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Nicias, ou la superstition à l’épreuve de l’éclipse

Dans le document Séléné : éclipses, éclat et reflets (Page 113-120)

Ce qui d’ailleurs est digne de mention pour les historiographes, ce qui crée le καιρός, ce n’est pas tant l’éclipse lunaire (à mettre en l’occurrence sur le même plan que d’autres incidents comme les éclipses solaires, les séismes, la chute de la foudre, etc.) que les réactions qu’elle suscite chez les protagonistes du récit. Le to- pos de l’éclipse de lune sert de révélateur de la force ou de la faiblesse d’esprit des personnages sur qui reposent les décisions, ainsi que d’inhibiteur ou de déclencheur d’actions. La narration fait apparaître alors un contraste entre une figure rationnelle et inébranlable (celle du savant, du général éclairé, de l’historien lui-même) et une autre, superstitieuse et prompte à craindre le châtiment divin – c’est souvent le cas de la foule ignorante, mais aussi d’une certaine élite aveuglée par la piété212.

C’est ainsi que nous est parvenu, porté par une postérité tenace qui l’a irrévoca- blement associé à la débâcle athénienne en Sicile en 413 av. J.-C., le portrait quelque peu caricatural de Nicias. Au moment où les deux stratèges Nicias et Démosthène

211. Sur la lune τέκμωρ καὶ σῆμα (Hymne homérique à Séléné, 13), voir p.46sq.

212. Sur la crainte des éclipses lunaires à Rome, voir Plutarque, Paul-Émile 17, 7-10 ; et parmi les auteurs latins, Cicéron, Tusculanes I, 28, 92 ; Tacite, Annales I, 28, 1-2 (épisode en Pannonie avec les légions de Drusus).

commençaient à s’embourber dans le siège de Syracuse, et qu’il était question d’or- ganiser le retrait des troupes, celui-ci fut semble-t-il retardé pour cause de présages défavorables, notamment d’une éclipse de lune ; ce délai devait se révéler fatal pour l’armée athénienne, qui fut encerclée par les Syracusains, et dont les deux chefs furent exécutés. Le premier à relater cet épisode est Thucydide ; par la suite, sa peinture du caractère de Nicias fut reprise à leur compte par des générations entières d’historiens et de commentateurs. Καὶ μελλόντων αὐτῶν, ἐπειδὴ ἑτοῖμα ἦν, ἀποπλεῖν ἡ σελήνη ἐκλείπει· ἐτύγχανε γὰρ πασσέληνος οὖσα. Καὶ οἱ Ἀθηναῖοι οἵ τε πλείους ἐπισχεῖν ἐκέλευον τοὺς στρατηγοὺς ἐνθύμιον ποιούμενοι, καὶ ὁ Νικίας (ἦν γάρ τι καὶ ἄγαν θειασμῷ τε καὶ τῷ τοιούτῳ προσκείμενος) οὐδ’ ἂν διαβου- λεύσασθαι ἔτι ἔφη πρίν, ὡς οἱ μάντεις ἐξηγοῦντο, τρὶς ἐννέα ἡμέρας μεῖναι, ὅπως ἂν πρότερον κινηθείη. Καὶ τοῖς μὲν Ἀθηναίοις μελλήσασι διὰ τοῦτο ἡ μονὴ ἐγεγένητο.

Les préparatifs étaient faits, et on allait prendre le large, quand la lune, qui de fait était dans son plein, s’éclipsa. La plupart des Athéniens, s’en faisant conscience, demandaient aux stratèges de surseoir au départ, et Nicias, qui était enclin, et même un peu trop, à la superstition213 et

aux pratiques du même genre, déclara « se refuser même à délibérer davantage, avant qu’on eût, conformément à l’interprétation des devins, attendu trois fois neuf jours : point question de bouger avant ». De là était résulté qu’après avoir, en raison de cette circonstance, tardé à partir, les Athéniens finalement étaient restés. (Thucydide, Guerre du Péloponnèse VII, 50, 4, trad. L. Bodin et J. de Romilly.)

