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Notion de balance azotée : équilibre entre les synthèses et les dégradations des protéines

Chapitre II – Modulation de la masse musculaire

1. Notion de balance azotée : équilibre entre les synthèses et les dégradations des protéines

1.1. Rôles des protéines et des acides aminés dans l’organisme

Certains nutriments, sont dit « indispensables » dans la mesure où l’organisme est incapable de les synthétiser en quantité suffisante pour couvrir ses besoins. Il s’agit de l’eau, de 9 acides aminés, de certains acides gras (acide linoléique et alpha-linolinique), de la plupart des vitamines (exceptées les vitamines D et K), minéraux et oligoéléments. Ces nutriments doivent, par conséquent, être apportés par l’alimentation. D’autres nutriments sont nécessaires mais « non indispensables » puisque l’organisme est capable de les synthétiser seul. Il s’agit des autres acides aminés, des autres acides gras, du glucose, du fructose et des vitamines D et K.

Rôle des protéines dans l’organisme

Parmi ces nutriments, les acides aminés sont l’unité de base constituant des protéines. Les protéines ont des rôles essentiels dans le fonctionnement de l’organisme. Elles sont, avec les lipides et les glucides, l’une des trois grandes familles de macronutriments, c’est-à-dire l’un des composants des aliments qui contribuent à l’apport énergétique.

De plus, elles jouent un rôle structural et mécanique, en participant au renouvellement des tissus musculaires, des phanères (ongles, cheveux, poils), de la matrice osseuse, de la peau, des tendons et des ligaments.

Elles sont également impliquées dans la régulation de l’homéostasie, en participant à de nombreux processus physiologiques tels que la catalyse de réactions chimiques, la signalisation intra-cellulaire, la transcription de certains gènes, le trafic trans-membranaire, la synthèse des ARN de transfert et des ribosomes, ou encore la régulation des défenses immunitaires (ANSES, 2016).

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Rôle des acides aminés dans la synthèse protéique

Les protéines sont composées d’une succession linéaire et séquentielle d’acides aminés, appelées polymères d’acides aminés. La présence d’acides aminés libres dans l’organisme est indispensable, afin de permettre la traduction du message génétique (transmis sous la forme d’ARN messagers, ARNm) en protéines fonctionnelles. En outre, les protéines sont continuellement impliquées dans le renouvellement de différents tissus de l’organisme tels que les muscles, l’intestin, le foie, les reins et la peau. Dans ce cadre, la disponibilité en acides aminés libres (notamment en acides aminés essentiels) dans les tissus est un déterminant important du contrôle des flux de synthèses des protéines.

L’activation optimale des synthèses protéiques dépend de nombreux facteurs (que nous détaillerons dans ce chapitre). Parmi ces facteurs, l’absence d’état inflammatoire est primordiale. En effet, le tube digestif et l’intestin sont les premiers organes approvisionnés en acides aminés provenant des aliments. Lors d’une inflammation intestinale - étant donné que la priorité est le maintien de la santé du tube digestif - les synthèses protéiques du tube digestif sont majorées au détriment des synthèses protéiques des muscles squelettiques. Par exemple, chez le rongeur, 58% de la thréonine fût utilisée par le tube digestif lors d’une agression à ce niveau, contre 8% en temps normal (Breuille et al. 1994).

Les protéines sont les composés essentiels des cellules de l’organisme. Elles sont constituées d’une séquence d’acides aminés, synthétisée au niveau du cytoplasme de la cellule, à partir des acides aminés libres. La présence d’acides aminés libres dans l’organisme est alors indispensable au métabolisme des protéines.

1.2. Le métabolisme des protéines musculaires

Les protéines tissulaires d’un individu adulte sont en perpétuel renouvellement. On appelle « état dynamique des protéines » ce métabolisme des protéines permanent. Il est caractérisé d’un côté, par une dégradation continue et, de l’autre, par une biosynthèse permanente des protéines à partir des acides aminés libres.

Ce métabolisme fonctionne de sorte que la quantité d’acides aminés libres dans le plasma reste relativement constante (environ 70g) (Figure 11). Ainsi, lorsque des acides aminés sont disponibles en quantité supérieure (i.e. après digestion du repas), les synthèses protéiques sont majorées, avec en parallèle, une inhibition des dégradations protéiques. Dans ces conditions, la balance azotée, qui résulte de l’équilibre entre les synthèses et les dégradations des protéines, est positive (i.e. protéosynthèse > protéolyse). Inversement, en cas de mauvaise disponibilité

35 en acides aminés libres (i.e. période de jeûne), la dégradation des protéines est augmentée, et la protéosynthèse diminuée, résultant ainsi en une balance azotée négative (pour revue, Trommelen and van Loon 2016).

