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II. 1 . L’hypertrophie musculaire

II.4. Les hormones et plasticité musculaire

II.4.1. L’hormone thyroïdienne

Les variations de l’hormone thyroïdiennes (hypothyroïdie et hyperthyroïdie) influencent le

phénotype des fibres musculaires. Dans ce processus de transition, l’hormone thyroïdienne favorise

un passage des fibres lentes à rapides ; inversement, l’hypothyroïdie est associée à une redistribution

majoritairement lente des fibres musculaires (Ciciliot et al., 2013). La transition consécutive à un

changement de l'état thyroïdien dépend fortement de la composition initiale du type de fibre du

muscle. Par exemple, en réponse à la transition de fibre rapide à lente induite par l'hypothyroïdie chez

le rat (Ciciliot et al., 2013), l'expression de MyHC-2A est diminuée dans le soléaire, muscle postural

composé majoritairement de fibres musculaires de type I et IIA, alors qu’elle est augmentée dans les

muscles comme le long extenseur des orteils (EDL, Extensor digitorum longus) ou le tibial antérieur

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(TA, Tibialis anterior), muscles composés fortement de fibres de type IIB. Il est intéressant de noter

que les effets des variations des hormones thyroïdiennes peuvent interagir avec les actions d’autres

facteurs responsables d’un changement de la typologie musculaire. Par exemple, l'hyperthyroïdie peut

contrecarrer le passage de fibre rapide à fibre lente induit par une stimulation mécanique chronique à

basse fréquence (Hamalainenet al., 1996 ; Kirschbaum et al., 1990), tandis que l'hypothyroïdie peut

renforcer les effets de la stimulation mécanique (Kirschbaum et al., 1990). L'expression des isoformes

de la myosine, marqueurs clés du type de fibre musculaire, est l’une des cibles des hormones

thyroïdiennes (Pette, D., & Staron, 2000).

Autre que le phénotype, la contraction musculaire est profondément influencée par les

hormones thyroïdiennes. Ces effets fonctionnels sont le résultat de modifications moléculaires qui

impliquent des protéines telles que la myosine ou les protéines de régulation des filament fins

(tropomyosine et complexe de troponine). Le principal mode d’action des hormones thyroïdiennes est

la régulation de la transcription des gènes par l’intermédiaire de l’action des récepteurs nucléaires

(Harvey et al., 2002). Un grand nombre de gènes spécifiques aux muscles contiennent des promoteurs

sensibles en réponse aux hormones thyroïdiennes (Clement et al., 2002), par exemple les gènes codant

pour les isoformes de pompe calcique (SERCA), des enzymes métaboliques, le transporteur de glucose

GLUT4, des protéines mitochondriales, les récepteurs β-adrénergiques, ou encore les isoformes de

MyHC (Clement et al., 2002).

II.4.2. Les hormones stéroïdiennes androgènes

La testostérone est un stéroïde androgène avec de puissants effets anaboliques. L'action de la

testostérone sur les muscles squelettiques entraîne une augmentation de la taille des fibres

musculaires, et l’hypertrophie musculaire est la principale raison son utilisation pharmacologique. La

testostérone et l’ensemble des stéroïdes sont utilisés pour augmenter la masse maigre, réduire la

masse grasse, améliorer les performances, mais aussi supporter des périodes d’entraînement intensif

(Kadi et al., 2008). Il a été mis en évidence chez l’homme une relation entre la concentration

plasmatique en testostérone avec la masse, la taille et la force musculaires. Des études ont montré

que la testostérone est capable d'induire une augmentation significative de la masse musculaire

uniquement en l’associant avec un exercice de résistance (Wilkinson et al., 2006). La testostérone

induit une hypertrophie des fibres musculaires de type I et de type II. L’augmentation de la synthèse

des protéines est le principal mécanisme par lequel la testostérone induit une augmentation de la taille

des fibres musculaires. L’activité des transporteurs membranaires des acides aminés de la cellule

musculaire est inchangée, ce qui suggère une réutilisation accrue des acides aminés intracellulaires.

Un aspect important du mécanisme par lequel la testostérone induit une hyperplasie des fibres

musculaires est la promotion de la myogenèse, basé sur l'activation des cellules satellites, prolifération

et différenciation des cellules musculaires (Kadi et al., 2008).

II.4.3. Les glucocorticoïdes

Les glucocorticoïdes sont des hormones appartenant à la classe stéroïdienne. Les actions

pléthores des glucocorticoïdes vont du contrôle de la réponse immunitaire et inflammatoire à la

stimulation du métabolisme et à la régulation de l'activité du système nerveux central (Rhen &

Cidlowski, 2005). L’administration exogène pour des raisons thérapeutiques ou la surproduction

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endogène de glucocorticoïdes entraîne au niveau de la balance protéique, une diminution du taux de

synthèse des protéines et une suractivation des voies de signalisation responsables de la dégradation

des protéines, avec pour conséquence une atrophie musculaire (Lofberg et al., 2002). Les

glucocorticoïdes inhibent la voie de synthèse des protéines en agissant principalement sur la

phosphorylation de la protéine de liaison 4E-BP1à eIF4E et de la protéine ribosomale S6 kinase 1

(S6K1), deux protéines jouant un rôle clé dans le mécanisme de synthèse des protéines en contrôlant

la traduction de l'ARNm (Dennis et al., 2002). Parallèlement à cette inhibition de la protéosynthèse, les

glucocorticoïdes stimulent la protéolyse dans le muscle squelettique par l'activation des principaux

systèmes protéolytiques cellulaires, notamment le système ubiquitine-protéasome, le système

lysosomal (cathepsine) et le système dépendant du calcium (calpaïnes) (Hasselgren, 1999). L'atrophie

des fibres musculaires de type II est davantage prononcée que celle des fibres de type I (Ciciliot et al.,

2013). Chez l’homme et l’animal, les conséquences de l’action prolongée des glucocorticoïdes sur les

muscles squelettiques sont caractérisées par une atrophie des fibres qui affecte principalement les

fibres rapides, par un changement de l’expression d’isoforme de la myosine rapide à lente, et par

l’hétérogénéité de la section transversale des fibres avec l’apparition de fibres musculaires

atrophiques et nécrotiques (Ciciliot et al., 2013). Ce changement phénotypique associé à la perte de

fibres musculaires est corrélé à la diminution des performances et à la faiblesse musculaire (Riso et al.,

2008).

En résumé,les muscles squelettiques ont la capacité de modifier leurs propriétés structurelles

et fonctionnelles, afin d’effectuer de nouvelles tâches ou de répondre à de nouvelles contraintes. La

plasticité des fibres musculaires peut survenir à la suite de différentes variations environnementales,

mécaniques, métaboliques et hormonales. Les perturbations moléculaires issues de ces variations

peuvent être détectées par de multiples capteurs, sarcomériques, métaboliques ou des récepteurs

membranaires. La stimulation de ces capteurs déclenche des cascades de voies de signalisation

intracellulaires pouvant entraîner des modifications de la taille (hypertrophie et atrophie) et du type de

fibre (transition phénotypique). Les changements de taille des fibres musculaires traduisent un

déséquilibre de la balance protéique, avec soit une hypertrophie musculaire résultant d’une activation

de la protéosynthèse et d’une réduction importante de la protéolyse, ou inversement dans le cas de

l’atrophie musculaire. Les changements de phénotypes musculaires traduisent d’une reprogrammation

de la transcription des gènes conduisant à un remodelage des propriétés contractiles des fibres

(transition entre un phénotype lent et rapide) ou du profil métabolique (transition entre un

métabolisme glycolytique et oxydatif).

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