La responsabilité du délai fatidique (μονή) est partagée, d’où la coordination renforcée Καὶ οἱ Ἀθηναῖοι […] καὶ ὁ Νικίας ; toutefois, si Thucydide s’abstient de jugement explicite sur cette « majorité » des troupes (οἱ πλείους) qui « prend

213. Nous corrigeons ici la traduction de l’édition des Belles Lettres, qui comportait ici « qui s’adonnait, non sans quelque excès, à la divination ». Il importe de distinguer entre le θειασμός de Nicias, sa « superstition » ou sa propension à voir tout phénomène naturel comme un signe divin, et les μάντεις (« devins ») dont il s’entoure par conséquent.

à cœur » l’éclipse (ἐνθύμιον ποιούμενοι), comme s’il était prévisible qu’une foule de soldats puisse s’inquiéter d’un phénomène sortant de l’ordinaire, en revanche, concernant leur chef, Nicias, l’historien se prononce sans appel : l’attitude du stra- tège est qualifiée de θειασμός, « superstition » à laquelle il est « même un peu trop » (฀฀ ฀฀฀ ฀฀฀฀) enclin, de même qu’à « tout ce genre de choses » (τῷ τοιούτῳ), expression qui pour être vague, n’en est pas moins péjorative, et qui recouvre la soumission inconditionnelle aux prescriptions des devins, aussi longue que soit l’at- tente imposée. Cette tendance préjudiciable à interpréter un phénomène naturel, quoique peu commun, comme un message divin, est d’ailleurs rendue par un jeu de mots entre σελήνη, la lune, et σημήνῃ (« qu’on fasse signe »), dernier mot de la phrase précédente214: il s’agit bien là d’avoir perçu l’éclipse comme un signal (σῆμα).

Lorsque Polybe aborde à son tour le même épisode, il l’insère à la fin d’un développement sur les compétences et savoirs requis d’un général. Nicias, pris comme exemple de la conduite à ne pas suivre, reçoit un traitement passablement négatif.

Autre exemple, le général athénien Nicias, qui pouvait sauver [δυνάμε- νος σῴζειν] son armée devant Syracuse et avait choisi une heure ap- propriée [καιρόν] de la nuit pour tromper la surveillance ennemie en se retirant en lieu sûr ; puis une éclipse de lune [τῆς σελήνης ἐκλειπού- σης] le frappa d’une crainte superstitieuse [δεισιδαιμονήσας], comme si c’était un présage terrible [ὥς τι δεινὸν προσημαινούσης], et il différa le départ. Il n’en fallut pas plus, les ennemis étant alertés quand il procéda au départ la nuit suivante [κατὰ τὴν ἐπιοῦσαν αὐτοῦ νύκτα], pour faire tomber aux mains des Syracusains et l’armée et ses chefs. Or, s’il s’était seulement documenté sur ces questions auprès de gens compétents [πα- ρὰ τῶν ἐμπείρων ἱστορήσας], il aurait pu [δυνατὸς ἦν] ne pas laisser passer sa chance [παραλιπεῖν […] τοὺς ἰδίους καιρούς] pour une raison

214. Juste avant l’épisode de l’éclipse, Thucydide expose comment les stratèges prennent secrè- tement la décision d’abandonner le siège le plus tôt possible. L’armée reçoit donc l’instruction de se tenir prête à partir « dès qu’on lui ferait signe » (ὅταν τις σημήνῃ). Nicias se rend donc coupable ici d’avoir préféré suivre un supposé signe du ciel plutôt qu’un signal militaire et véritablement stratégique.

pareille [διὰ τὰ τοιαῦτα], et qui plus est, il aurait pu l’exploiter grâce à l’ignorance de ses adversaires [διὰ τὴν τῶν ὑπεναντίων ἄγνοιαν] ; car l’incompétence [ἀπειρία] d’autrui constitue pour les gens compétents [τοῖς ἐμπείροις] le facteur principal de la réussite. (Polybe, Histoires IX, 19, trad. R. Weil.)

