voir notamment : Oreopoulos, 2003 ; Duncan et Zuberi, 2006). Dans l’ensemble, on peut retenir
que les familles qui ont déménagé vers les "bons" quartiers ont connu une amélioration des
résultats et de la réussite scolaire pour les enfants, une amélioration des perspectives d’emplois
pour les parents ou les enfants plus tard (emploi trouvé, rémunérations etc.) mais aussi une
meilleure intégration sociale et une diminution du recours aux aides sociales.
– Le programme "Moving To Opportunity" (ou MTO)
Ce programme, financé par le ministère fédéral du Logement et de l’Urbanisme, a été
lancé en 1992 aux États-Unis. Il a concerné un nombre de 4 610 familles localisées dans les
cinq grandes villes suivantes : Baltimore, Boston, Chicago, New York et Los Angeles. Dans
cette expérimentation, les familles participantes sont divisées en trois groupes différents de
"traitement". Les familles du groupe expérimental (1) reçoivent des subventions ainsi qu’une
assistance pour les aider à trouver un logement. Ces subventions ne sont effectives que si les
familles se relocalisent dans des quartiers où le taux de pauvreté n’excède pas 10%. Les familles
du groupe de comparaison (2) reçoivent les mêmes subventions que le groupe précédent mais
n’ont aucune contrainte sur le choix de relocalisation. Les familles du dernier groupe, le groupe
de contrôle (3), ne reçoivent aucune aide particulière. Les participants au programme sont
pla-cés au sein des groupes par un processus de tirage aléatoire qui garantit qu’il n’y ait pas de
différence systématique entre chacun de ces groupes.
Parmi les études qui se sont intéressées aux conséquences sur le long terme d’une telle
expérience, l’une des plus citées est celle de Katzet al.(2001). Les auteurs ne distinguent que
deux groupes sur les trois créés par l’expérimentation et se concentrent sur un échantillon de
540 familles localisées dans la ville de Boston. Ils comparent les familles qui ont bénéficié des
subventions pour déménager avec celles qui n’en ont pas bénéficié. Les familles sont suivies
entre un an à trois ans après la mise en place du protocole de l’expérimentation. Les résultats
montrent que les familles dans le groupe de traitement ont une probabilité plus forte de vivre
dans un quartier avec un faible taux de pauvreté et un niveau d’éducation élevé que les familles
dans le groupe de contrôle. Elles connaissant également une amélioration de leur bien être : les
enfants et les adultes de la famille ont moins de risques ou de problèmes de santé et les risques
d’être confrontés à de la délinquance ou de la criminalité sont plus faibles. Ils ne trouvent
pas d’effet en ce qui concerne l’accès à l’emploi ou la diminution potentielle du recours aux
prestations sociales.
Klinget al.(2007) travaillent, eux, sur un échantillon de 4 248 familles issus des cinq villes
dans lesquelles l’expérimentation a été menée. Ceux-ci sont suivis depuis la date de leur entrée,
entre 1994 et 1997, jusque 2002. Les comparaisons portent sur les trois groupes. Ils
s’inté-ressent aux différences potentielles en ce qui concerne la santé mentale et physique, les
com-portements déviants, l’éducation et l’autosuffisance économique. La distinction est également
faite entre les hommes, les femmes et les deux simultanément. Dans la lignée des travaux de
Katz et al.(2001), ils ne trouvent pas d’effet significatif de cette intervention sur l’emploi ou
plus généralement sur l’autosuffisance économique. En revanche, ils trouvent des effets
posi-tifs sur l’éducation, les comportements déviants et la santé physique pour les femmes, mais ils
sont compensés par des effets négatifs pour les hommes.
Même s’ils ne nous intéressent pas directement ici, un certain nombre d’autres travaux
ont également étudié les conséquences de la mise en place du programme MTO. On peut citer
Ludwiget al.(2001) ou Klinget al.(2005) qui se sont plus particulièrement intéressés aux effets
sur la criminalité des jeunes. Ces derniers montrent que les jeunes qui ont été déplacés vers des
quartiers plus aisés ont un taux de délinquance qui a diminué de moité par rapport à celui des
jeunes qui sont restés dans leur quartier d’origine. Par exemple, le nombre d’arrestations des
jeunes est réduit de 30% à 50% pour ceux ayant bénéficié de la mesure.
Duncan et Zuberi (2006), dans leur article "Mobility Lessons from Gautreaux and Moving
to Opportunity", concluent que les succès les plus notables de la mise en place du programme
MTO concernent surtout les effets positifs sur la santé mentale. Les différents travaux évaluant
les conséquences du programme notent une baisse du risque de dépression des mères, par
exemple. Ce constat n’est pas surprenant car la plupart des familles qui décident de s’engager
dans ce programme le font pour s’éloigner des problèmes de violences, de gangs. Le fait de ne
plus résider dans ces quartiers potentiellement dangereux est une source de diminution des
soucis et joue donc sur la santé mentale.
Ils notent que le programme a été moins efficace en ce qui concerne l’amélioration de
l’auto-suffisance économique. L’un des objectifs de la mise en place du programme était d’améliorer
l’accès à l’emploi des individus, diminuer la dépendance aux prestations sociales ou encore
d’encourager la poursuite d’études des enfants dans la famille. Sur ces aspects, les résultats
semblent plutôt décevants puisque les travaux sur la question montrent que les familles ayant
bénéficié de la mesure n’ont pas une probabilité plus élevée d’être en emploi, ne gagnent pas
plus ou ne reçoivent pas moins de prestations sociales que les autres n’en ayant pas bénéficié.
1.2.2 La question de la non-linéarité des effets de voisinage
Dans cette sous-section, nous voulons montrer que les effets de quartier et en particulier
les effets de voisinage peuvent se manifester de manière non-linéaire. Il est effectivement très
probable que les effets potentiellement négatifs démontrés dans la littérature ne se produisent
qu’au delà d’un certain seuil. Cette question a déjà intéressé un certain nombre d’économistes
urbains. C’est pourquoi, dans un second temps, nous dressons une brève revue de littérature
des travaux qui ont déjà tenté de répondre à cette question.
1.2.2.1 Les effets de quartier sont-ils linéaires ?
Un certain nombre des mécanismes relatifs aux effets de quartier et déjà mentionnés dans
Dans le document
Les effets du contexte local sur l'emploi : différentes applications sur données géo-localisées
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