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C. Les allocations budgétaires

2. Non-discrimination et disparités géographiques

Dans un pays (ou un état ou une ville), certaines zones sont souvent mal desservies, par rapport à d’autres zones, en services relevant de secteurs comme la santé, l’éducation, la justice et le logement abordable.

Cette qualité de service moindre ressort généralement des allocations (et dépenses) plus faibles par habitant inscrites dans le budget de l’État.

De telles disparités géographiques ont trois causes importantes, à savoir les pertes, la centralisation du pouvoir politique et le manque d’information.

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Premièrement, dans ce contexte, les pertes renvoient essentiellement à la corruption dans la gestion des fonds publics, de sorte que les fonds alloués ou décaissés à une fin précise sont détournés à d’autres fins, souvent pour enrichir personnellement des responsables gouvernementaux ou pour servir les intérêts de politiciens. On observe généralement un taux de perte plus élevé dans les sommes destinées aux zones pauvres et les services de l’État dans les zones pauvres gèrent par ailleurs souvent les fonds publics de manière moins efficace. Ainsi, même si les allocations sont équitables, les dépenses ne le sont pas nécessairement.

Deuxièmement, les détenteurs du pouvoir allouent souvent une part disproportionnée des crédits budgétaires aux zones géographiques qui leur seront favorables, et le pouvoir politique est souvent concentré dans les villes. De plus, les disparités géographiques découlant de ces allocations inéquitables peuvent être aggravées par la décentralisation : les zones urbaines génèrent habituellement plus de recettes que les zones rurales et, partant, les autorités des zones urbaines disposent en règle générale de plus de fonds au départ. Le transfert des responsabilités du gouvernement central aux autorités locales sans transférer les ressources nécessaires pour s’acquitter de ces responsabilités peut aboutir à un déséquilibre encore plus important entre les zones urbaines et les zones rurales. On peut souvent s’attendre à ce que les autorités locales fournissent les ressources nécessaires à la prise de responsabilités supplémentaires, mais ces autorités, en particulier dans les zones rurales, sont rarement en mesure de générer des recettes additionnelles.

Troisièmement, le centre politique est souvent peu informé des droits et besoins précis des habitants de certaines zones géographiques, ou refuse de les reconnaître et, partant, ne vérifie pas si les programmes de l’État touchent les personnes pauvres de ces zones. Sans carte de la pauvreté et sans données relatives à l’efficacité des dépenses dans les zones pauvres, il est plus probable d’observer un phénomène de sous-financement ou de financement inefficace. L’asymétrie de l’information renforce la disparité en empêchant davantage les personnes vivant dans des zones pauvres de comprendre leurs droits et de demander aux autorités les services qui devraient les aider à les exercer53.

Cette inégalité géographique dans les allocations est problématique non seulement pour ce qui est de l’obligation de non-discrimination, mais également

103 III. ÉTABLISSEMENT DU BUDGET

eu égard à l’obligation d’utiliser au maximum les ressources disponibles pour réaliser les droits de l’homme. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a indiqué que cette obligation signifiait que les gouvernements devaient utiliser leurs fonds de manière efficace. Le fait de consacrer la même somme à un service particulier dans une zone mal desservie peut être considéré comme une utilisation plus « efficace » des fonds que s’ils étaient consacrés à une zone mieux desservie, dans la mesure où, par exemple, plus de personnes gagneraient du temps si elles ne devaient pas se déplacer pour obtenir le service concerné, par rapport aux personnes vivant dans une zone mieux desservie, où le service est déjà plus facilement accessible.

Si ces conclusions sont relativement simples, il n’est pas toujours évident, en pareil cas, de rendre l’utilisation des fonds plus équitable et plus efficace.

Il convient avant tout de déterminer la façon dont les fonds doivent être ciblés pour atteindre les zones et les personnes qui en ont le plus besoin.

La géographie influe sur l’accès aux services sociaux

Le Rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l’alimentation a conclu que la géographie était un facteur clef en matière d’accès aux services sociaux en Chine :

« Une des principales raisons de la progression de l’écart entre les zones rurales et les zones urbaines réside dans le fait que les autorités locales ne disposent pas de suffisamment de recettes pour accomplir toutes les missions qui leur sont confiées. Un grand nombre de services essentiels, notamment l’éducation, les soins de santé et les pensions de retraite sont fournis à l’échelle locale, et on estime que les autorités locales financent au moins 80 % des dépenses en soins de santé de base et en éducation.

Si la quantité de subventions du Gouvernement central est importante − les transferts fiscaux (hors allégements fiscaux) du centre vers les autorités locales sont passés de 435 milliards de yuan en 2002 à 2,4 billions de yuan en 2009 − il existe encore d’importantes inégalités dans la distribution des ressources médicales et sanitaires. On estime qu’en 2005, seuls 25 % des ressources de santé publique étaient réservées aux habitants des zones rurales, alors même qu’ils représentent près de 60 % de la population totale. »54.

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3. Non-discrimination et formules servant à calculer