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que représente la phase larvaire, à savoir les concepts de transport, de dispersion

larvaire et de connectivité, qui font l’objet des travaux de Pineda et al. (2007). Un

grand nombre de facteurs sont à prendre en compte pour décrire les mouvements des

larves libérées dans le milieu, les plus importants étant les forces physiques locales

(marées, courants, vent...) et le comportement des larves (nage, activité dans la

colonne d’eau...). Différents niveaux d’intégration spatiaux et temporels permettent

ainsi de définir les trois grands concepts précédemment cités (voir figure 15.2). Le

transport larvaire désigne la translocation horizontale du nuage de larves d’un point

A à un point B et prend en compte le transport physique lié aux masses d’eau et

le comportement larvaire. La dispersion larvaire, quant à elle, décrit un transport

larvaire associé aux capacités de survie, de frai et de recrutement des larves. Enfin,

la connectivité implique la connaissance de la survie post-recrutement des larves

et de leur futur accès à la reproduction et rend compte des échanges d’individus

entre populations subdivisées (Pineda et al. 2007). Comprendre la dispersion larvaire

d’une espèce en milieu marin requiert ainsi principalement une bonne appréhension

des courants et autres forces physiques génératrices de mouvements dans la colonne

d’eau, vecteurs principaux d’entrainements des larves planctoniques dont la capacité

de nage reste limitée. Cependant, leur comportement constitue également un facteur

capital dans la mesure où une grande majorité des larves, notamment les larves de

décapodes, sont capables de réguler leur profondeur en fonction de divers paramètres

et subissent ainsi l’influence de différents courants.

15.2 Necora puber, un potentiel de dispersion

im-portant

Notre étude de la dispersion larvaire a pour objectif principal d’expliquer les

schémas de structuration génétique de Necora puber à l’échelle européenne. Même

si les capacités de dispersion à l’âge adulte sont relativement peu documentées chez

les portunidés, certaines espèces sont connues pour envoyer des migrants sur de

très grandes distances (Callinectes sapidus peut notamment parcourir des centaines

de kilomètres (Aguilar et al. 2005)). Cependant, en dépit de la cinquième paire de

pattes aplatie permettant un comportement de nage chez l’espèce, il semble peu

probable que les échanges mis en évidence soient imputables aux individus adultes

qui, quoique mobiles, restent plutôt, à priori, inféodés à une localité précise14.

En ce sens nous nous sommes intéressés au potentiel de dispersion larvaire de

14. les données de Combes (2002) obtenues par une expérience de marquage-recapture, font état

d’individus adultes retrouvés à moins de 200m de leur lieu de première capture.

Chapitre 15. Dispersion larvaire en milieu marin

Figure 15.2 – Représentation schématique des concepts de transport larvaire, de

15.2. Necora puber, un potentiel de dispersion important

Figure15.3 – Morphologie des différents stades larvaires de Necora puber. Source :

Wilhelm (1995)

l’espèce. L’étrille se classe, en effet, dans la catégorie des organismes à fort

poten-tiel dispersif en raison de sa phase de vie larvaire longue (elle peut durer jusqu’à

6 semaines) et pélagique (larves planctonotrophes). Cette phase larvaire se

décom-pose en 5 stades zoés et un stade mégalope (la morphologie détaillée est présentée

en figure 15.3), chacun d’entre eux présentant une durée plus ou moins longue en

rapport avec les conditions de température et de salinité du milieu (le temps de

développement est par exemple de 7 jours entre la 1re et la 2e zoé pour une

tempé-rature de 15˚C et peut être réduit à 4 jours pour une tempétempé-rature de 25˚C). D’un

point de vue comportemental, les connaissances portant sur ces larves sont limitées

Chapitre 15. Dispersion larvaire en milieu marin

à la description des différents stades larvaires (Wilhelm 1995), à quelques

estima-tions des effets abiotiques sur leur temps de développement (Mene et al. 1991; Lee

et al. 2006), ou encore au comportement de recrutement des mégalopes en fonction

des cycles de marées et de leur position dans la colonne d’eau (Lee et al. 2004) (les

conditions de recrutement sont décrites dans la figure 15.4). En ce qui concerne leur

capacité de déplacement, il apparaît que les larves, en dépit de leur capacité active de

nage, ne sont généralement pas capables de maintenir une vitesse de nage supérieure

à celle des courants, soulignant l’importance des procédés physiques de circulation

océanique pour le transport larvaire. Toutefois, même si ce comportement n’a pour

le moment pas été étudié chez l’étrille, les larves de décapodes présentent

commu-nément un comportement de migrations verticales dépendantes de la période de la

journée, les migrations nycthémérales. Ce mécanisme se traduit par des variations

de profondeurs "volontaires" du nuage de larves vers les eaux profondes pendant

le jour pour se protéger des prédateurs et vers la surface la nuit pour se nourrir.

Ces modifications de profondeur régies par le comportement des larves impliquent

ainsi la rencontre au cours des changements de profondeur de différentes directions

et vitesses de courant, influençant ainsi les distances de dispersion et les lieux de

recrutement.

Il est de fait, particulièrement difficile d’appréhender les mouvements de ces

par-ticules actives dans les masses d’eau et de prédire avec précision leur lieu d’émission,

les trajets effectués ou leur lieu de recrutement. Nous nous sommes ici intéressés à

leur composante de dispersion passive dans le milieu, afin d’obtenir une estimation

des distances maximales potentiellement parcourues et des éventuelles particularités

de recrutement en relation avec les schémas de structure populationnelle

précédem-ment mis en évidence.