La cinétique de synthèses/dégradations des protéines a été mise en évidence par la méthode du marquage d’un acide aminé, avec un isotope stable d’un des atomes entrant dans sa composition (l’azote ou le carbone par exemple, 15N ou 13C). Les entrées et sorties de cet acide aminé marqué par l’isotope sont évaluées. C’est grâce à cette technique de marquage (méthode de référence), que le métabolisme des protéines a pu être étudié au cours et à la suite d’exercices physiques (Waterlow et al. 1978).

La synthèse des protéines permet le renouvellement permanent des protéines. Elle est

initiée à partir des acides aminés issus de l’alimentation ou de l’hydrolyse des protéines tissulaires. A la suite d’une multitude de réactions - que nous décrirons dans ce chapitre - la disponibilité intracellulaire en acides aminés, et surtout en acides aminés essentiels permet d’assurer la traduction des messages génétiques en protéines. Ces protéines synthétisées, permettent de remplacer des protéines préalablement lysées et/ou d’augmenter le pool de protéines musculaires.

La dégradation des protéines est également un processus important. Tout d’abord elle

permet l’élimination des protéines présentant des anomalies, soit à la suite d’erreurs lors de la

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36 traduction, soit à la suite de dommages ou de lésions subis (i.e. lors d’un stress oxydatif, ou d’un exercice en excentrique). Elle permet également le turn-over physiologique des protéines. Ce catabolisme des protéines musculaires est majoré par différents facteurs, tels que le jeûne (faible quantité d’acides aminés libres), l’exercice physique, la blessure, l’immobilisation d’un membre, le vieillissement et lors d’états pathologiques (pathologies infectieuses, états inflammatoires, états d’immobilisation prolongée, stress oxydant chronique).

En résumé, le métabolisme des protéines évolue selon la synthèse et la dégradation des protéines. Ces processus sont à l’origine du renouvellement des tissus de l’organisme, et interviennent notamment dans la modulation de la masse musculaire.

1.3. Equilibre synthèses/dégradations des protéines et régulation de la

masse musculaire

La masse musculaire résulte de la balance entre les synthèses et les dégradations des protéines musculaires. Une balance synthèses/dégradations positive conduit à un état d’hypertrophie musculaire, alors qu’une balance négative se traduit par une atrophie musculaire (McGlory and Phillips 2015). Chez les individus sains, c’est l’action sur les flux de synthèses protéiques plutôt que sur la protéolyse qui influence la taille des fibres musculaires (Egan and Zierath 2013).

Au repos à jeun, le déficit énergétique se traduit par une augmentation de l’utilisation des substrats autres que le glucose, soit les acides gras et les acides aminés oxydables. Etant donné qu’aucun acide aminé n’est apporté par l’alimentation, les flux de synthèses des protéines décroient. En parallèle, l’augmentation de la disponibilité en acides aminés libres nécessite une activation prononcée de la protéolyse (Biolo et al. 1997). Dans cette situation de jeûne prolongé, la protéolyse est alors supérieure à la protéosynthèse. La balance synthèses/dégradations du muscle est donc négative, ce qui peut se traduire par une amyotrophie.

En revanche, après un exercice suivi de l’ingestion d’acides aminés, la sécrétion d’insuline (induite par l’exercice et l’ingestion des acides aminés) ainsi que la disponibilité en acides aminés, sont favorables à l’activation des synthèses protéiques et l’inhibition de la protéolyse. Au niveau musculaire, les synthèses protéiques sont supérieures aux dégradations, la balance synthèses/dégradations est donc positive, conduisant à l’accrétion des protéines musculaires (Biolo et al. 1997).

37 Les acides aminés sont les constituants des protéines musculaires. La présence d’acides aminés au niveau tissulaire régule directement les flux de synthèses et de dégradations des protéines. Un gain de masse musculaire est possible uniquement si les synthèses protéiques sont supérieures aux dégradations protéiques, c’est-à-dire dans le cas où le bilan synthèses/dégradations est positif sur la journée. Les synthèses protéiques sont stimulées par

différents facteurs tels que l’exercice physique, la sécrétion hormonale et les apports alimentaires.