On retrouve ici des éléments déjà présents chez Thucydide : la superstition, que l’historien classique appelait θειασμός (« divinisation » des phénomènes naturels) et que Polybe catégorise comme δεισιδαιμονία (« crainte divine ») ; son explication comme une surinterprétation des signes (ici, avec le verbe προσημαίνω, « annoncer, présager ») ; et son association avec « ce genre de choses » (τὰ τοιαῦτα). L’insis- tance sur la notion de καιρός, qui revient deux fois dans le passage, est cependant plus marquée ici que chez Thucydide. Ce dernier avait d’emblée présenté Nicias comme réticent à l’idée d’une retraite215 ; la décision du départ était en suspens,

et comme on l’a vu, d’autres acteurs que Nicias partageaient la responsabilité du report. Polybe, par souci didactique, fait de Nicias le seul superstitieux de l’histoire, et dramatise à loisir les événements : il concentre ainsi en l’espace de vingt-quatre heures le kairos favorable, le contretemps et le dénouement tragique, et souligne (à grands renforts d’irréel du passé et d’expressions équivalentes comme δυνάμενος ou δυνατὸς ἦν) la distance ténue qui sépare un succès d’un désastre. La morale qu’il tire de cet exemple fait tout reposer sur un savoir tiré de l’expérience : les ἔμπειροι (« experts ») ont l’avantage et peuvent même profiter de l’ἀπειρία (« inexpérience ») de leurs adversaires.

Cette polarisation est au cœur du motif de l’éclipse chez les historiens et mo- ralistes. Plusieurs siècles plus tard, on retrouve ce même récit à deux reprises chez Plutarque216. Le De superstitione, comme on pourrait s’y attendre, est encore moins

215. Thucydide VII, 49.

216. Pour des développements similaires sur Périclès, personnage qui à l’opposé de Nicias refusa de se laisser impressionner par une éclipse solaire, voir Dion 24 et Périclès 35, 2 (en 6, 1, Plutarque expliquait que la fréquentation du philosophe Anaxagore avait permis à Périclès de s’affranchir de la superstition et de la « stupeur suscitée par les phénomènes célestes », τὸ πρὸς τὰ μετέωρα θάμβος). Pour un équivalent romain, à mi-chemin entre les figures du savant et du superstitieux, voir Paul-Émile 17, 7-10.

tendre avec Nicias que ne l’était Polybe. Ἦν δ’ ἴσως καὶ Νικίᾳ τῷ Ἀθηναίων στρατηγῷ κράτιστον οὕτως ἀπαλ- λαγῆναι τῆς δεισιδαιμονίας ὡς Μίδας ἢ Ἀριστόδημος ἢ φοβηθέντι τὴν σκιὰν ἐκλιπούσης τῆς σελήνης καθῆσθαι περιτειχιζόμενον ὑπὸ τῶν πο- λεμίων, εἶθ’ ὁμοῦ τέτταρσι μυριάσιν ἀνθρώπων φονευθέντων ἢ ζών- των ἁλόντων ὑποχείριον γενέσθαι καὶ δυσκλεῶς ἀποθανεῖν. Οὐ γὰρ γῆς ἀντίφραξις ἐν μέσῳ γενομένης φοβερόν, οὐδὲ δεινὸν ἐν καιρῷ πε- ριόδων σκιᾶς πρὸς σελήνην ἀπάντησις, ἀλλὰ δεινὸν τὸ τῆς δεισιδαιμο- νίας σκότος ἐμπεσὸν τοῦ ἀνθρώπου συγχέαι καὶ τυφλῶσαι λογισμὸν ἐν πράγμασι μάλιστα λογισμοῦ δεομένοις.

