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La seconde étude porte sur le comportement de la poutre mixte soumise à un moment négatif dans une configuration de nœud extérieur. L'accent est mis sur les résultats des analyses non linéaires.

V.5.1. Description des configurations étudiées

M < 0

poutre transversale colonne

extérieure

dalle poutre longitudinale

configuration

n°2-configuration n°1- configuration

n°3-poutre de rive en béton

armé

configuration

n°4-Figure V.5.1 Configurations de nœuds en Té sous moment négatif

Quatre configurations possibles de nœuds poutre-colonne mixtes extérieurs avec dalle dont la poutre doit reprendre un moment négatif sont schématisées à la figure V.5.1. Elles ont les caractéristiques particulières suivantes :

- configuration n°1- : dalle arrêtée devant la colonne.

- configuration n°2- : présence d’une poutre de rive en béton armé, absence de poutre transversale. Ce cas correspond au cas étudié dans l’Eurocode 4 où la traction des armatures longitudinales est reprise dans la poutre de rive par compression du béton sur la semelle de la colonne, compression inclinée équilibrée par de la traction dans des armatures transversales.

- configuration n°3- : absence d’une poutre de rive en béton armé, présence d’une poutre transversale à laquelle sont ancrées les armatures longitudinales. Le transfert des efforts membranaires de la dalle (celui des armatures) se fait uniquement via la poutre transversale.

- configuration n°4- : présence d’une poutre de rive en béton armé et présence d’une poutre transversale. Ce dernier cas n’a pas été testé, car il n'a guère d'intérêt en pratique. De même que pour le nœud soumis à moment positif, la poutre transversale jouera un rôle d’autant plus grand que sa raideur sera grande vis-à-vis de la raideur du mécanisme de compression directe de la poutre de rive sur la semelle de la colonne. Maximisée, la poutre transversale doit pouvoir soulager l’effort de compression directe de la poutre de rive en béton armé sur la semelle de la colonne et retarder un écrasement éventuel du béton.

Les configurations sont indicées "-" pour les différencier des configurations traitées au chapitre V.4. consacré au nœud extérieur dont la poutre est soumise à un moment positif.

V.5.2. Etude non linéaire des configurations 1- et 2-

Les fonctionnements des configurations 1- et 2- sont supposés connus. La configuration 1- devrait plus ou moins correspondre au cas où l’on n’a pas de dalle. La configuration 2- a été largement étudiée dans le domaine des structures mixtes soumises à sollicitations verticales et au vent (contexte Eurocode 4). Nous voulions voir ce que notre modèle nous permettait d’obtenir pour ce type de configuration.

La poutre longitudinale testée est la poutre dite ductile du chapitre précédent, à savoir une poutre métallique IPE300 de limite d’élasticité fy = 300 N/mm², une dalle de 120 mm d’épaisseur de résistance à la compression fc = 30 N/mm² et de résistance à la traction ft = 3 N/mm². Les armatures longitudinales et transversales (de base) correspondent à un treillis φ10x150x150 (coque équivalente d’épaisseur 0.524 mm), et les armatures transversales additionnelles placées dans la poutre de rive correspondent à 3 barres de diamètre 10 mm réparties sur une coque de 123.75 mm de large, soit une épaisseur équivalente de 1.9 mm.

Leur limite d’élasticité vaut fs = 500 N/mm².

On teste 2 ensembles de conditions aux limites au niveau de l’appui de la dalle sur la colonne.

Le premier considère qu’il n’y a pas de béton à l’intérieur des ailes de la colonne et l’effort de dalle passe uniquement par la compression sur la semelle de la colonne du béton de la poutre de rive. Le second considère le béton à l’intérieur des ailes de la colonne et permet un transfert d’effort via les 2 semelles de la colonne. Le calcul est limité à un déplacement imposé en tête de colonne de 10 cm, soit une rotation d’environ 0.03 rad.

La figure V.5.2. donne les courbes moment – rotation des poutres mixtes des configurations 1- et 2- soumises à moment négatif.

Comportement de la poutre avec dalle arrêtée devant la colonne (config1-)

On compare la courbe obtenue pour le nœud acier seul et la courbe de la poutre mixte avec dalle arrêtée devant la colonne. Les valeurs des moments maximum numériques et des raideurs globales des poutres sont reprises et comparées au tableau V.5.1.

