4. Phytotoxicité et Stress oxydant chez les plantes exposées à la pollution
4.2 Le Stress oxydant lié { l’exposition aux polluants
4.2.2 Les moyens de défense contre le stress oxydant chez les plantes
plantes
Siess décrit en 1991 le stress oxydant comme étant un déséquilibre entre les
systèmes prooxydants (respiration cellulaire, radiation, xénobiotique) et antioxydants
(enzymes, vitamines, pigments…) en faveur des premiers et source d’effets toxiques
potentiels (Fig 15).
Les organismes utilisent des petites molécules (vitamines, chélateurs,…) et
différents systèmes enzymatiques pour piéger et gérer le stress oxydant (Fig 16)
(Mittler et al. 2004). L’élimination du radical superoxyde est catalysée par des
métallo-enzymes, les superoxydes dismutases (SOD) présentes dans tous les organismes
(Niviere and Fontecave 2004). Les SODs catalysent la formation de H
2O
2et d’O
2-. H
2O
2est une molécule "signal" clé chez les plantes, caractérisée par un temps de vie
relativement long (Mittler et al. 2004, Foyer and Noctor 2005, Zimmermann and
Zentgraf 2005) dont la détoxication est assurée par les catalases et les peroxydases (Fig
16) (Foyer and Noctor 2005, Zimmermann and Zentgraf 2005, Imlay 2008). Ces
enzymes catalysent la transformation de H
2O
2en molécule H
2O.
Figure 15 : Equilibre entre les antioxydants (AOX)
et les espèces réactives de l’oxygène (ROS) (Gill
and Tuteja 2010)
62
Figure 16 : Voies de gestion des espèces réactives de l'oxygène (ROS) au niveau des cellules végétales. Au
centre photo d’une cellule végétale (microscopie électronique { transmission).(1) L’oxydase alternative
(AOX) réduit le taux de production de O
2-dans les thylakoïdes [chez certaines plantes, la superoxyde
dismutase (FeSOD) pourrait remplacer le CuZnSOD dans le chloroplaste]. (2). Les ROS qui échappent à ce
cycle et/ou qui sont produits dans le stroma, subissent le processus de détoxication par la SOD et le cycle
ascorbate-glutathion du stroma. La peroxyrédoxine (PrxR) et la glutathion peroxydase (GPX) sont
également impliqués dans la suppression du H
2O
2au niveau du stroma (3) Les ROS produits dans les
peroxysomes lors de la photorespiration, oxydation des acides gras ou autres sont décomposés par la SOD,
la catalase (CAT) et l'ascorbate peroxydase (APX). (4). En principe, le cytosol contient le même groupe
d'enzymes que dans le stroma.. (5) La SOD et d'autres composants du cycle ascorbate-glutathion sont
également présents dans les mitochondries. De plus, AOX empêche les dommages oxydatifs dans les
mitochondries Bien que les voies dans les différents compartiments soient presque toutes séparées les
unes des autres, le H
2O
2peut facilement diffuser à travers les membranes. Abréviations: DHA,
déhydroascrobate; Dhar, réductase DHA; FD, ferrédoxine; FNR, ferrédoxine réductase NADPH; GLR,
glutarédoxine; GR, la glutathion réductase; GSH, glutathion réduit; GSSG, glutathion oxydé; IM, membrane
interne; IMS, l’espace IM; MDA, monodéhydroascorbate; MDAR, MDA réductase; PSI, photosystème I; PSII,
photosystème II; Trx, thiorédoxine ; tyl, thylacoïdes ; V, vacuole; W, paroi cellulaire (Mittler et al. 2004).