Et peut-être pour Nicias aussi, le général athénien, le mieux aurait-il été de se débarrasser de sa superstition par le même moyen que Midas ou Aristodème217 plutôt que de s’effrayer de l’ombre produite par une

éclipse de lune et de se laisser sans bouger investir par l’ennemi, puis, en même temps que quarante mille hommes furent tués ou pris vivants, de tomber entre ses mains et de subir une mort sans gloire. En effet l’in- terposition de la terre entre le soleil et la lune n’a rien d’effrayant, ni de terrible la rencontre de l’ombre de la terre avec la lune à un moment dé- terminé de leurs révolutions ; mais ce qui est terrible, ce sont les ténèbres de la superstition bouleversant et aveuglant la raison de l’homme qui y succombe dans des circonstances où la raison serait au plus haut point nécessaire. (Plutarque, De superstitione 8 (= 169A), trad. J. Kefradas et R. Klaerr.)

Faisant montre d’une parfaite connaissance des causes physiques de l’éclipse, due à l’ombre de la terre interposée entre le soleil et la lune, Plutarque se met en po- sition de condamner la terreur irrationnelle de Nicias, qui aurait mieux fait de se donner la mort que de causer celle de tant d’autres par sa superstition (le terme de δεισιδαιμονία apparaît à deux reprises, au début et à la fin du passage). La métaphore filée oppose l’image du σκότος (« obscurantisme ») de la superstition

217. Deux personnages précédemment cités par Plutarque, et qui se sont suicidés par désespoir face à de mauvais présages.

à la σκία (« obscurité, ombre ») réelle et naturelle de la terre qui voile la lune, le premier type de ténèbres étant bien plus insidieux et redoutable que le second. Une autre antithèse distingue la δεισιδαιμονία du λογισμός (« raisonnement ») qui doit triompher de celle-ci chez l’homme de jugement.

Dans ses Vies parallèles, où Plutarque traite du même problème, la causalité déjà établie par Polybe entre « ignorance » (ἀπειρία) et « superstition » (δεισιδαιμο- νία) donne lieu à tout un développement épistémologique sur l’évolution du savoir astronomique depuis l’époque classique.

Tout était prêt, et personne parmi les ennemis n’y prenait garde (car ils ne s’attendaient à rien de tel), lorsque se produisit pendant la nuit une éclipse de lune [ἐξέλιπεν ἡ σελήνη]. Cette éclipse inspira une grande terreur [μέγα δέος] à Nicias et à tous ceux qui, par ignorance ou su- perstition [ὑπὸ ἀπειρίας ἢ δεισιδαιμονίας], s’effrayaient de ces sortes de phénomènes [τὰ τοιαῦτα]. À cette époque, la plupart des gens [οἱ πολλοί] comprenaient déjà plus ou moins bien que l’obscurcissement du soleil [τοῦ…ἡλίου…ἐπισκότησιν], qui peut avoir lieu vers le trentième jour du mois, provient de la lune ; mais, pour la lune elle-même, alors qu’elle est dans son plein, par suite de quelle rencontre et comment elle perd soudain sa clarté [πῶς αἰφνίδιον ἐκ πανσελήνου τὸ φῶς ἀπόλλυ- σι] et passe par toutes sortes de teintes, voilà ce qu’il n’était pas facile de comprendre [οὐ ῥᾴδιον ἦν καταλαβεῖν] ; aussi y voyait-on un phéno- mène extraordinaire et comme un signe précurseur de grandes calamités, envoyé par les dieux [ἐκ θεοῦ γινόμενον σημεῖον]. Le premier de tous à avoir traité par écrit des phases [καταυγασμῶν καὶ σκιᾶς] de la lune avec beaucoup de netteté et de hardiesse, à savoir Anaxagore, n’était pas lui-même bien ancien à cette date, et son ouvrage, loin d’être ré- pandu dans le public, était encore tenu secret et circulait entre un petit nombre d’initiés qui ne le communiquaient qu’avec circonspection et à des personnes sûres. En effet on ne supportait guère les physiciens ni ceux qu’on appelait les « météorologues », parce qu’en rapportant tout à des causes dépourvues de raison, à des forces aveugles et à des évé-