Tableau V.5.1 Comparaison des moments maximum numériques et de la raideur entre la poutre métallique et la poutre mixte dont la dalle n’appuie pas sur la colonne (sous moment négatif)

Mmax num

KNm Κ

kNm/rad

Comparaison 1/0 M Κ Config0 Acier seul 197 20492

Config1- Mixte non actif 203 27310 1.03 1.33

Très logiquement, la dalle non fissurée en début de chargement influence la raideur de la poutre, qui est supérieure de 33 % à la raideur de la poutre métallique seule. La dalle joue un rôle de tension stiffening pour les armatures. Quand la charge croît, la fissuration augmente et l’on n’atteint pas une résistance très supérieure à la résistance de la poutre métallique seule (3

%).

Dans le cas où la dalle est arrêtée devant la colonne, donc non activée sous moment négatif, on considère que la poutre atteint un moment plastique de calcul maximum égal au moment plastique de la poutre métallique seule. En ce qui concerne l’augmentation de la raideur la poutre, nous pensons qu’il ne faut pas en tenir compte. En effet, dans les modélisations, 2 paramètres maximisent le "tension stiffening" : la dalle initialement parfaite et non fissurée et l'adhérence parfaite entre armatures et béton. Dans la réalité, la dalle peut être fissurée, car le séisme peut intervenir après que le bâtiment ait déjà été soumis à d’autres charges qui peuvent provoquer une fissuration de la dalle. Dans la réalité, le glissement des armatures par rapport au béton réduirait l'accroissement de raideur. Ces deux raisons nous poussent à croire qu’il est du côté de la sécurité de ne pas considérer cet apport de raideur dû à la dalle dans le cas d’une dalle mixte non active sous moment négatif.

-300 -250 -200 -150 -100 -50 0

0 0,01 0,02 0,03

rotation de la poutre (rad)

Momentgatif (kNm)

MRd mixte (6φ10) MRd acier

nœud acier seul

dalle arrêtée devant la colonne

poutre de rive - pas de béton à l'intérieur de la colonne poutre de rive - béton à l'intérieur de la colonne

Figure V.5.2. Courbes moment – rotation de la poutre mixte des configurations 1- et 2- soumise à moment négatif.

Comportement de la poutre avec poutre de rive en béton armé (config2-) Dans ce cas, on compare 2 circonstances de calcul :

-pas de béton intérieur aux ailes de la colonne - béton intérieur aux ailes de la colonne

Pour le dimensionnement sous moment négatif, les résistances sont estimées sur base de sections entièrement fissurées.

Dans une largeur effective calculée sur base de l’Eurocode 4 et qui vaut

b-eff = 2 Lconsole

4 = 1.25 m, on a 6 barres de diamètre 10 mm.

Il y correspond un moment plastique mixte MRd mixte(6φ10) = 232 kNm

Les moments plastiques numériques sont trouvés à l’intersection entre la droite de comportement élastique et une droite d’écrouissage, l’allure des courbes moment – rotation pouvant être approchée sans grande erreur par des courbes bi-linéaires. On reprend aussi les moments maximum obtenus pour le déplacement imposé maximal de 10 cm. On obtient la comparaison entre les différents calculs au tableau V.5.2. suivant :

Tableau V.5.2 Comparaison des moments plastiques numériques et du moment résistant de calcul des poutres mixtes avec poutre de rive.

Colonne Mnum

(Dimp = 0.1 m)

Mplas num

(intersection bilin)

MRd mixte

/Mplasnum

Pas de béton intérieur 264.4 250 0.93

Béton intérieur 277.4 260 0.90

Sans béton à l’intérieur des semelles de la colonne, le moment plastique numérique vaut approximativement 250 kNm, valeur légèrement sous-estimée par la largeur effective de l’Eurocode 4 qui donne un moment de dimensionnement de 232 kNm.

Avec du béton à l’intérieur des semelles de la colonne, le moment plastique numérique atteint 260 kNm, soit 4 % de plus que le moment atteint sans béton intérieur aux ailes de la colonne.

Notre préoccupation est de comprendre la différence entre les 2 comportements. Pour ce faire, on trace à la figure V.5.3. les croix de contraintes dans le plan moyen de la dalle et, à la figure V.5.4, les contraintes dans les armatures longitudinales pour un déplacement imposé en tête de colonne de 100 mm pour les 2 conditions aux limites, et on compare les 2 comportements.