Il existe chez les plantes un bagage enzymatique très varié et codé pour intervenir
en réponse aux éventuelles formations de ROS (Fig 16). Plus d’une de ces activités
(1) (2)
(3)
(5) (4)
63
enzymatiques peuvent être retrouvées dans chacun des différents compartiments
cellulaires (exemple des activités GPXs, PrxRs et APXs dans le cytosol et les
chloroplastes, et des activités APXs et CATs dans les peroxysomes; (Fig 16). De plus, des
études ont démontré que les ROS tel que le H
2O
2pouvaient très bien diffuser entre les
différents compartiments cellulaires, d’où cette nécessité d’avoir un bagage enzymatique
de défense réparti dans ces mêmes compartiments (Henzler and Steudle 2000).
a. Les peroxydases (POD)
Les plantes possèdent deux classes de peroxydases (classe I : intracellulaire ; classe
III : sécrétées dans les parois cellulaires) (Passardi et al. 2004). Les peroxydases (POD,
EC 1.11.1.7) sont des petites protéines qui catalysent la réduction à 1 électron des
peroxydes (R-OOH) en leur alcool correspondant (R-OH). Elles possèdent en général une
cystéine au niveau de leur site actif capable de réaliser une attaque nucléophile sur la
fonction peroxydique. Cette réaction conduit à la libération de R-OH ainsi qu’{ la
formation transitoire d’un acide sulfénique (R-SOH) (Wood et al. 2003). Cet acide
sulfénique réagit avec une autre cystéine pour former un pont disulfure. L’anion
peroxyde (H
2O
2) peut être transformé en H
2O pas les catalases et différentes
peroxydases (gaïacol peroxydase, ascorbate APX, glutathion
peroxydase-GPX) (Landberg and Greger 2002). Les peroxydases sont ensuite régénérées par la
réduction des ponts disulfures selon deux grandes voies, celle des thiorédoxines et celle
du glutathion (Bindoli et al. 2008).
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Figure 17 : Mécanisme de peroxydation au niveau des parois végétales (Passardi et al. 2004). (a) Les
peroxydases catalysent la régulation du H
2O
2(flèche orange/verte). Par ailleurs, les peroxydases oxydent
différents substrats (XH, i.e., monolignols, subérine, acide férulique…). Les radicaux produits (X) peuvent
conduire à la formation de liaisons entre les polymères des parois cellulaires et les protéines impliquées
dans les réactions de défenses. (b) Exemple de mécanisme de liaison catalysé par les peroxydases (R :
polysaccharide, XH : ferulate ester, X-X : 8-8-déhydroferulate ester).
Les peroxydases de classe III sont présentes sous formes solubles dans l’apoplaste
pariétal ou liées de façon covalente ou ionique à la paroi cellulaire (Passardi et al. 2004).
Ces peroxydases joueraient un rôle dans la protection des membranes des cellules
végétales face aux ROS (essentiellement H
2O
2) et catalysent la réduction de nombreux
substrats (composés phénoliques, précurseurs des lignines, auxines,…) (Hiraga et al.
2001). Ainsi, les peroxydases pourraient agir sur l’élongation cellulaire et intervenir
dans la formation des parois secondaires des cellules (lignification, subérisation,…) en
65
b. Glutathion réductase (GR)
La glutathion réductase NADPH-dépendante (GR, EC 1.6.4.2) permet de recycler le
glutathion oxydé (GSSG) produit au cours des mécanismes de détoxication (Chen and
Gallie 2004, Saruhan et al. 2009). Notamment, le GSSG est synthétisé lorsque les
glutathion-peroxydases catalysent la transformation de H
2O
2en H
2O. Dès lors, la GR
assure la réduction du GSSG en 2 GSH utilisant le NADPH (provenant de la
photosynthèse) comme cofacteur (Fig 18).
La GR est un composant majeur dans le système enzymatique de défense contre les
ROS dans les cellules. Il a été décrit dans des études antérieures que l’activité GR
augmentait de façon conséquente chez de nombreuses espèces de plantes au cours de
différents types de stress appliqués (Khan et al. 2008). La GR joue un rôle important
dans la résistance aux stress oxydatifs générés par des facteurs environnementaux
naturels tels que l’ozone, les UV, la salinité ou encore le froid, mais également des
facteurs chimiques comme par exemple les métaux et les polluants organiques (Khan et
al. 2008).
Figure 18 :A. Schéma du recyclage du GSSG par la glutathion réductase après utilisation du GSH pour la
détoxication du H
2O
2par la glutathion peroxydase. B. Glutathion et métabolisme de la plante (Gill and
Tuteja 2010).
Glutathione reductase Glutathione peroxidase