le Tableau 9.

L’effet altitude (altitude mais aussi température, précipitations, évapotranspiration, teneur en matière organique, …) est bien visible avec un gradient partant des classes 1 et 2 (faible altitude) vers les classes 6 et 7 (forte altitude).

86

Figure 16 Dendrogramme issu de la classification hiérarchique en composantes principales des prairies selon leurs critères du milieu et des pratiques

L’effet texture (texture, mais aussi CEC, réserve utile, pH, teneur en aluminium, …) permet principalement de différencier les classes de prairies à une même altitude : les classes 1 et 2 ont des altitudes similaires (266 m et 278 m) mais la première est argileuse et limoneuse alors que la seconde est sableuse. Ainsi, la classe 1 rassemble les prairies de basses altitude plutôt calcaires typiques des bords du massif des Vosges du Nord, alors que la classe 2 rassemble les prairies de faible altitude sableuse et donc sur grès, typiques du centre des Vosges du Nord et des vallées des Vosges moyennes.

Enfin, l’effet des pratiques permet aussi de discriminer les classes de prairies. La classe 1 est plus fauchée et moins pâturée que la classe 2. De même, les classes 6 et 7 sont à des altitudes similaires (1067 m et 1117 m), mais ont des utilisations différentes : la classe 7 regroupe les prairies plutôt pâturées (193 J.UGB/ha) alors que la classe 6 regroupe les prairies plutôt fauchées (64 j.UGB/ha). Enfin, les classes 4 et 5 ont des altitudes et textures similaires mais des pratiques différentes : la classe 4 est plus pâturées, reçoit une fertilisation total azotée supérieure et est utilisée plus précocement.

1 2

7

87

Tableau 9 Principaux liens entre critères du milieu, pratiques agricoles et classes de critères Classe 1

(noir) Classe 2 (rouge) Classe 3 (vert) Classe 4 (bleu) (turquoise) Classe 5 Classe 6 (violet) Classe 7 (jaune) Moyenne

Altitude 266 278 476 624 674 1067 1117 578

Température moyenne 10,4 10,4 9,8 9,2 8,7 7,5 6,8 9,3

Radiations cumulées 387883 379965 409090 407522 387462 443061 401324 399476

Précipitations cumulées 874 917 1429 1439 1551 2157 2188 1415

Evapotranspiration cumulée 653 644 659 627 601 603 553 626

Réserve utile cumulées 865 600 856 528 748 443 694 675

CLC_112 (tissu urbain) 3,8 14,6 16,9 11,0 7,1 0 2,5 9,7 CLC_211 (terres arables) 53,5 1,0 0 2,6 0 0 0 6,2 CLC_321 (prairies naturelles) 0 0 0 2,2 5,7 24,0 44,5 7,2 Argile 370,0 97,3 171,9 138,5 165,3 157,2 213,0 171,9 Limons fins 277,0 106,7 262,8 177,9 191,0 204,6 241,8 197,9 Limons grossiers 165,8 69,4 145,7 87,0 96,2 87,8 109,0 105,0 Sables fins 74,0 266,6 137,1 116,7 161,1 146,4 129,4 157,4 Sables grossiers 113,3 459,9 282,1 479,5 386,2 404,0 307,0 367,7 Carbone organique 43,3 28,4 53,2 43,8 69,0 94,0 130,1 57,9 C/N 9,9 11,0 11,5 10,7 12,0 13,6 15,0 11,6 CEC 242,3 85,3 197,2 175,9 223,2 268,4 349,4 198,0 pH 7,5 5,5 5,5 5,7 4,8 5,0 5,0 5,6 Aluminium échangeable 0,0 28,3 56,5 17,9 248,7 231,2 299,0 103,3

Date d'utilisation (jours) 155,7 152,6 150,6 129,2 148,5 177,6 183,8 152,4

Date d'utilisation (°C.jours) 1312,9 1221,1 1151,7 765,2 936,1 1148,0 1105,7 1071,7

Fertilisation total N 20,8 47,3 47,9 89,2 59,3 77,0 59,4 58,0 Fertilisation total P 14,5 27,4 22,2 48,2 29,8 37,4 31,4 30,7 Fertilisation total K 26,8 63,8 55,2 119,2 75,5 99,7 73,9 74,8 Nombre de fauches 1,8 1,2 2,1 1,5 0,8 0,8 0,6 1,3 Nombre de pâturages 0,3 0,7 0,5 1,8 1,4 0,4 1,2 1,0 Chargement (j.UGB/ha) 42 138 45 184 92 64 193 112 Ellenberg : fertilité 5,2 5,0 5,3 5,6 4,4 4,4 4,4 5,0

Ellenberg : état calcique 5,2 5,3 5,5 5,6 4,5 4,7 4,4 5,1

Les corrélations observées grâce à l’ACP permettent donc d’expliquer les classes de prairies construites grâces aux critères du milieu et des pratiques. Ces résultats montrent un fort effet altitude issu des corrélations entre altitude, climat, paysage et sol, mais une indépendance assez forte entre altitude et pratiques agricoles : les prairies peuvent être fauchées ou pâturées, recevoir des fertilisations plus ou moins fortes à toutes altitudes. Enfin, un fort gradient texture permet de discriminer les prairies, en particulier à faible altitude où les différences sont beaucoup plus forte qu’en altitude grâce à la présence de sols argileux et calcaires (classe 1) et de sols sableux plus acides (classe 2).

88