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III. La régulation de la masse du muscle squelettique

III.3. Le catabolisme protéique

III.3.5. La myostatine

La myostatine, aussi connue sous le nom de GDF-8 (Growth differentiation factor 8) est un

membre de la famille GDF, elle-même sous-groupe de la famille des facteurs de croissance TGF β

(Transforming Growth Factors β). C’est une glycoprotéine exprimée spécifiquement par le muscle

squelettique (Elkasrawy et al., 2010). La liaison de la myostatine à son récepteur transmembranaire,

l’activine de type II (ActRII), provoque un recrutement et une activation par phosphorylation des ALKs

4 et 5 (Activine receptor Like Kinases) qui sont des récepteurs de l’activine de type I (ActRI) (Figure 22).

L’activation de ces récepteurs entraîne la phosphorylation des protéines SMAD2 et SMAD3 ; une fois

phosphorylées, les SMAD 2 et 3 s’associent pour former un complexe avec SMAD4. Ces protéines

SMAD activées ont la faculté de se transloquer dans le noyau afin d’activer et inhiber un certain

nombre de gênes cibles contrôlant l’homéostasie protéique (Figure 22). La myostatine est un puissant

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régulateur négatif de la croissance et de la masse musculaire squelettique (Rodriguez et al., 2014 ;

Sandri et al., 2008). L’augmentation de son expression a été observée lors de conditions

physiopathologiques conduisant à une perte importante de la masse musculaire, alors que son

invalidation génétique entraîne une hypertrophie musculaire à outrance (Parsosn et al., 2006 ;

Schuelke et al., 2004). L’étude des mécanismes de signalisation de la myostatine a permis de la

considérer comme un régulateur clé dans l’homéostasie protéique du muscle squelettique (Rodriguez

et al., 2014).

Figure 22 : Schéma de la voie de signalisation de la myostatine.

La myostatine a la capacité de réguler l’expression de gènes cibles directement impliqués dans

le contrôle de la prolifération et de la différenciation des cellules musculaires. En présence de

myostatine, les myoblastes C2C12 montrent une réduction de leur capacité proliférative (Taylor et al.,

2001). La myostatine entraîne une stabilisation des cellules satellites dans leur état de quiescence

provoquant une réduction importante du nombre de myoblastes (McFarlane et al., 2008). Au

contraire, les cellules musculaires présentant une suppression du gène codant pour la myostatine

observent une hausse de la prolifération des myoblastes (McCroskery et al., 2003). En plus de

l’inhibition de la prolifération, la myostatine module négativement l’étape de différenciation

myogénique, étape où les myoblastes fusionnent entre eux afin de former des myotubes matures. La

surexpression de la myostatine dans des cellules C2C12 engendre une modulation négative des

facteurs régulateurs spécifiques de la myogenèse, tels que Pax7, MyoD et la myogénine, facteurs

primordiaux à la différenciation et à la maturation des cellules musculaires (Amthor et al., 2006 ;

Durieux et al., 2007 ; Langley et al., 2002 ; McFarlane et al., 2008) (Figure 23). À l’inverse, les souris

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masse musculaires comparativement à leurs homologues non traitées (Whittemore et al., 2003),

associées à une hausse de la phosphorylation des protéines P70S6K et 4E-BP1 (Welle et al., 2009). Ces

données démontrent que la myostatine agit en tant que régulateur négatif de la croissance et de la

maturation du muscle squelettique, et suggèrent que la suppression de la myostatine aurait pour

conséquence l’absence d’un rétro-contrôle négatif à l’hypertrophie musculaire.

Figure 23 : La voie de la myostatine dans la régulation de l’homéostasie protéique (d’après Sartori et al., 2014).

Au-delà de son implication dans la myogenèse, la myostatine joue également un rôle

important dans la régulation de la voie de synthèse des protéines PI3K / Akt / mTOR (Amirouche et al.,

2008 ; Glass, 2010 ; Li et al., 2008 ; Trendelenburg et al., 2009) (Figure 23). On observe chez des souris

présentant une absence de myostatine des muscles squelettiques hypertrophiés associés à une

augmentation de l’activation des protéines Akt et mTOR (Morissette et al., 2009). Au contraire, la

surexpression de la myostatine chez le rat agit comme un régulateur négatif de plusieurs protéines de

la voie de synthèse, avec une diminution de la phosphorylation d’Akt, de P70S6K et de 4E-BP1

(Amirouche et al., 2008). Lors d’une étude in vitro effectuée à partir de cellules musculaires issues de

souris knock-out de la myostatine, l’analyse morphologique révèle une augmentation significative du

diamètre des myotubes associée à une activation plus importante des protéines Akt, mTOR et P70S6K

(Rodriguez et al., 2011). En revanche, le traitement des myotubes par la myostatine entraîne une

diminution de leur diamètre (McFarlane et al., 2006). L’ensemble de ces données suggèrent que la

délétion ou la surexpression de la myostatine joue un rôle prépondérant dans la régulation de

l’homéostasie protéique. De plus, chez l’homme, il a été rapporté que la pratique d’un exercice de

résistance, connu comme étant l’une des modalités d’entraînement permettant d’engendrer un

maximum d’hypertrophie musculaire, entraîne une diminution de l’expression de l’ARNm codant pour

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Si un rôle d’inhibiteur de la synthèse protéique est donné à la myostatine, son action vis-à-vis

des voies protéolytiques reste encore controversée. Allen et Unterman ont mis en évidence dans des

cellules musculaires en culture que la myostatine contenait des sites de liaison spécifique à FoxO1

(Allen & Unterman, 2007), alors que d’autres chercheurs mettent en avant une activation indirecte de

FoxO par l’intermédiaire de l’inhibition de la protéine Akt (Elkina et al., 2011 ; McFarlane, et al., 2006)

(Figure 23). Toujours dans un modèle de cellules musculaires C2C12 en culture, il a été démontré que

la myostatine conduit à une inhibition de la voie PI3K / Akt / mTOR, à l’activation de FoxO1 et à

l’augmentation de l’expression de MAFbx et MuRF-1 (McFarlane et al., 2006). A l’inverse, des souris

déficientes en myostatine montrent une diminution de l’expression de MAFbx et MuRF-1, suggérant

une baisse concomitante de l’activité du système ubiquitine-protéasome (Gilson et al., 2007).

Combinées, ces données indiquent que la myostatine régule négativement l’activité de la voie

PI3K / Akt / mTOR et agit comme un répresseur de l’initiation de la traduction des ARNm par l’inhibition

des protéines 4E-BP1 et P70S6K (Amirouche et al., 2008). Même si de nombreuses études révèlent que

la surexpression de la myostatine au sein de la cellule musculaire entraîne conjointement une

suractivation de FoxO et une surexpression de MAFbx et MuRF-1 (Allen & Unterman, 2007 ; Gilson et

al., 2007), le rôle exact de la myostatine dans la modulation des mécanismes de protéosynthèse et de

protéolyse régulant l’homéostasie protéique reste encore à éclaircir.