Figure V.5.3. Vue des croix de contraintes dans le plan moyen de la dalle. Superposition des contraintes dans le béton, dans les armatures longitudinales et dans les armatures transversales de la poutre de rive.(cas des armatures transversales éloignées de la colonne)

(a) conditions aux limites avec béton dans les ailes de la colonne (b) conditions aux limites sans béton dans les ailes de la colonne

(a) (b)

Figure V.5.4. Contraintes dans les armatures. Localisation de la plastification en fonction des conditions limites à la colonne.(bleu : σxx = 0 ; rouge : σxx > fy = 500 N/mm²)

(a) conditions aux limites avec béton dans les ailes de la colonne (b) conditions aux limites sans béton dans les ailes de la colonne

Dans le cas où il n’y a pas de béton intérieur aux ailes de la colonne, les armatures développent leur effort maximal de traction dans la bande d’éléments la plus proche de la semelle extérieure de la colonne, où ces tractions sont équilibrées par des compressions (figure V.5.3 (b) et V.5.4 (b)).

Dans le cas où il y a du béton intérieur, les bielles de béton comprimé sont présentes sur les côtés latéraux de la colonne et les armatures longitudinales incluses dans ces bielles comprimées sont peut tendues. Elles développent leur effort maximal de traction dans la bande d’éléments la plus proche de la semelle intérieure de la colonne. La traction des armatures ne se transmet quasi pas dans la dalle de rive. Une grande partie de l’effort (44 %) est transmis par compression du béton sur la semelle intérieure de la colonne.

Une limitation du modèle est de nouveau mise en évidence dans ces modélisations : les armatures sont supposées totalement adhérentes au béton.

En réalité, la barre transmet l’effort par adhérence, ce qui demande une certaine longueur, alors que dans la modélisation, l’effort se transmet quasi instantanément à l’endroit où il est produit. Les mécanismes de bielles comprimées n’apparaissent pas si le béton n’est pas entièrement fissuré en traction, et d’autres transferts d’efforts apparaissent.

On peut aussi se demander si le transfert de la traction dans les armatures via une compression à l’intérieur de la colonne est réellement possible.

Dans la réalité, les armatures vont développer progressivement leur effort maximal et s’ancrer dans la poutre de rive. Si le dimensionnement des armatures est tel qu’elles plastifient avant écrasement du béton, comme le design EC4 le préconise, la compression sur la semelle extérieure de la colonne est suffisante pour équilibrer les tractions longitudinales dans les armatures. Si on met plus d’armatures longitudinales, l’effort supplémentaire peut être repris par de la compression sur la semelle intérieure de la colonne. Cependant, comme la plastification de la section est déterminée par la plastification de la poutre métallique, on va soulager la dalle sans améliorer de manière importante le comportement global de la poutre.

Le risque est même de le fragiliser. En effet, donner une plus grande résistance à la dalle

(a) (b)

équivaut à augmenter l’effort transmis par cette dalle, et donc relever l’axe neutre plastique de la section de poutre mixte. En relevant l’axe neutre, on augmente l’élancement de l’âme du profilé métallique en compression et on augmente le risque de voilement de l’âme. Ce problème d’instabilité n’a pas été traité dans les modélisations.

Les résultats obtenus avec la modélisation test invitent à une certaine prudence en ce qui concerne les résultats locaux d'efforts dans les armatures et les fissurations dans le béton.

Alors que globalement les courbes moment-rotation sont proches (4 % de différence), que l'on ait ou non du béton entre les ailes de la colonne, l'analyse des résultats locaux conduit à positionner la fissuration dans des zones différentes dans les deux cas et à minimiser le rôle de la poutre de rive dans le cas où l'on a du béton dans les ailes de la colonne. Cela ne correspond pas à la réalité ou, en tout cas, aucun résultat expérimental ne confirme ce résultat.

V.5.3.Etude non linéaire de la configuration 3-

Dans le nœud extérieur de la configuration 3-, on assure le transfert d'un moment négatif mixte de la poutre principale à la colonne par une poutre transversale. On étudie l'influence des paramètres suivants :

-caractéristiques de la poutre transversale -propriétés de la dalle et du béton en traction -armatures longitudinales

Les problèmes de conditions aux limites au niveau de la colonne ne se posent pas ici : dans le cas d’une poutre transversale seule, les armatures sont "accrochées" physiquement aux goujons et le seul transfert d’effort possible de la dalle vers la colonne se fait par le biais de la poutre transversale et non par transfert direct à la colonne. Cependant, alors que le calcul de moment résistant ne tient pas compte du béton, on verra que dans la modélisation, le béton influence la courbe moment - rotation.