nements nécessaires, ils sapaient la puissance divine [διατρίβοντας τὸ θεῖον]. C’est ainsi que Protagoras fut exilé, qu’Anaxagore, jeté en pri- son, ne fut sauvé qu’à grand’ peine par Périclès, et que Socrate, tout étranger qu’il était à ce genre de recherches, mourut cependant pour crime de philosophie. Plus tard, la doctrine de Platon, qui reçut un vif éclat [ἐκλάμψασα] de la conduite de ce grand homme, et aussi du fait qu’elle subordonnait aux principes divins et souverains [ταῖς θείαις καὶ κυριωτέραις ἀρχαῖς] le déterminisme du monde physique [τὰς φυσικὰς ἀνάγκας], dissipa les préventions contre ces études et ouvrit à tous la voie des sciences. (Plutarque, Nicias, 23, 1-5.)

La comparaison qu’établit Plutarque entre la compréhension assez extensive de l’éclipse solaire et celle, moins assurée, de l’éclipse lunaire, propose un élément de rationalisation de la peur de Nicias et de la « majorité » (οἱ πολλοί) superstitieuse. En effet, durant une éclipse solaire, qui advient à la nouvelle lune, on peut voir clai- rement le corps sphérique et sombre de la lune passer devant le soleil et l’occulter momentanément, alors que dans le cas d’une éclipse lunaire, on assiste inopinément au changement progressif de couleur qui amène la pleine lune de son état le plus brillant à son apparence la plus sombre – cette teinte sanglante caractéristique ne peut que contribuer, d’ailleurs, à un pressentiment de violence et de mort. L’ombre de la Terre ne se dessine pas sur la lune, son contour n’est pas perceptible et il est d’autant plus difficile de déterminer ce qui provoque cet assombrissement : pour en avoir une idée claire, il faut non seulement avoir compris d’où vient la lumière de l’astre nocturne, mais aussi être capable de se figurer la planète sur laquelle nous vivons comme un objet opaque capable de faire écran entre le soleil et la lune.

Mais l’aspect le plus intéressant de ce texte est le parti-pris idéologique de Plu- tarque, celui du progrès, déjà présent dans l’historiographie thucydidéenne (notam- ment avec l’archéologie de la Grèce dans le premier livre de la Guerre du Pélopon- nèse) et appliqué ici aux connaissances astronomiques et météorologiques. L’auteur procède à une reconstruction narrative, définissant une chaîne de savoir idéal218 du

218. Sur ces reconstructions d’une évolution fictive du savoir, que l’on observe par exemple dans les généalogies chez Diogène Laërce, voir Delattre2006b.

Ve siècle à l’époque impériale et faisant de la science des éclipses219 la base évolu-

tive du rapport entre le savoir humain et la puissance divine. Ainsi, une première étape correspond à Nicias et à la superstition généralisée d’une époque où, faute de comprendre les éclipses lunaires aussi bien que les éclipses solaires, on les prenait comme un signe (σημεῖον) divin220 ; la deuxième, concomitante, est marquée par

l’émergence de savants controversés (Anaxagore, Protagoras, Socrate) accusés de détruire le rôle du divin dans leurs explications des phénomènes physiques ; enfin vient Platon, qui réussit à harmoniser les causes divines (θείαι ἀρχαί) et les néces- sités de la nature (φυσικαὶ ἀνάγκαι). Il n’est pas anodin que le rayonnement de la doctrine platonicienne, dont Plutarque se fait l’écho, soit traduit ici par le verbe ἐκλάμπω (« briller »), à la fois antonyme et homophone de ἐκλείπω (« s’éclipser »). L’éclipse de lune est en effet par excellence le révélateur et la pierre de touche de la superstition ou de l’expertise, mais elle en est aussi le symbole : là où elle plonge les gens impressionnables dans l’obscurité de l’ignorance221, elle donne aux plus grands

savants l’occasion de briller.

Dans le document Séléné : éclipses, éclat et reflets (Page 113-120)