On traite 7 cas :

(1) Cas de base : poutre transversale avec parois où tf=10.2 mm et bf=135 mm ; 7 goujons autour de la colonne (simple concentration) ; dalle d’épaisseur 12 cm et de résistance à la traction ft = 3 N/mm²

(2) Cas de base, mais dalle d’épaisseur 12 cm et de résistance à la traction ft = 3 N/mm² et de déformation ultime très faible

(3) Cas de base, mais dalle d’épaisseur 2.4 cm et de résistance à la traction ft = 3 N/mm² (4) Cas de base, mais double concentration goujons autour de la colonne

(5) poutre transversale avec paroi d'épaisseur double de semelle (tf=20.4 mm, bf=135 mm) ; concentration de goujons égale au double du cas de base - dalle d’épaisseur 12 cm et de résistance à la traction ft = 3 N/mm² ;

Aslong1 = 0.524 mm²/m = référence ρ1x = 0.44 % (6) cas n°5 avec Aslong2 = 1.048 mm²/m = 2*référence ρ2x = 0.88 % (7) cas n°5 avec Aslong3 = 0.262 mm²/m = .5*référence ρ3x = 0.22 %

Comportement global

Les figures V.5.5. à 7 donnent les courbes moment – rotation des poutres mixtes des configurations 3- soumises à moment négatif. La poutre mixte définie dans les modélisations concentre la plastification dans la poutre métallique. L’allure de la courbe de comportement global est gouvernée par cette plastification. Les résultats locaux indiquent une amélioration

de résistance au niveau de la dalle si l’on profite d’une poutre transversale plus rigide et plus résistante, ou si l’on considère une dalle plus résistante, ou si le pourcentage d’armature longitudinale est plus élevé, mais la courbe de comportement global est peu modifiée. La faible augmentation relative de résistance lorsqu'on passe du cas 1 aux différents autres cas est liée au fait que la poutre est dimensionnée pour dissiper l’énergie dans la partie métallique de la poutre mixte. C'est donc la plastification de la poutre qui définit l'allure générale des courbes moment - rotation. L'amélioration des possibilités de transfert des efforts membranaires de dalle n'apporte pas dans ce cas une grande augmentation du moment résistant des poutres.

La figure V.5.5. confirme les résultats obtenus sous moment positif. Plus la poutre transversale est raide et résistante, plus elle est efficace dans le transfert des efforts de la dalle vers la colonne. Par rapport à la poutre transversale à simples parois et simple concentration de goujons, doubler la concentration de goujons près de la colonne (70 cm) augmente le moment plastique numérique de 2 %, ce qui est négligeable. Doubler la concentration de goujons près de la colonne (70 cm) et doubler l'épaisseur des parois de la poutre transversale permet d'augmenter le moment plastique numérique de 5 %, ce qui reste faible.

-300

0 0.005 0.01 0.015 0.02 0.025 0.03 rotation de la poutre (rad)

Figure V.5.5. Courbes moment – rotation de la poutre mixte de la configuration 3- soumise à moment négatif. Influence de la poutre transversale –dalle 12 cm, ft = 3 N/mm²

La figure V.5.6. met en évidence l’importance de la résistance du béton à la traction. Sans cette résistance, la transmission des tractions des armatures ne peut se faire correctement.

C’est pourquoi on observe des différences de comportement de la poutre mixte lorsque les caractéristiques des dalles de béton sont différentes. Plus la dalle de béton est importante et résistante à la traction, plus la poutre mixte est caractérisée par un moment résistant important. Au moment du séisme, la dalle peut être intacte ou avoir déjà subi quelque endommagement. Lorsque la dalle est intacte (et c’est le cas aussi des dalles des poutres traitées dans les essais), la valeur proposée pour la largeur effective plastique sous moment négatif et le moment plastique négatif correspondant concordent bien aux courbes numériques obtenues. Dans le cas d’une dalle fissurée, cette valeur de moment plastique conduit à surestimer la résistance de la poutre mixte sous moment négatif.

(1)

(4)

(5)